L’émergence du banquier itinérant

« La coopérative est-elle un modèle d’avenir pour le capitalisme ?». (P Durance, 2011) 

L’ONU décrète 2012 « l’année des coopératives », s’appuyant sur le slogan « des coopératives pour un monde meilleur ». Face au modèle capitalistique pris dans la tempête et remis en cause dans ses finalités humaines, le mouvement coopératif paraît à certain comme l’autre voie à emprunter. « L’air du temps est à la coopération» (Adam, 2012). Le modèle coopératif formule un projet social et économique présentant une alternative à un système d’entreprises capitalistiques fragilisées dans un monde à la cohésion sociale vacillante. Mais le modèle coopératif présente-t-il encore une différence avec le modèle dominant, une autre façon d’entreprendre, de produire, de fonctionner est-elle possible ? « Le modèle, inspiré par un équilibre entre des valeurs d’égalité, de démocratie, de liberté, d’équité, de solidarité et de prise en charge, a évolué entre la pratique et l’idéal » (IRECUS 2013).

N’assistons-nous pas à un effet de normalisation, d’homogénéisation des organisations ? Audelà des statuts coopératifs et des valeurs affichées, la réalité de ces organisations, ne rejointelle pas celle des entreprises de type capitalistique ? L’enjeu est de taille puisqu’il s’agirait de développer à côté d’une économie classique une nouvelle forme d’entreprendre «réconciliée avec le développement soutenable, solidaire et innovant des territoires » (Larasquet, 2012). Face au risque  d’isomorphisme dans ce type d’organisation, construire et développer une alternative bancaire est-il possible ?

Les coopératives et notamment les coopératives bancaires sont-elles encore des organisations différentes et quelles sont les conditions de pérennisation de ces différences ? 

Le monde des coopératives fait partie d’un domaine plus ample, celui de l’Économie Sociale et Solidaire (E.S.S.), la coopérative en étant une des formes juridiques.

La dynamique coopérative au sein de l’Économie Sociale et Solidaire (E.S.S.), un monde hétérogène mais cohérent 

Comment englober dans une même définition des secteurs aussi différents que des coopératives de productions agricoles, des lieux de ventes communautaires, des grandes banques et des entreprises gérées en SCOP ? Le projet de société qui sous-tend les activités de ces organisations, pourtant bien diverses, va bien au-delà de la simple dimension économique. C’est une même volonté de faire autrement comme le souligne Lasida (2007), avec « des finalités, des logiques propres » et une même volonté fondatrice de recréer une réalité sociale qui s’affranchit du lien marchand. La dynamique coopérative intègre une dimension économique mais aussi sociale et politique. L’ensemble de ses trois aspects se combine, s’agrège de façon particulière dans chacune des organisations. Comment s’explique cette volonté, cette capacité à faire autrement ? On peut retenir trois « pistes » d’explications :

• La première avance l’idée que la coopérative naît d’une défaillance du modèle dominant, d’une forme de creux. La solution coopérative vient donc combler ce manque, ce vide, elle s’insère dans un espace vacant sans réformer le reste du système qui l’englobe.
• La seconde piste reconnaît au modèle coopératif une volonté réformatrice, une capacité à innover, à se combiner avec le modèle de marché pour lui adjoindre des logiques sociales et politiques différentes.
• Une branche plus radicale voit dans le monde coopératif une partie d’un nouveau paradigme alternatif à l’économie de marché.

L’ensemble de ces approches reconnaît le changement social ou sociétal comme discriminant pour ces organisations. La coopérative est un modèle d’entreprise démocratique au sein de l’économie sociale et solidaire (ESS dans le reste de notre document). Dans la famille de l’ESS nous trouvions traditionnellement plusieurs types d’organisations, dont les coopératives, qui côtoient les associations, les mutuelles, les fondations. L’ensemble de ces structures représente 2,3 millions d’emplois en France et plus de 11 millions sur l’ensemble de l’Europe (source : site du ministère de l’économie, mars 2015).

Ces organisations, aux statuts juridiques différents partagent des traits communs. Organisations à caractère privé, elles réunissent des personnes associées autour d’un projet, la finalité n’étant pas de maximiser le profit dégagé. Demoustier (2003) définit l’économie sociale et solidaire par la volonté de « s’associer pour entreprendre autrement » car elle intègre les trois dimensions avec la dimension sociale de l’association, la dimension politique avec le « faire autrement » et enfin la dimension économique de l’entreprenariat.

Les critères définissant l’ESS
1. Les hommes et les femmes sont au cœur de l’économie et en constituent la finalité : la personne et l’objet social priment sur le capital
2. L’adhésion est libre et volontaire
3. La gestion est démocratique sur le principe « une personne = une voix »
4. La lucrativité est limitée : Les associations sont à buts non lucratifs, tout ou partie des excédents est réinvesti dans les sociétés de l’ESS et les fonds propres sont impartageables.
5. La gestion est autonome et indépendante des pouvoirs publics .

Une loi, portant reconnaissance et développement de l’ESS est adoptée en juillet 2014 en France. Légiférer sur cette thématique vise à définir et reconnaitre les spécificités d’un « mode d’entreprendre différent, générateur de richesses économiques en réponse à des besoins sociétaux et environnementaux » (source : site du MOUVES décembre 2014). Cette nouvelle loi a plusieurs conséquences sur le monde de l’ESS. En premier lieu elle en reprend les principes fondateurs :
– Avoir des buts autres que le bénéfice notamment une utilité sociale
– Fixer un mode de gouvernance participative sans corrélation avec le niveau de l’apport en capital
– Gérer les excédents qui ne doivent pas servir la spéculation mais doivent permettre de financer l’activité et son développement .

La nouvelle loi pose des nouvelles conditions pour avoir droit au titre d’entreprise solidaire, un cadre est créé ainsi qu’un agrément dit ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale), les conditions pour obtenir le sésame de l’ESUS sont de deux types :

1/ Sont reconnues d’emblée comme entreprises ESUS les entreprises classiques de l’ESS qui en sont membres de droit .

2/ Les autres structures peuvent obtenir l’agrément si elles poursuivent une utilité sociale avérée, si les salaires respectent un plafonnement, etc. …. Cet agrément est important car il permet de bénéficier de financements fléchés de la part de BPI  mais aussi de rejoindre des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE).

L’enjeu de l’évolution des coopératives

« Une coopérative est une association autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs, au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement ». Alliance Coopérative Internationale (ACI). L’ACI, qui dénombre plus d’un milliard de personnes faisant partie des 750.000 coopératives aux quatre coins du monde, s’est constituée à la fin du 19ème siècle, marquant une volonté d’organisation de la part d’un mouvement non homogène mais fort de principes communs. C’est tout à la fois « un mouvement d’idées qui cherche à prouver la practibilité d’une utopie, et de l’autre un mouvement d’entreprises qui cherche à penser une pratique coopérative » (Martin, 2008). En effet si le statut coopératif se retrouve dans des organisations de formes et de finalités différentes, les organisations coopératives, au sein du mouvement plus vaste de l’économie sociale, tentent de fédérer, rapprocher, les organisations et les personnes dont « le but est de répondre à des attentes et des besoins collectifs en fonctionnant de façon démocratique ». Il y a aujourd’hui dans le monde « trois fois plus de membres de coopératives que d’actionnaires de société de capitaux … Elles offrent à l’échelle internationale environ 100 millions d’emplois » (discours de Mme Merkel à l’ACI, 2012)  .

Une gouvernance particulière

Le principe coopératif se caractérise par l’importance de la démocratie au sein de ces organisations notamment à travers le principe de « une personne, une voix ». Quel que soit le nombre de parts sociales achetées, quel que soit le montant investi par le coopérateur, son pouvoir décisionnel est le même. C’est une caractéristique qui prend tout son sens face aux dérives du capitalisme financier. Ainsi que le soulignent Aglietta et Rébérioux (2005) il est temps d’introduire « la démocratie au cœur de l’entreprise pour y élaborer un intérêt collectif et en contrôler la mise en œuvre ». Mais au-delà des statuts consacrant la démocratie qu’en est-il des pratiques de gouvernance, les membres sont-ils dans la réalité des pratiques impliqués dans les processus décisionnels ?

Si le droit de vote est bien dissocié de l’apport en capitaux, l’exercice du pouvoir est souvent plus problématique : « la démocratie représentative s’est imposée dans son principe au moment où elle s’est fragilisée dans son fonctionnement » (Rosanvallon, 2000). Au-delà d’une certaine taille de coopérative se pose la question de « comment conjuguer l’efficacité économique et la démocratie (Caudron, 2008), un des grands défis des coopératives pour le futur et de « faire vivre la démocratie à l’échelle des territoires» (Malo et Richez-Battesti, 2010).

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Table des matières

Introduction générale
PARTIE 1 – PROBLEMATIQUE, QUESTION ET SCHEMA DE RECHERCHE
Chapitre 1 : Les spécificités des coopératives bancaires
Chapitre 2 : Le cadre théorique de la recherche
Chapitre 3 : Choix méthodologique et design de la recherche
PARTIE 2 – ETUDE DE CAS ET EXPERIMENTATION
Chapitre 4 : La nef entre stratégie de différenciation et isomorphisme
Chapitre 5 : L’expérimentation du banquier itinérant
PARTIE 3– RESULTATS ET DISCUSSIONS
Chapitre 6 : Les résultats de l’étude de cas
Chapitre 7 : Les apports de la recherche
Conclusion générale
Bibliographie
Annexes et schémas

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