L’efficience comme mesure de performance des banques

Performance, productivité et efficience

Suite aux ambiguïtés qui règnent autour de concepts de la performance, de la productivité, de l’efficacité et de l’efficience en économie, il nous semble impératif de faire le tour de ces concepts et d’en rappeler la pertinence d’utilisation. Lorsqu’on évoque d’une façon générale la performance, la productivité, l’efficience ou encore l’efficacité d’une entité quelconque, plusieurs idées nous traversent l’esprit. On ne sait alors de quel aspect, ni de quel indicateur doit-on évoquer ?
Cette première section de ce chapitre s’intéresse au concept de la performance qui est en réalité un construit de concepts dont la productivité et l’efficience. A travers la discussion cidessous, on s’apercevra que le concept d’efficience est différencié des autres notions utilisées habituellement en science de gestion et en économie.

Le concept de performance

Etymologie et début du concept

Pour commencer, il nous semble important de revenir sur l’étymologie et les origines du terme. Le mot « performance » est apparue au 13ème siècle, il provient de l’ancien français « parformer » qui signifiait à l’époque « accomplir, exécuter ». Vers la fin du 14ème siècle, le mot « to perform » est introduit à la langue anglaise, il désignait « la réalisation, l’accomplissement, l’exécution ». Au milieu du 19ème siècle, la langue française réintègre le mot. Il signifie depuis le résultat; le succès ou l’exploit, qu’on peut attribuer à la réalisation d’une action. Il faut remarquer que cette définition est différente de la définition anglaise.
Explicitement, la performance en anglais contient à la fois « l’action, son résultat et éventuellement son exceptionnel succès »1. Delà, la performance en français signifie les résultats (positifs et favorables) obtenus d’une action, contrairement à son sens anglais qui désigne en plus des résultats, la réalisation de l’action (performing).
Pour Guenoun (2009), le détour qu’a connu le terme « performance » lui attribue deux approches possibles: la première le définit comme le processus de formation de la perfection, d’où son préfixe « per », et l’idée de « processus en cours de formation », d’où son suffixe «formance». L’autre approche renvoie à l’idée de conduire une action jusqu’à son terme et de réaliser les objectifs.1Cette approche est plus proche de la définition anglaise.
Le sens du mot « performance » évolue au cours du 20ème siècle et touche plusieurs domaines dont: le sport; résultat chiffré obtenue par un sportif ou un cheval de course lors d’une épreuve, techniquement; résultat optimal obtenu par un matériel ou une machine et même en art contemporain; oeuvre éphémère constituée par une intervention sur l’environnement (happening), le corps de l’artiste (art corporel), le paysage (land art)2.
Il devient alors évident que le terme performance couvre des sens différents selon les utilisateurs:
– La performance est le résultat de l’action. La mesure de la performance inspire la mesure ex post de résultats obtenus. En gestion, il s’agit du sens le plus courant et le plus adéquat. Dans ce même sens, la performance exprime le degré d’accomplissement des objectifs poursuivis par une entreprise. La performance (dans ce sens) peut être évaluée grâce à des indicateurs quantitatifs ou qualitatifs. Les indicateurs peuvent exprimer un rapport entre un résultat obtenu et des moyens mis en oeuvre (ils mesurent dans ce cas des degrés d’efficience), ils peuvent exprimer un rapport entre un résultat obtenu et un objectif visé (ils mesurent dans ce cas un degré d’efficacité), ils peuvent pareillement être des simples données en valeur absolue (pour étudier l’évolution de la performance à travers une période ou la comparer à celle de d’autres concurrents).
– La performance est un succès. Elle est alors fonction des représentations de la réussite qui sont spécifiques aux entreprises, aux organisations, aux acteurs…etc.
– La performance est une action, celle qui conduit au succès. Elle est entendue ici comme un processus, une mise en actes de compétences qui ne sont que des potentialités.
En gestion, le mot performance prend l’un et/ou l’autre des trois sens cités ci-dessus. En général, la performance signifie le résultat positif de l’action. En outre, une contre performance indique un résultat médiocre.
En résumé, nous pouvons dire que la performance est un mot polysémique qui couvre plusieurs sens. La perception du terme dépend du domaine et du contexte dans lesquels il est utilisé. L’évolution du terme au cours du 20éme siècle l’introduit dans les entreprises et les organisations. Il devient un terme très courant dans le domaine des sciences de gestion.

Le concept de performance en sciences de gestion

Le concept de performance a toujours existé dans la littérature de gestion. On associe souvent l’expression « contrôle de gestion» à la formule « pilotage de la performance ». Cette formule est plus adéquate avec l’objet du contrôle de gestion qui consiste à atteindre des résultats (c’est-à-dire la performance) plutôt qu’exercer une surveillance sur les membres de l’entreprises.
Les premiers modèles multidimensionnels de la performance ne remonte qu’à la fin des années cinquante. Mahoney et Weitzel (1969) démontrent que la performance est une fonction de la réalisation des buts, de coopération et du développement des ressources humaines. En 1975, Steers a dénombré 17 critères de la performance, dont les plus cités sont l’adaptabilité et la flexibilité, la productivité et la satisfaction. Pour Scott, il convient de réduire les multiples critères de la performance en trois modèles de base: le modèle rationnel (considère la productivité et l’efficience);le modèle naturel (en plus de la fonction de production, il examine les différentes activités recommandées pour son maintien tel que le moral et la cohésion des employés) ; enfin, le modèle systémique (regroupe le système d’élaboration ainsi que le système de maintien à travers l’adaptabilité et l’acquisition des ressources).Quand à Cameron (1978), il identifie une présentation en quatre modèles : les objectifs ; les systèmes de ressources ; le processus interne et la satisfaction des participants.
L’apport de ces théoriciens montre un certain accord mais aussi une divergence dans les dimensions du « mot éponge » de la performance. Parallèlement, le concept reste un peu énigme car l’évaluation d’une organisation nécessite un choix réfléchi d’un ensemble de critères qui forment plus tard la base de l’estimation et influence les résultats des études. Les modèles multidimensionnels de la performance prennent une nouvelle forme avec l’étude de Quinn et Rohrbaugh (1983) qui émerge de la question initiale: comment les théoriciens perçoivent le construit de la performance?1Ils conclurent que la performance couvre trois dimensions:
– Flexibilité vs stabilité: quand l’organisation est flexible, elle est caractérisée par l’innovation et le changement. Quant à la stabilité, elle recommande un certain ordre et contrôle au sein de l’organisation.
– Externe vs interne: il s’agit des objectifs de l’organisation concentrés vers la compétitivité dans un environnement instable (vision externe), ou bien, concentrés vers la stabilité de l’organisation (vision interne) quel que soit l’environnement externe.
– Moyens vs résultats: les moyens sont ceux employés pour atteindre les objectifs tracés par l’organisation et les objectifs atteints.
Contrairement à la vision académique de Quinn et Rohrbaugh, Morin et al. (1994), avaient pour objectif initial le rapprochement des modèles théoriques aux conceptions des praticiens sur la performance. Les auteurs finissent par identifier quatre dimensions de la performance qui sont représentés à la figure 05.

Le concept de productivité

La discussion du concept de la performance nous enseigne que pour être performante, une entreprise doit réaliser des exploits dans plusieurs dimensions dont la dimension économique. Ainsi, pour être économiquement performante, une entreprise doit améliorer l’exploitation de ces ressources. D’où, l’un des objectifs primordiaux de toute entreprise est l’amélioration de la productivité.

Définition

Tout comme la performance, la productivité est entendu par les économistes sous plusieurs angles. En effet, lorsqu’on évoque la productivité en volume ou en valeur absolue, on sous-entend la productivité totale. La productivité globale est un rapport entre une production et la quantité des facteurs utilisés pour y parvenir. Le rapport entre une production (en volume ou en valeur) et un facteur exprimé en volume ou en valeur est associé à la productivité partielle.
Plus simplement, la « productivité » d’un producteur veut dire le ratio de ses outputs par rapport à ses inputs. Ce ratio est facilement calculé si le producteur utilise un seul input pour produire un seul output. Cependant, un producteur utilise généralement plusieurs inputs pour produire plusieurs outputs. Dans ces conditions, les outputs du numérateur doivent être agrégés d’une manière économique sensible, de la même façon que les inputs du dénominateur, pour que la productivité reste un ratio de deux scalaires. La croissance de la productivité devient alors la différence entre la croissance des outputs et la croissance des inputs, sachant que la condition d’agrégation reste maintenue dans ce contexte aussi.

Caractéristiques

La variance de la productivité, entre producteurs ou à travers le temps, est un résidu qu’Abramovitz (1956) décrit comme « la mesure de notre ignorance ». Beaucoup d’efforts ont été dévoué pour démêler notre ignorance, depuis probablement les débuts de Solow(1957), en « diminuant le résidu ». La plupart des diminutions ont évoqué la minimisation des erreurs de mesure dans la construction des indexes des outputs et des inputs. La conversion des données primaires en variables consistantes avec la théorie économique est une chose complexe. Une fois cette diminution achevée, un résidu adéquat à l’analyse est obtenu.
En principe, le résidu peut être attribué à des différences en technologie de production, des différences d’échelle opérationnelle, des différences d’efficience opérationnelle, et des différences dans l’environnement opérationnel dans lequel la production est exercée. Une attribution correcte est importante pour une adaptation des pratiques managériales privées et une conception des politiques publiques dont l’objectif est d’améliorer la productivité.
Des quatre composantes du résidu précédemment indiquées, il est naturel de mentionner que trois sont endogènes et sous le contrôle du management (les différences en technologies de production, en échelle d’opération et en efficience) et une composante exogène qui est l’environnement opérationnel de la production. Parmi les trois composantes endogènes, notre intérêt se porte sur la contribution de l’efficience dans la variation de la productivité. Sachant également que pour d’autres auteurs, la productivité n’est qu’une mesure de l’efficience. Ainsi, pour Mahé de Boislandelle (1998), la productivité est « un rapport entre une quantité produite et les facteurs qui ont permis de l’obtenir. La productivité mesure l’efficience des facteurs de production et celle de leur combinaison »3. Aussi, pour Bouquin (2001), la productivité qui n’est que le rapport d’un volume obtenu à un volume consommé, est un exemple de mesure de l’efficience4. Cette relation entre la productivité et l’efficience nous amène à discuter le troisième concept, c’est-à-dire l’efficience dans ce qui suit.

Le concept d’efficience

Dans ce qui a été écrit au dessus, il est précisé qu’une entité peut être performante uniquement si elle parvient à réunir tous les éléments essentiels composants du concept de la performance. Elle doit assurer une meilleure productivité, tout en étant efficiente et efficace.
Nous proposons dès lors de préciser le concept d’efficience et de le différencier du concept d’efficacité.

Premières approches

L’efficience est la dimension la plus évoquée, que ce soit par les chercheurs ou les praticiens, dans les essais de définition du construit de la performance. Le concept d’ « efficience » d’une unité de production peut être considéré comme nouveau en science de gestion. Les chercheurs, jusqu’à 1950, ont considéré que les ressources sont efficacement utilisées sous l’hypothèse du plein emploi. Les premiers travaux sur le concept d’efficience sont attribués à Koopmans (1951) qui a proposé pour la première fois une mesure du concept d’efficience et à Debreu (1951) qui a été le premier à mesurer l’efficience empiriquement.
Aussi, beaucoup de facteurs tels que la concurrence, le progrès technique et la rareté des richesses ont influencé les chercheurs théoriques et les preneurs de décision à étudier de prés l’exploitation efficace des ressources. A partir de 1957, les travaux de Farrell M. J. ont donné plus de clarté au concept en distinguant l’efficience technique de l’efficience allocative.

Différentiation entre efficacité et efficience

Avant d’analyser le concept de l’efficience, il faut souligner l’ambigüité sur la notion de l’efficacité et de l’efficience. Comme il a été indiqué, la performance couvre plusieurs concepts dont l’efficacité, l’efficience et la productivité. Nous avons remarqué que beaucoup de recherches et d’articles trouvent que les termes efficience et l’efficacité sont interchangeables (les chercheurs traduisent souvent « efficiency » en « efficacité »). Or les deux concepts sont distincts.
Pour March & Sutton (1997), une organisation peut être très efficace sans être efficiente et elle peut atteindre des niveaux relativement élevés d’efficience sans pour autant être efficace. De ce fait, il est essentiel d’attribuer une certaine attention à l’ambigüité qui existe entre les deux concepts.
Une première explication de cette ambigüité pourrait être l’ascendance des sciences de gestion. En effet, les sciences de gestion sont une émanation des sciences économiques et, pour l’économiste, seul le concept d’efficience existe, la productivité en étant un indicateur.
Et pourtant, le terme « efficacité » est largement utilisé dans la littérature de gestion pour mesurer la performance de toute organisation (organisation marchande ou non marchande) à long terme. Ce terme peut être définit comme le rapport entre les résultats atteints par un système et les objectifs visés. De ce fait, plus les résultats sont proches des objectifs, plus le système est efficace. On s’exprime donc en degré d’efficacité pour caractériser les performances d’un système.
Dans cette recherche, on retient l’acceptation de Marchesnay (2011) sur l’efficacité qui « mesure le degré d’accomplissement de l’objectif visé, comparé aux réalisations antérieures ou extérieures (concurrence : benchmark) »4. Nous rappelons qu’une démonstration plus détaillée sur l’efficience est présentée dans la suite du chapitre.

Essais de définition

Dans le cadre de l’évaluation des performances d’un système, quelle que soit sa nature (unité de production, unité médicale, service de livraison, etc.), on considère que l’efficience exprime le rapport (le lien) entre les objectifs visés et les moyens (les ressources) employés pour les atteindre. En d’autres termes, l’efficience s’intéresse à la quantité des facteurs utilisés pour atteindre les objectifs (nombre d’heure de travail, coûts de consommation intermédiaires, etc.). Traditionnellement, on peut utiliser certains indicateurs économiques (coût moyen) et techniques (productivité des facteurs) pour mesurer l’efficience5.

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Table des matières

Citation
Remerciements
Dédicaces
Sommaire
Introduction générale
Chapitre introductif – La banque et l’économie : Histoire et théories d’une intermédiation
Introduction
I. Origines et rôle de la banque dans l’économie
I.1. Rappel historique sur l’intermédiation bancaire
I.2. Poids d’un secteur bancaire efficient dans l’économie
II. Intermédiation bancaire: Détour théorique
II.1. Banques comme intermédiaire d’information et de risques
II.2. Examen théorique du lien entre les banques et la croissance économique
Conclusion
Introduction de la première partie
Chapitre I – L’efficience comme mesure de performance des banques
Introduction
I. Performance, productivité et efficience
I.1. Le concept de performance
I.2. Le concept de productivité
I.3. Le concept d’efficience
Première Partie – Analyse théorique de l’efficience bancaire : Présentation – Mesure- Déterminants
II. Efficience : Décomposition et mesure
II.1. Décomposition de l’efficience
II.2. Efficience technique: Décomposition et orientation
II.3. Techniques de mesure de l’efficience
III. L’efficience comme mesure de performance dans les différents secteurs
III.1. Le secteur de la santé
III.2. Le secteur de l’agriculture
III.3. Le secteur du transport
III.4. Le secteur de l’éducation
IV. Mesure de l’efficience bancaire
IV.1. Limites des indicateurs classiques dans la mesure de la performance bancaire
IV.2. Utilisation des frontières d’efficience dans l’industrie bancaire
IV.3. Approches déterminants les inputs/outputs des banques
Conclusion
Chapitre II – Facteurs déterminants de l’efficience des banques
Introduction
I. Facteurs liés au contexte économique et institutionnel
I.1. Relation causale entre la croissance et l’efficience des banques
I.2. Efficience des banques en périodes des crises économiques
I.3. Autres facteurs macroéconomiques et institutionnels
II. Facteurs liés au contexte financier
II.1. Marchés financiers
II.2. Dérégulation vs régulation : quel effet sur la performance des banques
II.3. Structure du marché bancaire
III. Facteurs spécifiques à la banque
III.1.Taille de la banque
III.2.Propriété de la banque
III.3. Capitalisation de la banque
III.4. Autres facteurs spécifiques à la banque
Conclusion
Conclusion de la première partie
Introduction de la deuxième partie
Chapitre III – Particularités des secteurs bancaires algérien, marocain et tunisien
Introduction
I. Aperçu sur le secteur bancaire algérien
I.1 Mutations et développement réglementaire du secteur bancaire en Algérie
I.2. Panorama du secteur bancaire algérien
I.3. Caractéristiques du secteur bancaire algérien
II. Aperçu sur le secteur bancaire marocain
II.1. Mutations et développement réglementaire du secteur bancaire au Maroc
II.2. Panorama du secteur bancaire marocain
II.3. Caractéristiques du système bancaire marocain
III. Aperçu sur le secteur bancaire tunisien
III.1. Mutations et développement réglementaire du secteur bancaire en Tunisie
III.2. Panorama du secteur bancaire tunisien
III.3. Caractéristiques du système bancaire tunisien
Conclusion
Chapitre IV – Efficience des banques algériennes, marocaines et
tunisiennes: Evaluation et déterminants
Introduction
I. Echantillon et source des données
Deuxième Partie – Etude empirique de l’efficience des banques algériennes, marocaines et tunisiennes
I.1. Présentation de l’échantillon
I.2. Source des données
II. Evaluation de l’efficience des banques
II.1. Méthodologie
II.2. Présentation des inputs et des outputs: étude quantitative
II.3. Mesure de l’efficience des banques
II.4. Décomposition de l’efficience des banques
III. Facteurs déterminants de l’efficience des banques des trois pays du Maghreb
(Algérie, Maroc et Tunisie)
III. 1. Méthodologie
III.2. Spécification du modèle
III.3. Discussion des résultats
Conclusion
Conclusion de la deuxième partie
Conclusion générale
Bibliographie
Les annexes
Liste des sigles
Liste des figures et des tableaux 
Table des matières

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