Les censitaires : acteurs de l’humanisation

Les censitaires : acteurs de l’humanisation

L’ENVIRONNEMENT RURAL

Dans ce premier chapitre, nous verrons dans quel environnement a évolué la seigneurie de Trois-Pistoles à l’époque du régime français et au début du régime britannique. Tout d’abord, nous étudierons la formation et le développement du territoire de la Nouvelle-France où s’est transplanté le régime seigneurial. Ensuite, nous étudierons ce dernier en analysant son évolution à l’intérieur de la vallée du Saint-Laurent, en évoquant ses éléments constitutifs et en abordant la question des droits et des devoirs seigneuriaux. Nous décrirons également l’environnement de la région du Bas-Saint-Laurent pour ensuite présenter celui de la seigneurie de Trois-Pistoles.

La Nouvelle-France : formation et développement du territoire (XVIe-XVIIIe siècles) La Nouvelle-France prend son origine au XVIe siècle, grâce aux mouvements des grandes découvertes et d’explorations du «nouveau monde» initiés et facilités par les progrès scientifiques et les innovations techniques de l’époque de la Renaissance. La volonté de découvrir une route plus rapide vers l’Asie et la recherche d’épices et de métaux précieux amènent les rois européens à financer des voyages d’explorations en faisant appel à des navigateurs. Cinq pays participent à ces mouvements de découvertes : le Portugal, l’Espagne, la Hollande, l’Angleterre et la France. L’historien, Marcel Trudel, date l’apparition d’une première Nouvelle-France en 1524 lors du voyage d’exploration du Florentin Giovanni da Verrazano.20 Ce dernier, qui était au service de la France, longea la côte atlantique du continent nord-américain, entre la Floride et Terre-Neuve. Il donna à cette portion de territoire le nom de Nouvelle-France (Nova Gallia ou Terra Francesco) ?x

Cette première Nouvelle-France disparaît pour devenir la Nouvelle-Espagne, suite aux expéditions du Portugais Esteban Gomez et de l’Espagnol Vasquez de Ayllon, qui étaient au service de l’Espagne, entre 1524 et 1526. L’aventure de la Nouvelle-France, redémarre lors du premier voyage du Malouin Jacques Cartier, en 1534 vers le nouveau monde. Le roi de France, François 1er, s’intéresse de nouveau aux expéditions outre-mer en finançant les trois voyages de Jacques Cartier effectués en 1534, en 1535 et en 1541. Lors de ces voyages, le découvreur du Canada explore le golfe du Saint-Laurent, remonte le fleuve en observant la vallée laurentienne jusqu’à Hochelaga (Montréal) où il prend possession de ces terres au nom du souverain François 1er. Après quelques tentatives infructueuses de colonisation de ce territoire au XVIe siècle et au début du XVIIe siècles, Samuel de Champlain réussit à implanter un établissement permanent à Québec en 1608.

En vue d’exploiter les ressources naturelles de la colonie, les pêcheries et surtout les fourrures, et toujours dans l’espoir de découvrir de l’or et la route des Indes, les autorités métropolitaines françaises poursuivent leurs entreprises d’explorations du continent Nord- Américain au XVIe, XVIIe et au début du XVIIIe siècles. Ces expéditions, qui sont facilitées par la présence d’un grand réseau hydrographique, entraînent la création de l’empire français en Amérique du Nord : la Nouvelle-France (carte 1). En 1713, avant la signature du traité d’Utrecht, la Nouvelle-France se composait des territoires suivants : Terre-Neuve, l’Acadie, le Labrador, le Domaine du roi, le Canada (vallée du Saint- Laurent), la Baie d’Hudson, les Pays d’en haut (les Grands Lacs), le pays des Illinois, la Louisiane (vallée du Mississippi). La mer de l’Ouest fait également partie de la Nouvelle- France, mais elle ne sera explorée officiellement qu’au milieu du XVIIIe siècle. Durant la période du régime français, cet immense empire est menacé par les Anglais qui convoitent ces territoires et ces richesses naturelles. Déjà en 1629, Québec tombe aux mains des Anglais jusqu’en 1632, suite aux expéditions des frères Kirke. Ces rivalités hégémoniques entre la France et l’Angleterre se traduisent également par quatre guerres européennes qui se déplacent en Amérique du Nord : la guerre de la Ligue d’Augsbourg (1688-1697), la guerre de Succession d’Espagne (1702-1714), la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748) et la guerre de Sept Ans ou guerre de la Conquête (1756-1763). Ces conflits entraîneront le commencement du démembrement de la Nouvelle-France en 1713 et sa chute en 1760.

Éléments constitutifs d’une seigneurie

En général, la seigneurie se présente comme un espace étroit de forme rectangulaire qui est perpendiculaire à un cours d’eau, soit le fleuve Saint-Laurent. Le fleuve sert de front à la seigneurie et la profondeur de cette dernière plonge à l’intérieur des terres. Le front a une orientation sud-est nord-est et la profondeur, nord-ouest sud-est. En moyenne, une seigneurie a une superficie de deux, quatre ou six lieues.31 Une seigneurie est composée du domaine personnel du seigneur, appelé réserve ou domaine direct, qu’il occupe et exploite lui-même. C’est à l’intérieur de son domaine que se trouve le manoir seigneurial. Ensuite, la terre de la Fabrique sur laquelle on construit l’église et le presbytère fait également partie des éléments constitutifs d’une seigneurie. Généralement, elle est située à l’intérieur du domaine personnel du seigneur pour que l’église soit près de chez lui. Elle comprend également une commune qui est un terrain concédé à l’ensemble des habitants pour y faire paître leurs animaux.

À l’époque du régime français, il arrive rarement qu’on y retrouve la présence d’un village à l’intérieur d’un fief. Une seigneurie est également composée du domaine indirect qui se caractérise par l’ensemble des terres que le seigneur doit concéder gratuitement à des habitants appelés censitaires : les censives. Ces dernières épousent la même orientation que la seigneurie et se présentent comme des étendues rectangulaires perpendiculaires au fleuve plongeant profondément à l’intérieur des terres, afin de permettre à plus d’habitants possibles d’avoir une facilité d’accès au fleuve, qui était la principale voie de communication dans la vallée du Saint-Laurent à l’époque du régime français et une source d’approvisionnement en poisson. Lorsque toutes les censives du premier rang, qui sont situées le long du fleuve Saint-Laurent, sont concédées, le seigneur ouvre à la colonisation le deuxième rang et ainsi de suite. En moyenne, la terre concédée mesure trois arpents de front par trente de profondeur.

Les droits et les devoirs seigneuriaux

Le sol de la colonie française appartient au roi, et ce dernier, par l’intermédiaire de ses représentants, soit le gouverneur ou l’intendant de la Nouvelle-France, concède des seigneuries à ses sujets, qu’ils soient des nobles, des roturiers ou des religieux. En effet, en Nouvelle-France, on retrouve des seigneuries laïques administrées par des nobles, des marchands et des habitants, et des seigneuries ecclésiastiques administrées par des membres du clergé ou des communautés religieuses. Donc, les seigneurs sont institués par l’État ou par d’autres seigneurs lorsque ces derniers accordent une partie de leur seigneurie en arrière-fief. En retour, les seigneurs, agents de colonisation, sont chargés de recruter des censitaires qui vont s’installer sur la terre seigneuriale gratuitement. Les seigneurs et les censitaires sont liés par des droits et des devoirs réciproques, fixés dans des contrats de concession de terres. Ces droits et devoirs seigneuriaux sont réglementés par l’État en vertu de la Coutume de Paris, qui demeurera en place à l’époque du régime britannique.

En débarrassant ce régime des abus qui lui étaient devenus traditionnels (comme l’arbitraire) et en l’adaptant aux conditions de l’Amérique, la France a fait du régime seigneurial canadien un système que l’on peut résumer comme suit : accorder à des entrepreneurs qu’on appellera seigneurs, une portion plus ou moins grande de terre pour y établir des habitants, en fixant d’avance et d’une façon précise des droits et devoirs réciproques dont l’État se réserve la surveillance minutieuse.33 L’historienne Louise Dechêne34, ainsi que Sylvie Dépatie, Mario Lalancette et Christian Dessureault35 divisent les droits seigneuriaux en cinq catégories, soit les droits honorifiques, les droits réels fixes, les droits réels casuels, les droits personnels (les monopoles) et les droits conventionnels. Les droits honorifiques sont caractérisés par la jouissance du banc seigneurial. Le seigneur a dans l’église un banc gratuit à l’endroit le plus honorable, soit au premier rang du côté droit et ce dernier a le double de la profondeur des autres bancs. On prie pour lui et sa famille aux prônes et dans les processions; il vient le premier derrière le curé. Il a droit à l’inhumation dans l’église, soit sous le banc seigneurial. Ensuite, la plantation du mai (sapin ébranché dont on n’a laissé que le bouquet) devant la porte du manoir seigneurial le premier du mois de mai constitue un autre droit honorifique. Sa plantation fournit aux seigneurs et aux censitaires l’occasion de festoyer.

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Table des matières

Résumé
Remerciements
Table des matières
Liste des cartes
Liste des annexes
Liste des tableaux
Introduction
Chapitre I. L’environnement rural
1.La Nouvelle-France : formation et développement du territoire (XVIe-XVIIIe siècles)
2.Le régime seigneurial canadien
2.1. Évolution du régime seigneurial
2.2. Éléments constitutifs d’une seigneurie
2.3. Les droits et les devoirs seigneuriaux
3.Le Bas-Saint-Laurent
4.La seigneurie de Trois-Pistoles
Chapitre II. Les seigneurs : gestionnaires de l’humanisation
1.Charles Denys de Vitré : premier seigneur de Trois-Pistoles (1687-1696) 27
1.1. La polyvalence de Charles Denys de Vitré
1.2. Le seigneur de Trois-Pistoles
2.Jean Rioux : deuxième seigneur de Trois-Pistoles (1696-1709)
2.1. Le censitaire de l’île d’Orléans
2.2. Le seigneur de Trois-Pistoles
3.Nicolas Rioux : troisième seigneur de Trois-Pistoles (1709-1756)
3.1. La polyvalence de Nicolas Rioux
3.2. Gestion de la seigneurie
4.Etienne Rioux : quatrième seigneur de Trois-Pistoles (1756-1784)
4.1. Relations sociales et familiales d’Etienne Rioux
4.2. Gestion de la seigneurie
Chapitre III. Les censitaires : acteurs de l’humanisation
1.L’humanisation de la seigneurie de Trois-Pistoles
1.1. Les premiers occupants avant 1687 : les Amérindiens et les pêcheurs Basques
1.2. Le peuplement durant le régime français et au début du régime anglais (1687-1784)
2.La vie quotidienne des censitaires au rythme des saisons
3.Georges-François Poulet : ermite de Trois-Pistoles (1715-1717)
4.Ambroise D’Amours (1740-1786) et sa famille
4.1. Les ancêtres d’Ambroise
4.2. La vie d’Ambroise à Trois-Pistoles : un censitaire aux activités multiples
4.3. Les héritiers d’Ambroise
Conclusion
Bibliographie
Cartes
Annexes
Tableaux
Liste des sigles

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