LES ARCHIVES PERSONNELLES,

LES ARCHIVES PERSONNELLES

L’habitat, comme lieu d’archives

Une cartographie de l’habitat

L’habitat semble être par excellence, le lieu le plus adapté à la conservation des archives personnelles, Daniel Fabre l’indique en précisant que « l’espace domestique est aujourd’hui le cadre de toutes sortes d’écrits »60. En effet, il est l’endroit le plus intime dont les individus semblent disposer à la fois pour le traitement et pour la conservation de leurs documents. L’espace et les capacités d’organisation et de rangement mis à disposition sont d’une utilité pratique. Il est aussi le lieu où les individus ont le pouvoir et la liberté d’organiser leur espace domestique, en garantissant certains secrets et en exposant ce qu’ils souhaitent. Ainsi, l’espace domestique est un outil qui permet aux individus de traiter leurs documents personnels à leurs manières, en se déchargeant des regards extérieurs.Au sein de l’espace domestique, les archives personnelles « s’inscrivent dans des dimensions spatiales spécifiques : cuisine, pièces de débarras, chambre, grange/grenier, salle à manger, bureau/bibliothèque, remise/atelier, … ». Le choix de la conservation des papiers personnels dans des pièces domestiques particulières peut s’expliquer par la valeur à la fois donnée à l’espace domestique et celle donnée aux papiers. En effet, un papier conservé au grenier n’a peut-être pas la même valeur qu’un document rangé dans une chambre. On remarque que certains lieux ont une signification plus marquée que d’autres. Le grenier est une pièce difficile à cerner, l’imaginaire domestique en fait un lieu retiré, sombre et sale dont l’individu ne se soucie peu. Mais cette pièce est d’une grande praticité pour les individus car l’espace n’y est pas restreint. Le grenier permet de décharger les individus du classement car les documents peuvent y être entreposés sans restriction précise et il garantit, tout simplement, la présence des documents dans l’habitat. La multiplicité des lieux rend des possibilités de rangement et d’entreposage variées et infinies.Valérie Feschet, qui a exposé les notions de mémoire « froide » et de mémoire « chaude » que l’on a vu précédemment, montre, suite à l’enquête de terrain qu’elle a menée dans les fermes de la vallée de l’Ubaye (entre la Provence et le Dauphiné) en 1990-1993, que « l’archivage domestique s’inscrit dans des lieux particuliers qui ne sont ni le fruit du hasard ni celui de choix individuels »62. En effet, elle souligne que « les papiers occupent des espaces qui sont en harmonie symbolique avec la mémoire qui leur est confiée »63. Pour comprendre la démarche de l’auteur, il faut rappeler que la maison ubayenne est un habitat rural, se composant d’une ferme et d’une partie réservée aux hommes dont la répartition des pièces est fortement sexualisée. La Provence rurale dispose d’une forte culture de l’écrit qui se répercute sur les modalités d’archivage domestique : toute preuve tangible doit être enregistrée et conservée sur papier. Les informations que l’auteur nous délivre ne doivent pas être comprises dans le contexte actuel. En effet, elle consigne des constatations faites au début des années 1990 et rapporte les propos des témoins interrogés sur les usages associés aux papiers de famille depuis plusieurs générations. Il faut donc admettre que l’archivage domestique dans les fermes ubayennes est issu d’un ensemble de traditions ancienne, rurale et familiale.
Valérie Feschet aborde en premier lieu l’ensemble des actes officiels, issus de la mémoire « froide », en particulier les actes du patrimoine foncier qui certifient la possession de biens et par conséquent les preuves de la réussite. Ceux-ci sont conservés précieusement dans la principale chambre à coucher : une pièce privée et isolée au cœur du bâtiment, qui est largement protégée de l’extérieur car seuls les propriétaires y ont accès. Ce désir de protection s’explique par la valeur de ces actes notariés qui forment l’identité première des Ubayens et qui garantissent la mémoire juridique de la maisonnée.
Les papiers moins formels, ayant une plus grande valeur sentimentale aux yeux du propriétaire et relevant de la mémoire « chaude », peuvent être aussi conservés dans la chambre principale.
Valérie Feschet donne l’exemple des cahiers de classe, un objet biographique selon l’auteur, révélant d’une mémoire strictement personnelle. Cet exemple est intéressant, juge l’auteur, car il rattache la personne individuellement à son passé, alors que « les lettres, les livres et les actes notariés rattachent l’individu au groupe familial et à la communauté »64. Ce sont principalement les femmes qui gardent ces cahiers. Ils trouvent leur place dans la cuisine ou à proximité dans le débarras, un lieu féminisé et sous haute surveillance. On perçoit donc, d’après l’étude menée par Valérie Feschet dans l’Ubaye, que la conservation des documents obéit à une cartographie précise de l’habitat.
Cette cartographie de l’habitat est donc existante mais elle est propre à chacun. Le lieu de rangement de tel ou tel papier personnel varie selon les individus. Les archives personnelles suivent, au gré du temps, une conservation itinérante. Elles sont mobiles. Elles vont être assignées à un lieu dès leur création, puis migreront vers d’autres endroits. Elles peuvent avoir une fin de vie subite mais peuvent aussi continuer leurs parcours et devenir, par exemple, des archives familiales et perdurer dans le temps encore longtemps.

Des conditions particulières de conservation

L’habitat peut apparaître comme un nouveau lieu d’archives, puisque qu’il conserve les documents personnels des individus. Mais, il doit néanmoins être perçu différemment de l’ensemble des services d’archives publiques ou encore des structures privées qui conservent officiellement les archives en France.L’espace domestique n’apporte pas le même cadre que les institutions d’archives. En effet, sa vocation première n’est pas de se revendiquer comme un lieu d’archivage alors que les autres structures tiennent leur existence du traitement, de la conservation matérielle et de la communication des archives. Les lieux par lesquels transitent les documents des individus ne sont pas destinés à recevoir ces documents dans un premier temps. Ces derniers peuvent donc côtoyer des objets quelconques et sont à proximité d’activités quotidiennes qui n’ont rien à voir avec les activités archivistiques. Cet environnement domestique, dans lequel les archives personnelles évoluent, ne respecte pas forcément les exigences de la conservation préventive. Les données climatiques comme la luminosité, l’humidité, la température ou la pollution ne sont pas essentielles, ni déterminantes dans les choix de stockage. De plus, les conditionnements adéquats et les manipulations respectueuses sont des démarches qui ne sont pas totalement intégrées par les individus. Les questions de préservation ne sont donc pas au centre du processus de conservation domestique alors qu’elles sont capitales pour le réseau archivistique. Ces normes sont impératives à mettre en œuvre et à respecter pour espérer une conservation sur le long terme des archives.Les premières données qui vont être prises en compte par les individus sont d’ordre pratique : disposer d’un espace suffisamment important et des supports adaptés. C’est ce que note Anne Monjaret à travers les propos d’une femme : « Je conserve à la campagne des cartons d’archives que je devrais éliminer. Quand on a de la place, on ne soucie plus de trier »65. Des supports quelconques, d’origine et de taille complètement aléatoires, vont être alloués à une nouvelle fonction : la conservation. Ainsi, les archives personnelles peuvent migrer d’une commode, à une étagère, d’un bureau à une armoire, d’un coffre à une bibliothèque.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
LES ARCHIVES PERSONNELLES, UN STATUT ARCHIVISTIQUE PARTICULIER
1. Les archives personnelles selon la sphère archivistique
1.1. Un intérêt tardif pour les archives privées
1.2. Le traitement des archives personnelles appliqué par la profession
1.3. Le goût pour les archives ordinaires
2. L’individu, un archiviste insoupçonné ?
2.1. Les archives personnelles dans le cadre domestique
2.2. La production et la collecte d’archives de soi
2.3. Le classement domestique
3. L’habitat, comme lieu d’archives
3.1. Une cartographie de l’habitat
3.2. Des conditions particulières de conservation
3.3. De l’intimité à une ouverture vers l’extérieur
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ÉTAT DES SOURCES
1. Sources législatives et réglementaires
2. Sources orales
Marine GAUDIN | Les archives personnelles dans l’espace domestique – Enquête auprès d’immigrés dans les Pays de la Loire (de 1974 à nos jours) 106
LES ARCHIVES PERSONNELLES, REFLETS DE PARCOURS D’IMMIGRATION
1. Les papiers d’origine, une représentation de la vie passée
1.1. Prouver administrativement son identité première
1.2. S’exprimer par les archives personnelles
1.3. L’importance des objets matériels
2. De nouveaux papiers comme la preuve d’une adaptation au pays d’accueil
2.1. Le souvenir de l’entre deux : le voyage
2.2. Le rapport à l’identité dans la société française
2.3. Une nouvelle identité civile
3. Les photographies, l’exemple d’un tissage culturel
3.1. La diversité des photographies
3.2. L’habitat, un lieu d’exposition hybride
3.3. Les photographies, vecteurs de souvenirs
CONCLUSION
CONCLUSION GÉNÉRALE
ANNEXES
1. Présentation brève de chaque témoin
2. Retour sur le pays d’origine
3. « L’après »

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