Le rôle du dispositif de supervision de la pratique professionnelle

L’ouverture sur des questionnements professionnels

Le repérage de thématiques générales liées à la problématique conduit à cette dernière phase de la supervision, généralement située en fin de séance, qui consiste à réintroduire ces thèmes et les réflexions spécifiquement dans le contexte professionnel. Toujours sous forme de questions larges, les éléments de réflexion précédents trouvent un écho plus précis concernant la pratique : « Vous ouvrez une question que vous pourriez traiter en équipe, celle du secret professionnel. Comment ne pas être confronté au clivage entre vous et restaurer la singularité de la rencontre [avec l’usager] ? C’est se raccrocher à l’identité professionnelle car le secret professionnel c’est l’identité professionnelle. » « Cette question de la responsabilité…on en revient toujours à cette question de comment cette institution qui se doit d’être bienveillante, la plus maternante possible et répondre aux attentes, n’empêche pas […] les souffrances ? […]
Alors qu’on est fragile et impacté professionnellement et personnellement, qu’est-ce qui manque à l’institution pour qu’il n’y ait pas d’effet groupal de soutien ? »
« On en revient sur la question de l’encadrement de stage et pourquoi et comment l’institution prend des stagiaires et comment en tant que salarié on peut se positionner pour dire à un moment que ce n’est pas possible ? […] C’est aussi ça qui provoque un grand flou et des tensions […] au delà de la question de votre positionnement dans votre métier. […] cela fragilise le professionnel. »
Cette ouverture peut concerner le travailleur social directement dans sa pratique, au travers, par exemple, de la relation avec les usagers. Elle peut concerner également le fonctionnement institutionnel, le fonctionnement d’équipe, les rapports avec la hiérarchie, le réseau partenarial, voire plus généralement les politiques publiques d’action sociale qui définissent les missions des travailleurs sociaux. Les participants ainsi que le superviseur mobilisent l’ensemble du matériel de la séance pour le réinvestir dans leur posture professionnelle, soit au niveau des accompagnements,soit au niveau de leur place dans l’institution. Le retour vers des questions restreintes au champ professionnel, en opposition avec le travail introspectif et le caractère très général des thématiques, est considéré comme un atterrissage plus concret, s’approchant de la réalité professionnelle des participants. Cependant, peu de solutions concrètes et opératoires sont envisagées à l’issue de la supervision en réponse avec la situation de départ. Occasionnellement des pistes sont proposées : « Il faut essayer de porter un autre regard avec lui, avec ces sujets il est important de réaliser une frise chronologique. On construit leur histoire, la représentation permet de penser. Il vit dans le présent, il faut l’amener à avoir un regard sur le passé. » « Parfois on fait des proposition d’actions : « tiens par rapport à ce que vous dite de son histoire, on sent que c’est quelqu’un qui est vraiment attiré…en tout cas elle accroche sur la question de l’art, est-ce que vous avez déjà essayé de l’emmener au musée ? » »

La fin de la séance

Les séances n’ont pas de fin formalisée ni de conclusion à proprement parler. Les séances se terminent de façon brève, l’arrêt est déclenché par les astreintes liées au temps, sous une forme très protocolaire et récurrente portée par le superviseur : « Très bien, on va s’arrêter là ». Trois grandes phases significatives dans la structuration de la supervision se distinguent : la présentation de la situation problématique , la problématisation collective de la situation et l’ouverture sur des thématiques ou des questionnements plus larges. Les apports conceptuels amenés par le superviseur traversent les deux dernières.
Nous pouvons schématiser la structure des séances de supervision comme une démarche de réflexion ascendante : une situation particulière provoque chez le ou les travailleurs sociaux telle difficulté, qui concerne tel thème et qui pose plus largement telles questions dans la pratique professionnelle. Le matériel mobilisé pour analyser les situations problématiques est issu exclusivement du champs introspectif concernant les participants et complété par des apports conceptuels sous forme de grilles de lecture des processus psychologiques en jeu par le superviseur. La problématique est alors utilisée comme un prisme pour aborder d’autres choses, élargir la réflexion sur d’autres sujets. Cette démarche correspond bien à une mise à distance de la situation de départ par le détour d’investigations sur des registres particuliers.
La démarche de supervision correspond-t-elle alors effectivement à une démarche d’analyse comme elle est présentée dans les discours ?
La structure de la supervision ne relève que partiellement d’un travail d’analyse dans la mesure où celui-ci vise habituellement à comprendre un objet en le décomposant en ses constituants . L’analyse établit donc tout d’abord des critères permettant d’identifier les composants en produisant des catégorisations. Dans la supervision, ces critères ne sont pas explicites, il n’y a pas de jalon permettant de structurer clairement la démarche d’analyse. Tous les éléments alimentant l’examen de la situation problématique sont autorisés et agencés indifféremment en une agglomération de points de vue. La démarche dite d’analyse est singulière et ressemble plus à un fil de réflexion libre sur la base d’association d’idées. Ce ne sont que les apports conceptuels du superviseur qui permettent in fine d’opérer des catégorisations. C’est en ce sens que nous privilégions le terme « problématisation » qui se définit en épistémologie comme l’action de poser un problème en vue de son analyse.
La supervision apparaît comme un travail de problématisation de difficultés, dont les facettes constituant les éléments de son analyse sont restreintes à des champs très spécifiques, voire unilatéraux. Le cadre théorique sous-jacent vient étayer cette structure et oriente la démarche de problématisation. L’implication du cadre théorique de référence correspond pleinement avec une démarche d’analyse au sens de la méthode clinique en psychologie , c’est-à-dire une interprétation des éléments de la situation en vue de faire surgir des mécanismes latents. Le travail d’analyse consiste alors à interpréter le contenu manifeste pour retrouver le sens caché, avec l’objectif d’en comprendre les processus pour dépasser les difficultés initiales.

Le cadre théorique

La structure de la supervision fait appel à un cadre théorique situé dans la méthodologie de la psychologie clinique. Ce facteur n’est pas surprenant dans la mesure où la grande majorité des superviseurs sont originaires de cette discipline. Néanmoins, la référence à ce cadre théorique n’est jamais explicite et demeure sousjacente.

Une référence implicite

Les participants ont généralement connaissance de l’orientation théorique du superviseur et y font référence pour caractériser l’intervenant : « C’est une psychologue clinicienne, avant c’était un psychiatrepsychanalyste » ; « le superviseur est psychanalyste »
Cependant le contenu de la supervision n’est pas repéré précisément comme s’inscrivant dans ce courant. Les modalités d’expression de ces théories restes diffuses dans les discours des participants qui minimisent sa place ou sa visibilité dans le déroulement de la supervision. Le courant théorique s’énonce comme un outil qui n’est destiné qu’a inspirer le travail de réflexion, le guider tout au plus, mais les participants ne lui accordent pas une place centrale. Ils revendiquent d’autant plus un détachement à ce courant comme un élément d’intérêt, voire un gage de sérieux de l’intervenant : « La psy est vraiment pas mal et simple dans sa manière d’intervenir avec nous.
Disons qu’elle nous rabâche pas la tête d’interprétations bizarres, elle est plutôt terre à terre. » ; « Je fais de la supervision avec une psychologuepsychanalyste, mais c’est bien, parce qu’elle n’est pas collé à son truc, elle n’interprète pas à tout-va, c’est juste un éclairage. »
À de rares exceptions près, les participants ne repèrent pas l’émergence de courants théoriques particuliers dans la supervision . Aucune théorie ne s’exprime, le vocabulaire utilisé ou les thèmes évoqués ne sont pas repérés comme étant rattachés particulièrement à un champ théorique, un courant, une discipline ou une autre. L’aspect théorique de la supervision est appréhendé simplement comme « psychologique » dans un sens très large, sans plus de spécificité d’une supervision à l’autre.
Le superviseur, en tant qu’autorité professionnelle, incarne l’aspect psychologique du contenu beaucoup plus que les éléments du contenu lui-même pendant les séances.
Les supervisons utilisent la psychologie puisque l’intervenant est psychologue, mais peu de participants sont en mesure de préciser en quoi les contenus mobilisent la psychologie, et quelle discipline ou quel courant spécifiques.
À cela nous pouvons proposer une hypothèse explicative. En effet la différenciation entre tous les courants disciplinaires de la psychologie ainsi que ceux des psychothérapies n’est pas aisée. Concernant plus spécifiquement la psychanalyse, Mikkel Borch-Jacobsen a montré qu’on ne pouvait pas l’évoquer comme une théorie dont le champ était unifié et qu’il y avait donc autant de psychanalyses que de praticiens . La psychologie clinique comme la psychanalyse font partie d’un vaste domaine conceptuel qui ne peut s’appréhender qu’avec beaucoup de recul sur le champ de la psychologie pour en saisir la globalité. Il paraît alors difficile pour les participants de repérer des éléments constitutifs d’un courant qui n’est pas nettement délimité.
Le recours à des psychologues pour conduire ce dispositif l’inscrit, de fait, dans un contexte psychologisant. Participer à la supervision est donc une acceptation tacite d’une démarche psychologisante, à l’intérieur d’un champ disciplinaire équivoque et qui ne s’exprime pas clairement dans le contenu des séances. Il n’y a pas alors lieu d’avoir une attention particulière au courant mobilisé par l’intervenant. Cet aspect peut expliquer le caractère implicite et sous-jacent des modèles théoriques utilisés dans les supervisions.
Nos observations indiquent, en outre, l’absence de références explicites au courant théorique pendant les séances, tout au plus une indication bibliographique, voire de rares évocations de concepts spécifiques repérés à travers leurs spécialistes, les notions de « résilience » de Boris Cyrulnik ou « d’immédiateté » de Patrick Declerck, par exemple.

Émergence des concepts

Même s’ils sont diffus et latents, les concepts théoriques émergent néanmoins ponctuellement pendant les séances et peuvent êtres repérés au travers du vocabulaire particulier et des thèmes évoqués.
Premièrement, de nombreux termes spécifiques à la psychologie clinique et plus précisément à la psychanalyse sont utilisés par le superviseur, comme par les participants. Nous relevons ainsi dans la totalité des séances observées l’emploi récurrent d’un vocabulaire spécifique.

Les relations homme/femme

« Elle ne dit pas à une femme ce qu’elle dit à un homme […] C’est comme si l’homme avait moins de valeur que l’accompagnement » ; « Elle clive le couple éducatif, elle séduit l’homme. […] Je vous dis des choses car je vous aime bien. […] Cela renvoie à votre place de femme et sur le possible jugement en tant que mère.» ; « Je m’interroge sur ses relations avec les femmes. […] Respecter la parole donnée c’est estimer qu’elle pourrait accorder une confiance aux hommes.[…] C’est la problématique du lien qu’elle lie aux hommes.[…] C’est un accrochage avec vous -un homme- : vous portez le poids de son rapport avec les hommes. » » ; « Vous êtes dans le registre des pulsions […], des femmes qui rentrent chez des hommes.»

La dimension infantile

« C’est très infantile comme réaction, c’est comme l’enfant qui dit si tu ne me donnes pas ce que je veux, je vais me faire mal. Vous touchez l’infantilité de cette dame.»
; « Vous êtes comme des parents qui anticipent ses besoins. […] Vous avez le rôle de la mère bienveillante, maternante.» ; « Il est en quête de quelqu’un qui l’étaye, comme la mère.[…] La femme va être comme la mère. […] Vous dites très certainement la représentation qu’il a de ses parents, qu’il met en scène,[…] c’est l’histoire d’un abandon […] il projette sa propre histoire. […] Surjouer la relation est une carapace.» ; « Est-elle vraiment en lien [avec le groupe] ou excitée comme une excitation infantile autour d’un jeu ? »; « L’institution est vécue comme maternante […], suffisamment bonne.[…] Pourtant [il] n’est pas votre grand-père : c’est une posture d’enfant »

Influence du modèle « clinique »

Un des éléments les plus significatifs de l’émergence des concepts de psychologie clinique et psychanalytique demeure le recours systématique à l’introspection tout au long des séances et notamment après la description des situations problématiques.
Les échanges font une part importante à l’expression des ressentis, des affects, des sentiments concernant les situations, comme les thèmes évoqués. Cette démarche d’introspection correspond à « un effort d’une conscience qui analyse ses pensées, ses sentiments, ses états d’âme, qui réfléchit sur eux à des fins d’investigation . » et constitue un mode d’entrée privilégié au travail de réflexion. Comme nous l’avons vu plus haut, le superviseur, et plus rarement les participants eux-mêmes, vont favoriser les questionnements pour révéler les aspects affectifs des situations.

La production de sens ad hoc

La structure de la supervision révèle l’incidence du champ théorique et l’orientation que ce dernier donne à la problématisation de la situation de départ. Le déroulement des séances, la place de la démarche introspective ainsi que la direction des thèmes abordés, indiquent un mouvement du fil de la réflexion centré d’une part sur l’individu et d’autre part sur des thématiques très larges. Cette dynamique est faite d’allers et retours entre ces deux pôles, alternativement mais de façon exclusive. Nous entendons par là qu’il n’y a pas d’intermédiaires et que l’activité en supervision ne considére que ces deux pôles bilatéraux comme matériel à saisir pour conduire le travail d’analyse.

Intériorisation

Le premier pôle recouvre l’ensemble de la démarche centrée sur un travail d’intériorisation de la situation de départ. Avec une volonté réflexive, développée plus haut, le contenu de la supervision focalise la problématique d’abord sur une perspective individuelle. « L’individu » désigne le participant, en tant que personne singulière, mais aussi la somme des individualités que composent le groupe. « L’individu » désigne également l’usager, ou les usagers, concernés par la situation de départ, dans la même modalité d’individualités.

Introspection

Nous avons mesuré plus haut la prépondérance du modèle « clinique », essentiellement construit sur la parole et la libération des affects, et par conséquent la place donnée à l’introspection dans le déroulé de la supervision. Le mode d’entrée privilégié pour les participants est l’expression de la dimension affective en jeu dans les situations évoquées en supervision. Cette démarche peut être mise en lien directement avec l’activité quotidienne des travailleurs sociaux dont la pratique d’accompagnement des usagers s’inscrit dans « la relation d’aide ».
Celle-ci entend proposer un soutien pour dépasser les difficultés et concourir ainsi à l’insertion sociale au travers de cette relation instituée entre le professionnel et l’usager. La relation d’aide impose la nécessité du dialogue, de l’échange. Les travailleurs sociaux sont ainsi familiers de l’expression des affects des usagers, de leurs ressentis, leurs difficultés, leurs souffrances, qui constituent la base de l’accompagnement. « L’exposé de la souffrance devient de ce fait une partie intégrante de la prise en charge », indique Didier Fassin . « Parler de soi » est encouragé chez les usagers comme support à la relation d’aide et par symétrie, le travailleur social va « parler de soi » pour dépasser ses propres difficultés professionnelles. À l’image de ce qui est attendu chez l’usager dans l’espace relationnel de l’accompagnement « les supervisions fluidifient l’importation de dispositions entre sa sphère privée et sa sphère professionnelle ou, plus exactement, régulent la perméabilité, les allées et venues entre ces deux sphères ; elles mettent ainsi en évidence les limites d’une réflexion qui ne prendrait pas en compte l’expérience personnelle travaillée par l’introspection. »
La subjectivité et son mode d’exploration qu’est l’introspection, conditionnent, pour les travailleurs sociaux, la qualité de l’activité réflexive ; le travailleur social est avant tout un individu et l’entrée principale de l’expression se fait donc d’abord par l’introspection, le « travail sur soi ». Pour les participants aux supervisions, l’expression de difficultés se confond entre professionnel et personnel, entre intime et ostensible. C’est ici qu’émerge la dynamique de psychologisation du travail social et que s’exprime fortement l’implication des différents concepts théoriques. En effet, cette volonté de prendre en compte la subjectivité est liée à ces concepts qui structurent, d’une part la pratique professionnelle des travailleurs sociaux et, d’autre part, l’exercice de supervision. Les travailleurs sociaux ont recours à la psychologie en réponse aux problèmes des usagers dans leur pratique quotidienne et cette démarche, intériorisée, s’impose alors spontanément quand ils doivent traiter de leurs propres problèmes. L’angle « subjectif » est lui sous-tendu par le modèle « clinique » des concepts qui se sont imposés dans le travail social depuis l’aprèsguerre et favorisent, sinon poussent, cette entrée introspective. Et en premier lieu la psychanalyse, dont Robert Castel a étudié le succès : « [Elle] introduit à la compréhension d’un état du monde et d’un vécu du monde dont toute l’épaisseur tient à ce qui en est psychologiquement interprétable et psychologiquement transformable. »
Robert Castel évoque ici cette « culture psychologique », généralisée depuis les années 1990 qui permet « une plongée dans le psychologique qui renouvelait les délices de l’introspection ».
Un des principaux auteurs psychanalystes revendique d’ailleurs cette démarche dans le travail de supervision : « Les relations avec les usagers, les collègues, la direction, les partenaires, les politiques, qui reposent sur la dynamique de la rencontre, exigent un effort constant des professionnels qui ne peut être maintenu en tension qu’au prix d’un travail permanent d’« entretien » de l’outil de travail, c’est-àdire la personne elle-même. »
L’introspection est en conséquence magnifiée dans les professions de la relation. Dans nos observations, l’introspection est le passage fondamental qui succède à la présentation de la situation de départ, puis ponctue régulièrement la séance. Outre la libération de la parole sur une situation, les participants sont encouragés à exprimer ce qu’ils ressentent concernant un usager, voire des collègues.

Psychologisation

« Au vu du public, le travail social est de facto psychologisant » nous a déclaré un superviseur. Cette conception de la pratique professionnelle éclaire la structuration centrée sur la psychologisation du travail social pendant les supervisions.
La dynamique se situe dans un exercice d’exploration et d’interprétation étayé par des concepts qui favorisent cette production de sens à partir des processus individuels. « La psychologie des « individus », permet des explications faciles qui font rarement appel aux situations et circonstances ».
Avec le recours à ces grilles interprétatives, la supervision donne du corps aux difficultés rencontrées par les professionnels, et propose de dévoiler le sens caché des problématiques en les situant dans les mécanismes psychiques, la santé mentale, les processus inconscients. La structuration des séances rabat le cadre d’analyse dans la psychologie et plus précisément dans la psychopathologie pour en extraire du sens, grâce à un discours psychologique « à fort rendement explicatif ».
Là encore cette démarche correspond avec constance à l’orientation psychologisante de la pratique quotidienne de la majorité des travailleurs sociaux. En effet, la relation d’aide peut tendre vers une motivation à dépasser les aspects triviaux de demandes d’aides – logement, ressources, emploi, démarches administratives, etc. – pour en comprendre leurs motivations profondes, les rouages inconscients dissimulés ou enfouis qu’il s’agirait de faire resurgir pour les traiter.
Didier Fassin parle d’aporie dans la mesure où le travail d’accompagnement est organisé autour de la « demande » de l’usager, mais comme celui-ci n’en a que de banales et qui ne peuvent êtres satisfaites aisément et immédiatement, la relation d’aide s’oriente vers l’émergence d’autres demandes situées dans le champ du psychologique, notamment concernant la souffrance liée aux conditions de précarité.
La tendance à confondre ou substituer alors l’objectif psychothérapeutique avec celui d’accompagnement social fait naître une ambiguïté : « Dans ce sens, une des dimensions fondamentales du travail social […] concerne la place occupée par la parole de l’usager sur laquelle l’assistant social va prendre appui pour concevoir ses interventions. À la différence de ses collègues « psy», ce que l’usager dépose comme parole ici et maintenant n’est pas objet des interventions de l’assistant social mais son support. »
La tendance inverse est héritière directe du développement du case work« […] les besoins primordiaux ne sont plus des manques objectifs appelant une réponse matérielle mais des difficultés ou des incapacités subjectives, des troubles relationnels, relevant du dialogue. »
Le travail de supervision opère de façon identique, la situation problématique est transformée en « quelque chose d’autre », essentiellement des pistes de réflexion pour comprendre ce qui se joue derrière la situation, ce qu’elle occulte, ce qu’il faut révéler, en ramenant l’analyse de la problématique et son traitement à la seule intériorité des individus. « La psychologisation ainsi entendue est donc une manière de mettre en cohérence l’expérience professionnelle, et l’expérience de vie des publics. »
Le recours à la psychologisation situe finalement la supervision dans une continuité de la pratique d’accompagnement quotidienne, sans en être déconnectée.

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Table des matières
Introduction
I La supervision : une démarche de mise à distance
1.1 Les logiques d’acteurs face à la supervision
1.1.1 Les catégories d’acteurs
L’institution
Les participants
Le superviseur
1.1.2 Des objectifs larges et épars
Questionner la pratique : un lieu pour réfléchir
Obtenir un éclairage
Un lieu d’expression
Réguler les tensions
1.2 La structuration de la supervision
1.2.1 Déroulement
La présentation du cadre par le superviseur
La présentation d’une situation problématique par un participant
Le travail de problématisation
L’ouverture sur des questionnements professionnels
La fin de la séance
1.2.2 Le cadre théorique
Une référence implicite
Émergence des concepts
Influence du modèle « clinique »
1.3 La production de sens ad hoc
1.3.1 Intériorisation
Introspection
Pathologisation
Psychologisation
1.3.2 L’élargissement
Atomisation du social
Déplacement des questions
Absence de solution
II La supervision comme instrument de régulation
2.1 Cloisonnement
2.1.1 Le secret dans la structure de la supervision
Confidentialité et démarche de recherche
Le secret comme cadre
L’engagement au secret
Participation et non-participation
2.1.2 L’injonction paradoxale du secret
Le secret comme thème
La question de la loyauté
Confusion de genre
2.2. Gérer les conflits
2.2.1 Psychologisation des rapports sociaux
Un statut d’autorité
Les attentes vis à vis du superviseur
2.2.2 Réguler les tensions
L’usager
Les collègues
L’institution
2.3 Gérer la souffrance
2.3.1 Les paradoxes du travailleur social
Les politiques publiques
Une impuissance qui fait souffrir
2.3.2 La clinique de la parole
Aménager l’impuissance
Produire du sens pour supporter
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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