Les couches minces ferromagnétiques Py et YIG

L’effet Nernst anisotrope s’invite dans la discussion

   En parallèle des mesures effectuées principalement par le consortium Japonais, des études détaillées ont été réalisées à partir de 2011 par des groupes spécialisés dans les mesures d’effets thermoélectriques et dans les mêmes conditions. Il s’agit en particulier du groupe de C. L. Chien au Johns Hopkins University (Baltimore) [35, 36], le groupe de B. Zink au NIST à Boulder [37], et le groupe de Jing Shi à Univerisy California Riverside [38]. Les résultats montrent que le comportement en fonction de l’angle de l’aimantation et de la direction du courant de chaleur suit les mêmes lois que l’effet Hall anisotrope (AHE) ou l’effet Nernst anisotrope (ANE) (voir Figure 1.2.c) Ces lois sont très spécifiques (en particulier, la composante planaire se distingue clairement des prédictions de la théorie du spin Seebeck proposée [30–34]). Compte tenu des différences d’amplitudes de tension mesurées (voir la Figure 1.2.c), les auteurs en déduisent que l’effet Spin-Seebeck (au sens du modèle d’injection de spin) serait caché par l’effet thermoélectrique anisotrope ANE. On aurait donc un effet macroscopique (effet massif et non pas d’interface) qui ne relève pas de l’injection de spin. En effet, l’ANE à la même origine que la magnétorésistance anisotrope AMR (en y incluant l’effet « Hall anormal »), tel que présenté, par exemple, dans l’article de référence McGuire et Potter de 1975 (équation (1) de  » Magnetoresistance in Ferromagnetic 3d Alloys « , IEEE Trans. Mag. 11, 1018 (1975)). L’origine de l’anisotropie provient évidemment du couplage des porteurs de charge électrique avec l’aimantation, c’est-à-dire l’interaction spin-orbite. Jusqu’à cette année 2013, la polémique est restée confinée entre les rares tenants de l’interprétation ANE (principalement C. L. Chien et B. Zink) contre la théorie de l’injection de spin défendue par le consortium japonais et leurs collaborateurs américains et européens [19, 22, 28]. Cependant les discussions dans le cadre des Workshops ont pris de l’ampleur (Gordon conférence Hong Kong 2013, SPIE, spintronics VI, San Diego 2013), et de nouveaux groupes ont publié des contributions dans le sens des les références [29, 39–41]. On notera en particulier le groupe de Ch. Back à l’Université de Regensburg avec un résultat publié en septembre de cette année [29] (Figure 1.2c).

La loi d’Ohm

   Le transport électrique est décrit par la loi d’Ohm, qui est une loi causale : le courant électrique J~e est généré par la force E~ = −∇~ µe/q, où µe est le potentiel électrochimique défini localement [49], et E~ le champ électrique. On montre, sur la base du premier et du deuxième principe de la thermodynamique (dans le cadre de la théorie thermocinétique [50–52]), qu’il existe un ensemble de fonctions d’état σˆ tel que localement on ait J~e = ˆσE~. Le coefficient de transport σˆ est le tenseur de conductivité électrique. Dans le cas d’un matériau homogène et isotrope, la conductivité électrique est un scalaire σ. La loi d’Ohm est alors invariante par rotation dans l’espace. Mais quel que soit le système magnétique étudié, si l’aimantation ~m est non nulle, la symétrie est brisée et le système ne peut pas être isotrope. S’il existe en outre une interaction entre les porteurs de charge (par exemple les électrons de conduction) et l’aimantation, les propriétés de transport cessent aussi d’être isotropes (cas des métaux de transition 3d par exemple [53]).

Premières conclusions à propos de l’effet spin-Seebeck

   En conclusion, la seule présence de l’aimantation ~m conduit à une dépendence angulaire très spécifique de la tension mesurée aux bornes d’un échantillon ferromagnétique. Cette dépendence angulaire constitue une signature du transport anisotrope, qu’il est difficile de confondre avec un autre effet. Inversement, une dépendence angulaire qui s’écarte de la loi Eq.(2.17) ne peut pas être attribuée à la seule anisotropie de l’aimantation, et d’autres propriétés que celles induites par le vecteur axial ~m doivent être évoquées. En particuli on s’attend à observer une contribution angulaire dûe à la magnétorésistance géante ou à la magnétorésistance tunnel dans les systèmes nanoscopiques, qui provient des degrés de liberté du spin attaché aux porteurs de charges. La description dans ce cas doit être encore généralisée, par exemple dans le cadre d’un modèle à deux canaux de conduction avec un indice binaire l associé à toutes les grandeurs introduites ci-dessus (J~l, E~l, σˆl,etc). Par définition, l’effet “spin-dependent Seebeck” discuté dans l’état-de-l’art focalise uniquement sur ces degrés de liberté du spin l, en excluant les effets d’anisotropie. De même, l’effet “spin-Seebeck” discuté dans l’état-de-l’art revendique aussi un effet exclusivement lié aux degrés de liberté des spins microscopiques. Mais la différence avec l’effet “spin-dependent Seebeck” est que l’injection de spin (avec l’hypothèse de l’effet “spin-Hall inverse”) n’a pas été mise en évidence par ailleurs à l’échelle macroscopique ! Dans sa description actuelle, l’effet “spin-Seebeck” est défini phénoménologiquement par une double négation. D’une part, l’interpretation “spin-Seebeck” exclut les effets d’accumulation et d’injection de spin (au sens habituel du terme) du “spin-dependent Seebeck » [22] car il est en effet difficile d’admettre que la longueur de diffusion de spin soit trois ordres de grandeur supérieure à celle mesurée par ailleurs. D’autre part, l’interpretation “spin-Seebeck” exclut les effets d’anisotropie présentés ci-dessus. C’est-à-dire que dans le cadre de spin-Seebeck, on est conduit à affirmer que le comportement mesuré en cosθ n’est pas celui auquel on s’attend en vertu d’un effet d’anisotropie (voir par exemple l’expression de Ey dans l’équation Eq. (2.18)), mais aurait pour origine la polarisation du courant de spin pur supposé circuler dans l’électrode (hypothèse du “pompage de spin”) [59]. Cette remarque justifie pourquoi nous n’avons pas jugé utile d’ajouter une section décrivant les théories de l’effet “spin-Seebeck”. Il faudrait en effet avant toute chose s’attacher à montrer que les effets d’anisotropie ne suffiraient pas à rendre compte des observations.

Dispositif expérimental

  Le système de mesure est présenté sur la figure 3.5. Le porte échantillon est placé dans une cage de Faraday qui permet de réduire le bruit électromagnétique généré par différentes sources dans le laboratoire. Il est placé ensuite dans l’espace entre deux bobines électroaimants alimentées par un générateur qui peut générer un courant d’intensité variable jusqu’à 50A. La valeur du champ magnétique appliqué sur l’échantillon dépend donc de l’intensité du courant qui passe dans les bobines. Le champ magnétique créé peut atteindre H=1.3T lorsque de courant est de 50A, donc la conversion est de 26mT/A. Cette intensité est contrôlée par un signal analogique (en tension) généré par une source de tension Keithley 6487 (voir figure 3.5). La polarité du champ est définie par le signe du signal analogique. La valeur du champ magnétique est mesurée par une sonde à effet Hall (Capteur LakeShore XHGT-9043) collée sur la surface de l’électroaimant. La valeur du champ magnétique est proportionnelle à la tension de sortie de l’instrument qui contrôle le capteur (Coffret amplification sonde de Hall – BOUHNIK SAS AF12122). Cet instrument possède deux calibres, l’un donne le signal direct (1T ≡ 0.078V) et l’autre un signal amplifié (2T≡ 10V). Cette tension est mesurée par un nanovoltmètre Keithley 2812. Les bobines et l’alimentation sont refroidies par un circuit d’eau dont le débit doit atteindre au moins 12 l/mn afin de ne pas surchauffer le système pendant la durée de la mesure (Voir la figure 3.5). On peut injecter dans le circuit un courant électrique compris entre 2nA et 100mA d’intensité avec une source de courant Keithley 6221 avec une précision ±(0.02%). La tension est mesurée par un nanovoltmètre Keithley 2182A avec une résolution de 1nV (résistance de source > 10GΩ). La source de courant et le nanovoltmètre sont reliés par un câble “trigger” et par un câble de communication RS232 pour les mesures nécessitant plus de précision (Delta et Pulse mode). Pour faciliter les modifications de configurations de mesure, nous avons utilisé quatre câbles BNC indépendants pour quatre contacts du porte d’échantillon. Nous utilisons une boîte de connections comme adaptateur entre les câbles BNC et le câble triax. Les modifications du circuit de mesure sont faites par changement des positions des BNC sur la boîte. Les différents appareils sont pilotés par l’ordinateur via l’interface GPIB (General Purpose Interface Bus). Les programmes pour contrôler les instruments, acquérir des données, automatiser les mesures, sont faits avec LabVIEW (un langage graphique de programmation de National Instruments). Les faces avant des programmes de mesure seront montrées dans la partie correspondant à chaque type de mesure. Les données sont enregistrées sous forme de texte et les éléments sont séparés par un Tab. Elles sont répertoriées de la façon suivante :
1. Toutes les données sont enregistrées dans le répertoire Data
2. Il y a un dossier pour chaque mois (sous format mm-aaaa)
3. Les données pour chaque échantillon sont stockées dans un dossier (le nom de dossier est le nom d’échantillon).
4. Les données pour chaque type de mesure sont stockées dans un dossier (le nom de dossier est le nom du programme de mesure).
5. Les données qui ont les mêmes paramètres de mesure sont enregistrées dans le même dossier.
6. Les données sont classées par jour et heure de mesure (sous format jj-mm-hh-mnss). Cette étape protège les données quand on réalise une mesure avec les mêmes paramètres à plusieurs reprises. Cette structure est créée automatiquement lorsque nous faisons des mesures.

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Table des matières

Résumé
Abstract
Remerciements
1 Introduction 
1.1 Objectifs de travail 
1.2 Etat de l’Art 
1.2.1 Thermoélectricité dépendant du spin
1.2.2 L’effet  » Spin Seebeck  »
1.2.2.1 Le modèle d’injection de spin
1.2.3 L’effet Nernst anisotrope s’invite dans la discussion
1.2.4 Le transport thermique anisotrope
2 Bases théoriques 
2.1 Introduction au ferromagnétisme
2.1.1 Ferromagnétisme à l’échelle macroscopique
2.1.2 Ferromagnétisme à l’échelle microscopique
2.1.3 Etat magnétique de la couche mince
2.2 Transport anisotropique des charges électriques et de la chaleur
2.2.1 Introduction
2.2.2 Equations du transport électrique en présence d’une aimantation
2.2.2.1 La loi d’Ohm
2.2.2.2 La dépendance angulaire
2.2.2.3 Premières conclusions à propos de l’effet spin-Seebeck
2.2.3 Equations du transport thermique en présence d’une aimantation
2.2.3.1 Cas des matériaux conducteurs électriques
2.2.3.2 Isolant électrique et expression générale
2.2.3.3 La dépendance angulaire
2.2.4 Force et flux ferromagnétique
2.2.4.1 Application aux mesures magnéto-voltaïques
2.2.5 Calcul ∆S des thermocouples
2.2.5.1 Thermocouple classique
2.2.5.2 Thermocouple dans les cas de notre mesure
2.2.5.3 Les thermocouples en série
3 Protocole de mesure 
3.1 Échantillons
3.1.1 Échantillon Py (NiFe)
3.1.2 Échantillon YIG
3.2 Protocoles de mesure 
3.2.1 Dispositif expérimental
3.2.2 Protocole de mesure de la magnétorésistance
3.2.2.1 Mesure de l’AMR en fonction de l’angle
3.2.2.2 Mesure de l’AMR en fonction du champ H
3.2.3 Protocole de mesure d’effet Hall
3.2.4 Protocole de mesure d’effet Seebeck et Nernst
3.2.4.1 Mesure de l’effet Seebeck ou Nernst en fonction de la fréquence
3.2.4.2 Mesure d’effet Seebeck ou Nernst en fonction de la puissance du chauffage
3.2.4.3 Mesure de l’effet Seebeck ou Nernst en fonction de l’angle
3.2.4.4 Mesure d’effet Seebeck et Nernst en fonction du champ magnétique appliqué
3.2.5 Analyse des données
4 Transport électrique anisotrope 
4.1 Introduction 
4.2 Mesures d’AMR
4.3 Mesures de l’effet Hall 
4.3.1 Mesure avec champ magnétique hors du plan
4.3.2 Mesure avec champ magnétique dans le plan
4.4 Rôle de l’épaisseur de l’électrode 
5 Transport thermique anisotrope 
5.1 Introduction 
5.2 Les mesures de la tension transverse ∆Uy
5.2.1 Mesures de la tension ∆Uy sur les échantillons de permalloy
5.2.2 Mesures en fonction du champ magnétique hors du plan
5.2.3 Mesures en fonction du champ magnétique dans le plan
5.2.4 Mesures en fonction de l’angle hors du plan de la couche
5.2.5 Mesures en fonction de l’angle dans le plan de la couche
5.3 Les mesures de tension ∆Uy pour les échantillons YIG 
5.4 Tension ∆Uy et mesure de thermocouples ∆S 
5.5 La tension ∆Uy en fonction de l’épaisseur de l’électrode 
6 Conclusion 
A L’état magnétique de la couche mince
A.1 Programme pour calculer AMR et effet Hall en fonction du champ magnétique H
A.2 Programme pour calculer AMR et effet Hall en fonction de l’angle ϕH
A.3 Programme pour calculer AMR et effet Hall en fonction de l’angle θH
A.4 Programme pour calculer la tension d’effet Hall maximum (planaire et anormal) en fonction de dP t
Bibliographie

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