Les complications thrombotiques dans les néoplasies myéloprolifératives

Définition des néoplasies myéloprolifératives

   Tout d’abord nous devons distinguer la leucémie myéloïde chronique avec chromosome de Philadelphie des autres néoplasies sans chromosome Philadelphie. Parmi les NMP Phi – nous identifions par ordre de fréquence la TE, la PV, la MFP et d’autres entités plus rares comprenant la leucémie à polynucléaires neutrophiles, la leucémie chronique à éosinophiles et les NMP inclassables. Le terme de NMP regroupe un ensemble de pathologies caractérisées par une prolifération excessive de précurseurs hématopoïétiques dans la moelle osseuse et par une production excessive de cellules sanguines matures.

Evolution et pronostic

   Ce sont des cancers rares car leurs incidences sont inférieures à 6 pour 100 000 personnes par an. Une récente étude (6) fournit les estimations d’incidences suivantes : PV de 0,4 à 2,8, TE de 0,38 à 1,7 et MFP de 0,1 à 1,0 pour 100 000 personnes par an. L’âge médian au diagnostic de la PV est de 65 ans, de 68 ans pour la TE et de 70 ans pour la MFP. Chez les patients non traités, la morbidité et la mortalité de la PV et de la TE sont principalement liées aux complications thrombotiques. Chez les patients traités, l’augmentation du risque de décès est liée au risque évolutif : transformation en myélofibrose secondaire, transformation en syndrome myélodysplasique (SMD) et leucémie aiguë myéloïde (LAM). Dans la PV, le risque de progression en MF secondaire a été reporté dans 9 à 21% des patients et la progression en LAM chez 3 à 10% des patients (7) (8). Les facteurs de risque de transformation inclus l’âge avancé et la leucocytose (9) (10). L’effet de la charge allélique JAK2 V617F sur l’évolution de la maladie n’est pas clairement établi (11). Dans la TE, la transformation en MF secondaire est plus faible de l’ordre de 3 à 4% des patients (12). La médiane de survie pour les PV et les TE non compliquées est estimée à 14 ans et 20 ans respectivement. Elle est plus faible pour la MFP, estimée à 6 ans (8) (Figure 3). Plusieurs scores pronostiques ont été développés afin de stratifier les patients atteints de MFP et d’adapter leurs prise en charge thérapeutique : l’IPSS (international scoring system) (13) puis le DIPPS (dynamic international prognostic scoring system) (14) et enfin le DIPPS-plus (15). Ce dernier prend en compte huit facteurs : l’âge supérieur à 65 ans, un taux d’hémoglobine < 100 g/L, une hyperleucocytose > 20 G/L, un taux de blastes supérieur à 1%, la présence de signes généraux, des anomalies de mauvais pronostic au caryotype, une dépendance transfusionnelle et un taux de plaquettes < 100 G/L. Récemment le GPSS (16) (genetic-based pronostic scoring system) associe aux facteurs cliniques, hématologiques et cytogénétiques, des critères moléculaires notamment la mutation CALR et ASXL1.

La polyglobulie de Vaquez

   La PV touche essentiellement la lignée érythroïde. Les patients sont souvent diagnostiqués de manière fortuite sur des anomalies de l’hémogramme. L’examen clinique retrouve l’existence de signes généraux dans 80% des cas (17) (asthénie, impact sur la qualité de vie, insomnies), des signes d’hyperviscosité (céphalées, vertiges, troubles visuels, acouphènes), des signes microvasculaires (migraines, paresthésies, érythromélalgies), une érythrose cutanéo-muqueuse d’apparition progressive touchant principalement le visage et les mains, un prurit à l’eau (aquagénique), une splénomégalie. Dans certains cas le diagnostic est évoqué devant des complications majeures comprenant la thrombose et les signes d’évolution en myélofibrose. La principale anomalie biologique retrouvée est la polyglobulie. L’augmentation de l’hémoglobine (>165 g/L chez l’homme et > 160 g/L chez la femme) et/ ou de l’hématocrite (>49% chez l’homme et > 48% chez la femme) doit faire évoquer le diagnostic après élimination des autres causes de polyglobulies secondaires que nous ne détaillerons pas. Une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles et une thrombocytose modérée peuvent être associées à la polyglobulie. Le taux d’érythropoiétine (EPO) circulant est normal ou bas en principe.

Prévalence et incidence des thromboses dans les NMP

   La prévalence des thromboses au diagnostic et leur incidence au cours des NMP ont été évaluées dans de nombreuses études rétrospectives. La prévalence des thromboses au diagnostic dans les PV varie de 20 à 39% alors qu’elles sont plus faibles dans les TE puisqu’elles varient de 7 à 26% (19). Globalement 2/3 de ces thromboses ont une localisation artérielle et 1/3 une localisation veineuse. Au cours du suivi des NMP l’incidence annuelle des événements thrombotiques varie de 0,74 à 10 pour 100 patients années en fonction du type de maladie (19). Pour la PV, les deux études les plus importantes comprenaient 1213 et 1638 patients. Dans la première étude rétrospective, après un suivi médian de 5,3 ans, 230 patients (19%) ont présenté une complication thrombotique (artérielle dans 57% des cas), avec un taux d’incidence global de 3,4 pour 100 patients-années (20). Dans la deuxième étude prospective, après un suivi moyen de 2,7 ans, l’incidence des événements cardiovasculaires (décès et événements thrombotiques non mortels) était de 5,5 pour 100 patients années (7). Pour la TE, dans une étude rétrospective multicentrique récente portant sur 891 patients atteints de TE défini par l’OMS, le taux annuel d’événements mortels et non mortels était de 1,9 pour 100 patients-années. L’incidence d’événements thrombotiques artériels non mortels (1,2 pour 100 patients-années) était supérieure à l’incidence de thrombose veineuse (0,6 pour 100 patients-années) (21). En ce qui concerne la MFP, la fréquence des événements thrombotiques a été moins étudiée compte tenu de la rareté de la maladie ; une des études de Barbui et al de 2010 portant sur 707 patients atteints de myélofibrose rapporte une prévalence de thrombose au diagnostic de 9,5% et une incidence d’événements thrombotiques de 1,75 pour 100 patients-années ce qui est comparable aux événements observés dans la TE (22). La thrombose artérielle est plus fréquente que la thrombose veineuse, avec des taux d’incidence respectif de 1,7 et 0,6 pour 100 patients-années.

Les thromboses veineuses splanchniques

   Les thromboses veineuses splanchniques sont les plus fréquemment observées dans les NMP et comprennent le syndrome de Budd-Chiari, les thromboses veineuses portales, spléniques et mésentériques. Dans une méta-analyse (31) de 1062 patients atteints de syndrome de Budd-Chiari et de 855 patients avec thromboses veineuses portales, la prévalence estimée de la mutation JAK2 V617F est de 30 à 50% et de 15 à 30% respectivement. Au niveau du sous type de NMP, il faut noter que la polyglobulie de Vaquez était plus fréquente dans les syndrome de Budd-Chiari que dans les thromboses veineuses portales de manière significative. Le dépistage JAK2 V617F chez les patients atteints de SBC sans critères hématologiques de NMP a permis de diagnostiquer une NMP sous-jacent dans 17,1% des patients dépistés et 15,4% des patients dépistés pour la thrombose veineuse portale. Dans une autre étude, parmi 120 patients atteints de thromboses veineuses splanchniques sans NMP déclaré, la mutation était présente chez 21,5% des patients (32). Ces résultats confirment le fait que le bilan diagnostic d’une thrombose veineuse splanchnique doit inclure la recherche de la mutation JAK2 V617F indépendamment des signes biologiques en faveur d’une NMP telle qu’une polyglobulie ou une thrombocytose.

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Table des matières

Introduction
Partie I : Généralités sur les néoplasies myéloprolifératives
A. Définition des néoplasies myéloprolifératives
B. Physiopathologie
1. Physiopathologie commune
a. Rappel physiologique : le gène JAK2 et le rôle de la voie JAK/STAT
b. La mutation JAK2 V617F
C. Evolution et pronostic
D. Tableau clinique et biologique
1. La polyglobulie de Vaquez
2. La thrombocytémie essentielle
3. La myélofibrose primitive
4. Critères diagnostiques
Partie II : Les événements thrombotiques dans les néoplasies myéloprolifératives
A. Epidémiologie des thromboses au diagnostic et au suivi des NMP
1. Prévalence et incidence des thromboses dans les NMP
2. Les thromboses artérielles
a. Les accidents vasculaires cérébraux et les accidents ischémiques transitoires
b. Les infarctus du myocarde
c. Les ischémies périphériques
3. Les thromboses veineuses de localisation fréquente
a. Les thromboses veineuses profondes des membres inférieurs et les embolies pulmonaires
4. Les thromboses veineuses de localisations plus rares
a. Les thromboses veineuses splanchniques
b. Les thromboses veineuses cérébrales
c. Les thromboses veineuses rétiniennes
5. Les thromboses récidivantes
B. Physiopathologie générale des thromboses au cours des NMP
1. Les leucocytes
2. La polyglobulie et l’augmentation de l’hématocrite
3. Thrombocytose et activation des plaquettes
4. Rôle des cellules endothéliales
5. Les microparticules plaquettaires
C. Facteurs de risques thrombotiques dans les NMP
1. Facteurs de risques liés aux patients
a. Le sexe
b. L’âge et les antécédents de thrombose
c. Les anomalies du bilan de thrombophilie
d. Risques cardiovasculaires
2. Facteurs de risques liés à la maladie
a. Les globules blancs et les plaquettes
b. La charge allélique JAK2 V617F
D. Thérapeutique
1. Stratification du risque
2. Stratégies thérapeutiques
3. Anti JAK2
Partie III : Etude rétrospective de 452 patients de l’APHM
A. Matériel et méthode 
1. Objectifs de l’étude
a. Objectif principal
b. Objectifs secondaires
2. Sélection des patients
3. Définition des événements thrombotiques artériels et veineux
4. Analyse statistique
5. Analyse moléculaire
a. Extraction de l’ADN
b. Quantification JAK2 V617F par PCR quantitative en temps réel
c. Interprétation de l’analyse sur le MX300P
B. Résultats
1. Description de la population
a. Caractéristiques des patients de l’étude
b. Répartition des patients en fonction de la charge allélique JAK2 V617F
c. Répartition des événements thrombotiques
2. Quelle est l’influence de la charge allélique sur les thromboses ?
a. Influence de la charge allélique JAK2 au diagnostic sur les thromboses initiales et études des facteurs de risques thrombotiques
i. Analyse des événements thrombotiques totaux sur la population JAK2 positifs
ii. Analyse des événements thrombotiques totaux dans les TE et les PV
iii. Analyse des thromboses artérielles dans les TE et les PV
iv. Analyse des thromboses veineuses dans les TE et les PV
b. Influence de la charge allélique JAK2 sur les récidives d’événements thrombotiques des NMP
c. Influence de la charge allélique JAK2 sur les récidives d’événements thrombotiques des PV
3. Les thromboses veineuses cérébrales et les embolies pulmonaires
a. Fréquence de la mutation JAK2 pour les thromboses veineuses cérébrales, splanchniques et embolies pulmonaires à l’APHM entre 2017 et 2018
b. Comparaisons cliniques et biologiques entre les groupes JAK2+ et JAK2- pour les TVC et les EP
4. Comparaison clinique et biologique entre les TE JAK2 et les TE doubles mutés JAK2 et CALR ou MPL
Partie IV : Discussion
A. Objectif principal : Risque thrombotique et charge allélique JAK2 V617F
B. Objectifs Secondaires
1. Etude des facteurs de risque de thrombose
2. Etude des thromboses veineuses cérébrales et embolies pulmonaires
3. Etudes des patients TE doubles positifs
C. Limites de l’étude
Conclusion
Référence bibliographiques

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