Les concepts fondamentaux de la démocratie délibérative

La démocratie est le système de gouvernement politique adopté par presque tous les états modernes, et cela depuis la chute du mur de Berlin et l’écroulement du socialisme bureaucratique. Elle a triomphé des idéologies concurrentes à savoir le nazisme et le communisme. Selon Francis FUKUYAMA, « un consensus assez remarquable semblait apparu ces dernières années, concernant la démocratie libérale, puisqu’elle avait triomphé des idéologies rivales_ monarchie héréditaire, fascisme et tout récemment communisme » .

Mais paradoxalement, aujourd’hui, la pratique démocratique reste problématique dans nos sociétés actuelles. Déjà, Max WEBER défendait l’idée d’une impossibilité d’une pratique de la démocratie dans nos sociétés modernes. En effet, comme le   Yves SINTOMER, WEBER pense que « de façon générale, le monde est de plus en plus gouverné par des logiques qui semblent hors de portée de l’action citoyenne (…) » . Cela s’explique par le fait que les sociétés actuelles sont déterminées par une logique de rationalisation qui a transformé la politique en un univers dominé par la bureaucratie et l’économie. Cette idée est confortée par la critique que HORKHEIMER et ADORNO ont faite des sociétés modernes. En effet, dans leur ouvrage intitulé Dialectique de la raison, il dénonce une instrumentalisation de la raison dans les sociétés capitalistes. Selon eux, cette perversion de la raison a envahi toutes les sphères de la vie active, elle s’est transplantée aussi dans la politique en la transformant en une compétition dans laquelle, seules la quête du pouvoir et la recherche du gain personnel sont déterminants.

LES CONCEPTS FONDAMENTAUX DE LA DEMOCRATIE DELIBERATIVE

L’ACTIVITE COMMUNICATIONNELLE

La pensée de HABERMAS sort de la philosophie du sujet et de son model cognitif tourné vers la perception et la représentation des objets pour poser une philosophie sous le mode de l’intersubjectivité langagière. Ainsi il pose comme paradigme la communication intersubjective pour produire une philosophie morale et politique assez originale, d’où la centralité de la notion de communication dans sa pensée. Mais que signifie la communication chez HABERMAS ?

Pour répondre à cette question nous allons d’abord dire que la communication chez HABERMAS n’a pas le sens du même mot tel qu’il est utilisé dans les sciences de la communication. En effet, la communication chez HABERMAS ne vise pas à traduire une activité technique qui vise à donner des informations en écrit ou en orale, en optimisant la recevabilité, mais elle traduit plutôt une interaction langagière entre deux ou plusieurs personne visant à produire une entente sur une action ou un plan d’action. Le sens de la communication chez HABERMAS pourrait être plus éclairé si nous analysons le concept habermassien d’ « agir communicationnel ». En effet, ce concept renvoie à une forme d’interaction où les participants cherchent, non pas à se dominer, mais plutôt à produire un consensus rationnellement motivé, à partir d’un certains nombre de principes susceptibles de les conduire vers cet accord. HABERMAS spécifie l’activité communicationnelle aux concepts d’ « agir stratégique» et d’ « agir téléologique ». L’ « agir téléologique » selon lui, c’est quand « l’acteur réalise un but (…) en choisissant et en utilisant de façon appropriée, les moyens qui paraissent lui assurer son succès » cette forme d’action renvoie à une rationalité technique qui met en rapport l’homme et la nature, comme dans le cadre du travail, et dont la finalité est de permettre à celui-ci de mettre en profit celle-là. Par contre, l’agir stratégique « c’est lorsque l’acteur fait intervenir dans son calcul de conséquences, l’attente de décisions d’au moins un acteur supplémentaire, qui agit en vue d’un objectif à atteindre » . Ce genre d’activité met l’homme avec les autres hommes dans un rapport politique. Sa finalité est, pour son acteur, de dominer les autres hommes par le détournement de leur conscience et de leur volonté. La manipulation idéologique et la propagande sont illustratives sur ce point. Contrairement à ces deux formes d’action, « l’agir communicationnel, c’est là où un ou plusieurs sujets (…) engagent une relation interpersonnelle (…) en recherchant une entente sur une situation pratique, afin de coordonner de manière concertée, leur projet ou leur action » . Ce qu’il faut retenir, c’est que l’ « agir communicationnel», comme nous le voyons, s’appuie sur une rationalité procédurale qui se manifeste dans des conditions appropriées qui peuvent permettre la production du consensus. D’ores et déjà, nous pouvons dire que la communication chez HABERMAS signifie littéralement la recherche de consensus.

La théorie de la communication chez HABERMAS, présuppose que tous les membres de la communauté, c’est à dire tous les citoyens qui sont capables de parler et d’agir, doivent participer à la recherche coopérative de la vérité et du consensus ; et dans ce sens, seule la force du meilleur argument peut valoir. Autrement dit, ils doivent viser à former de manière argumentative un consensus dont la rationalité et la légitimité dépendent de l’accord du plus grand nombre. C’est ainsi qu’ils pourraient prendre des décisions rationnellement objectives dans les quelles se trouvent exprimés les intérêts de tous les citoyens.

Sur ce point, HABERMAS posent deux principes par lesquels pourrait se mesurer la prétention à la validité et à la légitimité des normes et des décisions. Il s’agit du principe « U » et du principe « D ». Selon le principe d’universalisation « U », « toute norme valide doit satisfaire à la condition selon laquelle : les conséquences et les effets secondaires qui proviennent du fait que la norme a été universellement observée dans l’intention de satisfaire les intérêts de tout un chacun, doivent être acceptées par toutes les personnes concernées » . Et le principe de la discussion « D » stipule que « seules peuvent prétendre à la validité les normes qui sont acceptées par toutes les personnes concernées, en tant qu’elles participent à des discussions pratiques » . Ces deux principes expriment la nécessité formelle de fondation de la validité, de la légitimité et de la rationalité des normes et des décisions, dans l’espace public.

LES PRESUPPOSITIONS PRAGMATIQUES UNIVERSELLES OU LA POSSIBILITE DU CONSENSUS

Les présuppositions pragmatiques universelles ont pour objet de définir et d’identifier les conditions universelles de possibilité de la communication. Autrement dit, la pragmatique universelle dégage les principes formels qui peuvent permettre d’arriver à un accord intersubjectif. Mais aussi, elle offre les seules normes référentielles qui pourraient règlementer la communication. Dans la troisième partie de son livre Morale et Communication, HABERMAS présente quelques exemples de présuppositions pragmatiques qui peuvent règlementer la pratique de la communication et qu’il situe dans trois niveaux : « le niveau logique des produits, le niveau dialectique des procédures et le niveau rhétorique des processus » . Au niveau logique, il y a trois règles qui se soucient principalement de la logique et de la sémantique, et qui obéissent au principe logique de non contradiction.
I.1. « Aucun locuteur ne doit se contredire.»
I.2. « Tout locuteur qui applique un prédicat « F » à un objet « A », doit être à même d’appliquer « F » à tout autre objet qui dans tous ses aspects équivaut à « A ». »
I.3. « Deux locuteurs différents n’ont pas le droit d’utiliser la même expression dans un sens différent. » Au niveau dialectique, il y a deux règles qui obéissent aux principes de la responsabilité et de la sincérité. Elles exigent la fidélité des locuteurs par rapport au thème délimité, mais aussi à leurs pensées et à leur volonté.
II.1. « Tout locuteur ne peut affirmer que ce que lui-même croit.»
II.2. « Quiconque s’en prend à un énoncé qui n’est pas l’objet de la discussion doit en fournir les raisons. » .

Au niveau rhétorique, Habermas présente les règles comme suit.
III.1 « Tout sujet capable de parler et d’agir doit pouvoir prendre part à des discussions. »
III2.A. « Chacun doit pouvoir problématiser toute affirmation quelle qu’elle soit. »
III.2.B. « Chacun doit pouvoir faire admettre dans la discussion toute affirmation quelle qu’elle soit. »
III.2.C. « chacun doit pouvoir exprimer ses points de vue, ses désirs et ses besoins.»
III.3. « Aucun locuteur ne doit être empêché par une pression autoritaire, qu’elle s’exerce à l’intérieur ou à l’extérieur de la discussion, de mettre à profit ses droits tels qu’ils sont établis en (III.1) et (III.2). » .

Ces règles du niveau rhétorique définissent les structures de ce que HABERMAS appelle « une situation idéale de parole ». En effet, elles délimitent le cercle des participants au débat dans lequel on doit trouver tous les membres de l’espace public, sans distinction de race, de sexe, de culture ou de religion. En plus, ces règles permettent aux participants de jouir d’une totale liberté d’expression, de faire valoir leur argument à égale chance. Elles excluent aussi toute forme de contrainte, de pression ou d’oppression. Sans pour autant prendre, comme chez Karl Otto APPEL , la forme d’une formation ultime, ces présuppositions doivent impérativement gouverner les activités communicationnelles. Cela ne veut pas dire certes, que « toutes discussions qui se mènent dans la réalité doivent satisfaire ces règles » . Mais, à la limite du possible, « il faut toujours supposer que les conditions mentionnées sont approximativement remplies, et d’une manière satisfaisante en fonction du but de l’argumentation » . C’est dans ces conditions seulement que les discussions pourraient déboucher sur un consensus.

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Table des matières

INTRODUCTION
Première partie : Les concepts fondamentaux de la démocratie délibérative
Chapitre I : L’activité communicationnelle
Chapitre II : Les présuppositions pragmatiques universelles ou la possibilité du consensus
Chapitre III : Le concept de « Démocratie délibérative »
Deuxième partie : Démocratie et Délibération. Pour une pratique de la politique délibérative
Chapitre I : L’impératif d’une politique délibérative et la nécessité d’un espace public politique
Chapitre II : les rôles de la société civile et de la presse
Chapitre III : les obstacles théorique de la politique délibérative
CONCLUSION

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