Les archives des Commissions

Les archives des Commissions

Les rôles

Les premières Commissions apparaissent en Amérique latine sous la forme de Commissions d’enquête, mais le modèle s’exporte assez rapidement en Afrique. Le plus souvent, ces Commissions sont chargées d’enquêter sur un ou deux types de crimes sur une période donnée. Cela peut s’avérer assez restrictif, puisque la Commission exclut alors tous les autres types de crimes et de violations des droits de l’Homme. Ainsi, les Commissions d’enquête sur les disparitions – la Commission d’enquête sur les disparitions d’Ouganda en 1974, la Commission d’enquête sur les disparitions forcées de Bolivie en 1982, la Commission nationale sur les disparitions d’Argentine en 1983, la Commission d’investigation sur la situation des « disparus » et ses causes d’Uruguay en 1985, la Commission d’enquête sur les disparitions de personnes du Népal en 1990, et la Commission présidentielle sur les disparitions du Sri Lanka en 1998 – excluent les arrestations arbitraires, les exécutions sommaires, les viols, les enlèvements, les déportations, ou tout autre type de violation des droits de l’Homme, pour ne se concentrer que sur la résolution de tous les cas de disparitions de personnes. L’objectif est bien sûr de mettre en évidence une certaine vérité sur le sort de ces personnes disparues, et si les Commissions aboutissent bien à une conclusion générale sur les disparitions, elles ne font pas toujours de recommandations afin d’éviter que de tels actes se reproduisent.

Caractéristiques

De plus, les Commissions d’enquête ne sont pas des instances judiciaires, et beaucoup d’entre elles proposent même une amnistie générale pour tous les auteurs de crimes. Dans des pays où chaque corps du gouvernement, chaque institution sont impliqués dans les violences politiques, y compris la police et les juges, il devient difficile de condamner les coupables et de leur imposer de véritables sanctions judiciaires. Tous les pays d’Amérique latine ayant mis en place une Commission, que ce soit une Commission d’enquête ou une Commission de Vérité et de Réconciliation, ont choisi l’amnistie générale, exceptés L’Équateur et la Bolivie6. Certaines Commissions cherchent tout de même à rétablir l’impératif de justice. Elles ne peuvent poursuivre elles-mêmes les coupables, mais les condamnent parfois explicitement dans leur rapport final, ou bien recommandent des poursuites judiciaires. Ce fut le cas en Argentine, quand la Commission nationale sur les disparitions (1983) a rendu public un rapport final, en 1984, recommandant la poursuite en justice des responsables des disparitions. Cela s’est traduit par l’abandon des amnisties et la mise en place de nombreux procès.

Ces Commissions s’appuient le plus souvent sur des documents administratifs (rapports d’enquêtes de police, rapports d’exhumations, documents gouvernementaux, etc.), ainsi que sur les témoignages (écrits ou audio-vidéo), qui sont anonymes mais sont aussi souvent les seules sources d’informations disponibles. Sur les 23 Commissions d’enquête recensées, seules deux n’ont pas rendu de rapport final : la Bolivie voit sa Commission nationale d’enquête sur les disparitions forcées dissoute en 1984, à la fin de son mandat de deux ans, sans avoir le temps de rédiger un rapport final ; le Comité présidentiel sur les droits de l’Homme des Philippines ne rend pas de rapport final à la fin de son enquête en 1986. Au total, ce sont 21 Commissions qui ont remis un rapport final, dont 18 avec des conclusions et/ou des recommandations7. L’impératif du rapport final semble aller de soi puisqu’il s’agit d’enquêtes pour lesquelles les Commissions doivent faire des conclusions et, si possible, des recommandations afin d’éviter que l’histoire ne se répète.

Ce type de Commission résulte bien d’une négociation entre un ancien et un nouveau régime : les Commissions d’enquête ne permettent que très rarement des poursuites judiciaires puisqu’elles proposent une amnistie générale. Elles s’intéressent en grande majorité aux disparitions et aux meurtres sans chercher à faire évoluer le cadre institutionnel qui a permis ces violations des droits de l’Homme. Même si elles font des recommandations, celles-ci sont très rarement mises en oeuvre. Cela a notamment été le cas de la Commission d’enquête sur les crimes et détournements de l’ex-Président Habré du Tchad, dont le rapport final a entre autre recommandé la non-réhabilitation des auteurs de crimes dans leurs anciens postes de commandement et la réforme de la police, autant de mesures qui n’ont pas été prises en compte par le nouveau gouvernement. Ce modèle de la Commission d’enquête a été très largement utilisé dans les années 1980 – 1990, surtout en tant que moyen par défaut d’obtenir la vérité sans pouvoir juridiquement atteindre les auteurs de ces crimes, ni pouvoir les forcer à avouer8. À partir du milieu des années 1990, les Commissions d’enquête commencent à être supplantées par les Commissions de Vérité et de Réconciliation.

Les Commissions de Vérité et de Réconciliation du Chili et du Népal Les deux premières Commissions de Vérité et de Réconciliation sont créées en 1990, l’une au Chili, et l’autre au Népal. Leur mise en place et leur fonctionnement ne sont pas encore formalisés, ce qui en fait des organes hésitants, à l’efficacité modérée. La Commission de Vérité du Népal est dissoute après deux mois d’activité, remplacée par une Commission d’enquête, ce qui prouve que la Commission de Vérité n’avait pas encore su trouver sa place dans la démocratisation nationale. Si la Commission nationale pour la Vérité et la Réconciliation du Chili est allée jusqu’à la fin de son mandat, rendant un rapport final en 1991, celui-ci n’a pas été rendu public.

En outre, cette Commission ne bénéficiait pas d’une réelle coopération de la part du gouvernement. Elle n’avait par exemple pas accès aux documents militaires capables d’apporter des preuves aux dires des témoins. De plus, la Commission n’a pas fait l’unanimité puisque son mandat excluait toutes les violations des droits de l’Homme autres que les meurtres et les disparitions de personnes, si bien qu’une « corporation nationale pour la réparation et la réconciliation » a été créée en 1994 pour poursuivre son travail9, ce qui tend à prouver qu’il était incomplet. En fait, les deux premières Commissions de Vérité et de Réconciliation semblent hésiter entre l’ancien modèle des Commissions d’enquête et une nouvelle approche, véritablement formalisée avec l’Afrique du Sud.

La Commission d’Afrique du Sud En 1995, l’Afrique du Sud sort du régime de l’apartheid. Le nouveau président, Nelson Mandela, veut mettre en place une véritable démocratisation du pays. Il crée ainsi la première Commission de Vérité et de Réconciliation telle que nous les connaissons aujourd’hui. Alors que les Commissions d’enquête se focalisaient sur un type de crime commis sur une période donnée, les Commissions de Vérité et de Réconciliation ont un plus large champ d’action. Elles enquêtent généralement sur de nombreux types de crimes, principalement sur les abus et les crimes contre les droits de l’Homme, et sur des périodes très variées, allant de quelques années à plusieurs décennies. Ainsi, en Allemagne, la Commission d’étude sur l’évolution de l’histoire et des conséquences de la dictature du Parti socialiste unifié d’Allemagne (Sozialistische Einheitspartei Deutschlands, SED), en 1992, enquête sur une période allant de 1949 à 1989, alors que la Commissions de Vérité de l’Équateur (2007) enquête sur la période allant de 1984 à 1988.

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Table des matières

Sommaire
Introduction
Chapitre I – Les Commissions de Vérité et de Réconciliation : des instances novatrices Introduction
1. Mise en place et fonctionnement des Commissions
1.1 Les premières Commissions : les Commissions d’enquête d’Amérique latine a. Les rôles b. Caractéristiques
1.2 Des Commissions d’enquête à la Commission de Vérité et de Réconciliation : le cas particulier de l’Afrique du Sud
a. Les Commissions de Vérité et de Réconciliation du Chili et du Népal
b. La Commission d’Afrique du Sud
c. Les caractéristiques de la Commission d’Afrique du Sud
1.3 Le modèle des Commissions de Vérité et de Réconciliation
a. Commissions d’enquête et Commissions de Vérité et de Réconciliation : différences et points communs
b. Les enjeux
2. Les Commissions de Vérité et de Réconciliation : un nouveau modèle de « justice » et de démocratisation
2.1 La justice transitionnelle
a. La justice transitionnelle et les Commissions
b. La quête de vérité
c. Une justice sans peine
d. La réparation face à l’amnistie
2.2 La mise en oeuvre efficace d’une démocratisation
a. La promotion de la place du citoyen
b. L’unité nationale dans la justice
2.3 La promotion des droits de l’Homme
a. Le développement des droits de l’Homme
b. Les moyens pour y aboutir
3. Trente ans après les premières Commissions : un bilan ?
3.1 Une réconciliation nationale réussie
a. La place des victimes
b. Mise en place d’une vérité historique
c. La réconciliation et le pardon
3.2 Les limites des Commissions : le manque de moyens
a. Dans les rapports finaux
b. Le manque de moyens financiers face à la réalité des fonds
3.3 Bilan de l’efficacité et de la réussite des Commissions
a. La mise en oeuvre des recommandations
b. Les critiques de la population Conclusion Bibliographie
1. Informations générales
2. Ouvrages spécialisés
3. Sur les droits de l’Homme et la transition démocratique
4. Sur la réconciliation et le pardon
5. Études comparatives ou spécialisées
6. Sur les limites des Commissions
7. Sur les rapports finaux Sources
1. Sur la conservation
2. Informations générales
3. Afrique du Sud
4. Argentine
5. Brésil
6. Canada
7. Chili
8. Kenya
9. Maroc
10. Panama
11. Paraguay
12. Pérou
13. Togo Chapitre
II – La conservation des archives des Commissions Introduction
1. Les archives des Commissions
1.1 Enjeux sociaux et démocratiques
a. La transparence gouvernementale
b. Connaître le passé
c. Étudier le passé
1.2 Typologie des archives
a. Documents administratifs et officiels
b. Témoignages et documents de preuves
c. Le support numérique
2. Conservation et accessibilité des archives des Commissions : mise en place et réalité
2.1 La politique de conservation des pays concernés par les Commissions
a. Les lois
b. Les Archives nationales : le début de la conservation
2.2 Les lieux de conservation des archives
a. Panorama général
b. Niveau national
c. Niveau international
2.3 Une accessibilité efficace ?
a. Limitation de l’accessibilité
b. Les délais de communicabilité
c. L’accessibilité réelle des rapports et des archives
3. Des difficultés de conservation
3.1 Les oppositions gouvernementales
a. Refus de coopération
b. Le soutien au travail des Commissions
c. Intervention du gouvernement
3.2 Les archives en situation d’urgence
b. Localisation inconnue
c. Les mesures de conservation
d. Vols et destructions
3.3 La coopération internationale
a. Les aides internationales
b. Étude des soutiens internationaux
Conclusion
Conclusion

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