Le soutien économique du Canada à l’industrie minière 

L’accompagnement dans la résolution de conflits : De la théorie à la pratique

La « théorie de la résolution de conflit » découpe les conflits en plusieurs cycles avec des séquences bien identifiables qui appellent à chaque fois une réponse bien définie, avec des acteurs de la communauté internationale bien ciblés. Les séquences qui nous intéressent ici sont l’éclatement et la désescalade du conflit, le processus de paix, et de reconstruction post conflit.
C’est en 1992, que Boutros Boutros Ghali, alors secrétaire des Nations-Unies a clarifié les opérations de maintien de la paix avec une typologie spécifique, distinguant les opérations de : peacekeeping, peacemaking, peacebuilding et peace enforcement.
Les opérations de peacekeeping émergent généralement pendant le conflit. Elles ont une fonction minimaliste, qui correspond généralement à un appel au cessez-le-feu.
Les opérations de peacemaking sont déployées pendant la période de désescalade du conflit et du processus de paix. Elles correspondent à une médiation de la part des Nations-Unies, et à une période de négociations, qui a une vocation résolutoire du conflit. C’est aussi à ce moment, que l’on procède au rapatriement des populations qui ont subi l’exode, ou des déplacements massifs. Ces opérations entrainent bien souvent l’intervention de tous les acteurs (ONU, ONG…).
Les opérations de peacebuilding ont pour objectif initial d’éviter que l’État ne rebascule dans une période de conflit. Ces dernières correspondent à une assistance à la transition démocratique, et à la reconstruction économique, à la réhabilitation des infrastructures et des logements, au déploiement d’une aide humanitaire, et à la construction d’une mémoire collective et sociétale. C’est à cette étape que les accords de paix sont généralement signés, et que l’on organise des élections libres, encadrées et surveillées par la communauté internationale. De nouvelles réformes sont alors mises en place afin de restructurer la société civile. Pour Béatrice Pouligny cette assistance pose souvent des questions sur la souveraineté des États, car elle correspond à une « intervention des Nations-Unis dans le contrat social du pays », ce qui est souvent vécût comme une nouvelle forme de colonialisme.
Enfin, les opérations de Peace Enforcement s’effectuent uniquement si la paix n’est pas effective, donc pendant le conflit. Dans ce cas, on arrive à contraindre les acteurs d’arrêter les violences par le déploiement de troupes sur le terrain pour faire interposition, conjointement à un processus politique et diplomatique de médiation. Cependant, ce genre d’opération soulève des questions, notamment sur le fait que l’ONU n’est qu’une organisation de paix, et déployer dans de tels conflits ouverts une intervention armée pose donc les limites de la politique des Nations-Unies en termes de doctrines, mais aussi de moyens armés. Donc dans un contexte de conflit non résolu, l’ONU est finalement très mal équipée pour un règlement du conflit. Les Nations-Unies n’ont pas le mandat pour se permettre d’une opération « musclée », où de contrôler des bavures, comme ce fût le cas en Irak en 2003 avec l’intervention des États-Unis. Dans le cas du Guatemala, la mission de vérification des Nations-Unies au Guatemala (MINUGUA) initiée le 28 septembre 1994 suites aux recommandations du secrétaire général devient en 1997 par l’adoption du Conseil de Sécurité de l’ONU de la résolution 1094, une opération de maintien de paix. Initialement conçue pour mener des activités de vérification des institutions guatémaltèques responsables de la protection des droits humains à travers le pays , la MINUGUA a élargi son mandat avec la vérification du respect des accords de cessez-le-feu signé le 4 décembre 1996 par l’État guatémaltèque et l’Unité révolutionnaire nationale guatémaltèque (cessation des hostilités, démobilisation des combattants, désarmement…). Ainsi, cent-cinquante-cinq observateurs militaires ont été déployés sur place afin de vérifier le cessez-le-feu. La MINUGUA offrira même par la suite, de l’accompagnement afin de prévenir les abus.
Initialement prévue pour une durée de trois mois, la mission de la MINUGUA se terminera finalement le 31 décembre 2004. Cette mission a permis de porter la voix du Guatemala et de ses enjeux dans les arènes des Nations-Unies.
Si les missions et opérations de la paix semblent être fortement corrélées aux actions de l’ONU et de la communauté internationale, de nombreux auteurs ont tenté de placer parmi ce processus l’accompagnement international.
Pour beaucoup, l’accompagnement international serait une partie intégrante du processus de peacekeeping, d’accompagnement des victimes lors du cessez-le-feu. Ce fut ainsi le cas, lors du déploiement d’accompagnateurs internationaux lors du retour des réfugiés guatémaltèques dans les années 1990.
Néanmoins selon L. Mahony et L-E. Eguren, il ne faut pas réduire l’accompagnement qu’au seul processus de peacekeeping, car l’accompagnement reste plus un outil mis à disposition aux acteurs lors du conflit. Dans ce sens, il traverse ainsi toutes les étapes des opérations de maintien de la paix. L’accompagnement international à toute son importance dans le processus de peacemaking, car il permet d’instaurer un dialogue entre les victimes et les commanditaires. Sur le long terme, le fait d’accompagner procure un appui moral et encourage la poursuite des activités démocratiques, et permet donc une émancipation relative de la société civile. Il constitue en cela un aspect important du processus de peace building.

L’accompagnement international dans le cas du retour des réfugiés guatémaltèques

L’accompagnement international comme outil de construction de la paix peut-être analysé au travers du retour des réfugiés guatémaltèques dans les années 1990. Cet accompagnement déployé dans un contexte de post-conflit, a eu pour principale conséquence, l’institutionnalisation de l’accompagnement, le rendant plus légitime à l’échelle nationale et internationale.
Le Mexique a connu dans les années 1980 un exode massif de réfugiés guatémaltèques qui tentaient de fuir le conflit civil avec son lot de massacres, de tortures et d’assassinats au Guatemala voisin. Suite aux critiques de la communauté internationale, le gouvernement mexicain bien que peu préparé à accueillir ces populations – bien souvent malades, affaiblies par le déplacement, pauvres et traumatisées par les évènements violents qu’elles avaient subis – a dû s’organiser. Plusieurs camps ont donc été établis dans les régions pauvres du Chiapas, de Campeche, et de Quintana Roo.
Conscients des enjeux que représente leur retour, les réfugiés guatémaltèques ne souhaitent pourtant pas connaître l’expérience malheureuse connue par les réfugiés salvadoriens quelques années plus tôt. Pour éviter cela, ils s’organisent rapidement, bien que les conditions de vie soient difficiles, et préparent un jour un retour volontaire et collectif au Guatemala.
D’abord, exclus du processus de négociations par le gouvernement mexicain de Miguel de la Madrid et le gouvernement guatémaltèque de Vinicio Cerezo Aréval, les réfugiés écrivent en juillet 1986 une lettre ouverte aux instances internationales afin de demander publiquement leur pleine intégration aux processus de discussions.
En 1987, une Commission Permanente des Réfugiés Guatémaltèques au Mexique est créée regroupant des représentants de chaque camp démocratiquement élus.
Les réfugiés guatémaltèques ont ainsi été les premiers réfugiés à négocier et établir les conditions de leur propre retour, en exposant en 1988, six conditions de dignité et de sécurité : le droit de rentrer au Guatemala de manière volontaire, et collective, le droit de reprendre possession de leurs terres, la liberté d’association, la liberté de mouvement à l’intérieur et à l’extérieur du pays, le droit à la vie et à l’intégrité personnelle et communautaire, et le droit d’être accompagné pendant le processus de retour par des groupes nationaux et internationaux.
Malheureusement, ce ne fut que le début d’un long processus de négociations entre les parties contractantes, causé par la réticence du gouvernement guatémaltèque, notamment concernant la question de l’accès à la terre, de la démilitarisation, et de l’accompagnement international.
Sur ce dernier point, si l’accompagnement était vu par les réfugiés comme un gage de protection à leur retour dans des communautés affectées lors du conflit civil, cette vision n’était pas partagée par le gouvernement. « Lors du retour des réfugiés, il y a eu un appui très grand de la communauté internationale (HCR, ONU…). L’accompagnement était nécessaire, car les populations étaient fragilisées par le conflit civil. Les gens avaient peur de rentrer au Guatemala, certains enfants réfugiés avaient d’ailleurs plus l’accent mexicain que guatémaltèque, certains sont nés dans les camps et n’ont jamais vu le Guatemala… et puis il y avait des tensions entre communautés, car ceux qui revenaient étaient considérés comme faisant partie de la guérilla. C’était donc des personnes fragilisées qu’il était nécessaire d’accompagner. »

Entretien Steven Kaal

Pour l’État et l’armée guatémaltèques, l’accompagnement sans contrôle de leur part pouvait être une façon d’alimenter la guérilla au nord du pays, en facilitant le transfert logistique de matériel et d’armes, mais permettait aussi de véhiculer une mauvaise image à l’international du gouvernement et de ses politiques.
Même, le HCR voyait l’appel à d’autres organisations de la part d es réfugiés, une remise en cause directe de la légitimité de son mandat et de son action. Finalement, ces pressions n’ont qu’alimenté de façon plus forte et plus accentuée la volonté des réfugiés d’être accompagné par des organismes non gouvernementaux. Au vu de la lenteur, et des blocages des discussions, un Groupe International pour la Consultation et le Support du Retour des Réfugiés (GRICAR) est créé en février 1992. Composé de représentants des ambassades canadienne, mexicaine, française, suédoise, du conseil mondial des agences volontaires, et du conseil international des églises, le GRICAR a redonné un coup de fouet aux négociations.
Ainsi, un accord de principe sur la disposition d’accompagnateurs et d’observateurs internationaux fût signé en mars 1992, même si le gouvernement guatémaltèque maintenait sa position de vouloir contrôler le processus et le choix des ONG participantes.
Près de cinq ans après le démarrage des négociations, un accord est finalement signé le 8 octobre 1992, et pour la première fois le gouvernement guatémaltèque reconnaît le rôle et l’existence des organismes d’accompagnement.
« Accompaniment for the Return is understood to mean the physical presence of the Human Rights Advocates, the Church, the UNHCR, and the international consultation and support group for the return (GRICAR), as per their respective mandates, as wall as governmental and non governmental international organizations, governmental and non governmental national organizations, governmental and non governmental religious or lay national and foreign organizations, and individuals, in the stages of the journey, resettlement, and the reintegration of the returnees » Plusieurs organismes se mobilisent pour organiser l’accompagnement du retour des réfugiés : les Brigades de paix, Witness for Peace, des organismes européens (France, Espagne, Norvège Danemark…).
C’est à ce moment-là que se forme le Projet Accompagnement composé d’un réseau d’organismes de solidarité canadiens. Sa mission est de fournir une présence internationale durant les trois étapes du retour des réfugiés : dans les camps de réfugiés au Mexique, lors du déplacement en direction du Guatemala, et dans les communautés nouvellement établies.
La naissance informelle du PA se retrouve dès la création en 1989 du Comité de coordination de réseau du Guatemala, composé d’Oxfam, du CUSO international, de l’organisation catholique canadienne pour le développement et la paix, et de l’Eglise unie du Canada. Ce comité avait pour ambition de développer et coordonner une réponse canadienne à la situation des réfugiés guatémaltèques au Mexique, en renforçant et consolidant notamment les liens entre les différents organismes de solidarité au Canada. Un an après, une délégation canadienne est créée afin d’analyser le contexte politique, social et économique des réfugiés, ainsi que les enjeux qui tournent autour de la question de leur retour. Le partage d’expériences de plusieurs volontaires, ainsi que l’ambition de coordonner le réseau canadien de solidarité pour le Guatemala, donne naissance au PA.
La volonté initiale du PA est précise, il souhaite apporter un support non seulement financier, mais aussi et surtout politique, spirituel aux réfugiés guatémaltèques par la présence d’accompagnateurs canadiens à leurs côtés. Pour ce faire, le PA s’engage à coordonner plusieurs organismes en solidarité avec le Guatemala pour soutenir les réfugiés dans ce long et lent processus de retour. Au nord, une recherche de financement est effectuée pour couvrir les coûts engendrés par le déploiement d’accompagnateurs sur le terrain . De plus, le PA s’engage à conscientiser la population canadienne sur les enjeux guatémaltèques et à mener des actions de lobbying auprès du gouvernement canadien pour appuyer le processus d’accompagnement.
Au sud, le PA déploie une équipe permanente au Mexique, qui offre un soutien logistique aux accompagnateurs et aux délégations, mais qui correspond aussi à un lien entre les réfugiés, le PA et les accompagnateurs, permettant une relation cohérente entre ces différents acteurs.
Le PA se déclare impartial, mais pourtant pas neutre. Il se voit comme un allié des réfugiés, et en faveur du respect des droits humains, de la démocratie et de la paix au Guatemala.
Le retour officiel des réfugiés s’effectue le 20 janvier 1993, près de 2 480 guatémaltèques rentrent au Guatemala, soit soixante-dix-huit bus disposant chacun d’au moins un ou deux, accompagnateurs étrangers, le tout escorté par les Nations-Unies, le HCR, Médecins Sans Frontière et le gouvernement mexicain.
Au milieu de l’année 1995, c’est plus de 11 000 réfugiés qui sont retournés dans plus de douze nouvelles communautés à Ixcán, Huehuetenango, Alta Verapaz, ou encore au Petén. Au fil de la réintégration, le nombre d’accompagnateurs diminue, mais les équipes du PA sont toujours présentes, même si l’accompagnement se voit confronté à plusieurs difficultés. « […] le processus de retour demeure complexe… et trop lent. Chaque retour est une lutte en soi. Les conflits de terre et les problèmes rencontrés lors des négociations pour l’achat des parcelles compliquent la situation […] ». Bulletin PA Juin 1995/Vol.1, No 6 Dans ce contexte particulier post-conflit et de construction de paix au Guatemala, l’analyse du mécanisme de l’accompagnement international et des acteurs sur lequel il joue un rôle dissuasif, sont faciles à comprendre. « Le retour des réfugiés s’est fait dans un contexte de baisse de tension. L’accompagnement, pour reprendre le vocabulaire des casques bleus, était effectif dans une phase d’établissement et maintien de la paix ». Entretien Laurence Guénette.
À ce moment-là, le gouvernement guatémaltèque souffrait d’une mauvaise image à l’échelle internationale, entachée par les trente-six années de guerre civile, les massacres, les disparitions forcées, l’exode massif des réfugiés guatémaltèques au Mexique voisin. Pointé du doigt par les ONG de défenses des droits humains, et par la communauté internationale, l’État guatémaltèque tentait alors de redorer son image à l’échelle internationale. Le retour des réfugiés correspondait alors soit à un moyen de prouver sa bonne volonté de faire du Guatemala un pays nouvellement « démocratique », soit à un nouveau scandale dégradant encore plus son image. De plus, le gouvernement savait que le retour des réfugiés allait apporter une aide étrangère au développement considérable, représentant ainsi une manne financière non négligeable.
Ensuite, les chaines de solidarité permettant de faire pressions étaient claires et fortes. Dans les années 1990, la défense des droits humains est menée de front par un ensemble de pays, par les instances internationales et par de nombreuses ONG.
La position du Canada était d’ailleurs très forte. Après avoir initié la création des casques bleus en 1956, le Canada s’était promu comme le défenseur des droits humains à travers le monde et a joué un rôle important au Guatemala. « Le Canada a voulu redorer son image en protégeant les droits de la personne, sans piétiner les américains qui ont toujours été leur grand allié ». Entretien Steven Kaal.
Ainsi, dans ce contexte, le calcul coût/bénéfice par les potentiels agresseurs : l’armée et le gouvernement guatémaltèque, rendait les conséquences négatives et coûts politiques beaucoup plus importants que les bénéfices. Le mécanisme de dissuasion par la présence d’étranger a donc très bien fonctionné, et finalement peu de bavures ont été rencontrées lors du retour des réfugiés Avec la fin du processus de retour, le PA a souhaité poursuivre son accompagnement international au Guatemala. Il a alors modifié son mandat initial à partir de 1996 en accompagnant désormais la société civile guatémaltèque dans sa renaissance . Au même moment, le PA pancanadien s’est officiellement dissout pour donner naissance à plusieurs organismes, dont le Projet Accompagnement Québec-Guatemala. Ce dernier se donne pour mission de « […] mener des actions de soutien à l’attention des défenseurs guatémaltèques des droits civils, politiques, sociaux, culturels et économiques, victimes d’exactions ».
L’accompagnement international est donc une forme de solidarité singulière, qu’il est nécessaire d’analyser et de comprendre avant d’être déployé sur le terrain. Porté par le mécanisme de dissuasion, l’accompagnement de volontaires étrangers auprès d’activistes qui subissent des menaces fait le pari de réduire l’insécurité de ces derniers en jouant avec le fil des pressions politiques de la communauté internationale, et de la société civile.
Si l’accompagnement peut-être vu comme un outil ayant toute sa place dans le processus de reconstruction, et de maintien de la paix, il semble que le cadre d’analyse soit différent avec le conflit minier qui s’opère actuellement au Guatemala.

Le Canada, le Guatemala et les entreprises minières : des relations de proximité

Depuis quelques années, de nombreuses entreprises, et notamment minières contreviennent aux normes des droits humains, soit en violant directement des droits fondamentaux (conditions de travail injustes, non respect des libertés…), soit en se rendant complices de violations commises par les États hôtes (recours aux forces gouvernementales pour réprimer les mouvements sociaux qui contestent les projets des entreprises…).
Dans le cas qui nous préoccupe dans ce mémoire, les entreprises minières canadiennes trouvent un soutien sans faille de la part du Canada et du Guatemala, créant de fait une relation triangulaire de proximité.
Le Canada, est souvent décrit comme un paradis pour les entreprises minières, érigé comme un lieu privilégié pour la constitution du capital de l’industrie minière mondiale. Ainsi près de 58 % des entreprises minières ouvertes du monde sont inscrites à la Bourse de Toronto (Chapitre 1). Quant au Guatemala, c’est un pays riche en ressources naturelles, et notamment en minéraux métalliques et non métalliques, qui se retrouvent principalement dans les régions montagneuses où vivent les communautés autochtones. Les minéraux non métalliques incluant le marbre, le graphite, le pétrole ou encore le sable, sont de façon générale exploités par des compagnies nationales guatémaltèques à des fins de production nationale.
Les minéraux métalliques incluant l’or, l’argent, le nickel, le cuivre, le fer et le plomb sont quant à eux exploités par des entreprises transnationales, à des fins d’exportations. (Voir annexe 1). Le Guatemala a toujours favorisé les intérêts de compagnies étrangères sur son territoire, mais cette tendance est clairement identifiable au lendemain de la signature des accords de paix de 1996 (Chapitre 2).

Le soutien économique du Canada à l’industrie minière

L’Amérique Latine correspond à la première destination pour le capital minier canadien, avec plus de deux cent trente entreprises minières canadiennes y opérant, soit l’équivalent en 2013 de près de 1500 projets miniers sur l’ensemble du territoire.
Cette expansion est la conséquence de l’expansion de ce secteur connue ces dernières années.
Le Canada s’est alors érigé comme un lieu privilégié pour les entreprises minières à travers le monde, notamment avec la mise en place de mécanisme d’appui, d’avantages fiscaux, et d’encadrement privilégiés à travers la bourse de Toronto (I). De plus, un tournant des plus inquiétants est opéré, avec l’intervention croissante de l’Agence Canadienne pour le Développement International (ACDI) dans les zones géographiques, où des entreprises minières canadiennes opèrent (II).

Mécanisme d’appui économique, incitatifs fiscaux et encadrement de la bourse de Toronto

Le Canada correspond à un paradis pour l’ensemble des entreprises extractives du monde.
Preuve de l’importance de ce secteur, en 2012, l’industrie minière contribuait à hauteur de 52,6 milliards de dollars au produit intérieur brut canadien.
Cette attraction peut s’expliquer en autre, par le fait que le Canada est un pays géologiquement riche en minéraux et métaux, et dispose d’une longue tradition minière sur son territoire. Mais la réponse se trouve aussi ailleurs. L’attraction s’explique par les nombreux avantages fiscaux, judiciaires et réglementaires mis en place par l’État canadien au début des années 1990 pour attirer les sociétés minières du monde entier.
A cette époque, le cours des métaux est en baisse sur les marchés mondiaux, l’industrie minière connait alors une chute sans précèdent de ses investissements, qui diminuent radicalement de près de moitié . Pour alléger les contraintes fiscales et redynamiser le secteur en favorisant les investissements, l’association minière du Canada, appuyée par l’industrie minière, présente en 1994 « l’initiative Whitehorse », permettant de réviser le régime fiscal et réglementaire du Canada. Tenant compte de cette initiative, le gouvernement canadien ratifie en janvier 1995, une nouvelle loi sur les ressources naturelles largement favorables aux entreprises minières.
Pour Alain Deneault, auteur de l’ouvrage « Noir Canada : pillage, corruption et criminalité en Afrique », l’identification du Canada comme plaque tournante pour les sociétés minières correspond à un réel paradoxe. En effet, d’un côté on est en présence de compagnies minières, souvent pointées du doigt, et accusées de corruption, de dégâts environnementaux, de non respect des droits humains les plus fondamentaux… De l’autre côté, on a le Canada, longtemps associé à l’image d’une démocratie solide et exemplaire, d’un pays pacifique, s’érigeant sur la scène internationale comme le défenseur des droits de la personne à travers le monde, comme indiqué sur le site internet du Ministère des Affaires Etrangères : « La promotion et la protection des droits de la personne font partie intégrante de la politique étrangère canadienne. Fervent défenseur des droits de la personne, le Canada opte pour une position de principe voulant que le respect de la liberté, de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit, valeurs qui définissent notre pays, puisse profiter au reste du monde». Malheureusement, cette image d’un Canada porteur d’idéaux est largement entachée depuis quelques années déjà, et notamment par la promotion et le soutien inconditionel du gouvernement au secteur minier.
Plusieurs raisons font donc désormais du Canada la plaque tournante des industries minières du monde, « paradis réglementaire et fiscal de l’activité minière ».
Alain Deneault observe six raisons principales expliquant ce statut off-shore. Tout d’abord, les modalités d’action prévues dans le cadre de la loi, facilitent l’augmentation de la valeur du gisement minier par les acteurs-propriétaires. En effet, il est plus aisé de divulguer sur les marchés financiers les informations des industries minières afin de générer de la spéculation. Pour ce faire, la bourse de Toronto n’encadre pas ces spéculations de façon rigoureuse. Disposant d’une expertise financière, juridique et technologique, la bourse torontoise propose des coûts d’inscription relativement bas, n’exige que très peu d’informations de la part des sociétés minières, permettant d’entretenir un flou quant aux marges spéculatives des entreprises, et met en place des abris fiscaux permettant de protéger les entreprises minières nouvellement créées. Ainsi, les entreprises sont imposées, mais à moindre coût. La bourse de Toronto correspond donc bel et bien à un univers permissif de fait et de droit pour les sociétés minières s’y inscrivant.
Deuxième raison, le Canada soutient l’investissement dans les entreprises minières. De nombreux programmes fédéraux sont chaque année mis en place pour inciter à investir dans ce secteur. Par exemple, le programme « Québec Mines » correspond à une rencontre entre les industries, les membres du gouvernement, les scientifiques et même les citoyens afin d’échanger et de promouvoir les investissements dans le secteur minier.
Une autre raison, est l’élaboration d’un « forfait canadien », d’une sorte de service après vente permettant l’appui du Canada au travers ses ambassades et sa diplomatie en cas de problèmes (appui pour l’aménagement de routes, accès à l’eau, appui en cas de litige avec les communautés locales…). Ainsi, la diplomatie canadienne se charge de faire pression sur les gouvernements locaux en faveur des industries, et appuie le développement des projets miniers de façon optimale. Par exemple, dans les années 1990, le Canada s’est largement impliqué dans l’écriture de plusieurs codes miniers dans de nombreux pays d’Amérique Latine, s’assurant d’avantager les entreprises minières canadiennes. « […] c’est sûr qu’il y a des membres du gouvernement canadien, qui sont directement impliqués dans la rédaction de lois minières dans des pays d’Amérique Latine, le Guatemala je ne suis pas sûre, mais en tout cas c’est le cas pour la Colombie, l’Honduras… c’est fait pour avantager les entreprises étrangères en général, mais plus particulièrement les entreprises minières canadiennes. » Entretien Elyse Desjardin.

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Table des matières

Introduction
Première Partie. Les enjeux et prémisses de l’Accompagnement International 
Chapitre 1. L’émergence de l’Accompagnement International 
I. L’Accompagnement International : Définition et apparition
II. La théorie de la dissuasion comme précepte fondateur de l’accompagnement
Chapitre 2. L’accompagnement comme outil de construction de la paix : l’exemple du retour des réfugiés guatémaltèques
I. L’accompagnement dans la résolution de conflits : De la théorie à la pratique
II. L’accompagnement international dans le cas du retour des réfugiés guatémaltèques
Deuxième Partie. Le Canada, le Guatemala et les entreprises minières : des relations de proximité 
Chapitre 1. Le soutien économique du Canada à l’industrie minière 
I. Mécanisme d’appui économique, incitatifs fiscaux et encadrement de la bourse de Toronto
II. Le virage de l’Agence Canadienne de Développement International (ACDI)
Chapitre 2. L’ouverture économique du Guatemala aux projets miniers canadiens 
I. Le Guatemala et les entreprises minières canadiennes : une vieille histoire d’amour?
II. Une nouvelle logique de développement après la signature des accords de paix : favoriser les investissements étrangers
Troisième Partie. Les conséquences de l’industrie minière sur les communautés autochtones et le développement d’un mouvement de résistance anti-mine 
Chapitre 1. Les conséquences dramatiques des mégas projets miniers sur les communautés autochtones
I. Conséquences environnementales : le droit à un environnement sain et le droit à la vie bafouée
II. Les conséquences sociales des projets miniers
Chapitre 2. L’émergence de mouvements de résistance anti-mine 
I. La construction d’un mouvement de résistance de la société civile : le tournant perpétré par la résistance à la mine Marlin
II. Les faiblesses et défis des mouvements de résistance anti-mine au Guatemala
Quatrième Partie. Le rôle de l’accompagnement questionné dans le cas spécifique de la lutte 
Chapitre 1. Le PAQG face à de nouveaux défis
I. Stratégie de diffamation de l’accompagnement international
II. Implication de l’ambassade canadienne au Guatemala
Chapitre 2. Revisiter l’accompagnement international et ses enjeux 
I. Quand le PAQG se positionne contre l’industrie minière
II. Une logique de l’accompagnement international à redéfinir : de nouveaux acteurs, une nouvelle stratégie?
Conclusion
Bibliographie 
Annexes

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