Les apports scientifiques en biologie moléculaire

Les apports scientifiques en biologie moléculaire

Dans les années 1930 à 1960, de grandes découvertes scientifiques révolutionnent la compréhension du vivant. C’est en 1944 que la nature chimique des chromosomes, porteurs des gènes, est révélée. O. Overy confirme que ceux-ci sont constitués d’acide désoxyribonucléique, sous le sigle désormais connu d’ADN. Puis, vient la connaissance de la composition chimique de cet ADN par Changaffen en 1950 ; s’effectue ensuite la découverte de sa configuration en double hélice en 1953, par Watson et Crick ; s’ensuit la lecture du code, en 1966, par plusieurs équipes de chercheurs, celle particulièrement de Marshall W. Nirenberg et celle de Har GobindKhorana ; avancées toutes aussi remarquables que celle qui les suit : à savoir celle concernant les mécanismes de régulation de l’expression des protéines, découverte en bonne part par Jacques Monod, uni aux efforts des travaux de François Jacob et d’André Lwoff, et que Monod met très pédagogiquement en lumière, pour le grand public, dans HN. Pénétrant dans ce domaine de l’infra cellulaire, la nouvelle science de la biologie moléculaire est au point de rencontre de la biochimie et de la génétique. Monod va attirer l’attention sur le fait que l’activité des gènes peut être régulée par les protéines. Plus largement encore, il va montrer comment certaines protéines entrent en interaction avec l’ADN pour fabriquer d’autres protéines. Les relations entre ADN et protéines se trouvent dès lors mises en évidence.

À la différence de Wollman, Lwoff et Jacob qui se penchent sur l’étude de la lysogénie et la mise en valeur du prophage, c’est-à-dire du virus bactériophage incorporé au chromosome de la bactérie hôte, toute la recherche initiale de Monod se porte sur l’adaptation enzymatique. Le questionnement de Monod commence par la recherche sur le mode de croissance des bactéries, objet de sa thèse en 1942, rééditée en 1958. Ce travail est devenu très rapidement un classique de la recherche biologique moléculaire. Monod va se concentrer très spécifiquement sur les besoins nutritifs des micro-organismes et plus précisément, il va étudier les phénomènes d’adaptation chez les bactéries. Le problème est de chercher à expliquer comment les mécanismes cellulaires permettent l’assimilation du substrat. Or, la croissance des cultures bactériennes obéit à de simples lois quantitatives. Ses toutes premières recherches portent donc directement sur la cinétique et la physiologie de la croissance bactérienne. Il existe une relation linéaire entre la concentration initiale de l’aliment et le maximum de densité atteint par les populations de bactéries en culture pure. Cependant, Monod démontre que le taux de croissance, lui, n’est pas une fonction linéaire de la concentration de l’aliment, mais une fonction identique à l’équation cinétique qui décrit la vitesse d’une réaction enzymatique, selon la concentration de substance contenue dans le milieu de culture. Puisque la vitesse de croissance est déterminée par une réaction de type enzymatique, Monod va s’intéresser aux aspects biochimiques de cette croissance, c’est-à-dire aux enzymes responsables des synthèses. Rappelons qu’un enzyme est une molécule de protéine capable de catalyser, c’est-à-dire de faciliter ou d’accélérer une réaction chimique déterminée sans intervenir dans les produits de la réaction et se retrouvant inchangée lorsque la réaction est terminée. Comme le définit Monod, « les enzymes sont des catalyseurs spécifiques ».

En particulier, l’enzyme qui va devenir le sujet classique de ses recherches ultérieures est la βgalactosidase, cet enzyme ayant pour fonction d’hydrolyser, c’est à-dire de « défaire par l’eau » le lactose, ce qui lui permet d’être consommé et métabolisé. En cherchant à mesurer le rendement de la croissance en présence de nombreux sucres, Monod découvre que le rendement de la croissance en fonction de la source d’énergie est indépendant de la vitesse de croissance ; cela indique que la quasi-totalité de l’énergie disponible est utilisée par les biosynthèses.

La détermination génétique et ses modèles

Monod voit bien le rôle fondamental des protéines pour la constitution et l’organisation de l’être vivant. Par conséquent, il va s’interroger sur leur mode d’expression, c’est-à-dire sur la façon dont elles sont produites. De plus, il va s’interroger sur la façon dont leur structure implique leur fonction.

Les protéines, et plus particulièrement les enzymes, jouent un rôle majeur dans l’activité cellulaire. Elles sont les plus importants des constituants des êtres vivants. Toute protéine se définit comme une substance constituée par une chaîne d’acides aminés associés ou non à un groupe chimique de nature variée. Monod cherche à comprendre le mode de formation et d’évolution des structures protéiques afin de tenter de cerner, si possible, le mécanisme, substitut en cela de la « téléonomie », qui résoudrait le problème du projet des performances par la solution qu’apporte la nécessité de la fonction inhérente aux structures. Toute l’attention de Monod se porte dès lors sur deux découvertes macromoléculaires structurelles majeures et de considérable portée : l’opéron et l’allostérie.

– L’opéron, désigne « un groupe de gènes à expression coordonnée par un opérateur. »  C’est particulièrement l’étude de l’opéron lactose, qui va permettre non seulement l’identification des séquences opérateurs-promoteurs mais aussi la reconnaissance du rôle du répresseur ainsi que la mise en lumière de la découverte du rôle de l’ARN messager. De l’opéron dépend donc directement l’expression ou non des protéines.
– L’allostérie est une notion qui signifie le changement de forme que connaît la protéine, selon des transitions, en présentant différents sites actifs, c’est-à-dire catalytiques.

L’opéron, découvert en 1961, devient le modèle de l’activité des gènes, en tant que modèle de régulation

C’est d’abord avec le modèle de l’opéron que se trouve éminemment représentée cette idée émise selon laquelle il y a, d’une part, des gènes codant pour les enzymes ou les protéines structurales, nommés gènes de structure qui sont sous la dépendance du gène « opérateur » de « l’opéron » ; d’autre part, à côté d’eux, existent des gènes régulateurs, dont la seule fonction est de contrôler l’activité des autres gènes, en codant pour une protéine qui réprime ou augmente leur expression. La filiation sémantique du choix du terme « opéron » relevant de l’« opérateur » est clairement explicitée dans le début de la présentation de Lwoff, dont nous citons ici un passage explicatif : « La régulation coordonnée de la synthèse des enzymes est gouvernée par deux gènes : le gène régulateur responsable de la formation du répresseur, et le gène opérateur, responsable de l’expression des gènes de structure de l’opéron. Le répresseur doit reconnaître et l’inducteur et l’opérateur. ».

Dans le même sens, Monod et Jacob déclarent dans un document portant sur le mode d’action des gènes et leur régulation : « Le segment chromosomique contenant un opérateur et les gènes de structure adjacents dont il gouverne l’expression constituent une unité de transcription coordonnée à laquelle a été donné le nom d’opéron. ».

Monod donne un exposé très précis de l’opéron dans le système lactose où est intégré également le rôle du promoteur, car l’opéron y est défini comme une unité d’expression génétique qui comprend un ou plusieurs gènes et des séquences régulatrices, promoteur et opérateur qui régulent leur transcription. Le promoteur est la partie de l’ADN sur laquelle se fixe l’ARN polymérase afin d’initier la transcription d’ADN en ARN. En effet, il convient de préciser que cette synthèse des protéines ne s’effectue pas sans la transcription préalable de l’ADN en ARN, découvert par Monod et Jacob. L’opérateur est le site d’action qui a pour seule fonction de recevoir le répresseur, bloquant la transcription du promoteur placé en amont et lui faisant ainsi barrage, lorsque le répresseur est fixé dessus ; et laissant, à l’inverse, la transcription s’effectuer lorsque le répresseur quitte l’opérateur, se dissocie de lui pour s’associer à l’inducteur. On peut se référer au schéma figurant ci-dessus du « système Lactose» reproduit au ch. 4 de HN portant sur la fonction régulatrice des protéines, intitulé Cybernétique microscopique.

Dès 1961, François Jacob et Jacques Monod présentent le modèle de l’opéron, dans l’article Genetic Regulatory Mechanisms in the Synthesis of Proteins. Nous voyons que toute la recherche a porté tout d’abord sur l’opéron lactose, c’est-à-dire sur le système mis en place qui permet à une bactérie caractéristique, l’Escherichia coli, d’assimiler le lactose.

DISCUSSION sur l’opéron 

L’opéron peut être décrit comme un montage de gènes coordonnés. Il intéresse au plus haut point la réflexion scientifique et philosophique : en matière de compréhension d’un mécanisme régulateur tout à fait inédit en particulier, et, plus largement en matière de compréhension de tout organisme vivant. Il convient tout d’abord d’indiquer quelques apports plus récents, et de relativiser le rôle de la levée du répresseur, qui n’est pas l’unique mécanisme de régulation ; son caractère « rigidement programmé », tel qu’il est conçu par Monod est également actuellement remis question. Ensuite, nous nous attacherons à préciser si oui ou non et en quel sens, nous pourrions parler d’une cause finale décelable dans ce mécanisme, étant donné que ce dispositif ou montage préexiste à toute action de l’inducteur. La même question portera également sur la prise en compte du principe d’économie qui lui est attaché, à savoir l’homéostasie.

Tout d’abord, apportons quelques nouvelles précisions concernant l’opéron, définies par d’autres acquis scientifiques de sources différentes ou un peu plus récentes que l’exposé de Monod, apports mineurs toutefois, qui n’en modifient aucunement l’intérêt.

Quelques années plus tard, après ces découvertes de Monod sur l’opéron, il s’avère que les enzymes de dégradation d’un autre sucre, le maltose, ne sont pas contrôlées par un mécanisme de régulation ; le maltose semble bien activer la synthèse qui le dégrade. Monod n’accepta que très tardivement ce fait. Il s’avère en effet que l’activation positive peut venir également d’autres facteurs que de la levée d’un répresseur et peut s’expliquer par de multiples mécanismes. Voici également une simple précision témoignant d’avancées scientifiques encore plus récentes : il s’avère à l’heure actuelle que l’inducteur serait l’allo-lactose, produit secondaire de la β-galactosidase et non pas le lactose lui-même, selon l’exposé d’Andras Paldi, lors de son intervention du 16 octobre 2013 au Centre Cavaillès.

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Table des matières

Introduction
Première partie : les découvertes de J. Monod
I. Les apports scientifiques en biologie moléculaire
1) La détermination génétique et ses modèles
a) L’opéron, découvert en 1961, devient le modèle de l’activité des gènes, en tant que modèle de régulation
b) Le modèle de l’allostérie fait son apparition dès 1961 déjà, mais il n’est formalisé scientifiquement qu’entre 1963 et 1965
2) « La quintessence du code » : le mécanisme du code génétique, à l’origine de l’invariance et de la téléonomie
a) L’invariance par réplication
b) Le mécanisme de la traduction
3) Rôle des mutations aléatoires et de la sélection naturelle
a) Les mutations aléatoires
b) La sélection naturelle
c) Application de cette théorie à l’exemple de l’œil
4) Les lois de la physique et de la chimie, appliquées au vivant, par la biologie moléculaire
5) Les énigmes non résolues de la biologie
II. La méthode : un emploi renouvelé de la méthode hypothético-déductive
1) Continuité et rupture
2) Les points de méthode originaux employés par Monod
3) Le postulat d’objectivité
4) Réductionnisme et holisme
Deuxième partie : L’interprétation philosophique par Monod de ses propres découvertes
I. Deux principes explicatifs du vivant : le hasard et la nécessité
1) Le hasard
a) Distinction hasard essentiel/hasard opérationnel
b) Hasard intrinsèque et objectif
c) Hasard : liberté créatrice, absolue mais aveugle
2) La nécessité : exprimée dans l’émergence et la téléonomie
II. Le couple de concepts invariance/téléonomie
III. Une clé d’interprétation : la cybernétique
IV. Le primat du génétique
V. L’émergence : un concept en gestation
Troisième partie : les implications métaphysique et éthique, d’une telle conception
I. Ce que cette position n’est pas : ni un vitalisme ni un animisme au sens large
1) Cette position n’est pas un vitalisme
2) Cette position se démarque aussi de l’animisme
II. Ce qu’est cette position : un matérialisme scientifique
III. Passage du matérialisme scientifique à une métaphysique naturaliste athée
IV. L’éthique devient une éthique de la connaissance. La recherche du bien par l’homme se trouverait-elle disqualifiée ?
Conclusion

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