Le programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie

CADRE MÉTHODOLOGIQUE

Les tests d’aptitudes physiques

Comme mentionné précédemment, l’objectif d’un TAP est d’assurer que les candidats désirant exercer une profession possèdent les capacités physiques minimalement requises afin d’exécuter efficacement et en toute sécurité les tâches critiques de l’emploi (Gumieniak et coll., 2013; Jamnik et coll., 2010). Trois différentes approches peuvent être utilisées pour développer un T AP, soit celle des tests à validité conceptuelle, celle des tests à validité de contenu et les tests hybrides (Shephard et Bonneau, 2002; Gumieniak, Jamnik et Gledhill, 2011).
La locution « tests à validité conceptuelle» est présentée dans la littérature portant sur les T AP comme une batterie de tests standardisés utilisée afin d’évaluer différents déterminants physiques essentiels au métier (Shephard et Bonneau, 2002). Ce type de test ne tente pas de simuler les tâches critiques et essentielles du métier, mais il vise plutôt à évaluer individuellement chaque paramètre physique sous-tendant la réalisation de celles-ci (Greenberg et Berger, 1983). Un exemple répandu de tests à validité conceptuelle est l’utilisation de tests de course progressifs pour évaluer la capacité aérobie de candidats.
En effet, bien que la course ne soit pas nécessairement une tâche critique et essentielle des métiers d’urgence, cette mesure est largement utilisée dans ces domaines puisque l’utilisation de ces tests est justifiée par le concept théorique liant le V02max minimalement nécessaire pour effectuer les tâches d’un métier et l’atteinte d’un niveau de performance au test permettant de confirmer qu’un candidat possède ce niveau.
Puisque les tests à validité conceptuelle sont souvent peu coûteux et simples à administrer, ils ont été couramment utilisés par les organisations policières dans le passé (Wilmore et Davis, 1979; Greenberg et Berger, 1983). Ces tests présentent cependant une lacune considérable, soit leur manque de validité manifeste (Shephard et Bonneau, 2002). En effet, le lien entre une batterie de tests standardisés et le métier policier est difficilement observable. Ce lien réside plutôt dans un concept théorique souvent complexe à apprécier par des observateurs ne possédant pas de formation scientifique dans le domaine de l’activité physique. Cette lacune pourrait donc représenter une faiblesse rédhibitoire si la pertinence d’un tel test devait être débattue lors d’un litige judiciaire. Pour cette raison, les tests à validité conceptuelle sont aujourd’hui très peu utilisés pour mesurer une exigence professionnelle au Canada.
Les tests à validité de contenu sont quant à eux basés sur la simulation de tâches du métier évalué (Gumieniak, Jamnik et Gledhill, 2011). Ce type de tests est composé de tâches préalablement identifiées comme étant critiques et essentielles au métier. Celles-ci peuvent être exécutées de façon indépendante ou bien être incorporées à l’intérieur d’un circuit. Bien que cette approche soit généralement bien acceptée d’un point de vue légal en raison de son lien évident avec le métier, celle-ci peut tout de même être jugée discriminatoire. Le principal problème des tests à validité de contenu est que ceux-ci reposent parfois sur la maîtrise d’habiletés techniques (Shephard et Bonneau, 2002), lesquelles ne sont pas nécessairement acquises au moment de l’embauche. Ceci représente une faiblesse importante puisqu’un TAP a comme objectif d’évaluer si un candidat possède les aptitudes physiques minimales qui lui pennettront d’exécuter les tâches du métier, non pas d’évaluer s’il maîtrise déjà certaines habiletés techniques propres au métier. Un autre problème relié aux tests à validité de contenu est que certaines tâches critiques et essentielles d’un métier ne peuvent être simulées puisqu’elles représenteraient un danger (évitable) pour la sécurité des candidats. Lors du développement d’un test à validité de contenu, une attention particulière doit donc être portée au choix des tâches retenues.
L’approche hybride incorpore quant à elle certains éléments des tests à validité de contenu et à validité conceptuelle. (Wilmore et Davis, 1979; Shephard et Bonneau; 2002; Jamnik, 2008). Ce type de tests pennet donc d’inclure intégralement des tâches critiques et essentielles du métier ne présentant pas un risque pour la santé du candidat et ne nécessitant pas la maîtrise d’habiletés techniques particulières (ex. : savoir dégainer une anne à feu). De plus, les tests hybrides admettent l’inclusion de tâches non reliées directement au métier de policier mais qui évaluent des qualités physiques jugées essentielles à l’exécution de tâches policières. Le TAP-ENPQ (2002) obéissait au modèle du test hybride puisque, en plus du circuit chronométré et des stations indépendantes simulant différentes tâches policières, ce test comprenait aussi un test navette servant à évaluer de façon individuelle la capacité aérobie des candidats.

Processus global de développement d’un TAP

Sommairement, le processus de développement d’un test normatif tel qu’un TAP comprend deux volets, soit un volet conceptuel correspondant à la détermination d’un standard de performance, et un volet opérationnel se définissant par l’établissement d’un seuil de passage (Kane, 1994; Zumbo, 2016). De façon très succincte, le standard de performance peut se définir comme le minimum d’habiletés et de capacités physiques requis pour effectuer les tâches critiques et essentielles de manière efficace et sécuritaire (Zumbo, 2016). Ce standard découle donc d’une analyse permettant à la fois d’ identifier les tâches critiques et essentielles du métier, de déterminer le niveau minimal de performance adéquat pour celles-ci et d’analyser les exigences physiques liées à cette exécution.
Le seuil de passage est quant à lui décrit comme le point de rupture correspondant au résultat (p. ex. un temps de réalisation d’un circuit) à un test permettant d’ attester qu’un candidat présente ou non le standard de performance attendu (Kane, 1994; Zumbo, 2016).
Le concept de seuil de passage englobe donc le choix des tâches du TAP choisies pour représenter le métier ainsi que le niveau de performance minimal à ces tâches permettant d’attester qu’un candidat rencontre le standard de performance. La validité d’un T AP repose donc sur la capacité à démontrer que le seuil de passage établi permet de représenter étroitement le standard de performance attendu lors de l’exécution des tâches du métier. Un exemple simple de ces concepts est la détermination d’un seuil minimal de passage lors d’un test progressif de course. Par une analyse sur le terrain, la consommation d’oxygène maximale (V02max) nécessaire à l’exécution minimalement acceptable des tâches d’un métier peut être déterminée. Ce V02max serait alors identifié comme le standard de performance. Le seuil de passage pourrait ensuite être établi à la vitesse aérobie maximale ou au nombre de paliers atteint lors d’un test progressif de course permettant d’assurer qu’un candidat possède un V02max suffisant pour répondre au standard de performance.
Bien qu’elle permette de conceptualiser le développement d’un TAP, cette définition très simpliste ne permet pas d’appréhender la complexité liée à ce processus. Plusieurs auteurs ont tenté d’établir un cadre de travail plus étoffé permettant de guider les organisations désirant développer un TAP se qualifiant comme une exigence professionnelle justifiée (Gledhill et Bonneau, 2001 ; Payne et Harvey, 2010; Taylor, Fullagar, Mott, Sampson et Groeller, 2015; Tipton, Milligan et Reilly, 2013). Bien que certaines nuances différencient ces divers cadres, les lignes directrices proposées restent similaires. Les étapes de développement sont généralement regroupées en cinq phases :
1) le processus pré-expérimentation (formation de l’équipe de reèherche et familiarisation avec l’emploi considéré); 2) l’ évaluation des tâches et exigences du métier; 3) le développement du test; 4) la détermination d’un seuil minimal de passage, et 5) l’établissement de la précision de mesure et de l’ impact discriminatoire du test développé.
Le processus de développement d’un T AP ne doit donc pas être perçu comme un unique protocole d’expérimentation, mais plutôt comme une série d’expérimentations interdépendantes.

L’évaluation des tâches et exigences du métier

L’analyse des tâches et des exigences d’un métier est définie comme un processus par lequel un métier est divisé en différentes composantes, telles que des tâches et qualités physiques, par l’application d’une méthodologie rigoureuse et systématique lors de la collecte, l’analyse et la synthèse de données (McCormick, 1976; Levine, Ash, Hall et Sistrunk, 1983). Lorsque l’on se penche sur le cadre de travail du Forum national sur les exigences professionnelles justifiées (Gledhill et Bonneau, 2001), on constate que 3 des 12 étapes de développement d’un TAP sont directement liées à l’analyse de tâches, soit les étapes 3, 4 et 5. Ces étapes devraient permettre d’identifier et de quantifier les exigences liées aux éléments (tâches) essentiels du travail (Petersen et coll., 2016).
Même si plusieurs méthodologies peuvent être utilisées afin de procéder à cette phase de recherche, celle-ci comporte généralement une combinaison de prises de données objectives et subjectives (Tipton, Milligan et Reilly, 2013). Par exemple, des mesures telles que la fréquence cardiaque et la consommation d’oxygène lors de l’accomplissement des tâches du métier (Reilly et coll., 2005; Adams, Schneider, Hubbard, McCullough-Shock, Cheng, Simms, Hartman, Hinton et Strauss, 2010; Jamnik et coll., 2010); l’analyse des forces appliquées pour l’exécution des tâches (Jamnik et coll., 2010) et l’analyse de la fréquence et de la durée des efforts (Reilly et coll., 2005; Anderson et coll., 2001) peuvent constituer différentes sources de données objectives. D’autre part, la quantification de l’importance de certaines tâches et qualités physiques associées aux fonctions du métier (Anderson et coll., 2001; Jamnik et coll., 2010; Arvey et coll., 1992; Osborn, 1976) permet de constituer différentes banques de données subjectives (c’est-à-dire obtenues par le jugement de personnes) souvent explorées par les chercheurs.

L’analyse de l’exigence physique des différentes tâches du travail

L’une des méthodologies les plus utilisées pour analyser les exigences physiques d’un métier est l’évaluation de la réponse métabolique et cardiovasculaire à l’accomplissement de façon sécuritaire et minimalement acceptable des tâches du métier (Reilly et coll., 2005; Adams et coll., 2010; Jamnik et coll., 2013). L’analyse directe des exigences métaboliques est toutefois difficile pour la fonction policière. En effet, l’équipement nécessaire afin de procéder à une telle analyse pourrait gêner les policiers lors de l’exécution des tâches sur le terrain et ainsi compromettre leur sécurité. Les exigences métaboliques peuvent tout de même être estimées de façon indirecte à l’aide de cardiofréquencemètres (Anderson et coll., 2002; Armstrong et coll., 2014). Cette méthode peut se révéler particulièrement efficace puisque la plupart des tâches policières n’engendrent généralement que des efforts sous-maximaux (Bard et coll., 1985; Shephard et Bonneau, 2002).
Si un tel appareillage n’est pas accessible à l’équipe de recherche, l’analyse des exigences physiques peut aussi inclure l’observation et le fractionnement des efforts fournis sur le terrain en différentes composantes telles que la fréquence, la durée et l’intensité apparente des efforts fournis (Payne et Harvey, 2010). Bien que moins précis que la mesure directe de paramètres physiologiques, le fractionnement des efforts peut servir à estimer l’amplitude des efforts fournis lors d’efforts brefs mais intenses, efforts qui pourraient ne pas être adéquatement représentés par les données de fréquence cardiaque. Bien que comportant des limites liées à la fiabilité des données recueillies, l’utilisation d’un outil comme une échelle de perception de l’effort peut aussi guider le chercheur dans son analyse de tâches.

L’identification des tâches les plus importantes, fréquentes et exigeantes physiquement

Dans le développement d’un TAP, en plus de l’évaluation des eXIgences métaboliques du métier policier, il faut aussi se questionner sur la nature même de ce métier pour déterminer le niveau d’aptitudes physiques nécessaire à cette fonction. Ceci inclut l’identification, l’observation et l’analyse du métier afin de détenniner les tâches étant les plus représentatives par leur fréquence d’exécution, ainsi que leur aspect critique et essentiel (Payne et Harvey, 2010).
À défaut d’une observation directe et systématique du métier concerné, l’identification des tâches critiques et essentielles qu’il comporte ne peut que reposer sur l’avis d’experts du domaine (Jamnik, 2008; Payne et Harvey, 2010; Shephard et Bonneau, 2002). Ces experts sont généralement consultés à l’aide de questionnaires permettant de quantifier l’aspect critique et essentiel de différentes tâches du métier (Jamnik, 2008; Anderson et coll., 2001). Certains auteurs utilisent aussi des entrevues (Reilly, Wooler et Tipton, 2005) ou des entretiens de groupe (Todd Rogers, Docherty et Petersen, 2014) lors de leur collecte de données. Au final, cette étape doit pennettre d’assurer que le niveau d’aptitudes et de capacités physiques exigé d’un individu soit basé sur les tâches jugées pertinentes accomplies dans l’exercice d’une fonction.

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Table des matières

RÉSUMÉ 
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES ABRÉVIATIONS
REMERCIEMENTS 
INTRODUCTION 
L’ historique des tests d’ aptitudes physiques à l’ENPQ
Le programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie
CADRE THÉORIQUE 
Cadre législatif des exigences professionnelles
Exigences professionnelles et discrimination
Responsabilité de diligence raisonnable
Tests d’ aptitudes physiques et les femmes
La profession policière
Tâches de la profession
Exigences physiques du métier policier
CADRE MÉTHODOLOGIQUE 
Les tests d’ aptitudes physiques
Processus global de développement d’un TAP
L’évaluation des tâches et exigences du métier
L’analyse de l’exigence physique des différentes tâches du travail
L’ identification des tâches les plus importantes, fréquentes et exigeantes physiquement
L’ identification des habiletés et aptitudes requises pour effectuer ces tâches
OBJECTIFS 
ARTICLE 
ABSTRACT 
INTRODUCTION 
Development of a physical employment standard
OBJECTIVES 
MATERIAL AND METHODS
Analysis of the physiological requirements
Identification of the physically demanding and cri tic al tasks
Identification of the physical abilities required to accomplish the physically demanding and critical tasks of the training
RESULTS 
Analysis of the physiological requirements
Critical tasks identification
Identification of the most important physical abilities
DISCUSSION
Practical application for the development of the new PES
CONCLUSION 
REFERENCES 
CONCLUSION GÉNÉRALE
Limites et ouvertures
RÉFÉRENCES

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