Le tragique en question dans Puisque mon cœur est mort de Maissa Bey

Le tragique

  Le tragique se définit comme ce qui émane de la tragédie, en tant que forme particulière du théâtre. Il est le caractère de ce qui est funeste, alarmant ou attaché à la tragédie. Un personnage tragique semble soumis au destin, à la fatalité .Il est emporté par ses passions ou subit un conflit intérieur proche de la folie.Le tragique mène le protagoniste à une fin irrévocable, contre laquelle il va lutter jusqu’au bout mais en vain. Le tragique mêle des sentiments forts et exacerbés par celui qui lutte contre son destin. La passion et la haine se confondent dans une tension qui retranscrit la menace omniprésente de la fatalité qui tombera soudainement et accomplira la destinée.Le tragique se confond alors avec la tragédie grecque, c’est à dire une pièce de théâtre dont le sujet est généralement emprunté au mythe ou à l’histoire, qui met en scène des personnages illustres et représente une action destinée à susciter la terreur et la pitié par le spectacle des passions et des catastrophes qu’elles provoquent.

La tragédie

   Selon Larousse,« Une tragédie développe généralement une action mettant en scène des héros ou des personnages de rang social élevé en vue d’émouvoir et d’instruire le spectateur, provoquer sa terreur et sa pitié par le spectacle des passions humaines en lutte entre elles ou contre le destin » L’identité entre tragique et tragédie se maintient jusqu’à la fin de la mode de la tragédie classique connue au XVII siècle qui, dans une écriture spécifique, reprend, notamment chez Corneille et Racine, les sujets des tragédies antiques. Pour notre part la définition qui nous convient est la suivante : « Est tragique tout ce qui montre à l’homme qu’il ne peut pas contrôler sa vie » Le tragique surgit comme dans Puisque mon cœur est mort pour bouleverser la vie des personnages heureux, vivant dans l’équilibre des traditions et de la modernité,mais sont confrontés inéluctablement à la violence extrême de l’histoire de leur pays. A ce propos Alain Beretta dit : « Le tragique est défini par l’existence d’une transcendance souvent malveillante et source de catastrophes, s’exerçant contre des êtres qui voudraient ne pas avoir fait, ou ne pas faire ce qu’ils font : l’homme constate qu’il n’est pas libre. » L’œuvre de Maissa Bey témoigne de l’impuissance face à la fatalité tragique dont les tentatives d’Aïda (héros tragique) s’avèrent inefficaces. Autrement dit, le héros tragique est impuissant devant le destin tragique. «Cette liberté humaine qui cherche à s’exercer, explique A Beretta, se trouve mise en échec, car elle se heurte à une nécessité qui la dépasse, ce que les grecs appelaient fatum » . Cela veut dire que l’homme est amoureux de sa liberté, et cette dernière ne rime toujours pas avec la fatalité si bien qu’on soit dans une impasse et qu’on comprenne ce rapport conflictuel qui lie l’homme avec cette instance supérieure à qui le dernier mot revient toujours. Autrement dit, les personnages du roman tragique sont comme ceux d’une tragédie antique : ils sont condamnés dès le début à mourir. Ainsi,ils peuvent à leur tour être tragiques au même titre que ceux d’une pièce théâtreale tragique.

La fatalité

   La fatalité est le caractère de ce qui est inéluctable. Elle se différencie du fatalisme qui est un trait négatif dans certaine religions même s’il est issu de la même racine fatum en latin. La fatalité est souvent associée au « Dieu »et au « Ciel » dans les œuvres tragiques telle Phèdre de jean racine : autrement dit, c’est ce que l’homme ne peut pas éviter (la mort). Par exemple, l’expression « c’était fatal » signifie c’était prévu , « cela devait arriver » « D’une manière ou d’une autre, le tragique se manifeste toujours par les effets néfastes d’une force supérieure à l’homme, contre laquelle il reste impuissant et qu’on peut résumer par le mot fatalité ».

La culpabilité

   Quand la conscience devient fautive à cause d’une transgression d’un devoir, c’est-àdire « c’est la surprise de la conscience, après l’action » « Heidegger fait de la culpabilité un « existential », c’est-à-dire une détermination fondamentale de notre être, de sorte que c’est cette culpabilité originaire et irrémédiable qui est la source de nos fautes »

La Haine

   « Est une hostilité très profonde, une exécration, et une aversion intense envers quelqu’un ou quelque chose ». Ce sentiment venant du plus profond pousse l’homme à commettre les choses les plus atroces. On peut citer l’exemple de la mort dans notre roman : Aida dit dans son journal : « je sais maintenant qu’il faut haïr pour vouloir tuer »

La mort

  La mort est « un risque ou tout est risqué, risque essentiel ou l’être est en jeu, ou le néant se dérobe, ou se jouent le droit, le pouvoir de mourir » L’écriture de Maissa Bey dans Puisque mon cœur est mort nous transmet et nous fait vivre le tragique. La mort est partout, elle traverse de bout en bout le roman .Cet élément déclenche et donne naissance aux autres composantes du tragique qui vont nous transmettre la douleur et le malheur que vit Aïda.La représentation de la mort dans Puisque mon cœur est mort est l’élément à travers lequel Maissa Bey rend hommage à tout les algériens qui ont vécu le drame des années quatre-vingt-dix d’une manière générale et les femmes en particulier. Si Aïda parle à son fils de la mort dans son journal, c’est par ce qu’elle veut faire vivre l’être cher dans sa pensée et le sentir à ses côtés. Il s’agit d’une autre manière de conserver son souvenir de lui. Les thèmes tragiques ont évolué dans l’histoire de la littérature, en fonction des genres et des mouvements. Le roman représente souvent les passions humaines dans leurs déchainements, le héros est victime de la violence de son propre sentiment qui le prive de liberté et l’entraine dans des choix destructeurs. Les dramaturges et romanciers soulignent l’engrenage fatal des passions, des ambitions, de l’amour, de jalousie, de la haine, de la vengeance, etc.

La solitude dans Puisque mon cœur est mort

  Aïda souffre de la solitude à cause du malheur qui surgit soudainement dans sa vie (la perte de son fils) à cause du pouvoir de l’époque où l’Algérie vivait en danger, voire une époque très critique de son histoire, celle d’une guerre civile particulièrement violente qui a causé un nombre inimaginable de victimes.La solitude de Aïda est liée à l’événement tragique qui a envahi sa vie, cette souffrance est exprimée tout au long de son journal et à deux moments précis de sa journée qui sont la nuit et le moment du diner : « la nuit,dit-elle, enfante la solitude » « Les moments les plus difficiles, continue-t-elle, le sais-tu ? Sont ceux que je passe dans la cuisine.je ne parle pas des quelques minutes qui me sont nécessaires à présent pour préparer un repas.je parle des moments où je dois affronter la solitude. Manger seule. » Aïda dans ce cas trouve difficile le fait de se déshabiller des gestes quotidiens, c’est-à-dire elle trouve difficile le fait de sortir du placard un seul verre, une seule assiette … sachant qu’avant elle faisait sortir machinalement deux assiettes, deux verres, etc. On peut comprendre l’état d’Aïda, son malheur et surtout son isolement. Elle refuse de communiquer avec qui que ce soit. Cet isolement ou le repli sur soi porte l’emprunte de la culpabilité tragique parce qu’elle croit être la cause de l’assassinat de son fils. Elle diffère des autres femmes de son époque. En témoigne sa tenue vestimentaire (elle porte des pantalons, marche tête découverte) et le commentaire fait par Aïda pendant un cours portant sur le caractère privé de sa relation avec Dieu. Alors, on déduit par là l’isolement de notre personnage tragique qui devient synonyme de souffrance.Son isolement apparaît dans le fait qu’elle veut rester seule avec son fils, le rejoindre à travers le journal qu’elle a décidé d’écrire, pour dire sa souffrance qui représente une accumulation de malheurs et de haine, une autre manière de sentir sa présence qu’elle commente ainsi : « Je t’écris parce que j’ai décidé de vivre.de partager avec toi chaque instant de ma vie, je t’écris pour défier l’absence et retenir ce qui en moi demeure encore présent au monde » « La solitude est mon horizon » , poursuit-elle. Cette solitude est le résultat du tragique, autrement dit Aida est condamnée à cette solitude, à continuer sa vie seule.

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Table des matières

Première partie : Du tragique individuel au tragique national
– Introduction
I-Concepts clés
I-1Le tragique
I-2La tragédie
II-Aspects du tragique
II-1La solitude
II -2la culpabilité
II -3La fatalité
II -4Destin
III- Repères extratextuels
III-1 L’horizon d’attente
III-3 La réception
IV L’étude du paratexte
IV-1 Le paratexte
IV-2 Etude de la première de couverture
IV-3Le cœur du texte
IV-4L’étude de la quatrième de couverture
V-L’étude sémiologique du personnage
V-1 Qu’est ce qu’un personnage ?
V-2 Les itinéraires des personnages
V-4 Le langage des personnages
Deuxième partie : Vers une poétique du tragique
Introduction
I/ L’intertextualité
I-1La poésie
I -2 L’oralité
I -3Religion et légende
II/ L’onirisme transcendantal
II-1Le silence
II-2Le mnésique
II-3Le rêve
II-4Le tropisme
III/ Elément d’une poétique du tragique
III-1/Le journal intime
III-2/L’épistolaire
III-3/Le dialogue
III-4/Le monologue intérieur
IV/Des espaces euphoriques aux espaces tragique
IV-1L’espace
IV-2 La transgression des interdits
Conclusion

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