Le transfert des apprentissages

Orthographe et dictée

L’orthographe française a vécu un certain nombre de remaniements et aujourd’hui, quelques problèmes persistent, nous allons voir ici lesquels et pourquoi.

a) L’orthographe Selon Hubert Joly, « avant le français, la langue latine a été largement utilisée et diffusée, pour petit à petit laisser s’imposer la langue française avec toutes ses complexités»1. Cette langue française se veut très opaque : la façon dont on écrit la langue ne correspond que peu à la façon dont on la prononce, d’où cette complexité. Entre les années 1650 et 1835, les français ont assisté à de nombreux changements orthographiques. En 1990 apparaît une réforme de l’orthographe qui autorise quelques petites simplifications dans l’écriture. L’Etat français encourage alors cette diffusion des Rectifications de 1990 et permet de réduire ainsi l’opacité de la langue française. Cependant comme l’affirme Fayol et Jaffré dans leur ouvrage Orthographier (2008, p. 113), « l’histoire de la langue française et de son orthographe n’est pas un long fleuve tranquille »… Aujourd’hui, la langue française semble faire partie des langues les plus difficiles au monde, notamment concernant son opacité, et ceux qui l’apprennent en font rapidement l’expérience. « Comme elle est d’une complexité indiscutable, la maitrise de l’orthographe se pare d’un grand prestige et le brillant orthographieur est fêté en France comme un sportif de haut niveau » (Manesse & Cogis, 2007, P.23). Cette citation met en lumière la place que l’orthographe a dans notre société actuelle et nous montre à quel point il est complexe de maitriser parfaitement celle–‐‑ci. Nos élèves ne sont malheureusement pas épargnés par cette difficulté, d’autant plus que l’école offre une place tout aussi primordiale à l’orthographe française. « Une bonne orthographe incarne le respect du bien commun, à l’égal de la politesse, du bon goût ou d’autres qualités du vivre–‐‑ensemble ; si sa maitrise est signe de distinction, son ignorance, patente dans les écrits les plus répandus, est un témoignage qui engage des jugements bien au–‐‑delà de l’orthographe à proprement parler : une personne qui a une mauvaise orthographe court le risque de n’être pas estimée fiable» (Ibid., p.23).

C’est dire si les enseignants doivent tout mettre en oeuvre pour permettre à leurs élèves de comprendre et de progresser en orthographe, faute de quoi les jugements sociaux à leurs égards pourront être négatifs. Mais une personne dont les connaissances orthographiques sont moindres est–‐‑elle vraiment une personne ignorante, et non fiable? Il est vrai que des études ont démontré une baisse du niveau orthographique chez les élèves français depuis les années 80 (voir par exemple Manesse & Cogis, 2007). En effet, Chervel (2008) dénonce cette considérable baisse du niveau scolaire en orthographe, due principalement aux fautes de grammaire. On constate d’une manière générale un retard de deux années scolaires dans l’acquisition de l’orthographe. Il est intéressant de comprendre pourquoi une telle baisse est observée. L’orthographe occupe–‐‑t–‐‑elle la même place à l’école de nos jours qu’elle ne l’occupait il y a une vingtaine d’années ? La réponse est non, et de nombreux auteurs l’ont d’ailleurs déploré. « Pire encore, en 2005, on apprend moins d’orthographe entre le CM2 et la troisième que ce n’était le cas en 1986–‐‑1987 » (Ibid., 2008, p.65). L’orthographe n’aurait alors plus la même priorité à l’école qu’avant, les horaires à disposition pour le travail de l’orthographe auraient sensiblement diminué au profit d’autres disciplines qui étaient absentes auparavant. La première réforme à mettre en place de nos jours serait–‐‑elle de redonner à l’enseignement de l’orthographe une place plus grande qu’elle ne l’a aujourd’hui, tel que le proposent Fayol et Jaffré (2013) ?

b) La dictée Les tous premiers exercices d’orthographe apparus en France ont été développés au début du XIXème siècle. Il s’agissait de la cacographie (Brissaud & Cogis, 2011), exercice qui consistait à corriger des erreurs d’orthographe introduites délibérément dans un texte. Cette méthode permettait aux élèves d’être en activité et les rendait curieux. Suite à la cacographie, sont apparues les premières dictées qui se sont généralisées en France dans les années 1850. Celle–‐‑ci est devenue l’emblème de l’apprentissage de l’orthographe à l’école et elle y occupait une place prédominante. Au XXème siècle, les certificats d’études au primaire comportent systématiquement une dictée. Jusqu’au milieu du XXème siècle, les élèves doivent réussir leur dictée pour espérer accéder à l’enseignement secondaire. Comme le stipulent Brissaud et Cogis (op.cit., p115) : « on comprend mieux le prestige légitime de la dictée et sa place prépondérante à l’école primaire ». Voici la dictée belle et bien ancrée dans les apprentissages scolaires, pour ne plus en sortir, au point que de nos jours encore, elle est omniprésente dans les classes et sous différentes formes. Elle a donc encore de beaux jours devant elle, même si elle a été et sera encore critiquée. Brissaud et Cogis (2011) montrent leur mécontentement face au fait qu’on se borne à utiliser la dictée telle qu’il y a une centaine d’années. Selon eux, les époques changent, la dictée doit elle aussi évoluer : « toucher à la dictée reviendrait pour beaucoup (…) à vouloir signer l’arrêt de mort de l’orthographe, voire de la langue française. Il faut sortir de cette croyance absurde, de ce véritable enfermement de la pensée» (p.121).

Alors certes, elle parait aujourd’hui intouchable dans les écoles, mais Brissaud et Cogis proposent d’en modifier son enseignement et sa forme à travers des pratiques novatrices. La dictée est présente actuellement à l’école sous différents aspects et de nombreux enseignants se la sont appropriée pour tenter de l’adapter à leur public d’élèves. Face aux nombreuses difficultés qu’ont les élèves et face à la complexité de la langue française, il semble aujourd’hui nécessaire et indispensable d’utiliser la dictée à bon escient. Il ne s’agit donc pas de « jeter la dictée aux orties » selon les mots de Brissaud et Cogis (Ibid., p.22), mais « s’en tenir à la dictée classique risque d’isoler l’orthographe 12 dans l’esprit des élèves ». Et il semblerait que ce ne soit pas l’objectif de l’école de relier l’orthographe à l’exercice « dictée ». Ce phénomène est d’autant plus juste que la dictée traditionnelle met en avant un système de notation trop stricte pour des élèves en difficulté, qui ne voient que leurs nombreuses erreurs, synonyme de démobilisation et d’image de soi négative.

a) L’atelier de négociation graphique

Ce dispositif didactique centré sur l’apprentissage de l’orthographe peut être retrouvé dans les ouvrages sous différentes appellations, mais le contenu est en majeure partie identique : Brissaud et Cogis (2011) avec le terme « phrase du jour » ; Ghislaine Haas et son « Atelier de Négociation Graphique ou ANG » ; Morag L. Donaldson (cité par Brissaud et Cogis (2011) et « Entretiens meta–‐‑graphiques » ; « ateliers d’écriture » pour Jean–‐‑Pierre Jaffré (2008), etc. L’atelier de négociation graphique que je vais expliciter ci–‐‑ après est le dispositif mis au point par l’équipe de Haas, étudié dans le sillage des travaux d’Émilia Ferreiro. Dès à présent, j’utiliserai le terme d’ANG. Selon Haas et Lorrot, dans les ateliers de négociation graphiques, « la maitrise du fonctionnement de la langue s’installe dans une démarche personnelle de l’enfant, engagée par un processus de raisonnement, souvent lent et difficile tant l’objet auquel il s’applique est complexe. » (1996, p.167). Ces ateliers offrent la preuve aux enseignants que les élèves ont les capacités pour s’engager dans un raisonnement métalinguistique, chose que les enseignants ont de la difficulté à percevoir. Il est intéressant de voir de même à quel point les élèves y prennent un réel plaisir. 23 «En écoutant les élèves parler d’orthographe, de leur raison d’ajouter un graphème, d’en supprimer un autre, en les écoutant faire part de leurs doutes, de leurs perplexités devant certains paradoxes, on découvre qu’ils ont des savoirs insoupçonnés, une grande capacité à réfléchir sur leur langue et, bien souvent, une grande curiosité par rapport à la chose orthographique» (Brissaud & Cogis, 2011, p 45).

Je développerai dans la partie pratique de ce travail le déroulement de ces ANG. Argumentation, échange, dialogue, justification, sont les maitres mots de ces activités métagraphiques et permettent aux élèves de réfléchir sur leurs propres connaissances et surtout d’apprendre de leurs camarades. Tous les élèves sont concernés par l’activité, qu’ils soient doués ou non en orthographe : chacun a à apprendre de l’autre. Pour Brissaud et Cogis (2011, p.63), les ateliers de négociation graphique sont « des modalités d’aide qui favorisent la réflexion et le raisonnement et qui n’oublient pas la prise de parole des élèves les moins avancés ». Haas souligne la permission de raisonner, d’argumenter, même de manière hésitante (actions que trop d ‘élèves s’interdisent de faire dans un contexte ordinaire). Willemin (2009), précise que « les objectifs des ateliers de négociation graphique sont de dédramatiser la réalisation d’erreurs, de déculpabiliser les enfants et de les aider à prendre conscience de leur raisonnement orthographique, à le construire, ceci afin de leur permettre de transférer leurs acquis orthographiques dans le cadre de leurs pratiques d’écriture » (p.8). Selon Haas (1996), l’élève s’investit dans une tâche orthographique grâce à l’interaction entre les savoirs linguistiques et la réflexion de l’élève. Cet investissement est source de compétences qui donnent à ce dispositif toute son efficacité.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
II. PROBLÉMATIQUE
1. Importance de l’objet
2. Questions de départ
3. Cadre théorique
A. Orthographe et dictée
B. Métacognition et motivation
C. Métaréflexion et orthographe
D. Le transfert des apprentissages
4. Questions de recherche
5. Hypothèses
III. METHODOLOGIE
IV. ANALYSE ET RESULTATS
1. Première Phase: Etat des lieux
A. L’enseignant titulaire
B. Les deux élèves: Roméo et Francis
C. Mère de Roméo
2. Deuxième phase phase-­‐‑action
A. Le travail en soutien spécialisé ambulatoire
B. Le travail de collaboration
3. Troisième phase: quels changements observés?
A. Evolution grâceà la collaboration
B. Entretiens bilans
V. SYNTHESE ET DISCUSSION
VI. CONCLUSION
VII. PROLONGEMENTS
VIII. BIBLIOGRAPHIE
IX. ANNEXES

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