Le travail de Louis-René Boquet : présentation générale du corpus de dessins

Noverre et la réforme du costume : sa théorie, sa place parmi les « réformateurs », héritage et postérité

Au début du XVIIIème siècle, l’Europe entière reconnaît la supériorité de la France en matière de costume. Carlo Vigarani arrivant à Paris loue les qualités de Henry Gissey , dessinateur puisant à des sources diverses comme celles laissées par Le Primatice ou Stefano della Bella, soucieux comme il se doit alors de respecter la « convenance des habits », règle permet de reconnaître d’emblée à leurs vêtements les rôles d’un ouvrage lyrique ou chorégraphique. Pour cela on recourt à des accessoires, à des attributs traditionnels, fournis parfois par la célèbre Iconologie de Ripa, mais aussi à tout un vocabulaire descriptif, à des motifs chargés de signification, véritable langage capable d’orienter le public épris de logique, et de l’aider ainsi à une meilleure compréhension du spectacle.
Cela dit, en cette première partie du XVII ème siècle, dans le théâtre classique, les costumes doivent servir souvent à des rôles différents, et leur vraisemblance n’est pas la préoccupation majeure ni du comédien, ni du directeur de troupe, ni même de l’auteur dramatique. « On sentait bien, en 1750, qu’Auguste et Aricie ne devaient pas être habillés comme nos lieutenants généraux et nos petites maîtresses, mais on oubliait que les habits du siècle précédent ne leur convenaient pas davantage. On les avait toujours vus sous ce travestissement absurde et l’on s’en contentait sans chercher s’il y avait quelque chose de mieux. Pour imaginer que c’étaient des héros, il suffisait de voir qu’ils ne nous ressemblaient pas (…) si cette indifférence avait été raisonnée, peut-être ne serait-il pas difficile de l’excuser ; car, enfin, il n’est pas plus extravagant de faire porter à Néron, à Pharasme, un chapeau à trois cornes avec des plumes d’autruche, que de les faire parler en vers rimés scrupuleusement deux à deux… »
La mode règne et la notion de beauté évolue vers le noble, le somptueux, la pompe. De façon générale la décision quant au costume revient au comédien et cette autonomie provoque des aberrations : dans la tragédie, la présence sans aucune autre transposition que celle du plus grand luxe possible, singeant la magnificence des costumes de cour, agrémentés, s’il s’agit de personnages mythologiques, d’un vague attribut (Hercule emperruqué et poudré portant une bûche), achève le désordre et le ridicule ; la comédie mélangeant les habits de caractère hérités du XVIIème siècle avec l’habit de cour, perdant de ce fait l’unité conférée par ces types conventionnels. Des aberrations sanctionnées par les sarcasmes de Voltaire, Crébillon, ou autres littérateurs : « rien n’était si comique que l’habit tragique » . Ce faste trop excessif met en péril « la vérité de la représentation » dénonce en 1737 Saint Albine . Mais peu à peu l’esprit de réflexion et d’observation des Lumières s’impose. De ces excès na ît ainsi un désir de réforme et du jeu, et du costume, en vue d’une même et nouvelle vraisemblance, résultat de la prise de conscience de quelques grands comédiens, sous l’influence de la promotion de l’action montrée sur le discours déclamé. Réactivant la tradition anglaise du dumb show, le comédien David Garrik dès sa première apparition à Londres en 1741 dans le rôle de Richard III, fait sensation avec un jeu pantomime en rupture avec la déclamation.
En France mademoiselle Dumesnil innove en courant sur la scène et Lekain en diversifiant ses déplacements et sa gestuelle. Dès 1734, Marie Sallé, danseuse et chorégraphe amie de Voltaire, à Londres, dans le ballet de Pygmalion, ose danser « sans panier, sans jupe, sans corps, échevelée et sans aucun ornement sur la tête (…) vêtue, avec son corset et son jupon, que d’une simple robe de mousseline tournée en draperie ajustée sur le modèle d’une statue grecque. »
Une esthétique de la surprise se fait jour, qui vise à susciter l’émotion du spectateur en dynamisant l’expression des sentiments. L’habit de théâtre doit désormais accompagner les mouvements de l’acteur, non plus les entraver, et acquiert en même temps une fonction plus nettement dramatique et non plus décorative et sociale comme dans le premier XVIII ème siècle.
Simultanément dans toute l’Europe resurgit la référence à l’histoire. Levacher de Charnois écrit ainsi dans ses Recherches sur les costumes et sur les théâtres de toutes les nations tant anciennes que modernes : « L’Histoire existe ; qu’on l’ouvre : on y remarquera la différence ou les rapports qui ont existé entre les Habillemens des différens Peuples qui ont habité la terre, entre leurs armes, leurs cérémonies, leurs usages, et les marques distinctives de leurs dignités ; on connoîtra ce qui convient à chaque Nation, et par conséquent à chaque personnage d’un Drame tragique» . Mademoiselle Clairon (1725-1803), en 1755, décide avec Lekain, passionné de dessin et d’histoire, de faire réaliser pour l’Orphelin de la Chine des costumes originaux adaptés aux lieux et à l’époque de l’intrigue. Voltaire leur abandonne ses droits d’auteur « pour les dépenses de leur habillement ». Diderot écrit à son sujet dans son traité De la poésie dramatique : « une actrice courageuse vient de se défaire du panier et personne ne le trouve mauvais. Elle ira plus loin, j’en réponds. Ah, si elle osait, un jour, se montrer sur la scène avec toute la noblesse et la simplicité d’ajustements que ses rôles demandent. Disons plus : dans le désordre où doit jeter un événement aussi terrible que la perte d’une ville et les autres catastrophes de la scène tragique, que deviendraient autour d’une femme échevelée toutes ces poupées pommadées ? Il faudrait bien que, tôt ou tard, elles se missent à l’unisson. La nature, la nature, on ne lui résiste pas. Il faut la choisir ou lui obéir ».
Le mouvement s’amplifiera tout au long du siècle et Noverre y participe pleinement, lui qui, dès 1760 et toujours dans ses Lettres sur la danse préconise de se défaire de « la gêne d’un vêtement ridicule » qui, « partageant » « l’imagination » de l’acteur, lui fait « oublier son rôle » . Quand  Lekain, jouant Sémiramis de Voltaire en 1748, sort du tombeau de Ninus « les manches retroussées, les bras ensanglantés, les cheveux hérissés et les yeux égarés », Noverre applaudit : « cette peinture forte mais naturelle frappa, intéressa et jeta le trouble et l’horreur dans l’âme du spectateur » montrant ainsi que l’habit, n’ayant plus pour fonction de séduire le spectateur par son faste, fait partie intégrante des instruments participants à l’efficacité dramatique de la représentation. « Un ballet est un tableau, la Scène est la toile, les mouvements méchaniques des figurants sont les couleurs, leur phisionomie est, si j’ose m’exprimer ainsi, le pinceau, l’ensemble & la vivacité des Scenes, le choix de la Musique, la décoration & le costume en font le coloris ; enfin, le Compositeur est le Peintre. »
Appliquant aux arts de la scène le principe pictutal du « costume », « art de traiter un sujet dans toute sa vérité historique » , Noverre estime que l’habit fait partie de « tout ce qui peut contribuer, par une imitation fidèle, à procurer à l’œil le plaisir de l’illusion, et transporter le spectateur, par le prestige des beaux-arts, dans le climat et chez la nation dont on lui trace la peinture » . Dès lors, tandis qu’est favorisée une approche personnelle du rôle, le choix de l’habit, destiné à participer au « costume » du spectacle, n’est plus seulement le fruit d’une décision individuelle. Contre le mélange hétéroclite jugé « ridicule », il s’insère dans une composition d’ensemble et cont ribue au « coloris » du tableau.
Prônant la variété et la vérité dans le costume, fustigeant l’Académie de Musique pour ces excès, il renchérit : « Grec, Romain, Berger, Chasseur, Guerrier, Faune, Silvain, Jeux, Plaisirs, Ris, Tritons, Vents, Feux, Songes, Grand-Prêtres et Sacrificateurs ; tous les habits de ces Personnages sont coupés sur le même patron, et ne différent que par la couleur et les embelissements que la profusion bien plus que le goût jette au hasard. L’oripeaux brille partout : le Paysan, le Matelot et le Héros en sont également chargés ; plus un habit est garni de colifichets, de paillettes, de gaze et de réseau, et plus il a de mérite aux yeux de l’acteur et du spectateur sans goût. Rien n’est si singulier que de voir à l’Opéra une troupe de Guerriers qui viennent de combattre […] ils ressemblent plutôt à des hommes effeminés, sortant des mains du Baigneur, qu’à des Guerriers échappées de celles de l’ennemi. Que devient la vérité ? où est la Vraisemblance ? D’où naîtra l’illusion ? (…) Il faut de la décence au Théâtre, j’en conviens, mais il faut encore de la vér ité et du naturel dans l’action ».
Dans ce but, il rejette les tonnelets et les masques, réclame des draperies simples et légères, demande que soient diminués de trois quarts les « paniers ridicules » des danseuses.
Dans l’avant-propos d’une des dernières éditions de ses Lettres sur la danse parues de son vivant, il écrira encore : « j’ai senti que supprimer des paniers incommodes, bannir des hanches plus incommodes encore, substituer le goût à la routine, indiquer un costume plus noble, plus vrai et plus pittoresque, exiger de l’action et du mouvement dans les scènes de l’âme et de l’esprit, dans la danse marquer l’intervalle immense qui sépare le mécanisme du métier, du génie qui les place à côté des Arts imitateurs, c’était m’exposer à la mauvaise humeur de tous ceux qui respectoient et vénéroient les anciens usages, quelques barabres et ridiculent qu’il pussent être.. Monsieur Bocquet qui avoit saisi et adopté mes vues, monsieur Dauberval, mon élève qui lutta constamment contre les préjugés, l’habitude et le mauvais goût, monsieur Vestris lui-même, qui fut frappé à son tour des vérités que j’avais enseignées lorsqu’il les vit en pratique à Stuttgart, tous ces artistes devenus depuis célèbres, cédèrent à l’évidence et se rencontrèrent alors sous mes drapeaux. L’Opéra prit bientôt une nouvelle forme quant au costume, à la pompe et à la variété des ballets ».
Dès 1760, en effet, Louis-René Boquet, avec le lequel il travaille déjà en 1751-52, voire peut-être dès 1749 pour son Ballet Chinois , apparaît sous sa plume, comme le dessinateur le plus à même de répondre à ses attentes en matière de costume : « M. Boquet, chargé depuis quelques temps des desseins et du costume des habits de l’Opéra, remediera facilement aux défauts qui subsistent dans cette partie si essentielle à l’illusion, si toutefois on lui laisse la liberté d’agir et si l’on ne s’oppose point à ses idées qui tendront toujours à porter les choses à leur perfection. »

Louis René Boquet

Ce dessinateur ne semble pas avoir lui-même laissé d’avis rédigé en matière de costume. Du moins nous n’en avons pas trouvé trace. Les frères Goncourt qui collectionnaient une centaine de dessins de cet artiste ambitionnaient d’en rédiger la biographie mais ont dû abandonner après avoir vainement cherché des sources.
C’est finalement André Tessier qui a relevé le défi en 1926 en publiant un article biographique en trois livraisons dans La Revue de l’art intitulé « Les habits d’opéra au XVIIIe siècle : Louis Boquet, dessinateur et inspecteur général des Menus Plaisirs ». C’est toujours cette étude qui est citée en référence, en dépit de ses lacunes. Depuis, on peut mentionner un chapitre de Carlos Fischer dans son place à côté des Arts imitateurs, c’était m’exposer à la mauvaise humeur de tous ceux qui respectoient et vénéroient les anciens usages, quelques barabres et ridiculent qu’il pussent être.. Monsieur Bocquet qui avoit saisi et adopté mes vues, monsieur Dauberval, mon élève qui lutta constamment contre les préjugés, l’habitude et le mauvais goût, monsieur Vestris lui-même, qui fut frappé à son tour des vérités que j’avais enseignées lorsqu’il les vit en pratique à Stuttgart, tous ces artistes devenus depuis célèbres, cédèrent à l’évidence et se rencontrèrent alors sous mes drapeaux. L’Opéra prit bientôt une nouvelle forme quant au costume, à la pompe et à la variété des ballets .
Dès 1760, en effet, Louis-René Boquet, avec le lequel il travaille déjà en 1751-52, voire peut-être dès 1749 pour son Ballet Chinois, apparaît sous sa plume, comme le dessinateur le plus à même de répondre à ses attentes en matière de costume : « M. Boquet, chargé depuis quelques temps des desseins et du costume des habits de l’Opéra, remediera facilement aux défauts qui subsistent dans cette partie si essentielle à l’illusion, si toutefois on lui laisse la liberté d’agir et si l’on ne s’oppose point à ses idées qui tendront toujours à porter les choses à leur perfection. »

Louis René Boquet

Ce dessinateur ne semble pas avoir lui-même laissé d’avis rédigé en matière de costume. Du moins nous n’en avons pas trouvé trace. Les frères Goncourt qui collectionnaient une centaine de dessins de cet artiste ambitionnaient d’en rédiger la biographie mais ont dû abandonner après avoir vainement cherché des sources.
C’est finalement André Tessier qui a relevé le défi en 1926 en publiant un article biographique en trois livraisons dans La Revue de l’art intitulé « Les habits d’opéra au XVIIIe siècle : Louis Boquet, dessinateur et inspecteur général des Menus Plaisirs ». C’est toujours cette étude qui est citée en référence, en dépit de ses lacunes. Depuis, on peut mentionner un chapitre de Carlos Fischer dans son Boquet commença comme éventailliste et qu’il l’était encore en 1743, lors de la naissance de son second fils Simon-Louis. Paul Jeannin-Naltet, dont nous avons obtenu le texte dactylographié de la communication orale qu’il fit en 1983 à ce sujet, soutient, sans mentionner de source, qu’il entra à 17 ans dans l’atelier du peintre François Boucher. Enfin, il est communément admis que Louis-René Boquet travaille pour les spectacles des Petits-Appartements dès 1748.

LE BALLET MEDEE ET JASON : DESCRIPTION DES SOURCES COROLLAIRES AUX DESSINS

C’est en effet à la cour de Wurtemberg, à l’occasion des fêtes de l’anniversaire du duc de Wurtemberg qu’est créé le ballet Médée et Jason, en 1763 dit-on généralement. Mais peut-être le fut-il dès 1762, comme l’indique Noverre lui-même dans l’avertissement du livret qu’il rédige pour une reprise de ce ballet à l’Académie Royale de Musique le 30 janvier 1780 , et dans celui du livret de la reprise de Pierre Gardel et Auguste Vestris (fils de Gaëtan) sur la scène du Théâtre de la République et des Arts (terme dont a été rebaptisée l’Académie Royale de Musique) en 1804.
On trouve une indication similaire dans les Mémoires secrets de Bachaumont, à la date du 6 mars 1780 : « c’est en 1762 que M. Noverre composa et fit jouer le ballet de Médée à la cour de Wurtemberg ; des talents en tous genre et surtout ceux de Vestris dans tout l’éclat de sa jeunesse embellirent cette production par les charmes de l’exécution la plus brillante. MM. Servandoni et Colomba furent chargés des décorations ; M. Bocquet le fut du costume ; et M. Rodolphe composa la musique. » . Nous ne connaissons pas d’autre document qui nous renseigne davantage sur cette création de 1762 et Uriot n’en parle pas dans sa Description des fêtes de 1762 (qui n’est pas une relation aussi précise que celles qu’il a rédigées pour les années suivantes). C’est de sa production en février 1763, pour l’anniversaire du duc Charles-Eugène de Wurtemberg, que l’on conserve en revanche le plus de traces et de renseignements.
L’épisode retenu pour ce ballet, celui de la vengeance de Médée après que le couple qu’elle formait avec Jason eut trouvé refuge en Corinthe, à la cour du roi Créon, et que Jason eut renié Médée est emprunté à Euripide et Sénèque : un thème abondamment illustré sur la scène française à l’époque classique . Pierre Corneille écrit sa Médée en 1635 ; Thomas Corneille une tragédie mise en musique par Marc Antoine Charpentier (créée à l’Académiee Royale de Musique en 1693), François Joseph Salomon compose la musique de Médée et Jason, tragédie lyrique en cinq actes et un prologue sur un livret de l’abbé Simon-Joseph Pellegrin, représentée à l’Académie Royale de Musique le 24 avril 1713, reprise le 17 octobre 1713, puis le 1ermai 1727.
L’action se situe en Corinthe où Médée et son époux Jason ont été accueillis par le roi Créon avec leur deux enfants. Jason, chef des illustres argonautes, et qui a conquis la Toison d’or avec l’aide de Médée, magicienne, serait un allié de choix pour le roi, qui cherche donc à détacher Médée de Jason et à proposer à ce dernier sa fille Créüse en mariage. A l’occasion d’une fête au Palais de Créon, tout est mis en œuvre pour pousser Jason dans les bras de Créüse. Jason n’est pas insensible aux charmes de la princesse, ce qui n’échappe pas à Médée et fait naître en son esprit des soupçons violents. Créon, voyant le trouble de Jason et Créüse, choisit ce moment pour offrir son trône et sa fille à Jason. Ce dernier hésite, quand survient Médée, avec leurs deux enfants. Elle lui rappelle ses serments, le supplie de lui rendre sa tendresse en lui montrant leurs deux enfants. Jason chancell e. Mais Créüse se présente et triomphe : Jason cède à sa passion, et chasse Médée. Médée décide alors de se venger. Le décor se change en une grotte épouvantable peuplée de monstres et de serpents. La magicienne commande à la Haine, la Jalousie et la Vengeance de servir sa fureur. Elle ordonne au Feu de renfermer dans un coffret qu’elle destine à Créon, les matières les plus combustibles et les flammes les plus ardentes ; elle commande au Poison de répandre des venins mortels et des vapeurs empestées sur un bouquet de diamants, que sa cruauté réserve à Créuse ; elle demande au Fer un instrument propre à assouvir sa rage : il tire de son sein un poignard ensanglanté, que la Jalousie, la Haine et la Vengeance présentent à Médée, après l’avoir aiguisé. Elle charge enfin ses enfants des présents empoisonnés et survient dans la salle du trône du palais de Corinthe, où Jason vient d’être intronisé et s’apprête à boire à la coupe nuptiale, semant la crainte et la consternation au milieu de la fête. Perfide, Médée feint l’amabilité et offre ses présents. Mais après qu’elle se soit retirée, Créuse ressent tout à coup les effets des présents de Médée : un poison dévorant coule dans ses veines ; Créon dans ce moment ouvre le coffret et les vapeurs empestées qui s’en exhalent le suffoquent : il tombe mort sur les marches du trône. Jason au d ésespoir s’efforce en vain de secourir les victimes quand Médée paraît, triomphante, la Haine, la Jalousie, la Vengeance groupées autour d’elle, un de ses enfans expirant à ses pieds, le bras levé pour frapper l’autre. Jason ne peut l’en empêcher. Médée jette à Jason le poignard, Jason le saisit avec fureur, s’en frappe et meurt dans les bras de Créuse qui confond son dernier soupir avec le sien. Le Palais s’embrase, s’écroule et Médée s’envole triomphante.

Choisy, 13 juin 1763

Le lundi 13 juin 1763 est représentée sur la scène du château de Choisy, devant le Roi et la Reine, une tragédie lyrique de Jean-Benjamin de Laborde, sur un livret en trois actes de Pierre Laujon. Un ballet-pantomime, Médée et Jason, y est inséré dans le second acte. La tragédie et le ballet seront repris à l’Académie Royale de Musique le mardi 11 décembre 1770 (cf. ci-après). Il ne s’agit pas proprement du ballet de Noverre, dont le nom n’est mentionné nul part, mais d’un arrangement sans doute inspiré par Gaëtan Vestris (qui n’est que danseur à Choisy mais qui est lui-même le chorégraphe en 1770), si l’on en croit une lettre de Diderot publiée dans la Correspondance littéraire, philosophique et critique du baron Grimm , à propos de la reprise de 1770: « On donna le 11 décembre dernier, sur le théâtre de l’Opéra, la première représentation d’Ismène et d’Isménias, tragédie lyrique en trois actes, tirée en partie du roman grec de ce nom par M. Laujon, secrétaire des commandemens de monseigneur le comte de Clermont, prince du sang. Je conviens que je n’ai rien compris au poëme de M. Laujon, et que je n’ai eu nulle envie d’y rien comprendre. Il a été musiqué par M. de La Borde, premier valet de chambre du roi, amateur et garde-magazin de doubles croches suivant la cour. Cet opéra a fait fortune par le ballet de Jason et Médée qu’on y a cousu, non tel qu’il a été donné à Vienne par les soins de Noverre, mais tel qu’il a pu être imité par Vestris qui a dansé à Vienne dans ce ballet de Noverre. Il fallait en conserver au moins la musique qu’on dit superbe ; mais M. de La Borde a mieux aimé y substituer la sienne sans génie et sans goût.… »
Par ailleurs Catherine Mercier a montré la grande similitude des partitions de Rodolphe pour Stuttgart avec celle de La Borde, qui laisse penser que Vestris rapporta la partition de Stuttgart, et la transmis à La Borde qui la raccourcit et l’adapta à ses propres moyens.
Si la chorégraphie fut, semble-t-il, relativement éloignée de celle qu’offrit Noverre à Stuttgart, il nous a semblé intéressant de garder cette production, cette imitation du ballet de Noverre, dans notre corpus, afin d’inclure à notre étude les costumes fournis par Boquet pour les mêmes sujets, et la même intrigue, seulement quatre mois après son passage à Stuttgart.

Sources critiques

Nous pouvons citer à nouveau Le Mercure de France, du mois de janvier 1771 : « Ce qui a été dit de cet Ouvrage dans le Mercure de Juillet 1763, faisoit bien présumer de sa réussite, qui est aujourd’hui constatée par la manière dont le public a suivi ses représentations. Les décorations, les habits et l’exécution de cet Opéra, sont autant de nouvelles preuves de l’attention que les Directeurs ne cessent d’avoir à tout ce qui peut contribuer à la magnificence de ce spectacle et à la satisfaction des Auditeurs. Azaris, Roi d’Euricome, représenté par M. Gelin ; Ismenias, envoyé des Dieux, par M. le Gros, et Thémisthée, père d’Isménias, par M Larrivée, sont trois principaux rôles que ces Acteurs ont rendus avec le succès dont leurs talents sont assurés. Mlle Beaumenil n’a pas moins réussi dans le rôle d’Ismène, Princesse d’Euricôme. Le rôle de la Prêtresse de l’Indifférene au second Acte, a été chanté par Mlle Rosalie, ainsi que celui de l’Amour au troisième Acte, successivement avec mlle Châteauneuf ; l’une et l’autre y ont reçu des applaudissemens mérités. Mlle Vincent a fait plaisir dans les deux airs de Bergère du même Acte. Le Ballet du premier Acte, par M. Gardel, est le premier de sa composition qui ait été présenté au public ; on y a trouvé beaucoup d’art et de génie dans les différents groupes, un beau dessein dans les figures, et les pas réglés d’une mannière qui prouve que M. Gardel joint à la perfection du talent de la danse, celui de la musique, si essentiel à la composition des Ballets, qu’il est, pour ainsi dire, indispensable. Le Ballet dramatique de Jason et de Médée au second Acte, est amené pour présenter à Ismène et à Isménias une image des suites funestes de l’amour. Les principaux personnages, savoir Jason (M. Vestris) Médée ( Mlle Allard), Créuse ( Mlle Guimard), sont chacun dans leur caractère d’une expression qui étonne. La Jalousie, la Vengeance et le Désespoir, figurés par Mlles Peslin, Asselin et M. Dupré, les trois Divinités infernales qui apportent à Médée le Fer, M. Delaistre, le Feu, M. Leger, le Poison, M. Rogier, forment une scène dont le tableau est du plus grand effet. Il a, dit on, été vu dans les cours étrangères. Mais bien postérieurement à l’idée qu’avoit eu le charmant Auteur de Daphnis et Cloé, d’Eglé et de Silvie, de l’annexer à cet Ouvrage et de l’introduire sur la scène, puisqu’en 1755 la musique de cet Acte du Ballet pantomime fut répétée à Paris, et en 1763, l’Opéra fut donné à Choisi devant leurs Majestés, avec le même Ballet, dont M. Vestris a très bien saisi l’historique et l’esprit en le remettant au théâtre. Il n’a pas moins ingénieusement composé le Ballet du troisième Acte ; la disposition des divertissemnets de Bergers et de Bergères, de Pastres et de Pastrourelles et des Peuples, termine l’Opéra d’une manière très agréable… »

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Table des matières
Résumé 
Remerciements 
Table des matières
Introduction 
A. Contexte d’une création. L’esthétique dramatique au siècle des lumières
I. Une création à la cour de Wurtemberg
a) Rayonnemnent français à la cour de Wurtemberg
b) Jean-Georges Noverre (1727-1810)
II. Esthétique dramatique au siècle des lumières
a) Définition
b) Les théories de Noverre
c) Noverre et la réforme du costume : sa théorie, sa place parmi les « réformateurs », héritage et postérité
III. Louis René Boquet
B. Le ballet Médée et Jason : description des sources corollaires aux dessins 
I. Stuttgart, le 11 février 1763
a) Livret, Archives de Stuttgart, cote A 21 638
b) Fortune critique
II. Choisy, 13 juin 1763
a) Livret : Bibliothèque Musée de l’Opéra, cote : livret 14384
b) Fortune critique
c) Archives des Menus-Plaisirs
III. Académie Royale de Musique, 11 décembre 1770
a) Livret : Bibliothèque Musée de l’Opéra, cote livret 18 386
b) Sources critiques
c) Archives de l’Opéra
IV. Versailles, 23 décembre 1775 et Académie de Musique, 26 janvier 1776
a) Livret : Bibliothèque municipale de Versailles, cote : Anc. Rés. D 536
b) Sources critiques
V. Vienne, Kärntnertortheater, printemps 1776
VI. Paris, Académie Royale de Musique, 30 janvier 1780
a) Livret : Bibliothèque Musée de l’Opéra, cote Liv. 18441
b) Sources critiques
VII. Paris, Théâtre de la République et des Arts, 22 germinal an XII (12 avril 1804)
a) Livret : Bibliothèque-Musée de l’Opéra, cote liv. 19 316
b) Archives de l’Opéra
VIII. Les dossiers de candidature de Noverre : les manuscrits de Varsovie et de Stockholm
C. Le travail de Louis-René Boquet : présentation générale du corpus de dessins 
I. Bibliothèque Nationale de France, dessins du département des Manuscrits
II. Bibliothèque-Musée de l’Opéra
III. Musée des Arts-Décoratifs de Paris
IV. Angleterre, Waddesdon Manor
V. Bibliothèque de l’Université de Varsovie
VI. Stockholm, Bibliothèque Royale de Suède
Conclusion 
Table des Annexes
Références
I. Sources manuscrites
a) Varsovie, Bibliotecka Uniwersytecka, Gabinet Rycin
b) Archives nationales
c) Stuttgart, Landesarchiv Baden-Württemberg – Archives du Land de Bade-Wurttemberg Hauptstaatsarchiv
d) Stockholm, Kungliga Biblioteket /Bibliothèque Royale de Suède
II. Sources imprimées
III. Bibliographie
IV. Expositions
V. Sources électroniques

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