Les analyses propres aux « Notes marginales » chez Spinoza

ÉLÉMENTS DE CONTEXTE : THE CALCULUS OF CONSENT ET SON ÉPOQUE

Quelques éléments de contexte

La parution du Calculus of Consent, au début des années 1960, est marquée par un triple contexte : la critique générale du  capitalisme américain, le renouveau des pensées libérale et conservatrice, et le développement de l’économie politique.

La guerre froide, le communisme et le capitalisme

Ainsi, il est utile de rappeler que J. Buchanan et G. Tullock accomplissent leur recherche dans un contexte de Guerre froide, au sein duquel la démocratie libérale comme l’économie de marché doivent essuyer de féroces critiques. Aux yeux d’un certain nombre d’intellectuels de l’époque, aux Etats-Unis comme en Europe de l’Ouest, le capitalisme, la propriété privée des moyens de production, ainsi que le marché comme mode d’allocation des ressources apparaissent devoir être défendus contre des modes d’organisation sociale alternatifs – au premier rang desquels le communisme. Le début des années 1960 est ainsi le théâtre de fortes tensions et de débats animés sur des sujets de nature politique et économique. De manière significative, l’année de parution de The Calculus of Consent constitue également l’un des points de tension diplomatique les plus graves de la Guerre froide. En effet, du 14 au 28 octobre 1962, Etats-Unis et Union Soviétique se font face au sujet de missiles soviétiques pointés depuis l’île de Cuba vers le territoire américain. Cette « crise des missiles », moment paroxystique de la guerre froide dans la mesure où de nombreux observateurs croient alors à l’imminence d’un troisième conflit mondial, débouche sur une période de détente. Il n’empêche que une part non négligeable des intellectuels et hommes politiques de l’époque, attachés à la défense du camp « occidental », la présence soviétique est plus menaçante que jamais. Ces craintes se trouvent renforcées par la popularité de nombreux discours cherchant à démontrer la supériorité du mode d’organisation collectiviste dans les domaines agricole, économique, et technologique. À cet égard, les succès russes dans la conquête spatiale (le 4 octobre 1957, le Spoutnik 1 devient le premier objet satellisé par l’homme ; le 12 avril 1961, le vol de Youri Gagarine fait de l’URSS la première puissance à avoir réussi à envoyer un homme dans l’espace) sont interprétés par de nombreux observateurs comme des preuves de additionnelles de l’incapacité du capitalisme libéral à soutenir la compétition dans laquelle il s’est engagé. Par ailleurs, les vives tensions sociales qui se font jour à l’intérieur des ÉtatsUnis, notamment autour de la question raciale, – largement médiatisées, du fait du caractère ouvert de la société américaine – semblent attester du manque de réussite du système politique américain dans les domaines de l’intégration économique et politique. Seul le Tennessee sépare géographiquement la Virginie où enseignent J. Buchanan et G. Tullock du Mississippi, où éclatent en septembre 1962 les émeutes « d’Ole Miss ». Refusant l’admission de James Meredith, noir américain et ancien soldat de l’armée états-unienne, à l’Université du Mississippi (surnommée « Ole Miss ») des ségrégationnistes s’affrontent aux forces de police fédérale. Les violences feront deux morts et trois-cent blessés. Trois ans plus tard, les émeutes de Watts à Los Angeles laissent 34 morts, plus de 1 000 blessés et 40 millions de dégâts, au milieu des décombres. Dans ce contexte, le « rêve américain », et la prétendue supériorité du système économique et politique qui lui serait attaché laissent de plus en plus d’intellectuels, d’hommes politiques, d’artistes, et d’hommes d’affaires, perplexes. Avant même que la Guerre du Vietnam ne vienne approfondir cette fracture, nombre d’œuvres culturelles viennent questionner les certitudes qui dominaient alors dans de nombreux discours au regard de l’histoire américaine et de la « destinée manifeste » de son capitalisme.
Ce contexte n’est pas sans conséquence sur les débats dans le domaine des politiques publiques. La rivalité avec le communisme et le souvenir de la crise de 1929 incitent de nombreux esprits à rechercher en l’État la solution aux imperfections du marché. En parallèle, beaucoup, y compris aux Etats-Unis s’attèlent à concevoir une « troisième voie » entre le capitalisme libéral et le collectivisme. Dans le champ de la science économique, ces intuitions intellectuelles trouvent de la substance dans le développement d’un keynésianisme triomphant. La Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie , publiée en 1936, devient en effet au début des années 1950 l’un des ouvrages incontournables pour penser la Dépression des années 1930, mais aussi les politiques économiques mises en pace dans l’après-guerre. Les élèves ou disciples de John-Maynard Keynes, tels Joan Robinson ou Pierro Sraffa poursuivent sa réflexion et participent à populariser sa pensée. La formulation du modèle « IS-LM » en 1937 par John Hicks constitue la première étape de la synthèse entre courants néo-classique et keynésianisme qui s’opérera à partir des années 1970. À côté du keynésianisme, le socialisme de marché, porté par des personnalités comme celle d’Abba Lerner, tente de concevoir une propriété coopérative des moyens de production dans le cadre d’une économie de marché. En parallèle à ces évolutions intellectuelles, les paradigmes politiques changent également. La puissance publique doit désormais assumer la régulation l’économie de marché, et pallier aux défaillances des mécanismes privés d’allocation des ressources. Le résultat de cette dynamique, c’est qu’aux Etats-Unis, en moins d’un demisiècle, la place de l’État dans l’économie s’accroît considérablement. Nombreux sont ceux qui voient dans le « New Deal » mis en place par Franklin D. Roosevelt entre 1933 et 1937 et dans le Social Security Act de 1965 la fin du système capitaliste américain, basé sur la liberté et la responsabilité individuelle.
En résumé, au début des années 1960, la constitution américaine de 1787 apparaît périssable, et le système économique qui a permis aux Etats-Unis de transformer en moins de deux siècles une « Terra Nullius » en territoire de la première puissance économique mondiale semble à bout de souffle. Le travail de J. Buchanan et G. Tullock entend donc apporter de la structure et de la rigueur à un débat trop souvent motivé par des considérations idéologiques.

Un double renouveau : libéralisme et conservatisme

En parallèle au climat particulier de la Guerre froide, il convient également de garder à l’esprit que The Calculus of Consent paraît à un moment historique qui peut être caractérisé comme celui d’un double renouveau – à la fois intellectuel et politique. D’une part, en réponse aux assauts marxistes, à la popularité du keynésianisme, à la tentation planiste et à l’interventionnisme croissant de l’État dans l’économie, se développe, dans les années 1950 et 1960, un nouvel argumentaire libéral. D’autre part, le début des années 1960 voit le conservatisme américain se doter d’un nouveau souffle, et mettre en place des idées qui persisteront pendant les décennies suivantes.

Le renouveau libéral

Considérons d’abord le renouveau de la pensée libérale. Nous entendrons par ce terme toute une série de travaux et d’analyses qui souhaitent prendre le contrepied du communisme, mais aussi du keynésianisme et de ses contreparties politiques, pour réaffirmer que le marché reste le meilleur mode d’allocation des ressources au sein d’une société donnée. La rencontre de l’offre, de la demande, et l’équilibre obtenu par l’intermédiaire des variations de prix permettraient donc indéniablement d’obtenir la situation optimale du point de vue du bien-être collectif. En effet, cette position ne va, au début des années 1960, pas de soi dans la mesure où le procès du marché semble bien engagé. La crise des années 1930 avait montré de manière dramatique ce que de nombreux économistes et théoriciens avaient formalisé de manière analytique : le cadre-néoclassique construit à la fin du XIXe siècle par Léon Walras, Stanley Jevons et Carl Menger, ne permet pas de penser les « échecs de marché » (market failures). Cherchant à retourner la critique, un nombre croissant d’auteurs vont, dans les années 1950 et 1960, s’intéresser aux « échecs de l’action publique » (government failures).
Nous aurons l’occasion de voir que The Calculus of Consent représente sûrement la formulation la plus aboutie de cette idée. Plus généralement, deux figures vont porter ce renouveau intellectuel. La première, c’est Friederich von Hayek, qui publie en 1944 La Route de la servitude. Profondément marqué par les régimes totalitaires qui se développent en Italie, en Allemagne et en Russie dans l’entre-deux-guerres, l’économiste et philosophe autrichien développe une pensée selon laquelle le contrôle gouvernemental de la décision économique (via la planification centralisée) mis en place dans les démocraties occidentales porte inévitablement en lui les germes de la tyrannie. L’enchaînement historique est selon Hayek très clair, et la dynamique implacable : l’abandon de l’individualisme (concept que nous aurons à mieux définir dans le cadre de ce travail) et du libéralisme (politique comme économique) impliquent une perte de liberté qui débouche mécaniquement sur la création d’une société fondée sur l’oppression des citoyens par un dictateur tyrannique. Ce qu’il s’agit d’éviter, c’est la mise en place – de manière subreptice – des bases d’une servitude généralisée des individus. L’auteur autrichien se donne également pour but d’opérer un renversement de la lecture historique dominante de l’époque. La fascisme n’est pas, selon lui, une réaction capitaliste au socialisme. Au contraire, il entend établir que fascisme et socialisme partagent des racines communes, que l’on retrouve dans la planification économique et l’accroissement du rôle de l’État au détriment des responsabilités des individus.

L’ambition pluridisciplinaire de The Calculus of Consent, et la question de l’impérialisme de la science économique

L’ambition pluridisciplinaire de J. Buchanan et G. Tullock

L’une des originalités fondamentales de The Calculus of Consent réside dans le choix de son objet. J. Buchanan et G. Tullock comptent ainsi parmi les premiers à appliquer les méthodes et raisonnements économiques aux processus politiques . Selon les auteurs, leur projet est ainsi résolument pluridisciplinaire. La préface de The Calculus of Consent s’ouvre ainsi par ces quelques mots:
Ce livre traite de l’organisation politique d’une société constituée d’hommes libres. Sa méthodologie, son appareil conceptuel, et son cadre analytique sont dérivés, essentiellement de la discipline académique qui pour sujet l’organisation économique d’une telle société. Les étudiants et les chercheurs en sciences politiques partageront avec nous un intérêt pour les problèmes centraux que nous étudions ici. Leurs collègues des sciences économiques partageront avec nous un intérêt pour la construction de l’argumentaire. Ce travail se tient pleinement le long de cette frontière mythique et mystique entre ces deux descendants prodigues de l’économie politique.
Le travail de Gordon et Tullock entend donc pleinement se situer sur une frontière. Il n’est ni question d’opérer une révolution paradigmatique, ni question de dévoiler un nouveau sujet d’analyse. Bien au contraire, les auteurs de l’université de Virginie entendent faire du « neuf avec du vieux ». L’originalité de leur approche consiste à appliquer les méthodes de la science économique (l’analyse en termes de coûts et de bénéfices ; l’hypothèse d’optimisation) à un objet qui lui échappait jusqu’à présent, et qui restait donc le monopole des politistes. Ce projet est d’autant plus justifié que, selon J. Buchanan et G. Tullock, établir une frontière entre économie et science politique paraît totalement dépourvu de sens. La frontière sur laquelle ils entendent construire leur théorie est autant « mythique » que « mystique », c’est à-dire qu’elle semble ne pas avoir de réalité à part dans les représentations des agents. Elle est une fiction utile à la structuration des champs académique, mais rien de plus . Pour illustrer leur propos, J. Buchanan et G. Tullock recourent à l’image d’un fermier qui labourerait le long d’une clôture. La métaphore vise à mettre en évidence les coûts et bénéfices de l’opération. Trois aspects doivent être, en ce sens, pris en compte. « Premièrement, écrivent Buchanan et Tullock, du simple fait qu’il s’y trouve situé, la terre qui longe la clôture a toutes les chances d’être plus fertile, plus productive, si elle est bien cultivée, que celle qui sera trouvée dans le plus accessible centre du terrain ». Cependant, cet avantage peut fort rapidement être
contrecarré par la très grande probabilité d’erreur qui surgit à mesure que l’on s’approche des « frontières de l’orthodoxie ». Filant, la métaphore, Buchanan et Tullock mettent en garde contre le fait que « La probabilité de buter sur des souches ou des blocs rocheux s’accroit, et que le simple manque de familiarité avec le territoire rendent les détours inconscients et non volontaires quasiment inévitables » . Enfin, s’aventurer le long des frontières risque de perturber les relations de voisinages. La démarche qu’ils entendent développer risque alors de s’attirer les foudres des praticiens plus « orthodoxes » de la science économique comme de la science politique. Buchanan et Tullock affirment alors ne pouvoir qu’espérer que le premier aspect ne soit pas contrebalancé par les deux autres. Enfin, la préface de The Calculus of Consent affirme craindre que « la nature interdisciplinaire du livre ne fasse surgir des problèmes de contenu » . Puisque le livre s’adresse à des lecteurs spécialisés dans les deux matières dont il est question, il est fort possible que certaines parties de l’analyse semblent trop simples ou fastidieuses, à chacun des groupes potentiellement visé par le livre.

« LES NOTES MARGINALES CONSACRÉES À LA LECTURES DE LA PHILOSOPHIE » ET L’ANALYSE DE SPINOZA EN TERMES DE PUBLIC CHOICE.

Structure et caractéristiques de l’appendice – situation de la référence à Spinoza

La référence à Spinoza ne prend pas place au sein de l’argumentation de The Calculus of Consent ; elle n’intervient pas dans une démonstration, pas plus qu’elle n’est invoquée pour justifier un postulat anthropologique, ou une hypothèse de travail. Lorsque J. Buchanan et G. Tullock se réfèrent à Spinoza, c’est au sein de l’un des deux appendices attachés à leur livre, dans celui consacré aux « Marginal Notes on Reading Political Philosophy » . Selon nous, le choix de se référer à Spinoza en appendice, tout autant que la structure et les caractéristiques des « Notes marginales » nous renseignent éminemment sur la nature de la lecture opérée par les fondateurs de l’École du Public Choice de l’œuvre de Spinoza. Ce choix, qui nous renvoie à l’architecture interne du livre, soulève également toute une série de problèmes.

Le problème de la paternité des appendices

Le premier problème soulevé par la lecture des « Notes marginales », c’est celui de la paternité de ce texte. En effet, si le texte de The Calculus of Consent porte une signature commune, chacun des deux appendices a été écrit séparément. James Buchanan s’est chargé des « Marginal Notes on Reading Political Philosophy » , et c’est Gordon Tullock qui a rédigé le second appendice, consacré aux « Theoretical Forerunners » . Comme le remarque la Préface, on sort ici de ce qui relève du travail commun des deux auteurs:
Les deux Appendices ont été écrits et signés séparément. Bien qu’ils discutent tous deux le contenu du livre en relation avec deux pans séparés et distincts de la littérature, le lecteur attentif pourra peut-être distinguer la légère différence d’emphase entre les deux auteurs de ce livre. Que cette différence soit présente et identifiée nous semble tout à fait normal.
Doit-on alors considérer que les appendices ne sont pas solidaires du reste du livre, et que la lecture de l’œuvre de Spinoza telle qu’opérée dans les « Notes marginales » ne doit pas être considérée comme le reflet de la pensée des fondateurs de l’école du Public Choice, mais seulement comme l’expression de l’interprétation de James Buchanan ? Ce problème de paternité doit indéniablement nous inciter à la prudence. Il demeure que, comme nous l’avons montré dans notre première partie, les itinéraires intellectuels de James Buchanan et Gordon Tullock sont très intimement liés. Les influences réciproques sont nombreuses, et The Calculus of Consent doit être considéré comme le résultat d’un travail commun de longue haleine. Il semble ainsi très difficile, et même surement incorrect, de penser que James Buchanan aurait écrit en appendice un texte qui ne reflèterait pas les opinions de Gordon Tullock – et réciproquement.

Une lecture aussi particulière que stimulante de l’œuvre de Spinoza

Deux remarques préliminaires peuvent être formulées quant à l’interprétation de l’œuvre de Spinoza exposée dans les « Notes marginales ». La première, c’est que lorsqu’ils évoquent l’histoire de la philosophie, Spinoza est le premier auteur auquel J. Buchanan et G. Tullock font référence de manière positive . Il est, en quelque sorte, le point le plus ancien vis-à-vis duquel les fondateurs du Public Choice se sentent une affinité. Il est donc loisible de penser que la référence à Spinoza a donc, en quelque sorte, à avoir avec la recherche d’une origine.
De plus, cette analyse de Spinoza intervient dans un paragraphe consacré à « La politique, la morale, et la méthodologie de la science politique » . Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que ce qui intéresse J. Buchanan et G. Tullock chez Spinoza, c’est que l’auteur du Traité politique aurait donc été le premier à développer un certain rapport d’indépendance entre la politique et la morale.

La distinction entre ce qui « est » et ce qui « doit être » et la confusion regrettable qui caractérise une grande partie des analyses politiques

Ainsi, au sein des « Notes marginales », la référence à Spinoza est immédiatement précédée par une réflexion sur les relations du « positif » au « normatif ». Pour les auteurs du Calculus of Consent, « qu’est-ce qui est ? » est une question positive, là où « qu’est-ce qui doit être ? » demeure la principale question normative. Selon James Buchanan, cette distinction a permis d’établir une ligne de séparation claire et opératoire entre la philosophie morale d’un côté et la science de l’autre. Cependant, elle construit également une dichotomie trop rigide et simpliste au regard de la complexité des problèmes qui se posent en théorie politique et en philosophie politique  . En effet, les « Notes marginales » entendent montrer que les liens entre le normatif et le positif sont ténus, où plus exactement que la science positive porte indéniablement en elle des potentialités normatives – c’est là d’ailleurs ce qui constitue tout son intérêt, dans le cas de l’économie politique.
Prenons l’exemple de l’État. Selon les notes marginales, « l’État, ou un régime politique, peut être considéré comme un ensemble de règles ou d’institutions au travers desquelles des individualités agissent collectivement, plutôt qu’individuellement ou de manière privée ».
Sans rentrer dans le détail des débats que peut soulever cette définition particulière de l’État, il demeure que celle-ci, dans la mesure où elle décrit une organisation sociale et un ordre politique, permet de préciser la distinction entre analyse positive et normative. Comme l’exposent les « Notes marginales ».

Une lecture stimulante de Spinoza

Ainsi, les sympathies des fondateurs de l’école du Public Choice vont à Spinoza en tant que celui-ci tient une place particulière parmi les « classiques ». Le natif d’Amsterdam aurait ainsi développé des analyses « réalistes », par opposition avec le courant « idéaliste » vis-à-vis duquel J. Buchanan et G. Tullock entendent s’inscrire en porte-à-faux. En effet, les « Notes marginales » se disent totalement étrangères à cette dernière tradition, dans la mesure où l’analyse « idéaliste » consacre de nombreuses réflexions aux questions d’obligation politique . En vertu des analyses mentionnées ci-dessus, J. Buchanan considère donc que la tradition idéaliste relève de la philosophie morale, et n’a donc que peu de choses à apprendre lorsqu’il s’agit de concevoir des réformes de l’ordre politique. La position des « Notes marginales » par rapport à ce qu’elles identifient comme la tradition « réaliste » – de laquelle Spinoza est l’un des plus éminents représentants – est toute différente:
En conséquence, il ne devrait pas être très étonnant que les travaux envers lesquels nous sommes les plus « bienveillants » et « favorables » doivent être trouvés au sein du courant « réaliste » de l’histoire de la doctrine politique. Initialement, nous nous référons à Glaucon dans La République de Platon, à Thomas Hobbes, et à Baruch Spinoza. Parmi eux, et d’autres dans leur tradition, seule l’œuvre de Spinoza semble partager beaucoup en commun avec la notre, et seule la sienne mérite un commentaire spécifique.
Dans son Traité politique, publié de manière posthume en 1677, Spinoza aborde l’étude entière de l’organisation politique d’une manière qui semble étonnamment moderne selon nos critères.

Une lecture quelque peu hâtive de Spinoza ?

Ainsi, la référence opérée par J. Buchanan et G. Tullock dans les « Notes marginales » possède une triple dimension : elle est anthropologique, analytique, et conceptuelle. Les auteurs du Calculus of Consent considèrent que l’on trouve chez Spinoza des justifications à l’idée selon laquelle les individus sont motivés par des questions d’intérêt, à la distinction entre les niveaux d’analyse constitutionnelle et organisationnelle, et enfin que l’on trouve dans son œuvre un travail intéressant du concept de contrat social. La référence à Spinoza opérée dans les « Notes marginales » est alors hautement stimulante, en ce qu’elle apparaît éminemment cohérente avec le corps du texte. Elle résonne particulièrement avec les analyses qui la précèdent immédiatement, et qui s’attachaient à constuire la distinction entre ce qui « est » et ce qui « doit être ». L’usage de Spinoza fait par J. Buchanan et G. Tullock apparaît tout à fait justifié dans son esprit, et indique que la démarche qui motive l’écriture du premier appendice doit être considérée comme tout à fait féconde. Grâce aux « Notes marginales », on comprend mieux, à l’aide de Spinoza et d’autres auteurs, le contenu du Calculus of Consent .
De plus, on prend également la mesure de ce qui fait un d’un auteur un « classique » l’appareil conceptuel qu’il développe et sa manière de poser les problèmes continuent à nourrir, au cours du temps, des réflexions intenses, et permettent à d’autres auteurs, de développer une pensée originale.

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Table des matières

INTRODUCTION
IV) ÉLÉMENTS DE CONTEXTE : THE CALCULUS OF CONSENT ET SON ÉPOQUE
4. Quelques éléments de contexte
d) La guerre froide, le communisme et le capitalisme
e) Un double renouveau : libéralisme et conservatisme
f) L’analyse économique des phénomènes politiques
5. La parution du Calculus of Consent et ses enjeux
c) La coopération de James Buchanan et Gordon Tullock – éléments biographiques
d) The Calculus of Consent (1962) et son but – l’École du Public Choice et sa postérité
6. L’ambition pluridisciplinaire de The Calculus of Consent, et la question de l’impérialisme
de la science économique
d) L’ambition pluridisciplinaire de J. Buchanan et G. Tullock
e) La question de l’impérialisme de la science économique
f) Le « calcul » de J. Buchanan et G. Tullock : annexer a la science politique à l’économie ?
V) « LES NOTES MARGINALES CONSACRÉES À LA LECTURES DE LA PHILOSOPHIE » ET L’ANALYSE DE SPINOZA EN TERMES DE PUBLIC CHOICE
3. Structure et caractéristiques de l’appendice – situation de la référence à Spinoza
d) Le problème de la paternité des appendices
e) Le but des « Notes marginales sur la lecture de la philosophie politique »
f) Comment interpréter la position de prudence caractéristique de l’Appendice ?
4. Une lecture aussi particulière que stimulante de l’œuvre de Spinoza
d) La distinction entre ce qui « est » et ce qui « doit être » et la confusion regrettable qui caractérise une grande partie des analyses politiques
e) Une lecture stimulante de Spinoza
f) Une lecture quelque peu hâtive de Spinoza ?
VI) LE PUBLIC CHOICE EST-IL UN COURANT D’ANALYSE VÉRITABLEMENT
SPINOZISTE ? QUELQUES EXEMPLES
4. Les analyses propres aux « Notes marginales » chez Spinoza
f) Le conatus : penser l’individualité
g) Le rapport de l’anthropologie à la morale
h) L’utile qui nous est propre, le droit naturel et le contrat social
i) L’approche comparatiste, le bon régime politique et la libération
j) Un mariage conceptuel réussi avec les analyses des « Notes marginales » ?
5. L’individualisme méthodologique et la grille de lecture économique appliquée aux processus politiques
d) Le postulat individualiste
e) L’approche en termes de coûts et d’avantages de l’action collective
f) Les principes fondateurs du Public Choice et le spinozisme
6. Spinoza et la modélisation mathématique
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE

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