Le processus dynamique d’économisation de l’objet textile artisanal

Le processus dynamique d’économisation de l’objet textile artisanal

Structure du travail Suite à la présentation de ma problématique au chapitre 5.

Le processus dynamique d’économisation de l’objet textile artisanal, mon développement se compose de deux axes principaux : 6. L’artisan-passionné et 7. L’artisan-entrepreneur. L’axe de l’artisan-passionné se concentre sur le rapport entre l’acteur et sa création de produits textiles artisanaux. Dans la première partie 6.1. L’origine de l’intérêt pour l’artisanat textile, je développe l’origine de l’intérêt pour l’artisanat et pour le textile. Cette partie révèlent les événements de vie significatifs aux yeux de l’acteur, l’ayant conduit à être artisan-créateur dans le milieu du textile. Cette origine peut aussi être divisée en deux catégories : le besoin de créer (6.1.1) ressenti par l’individu comme étant organique et inné, et auquel il « cède »; la création comme une compétence héritée par un conditionnement social primaire, voire de temps en temps secondaire (6.1.2). Pour la deuxième partie 6.2. La nature de l’intérêt pour l’artisanat textile, je développe la nature de cet intérêt se rapportant à la passion pour le processus créatif (6.2.1), pour les matériaux (6.2.2), ou encore pour l’objet réalisé (6.2.3). L’importance de la créativité et de la passion dans cette partie me permet de tisser des liens avec la théorie de Boltanski et Thévenot (1991) concernant la cité inspirée (6.2.4), puisque le rapport entre les acteurs et leur pratique artisanale prend sa source dans la passion, le besoin de créer, d’imaginer et dans l’émotion. Comme le révèle cette recherche, cette cité est fréquemment mentionnée par les acteurs pour justifier leur pratique et lui donner un sens.

L’axe concernant l’artisan-entrepreneur (7) se concentre sur la pratique des acteurs en tant qu’artisans-entrepreneurs à travers le processus d’« économisation » de l’objet analysé sous l’angle des Valuation studies. Puisque ce processus concerne la transformation d’un objet en un « bien auquel un agent économique attribue une valeur » (Callon, Muniesa 2003, p. 200), il s’agit dans cette partie de comprendre comment cette valeur se constitue. Pour ce faire, j’analyse le processus de « valuation » qui est définie en trois étapes selon Aspers et Beckert (2011). Bien que ces étapes soient interconnectées, je propose dans ce travail de les séparer afin de faciliter la lecture des éléments qui leur sont constitutifs. La première étape concerne les valeurs morales qui guident la pratique artisanale des acteurs (7.1). Ces valeurs font fréquemment référence au respect de l’environnement (7.1.1), d’une justice sociale (7.1.2), ou au besoin de se reconnecter à une « vraie réalité » (7.1.3). Elles sont également mobilisées par les acteurs en tant qu’outils marketing afin de séduire davantage les potentiels clients, constat développé au point 7.1.4. Les valeurs morales comme outils marketing. Pour conclure, le point 7.1.5. Des valeurs morales qui balancent entre complémentarité et ambivalence développe la présence d’ambivalences, voire de contradictions au sein des discours et des pratiques des acteurs en lien avec leurs valeurs morales. J’y fais notamment référence aux notions d’épreuves et de conventions développées par Boltanski et Thévenot (1991).

La deuxième étape du processus de « valuation » concerne 7.2. L’évaluation de l’objet et de la pratique artisanaux. Dans ce chapitre, je mets en évidence, dans un premier temps, le fait que l’acteur évalue les caractéristiques de l’objet comme sa qualité, son esthétisme, son originalité, son efficacité, sa rentabilité ou encore sa valeur économique (7.2.1). Dans un deuxième temps (7.2.2), je propose de considérer l’objet comme un moyen pour évaluer les compétences artisanales des acteurs. Dans un troisième temps (7.2.3), je développe le rôle du réseau de l’acteur dans la construction de la valeur de l’objet et de la pratique artisanale, ce qui me permet de mettre en évidence le fait que « l’action économique est “encastrée” au sein de réseaux de relations personnelles » (Granovetter 1985, cité par Laville 2008, p.2). Le réseau social intervient en effet, non seulement comme moyen d’évaluation de l’objet et de sa promotion, mais également comme moyen permettant d’évaluer positivement le fait d’être dans un réseau social spécifique. Pour la troisième étape du processus de « valuation » de l’objet, je développe, au point 7.3, la valorisation du produit et son juste prix considéré comme un compromis entre les valeurs de l’objet attribué par le producteur et par les clients.

En effet, ce chapitre me permet de mettre en lumière le fait que le prix ne se limite pas à un calcul du matériel utilisé et des heures passées à le réaliser. C’est un processus de construction qui va dépendre de plusieurs autres facteurs dont les valeurs morales des protagonistes, leurs évaluations des qualités du produit (esthétique, fonctionnel, « fait main ») et de sa valeur économique, ainsi que des interactions sociales au sein de la transaction marchande. Je clos le chapitre 7 par le point 7.4. La discrétion des prix ou le rapport des artisans au prix fixé. Dans cette partie, je relève le fait que, d’une part les acteurs rencontrés me parlent peu du prix concret de leur produit. D’autre part, le rapport particulier entre l’acteur et le prix fixé révèle parfois un rôle secondaire à ce dernier dans le sens où la présence de l’artisan-créateur sur le marché n’a pas forcément la finalité de vente de l’objet, rendant ainsi la mise de prix peu pertinente. Suite à une discussion en guise de conclusion au chapitre 8, je propose quelques pistes relevant les limites principales de cette étude, ainsi que des propositions pour approfondir cette recherche.

Le processus dynamique d’économisation de l’objet textile artisanal Puisqu’il s’agit, tout au long de ce travail, de discuter de l’implication et du comportement des acteurs au sein d’un marché artisanal, il est essentiel d’apporter un éclairage sur la définition-même de « marché ». D’après Dubois, Keller, Kotler et al. (2006), le marché découle directement de l’identification des besoins des individus et de la société et d’y apporter des réponses. L’activité permettant au marché d’émerger – appelée marketing -, est définie par les auteurs comme étant un « processus économique et social par lequel les individus et les groupes satisfont leurs besoins et leurs désirs au moyen de la création, de l’offre et de l’échange avec autrui de produits et services de valeur » (ibid., p.6). Il s’agit donc de connaître les besoins et envies du client afin que la transaction du bien soit favorisée :« Tout ce dont on a alors besoin est de rendre le produit ou service disponible » (ibid. p.6). Cette définition d’obédience économique semble restreindre l’existence du marché à la présence des besoins et attentes de l’individu social, et de leurs réponses par la transaction économique d’un bien ou d’un service spécifique.

Or, en adoptant une approche des sciences sociales, le développement du marché semble être beaucoup plus sinueux. Il prend en compte non seulement les besoins utilisateuristes de l’individu, mais également d’autres aspects sociaux comme par exemple les règles formelles et informelles dont certaines dépendent des conceptions morales des acteurs. Beckert (2012) parle d’ailleurs de l’insertion morale de l’économie comme condition essentielle à l’émergence du marché. Pour l’auteur, cette morale se trouve dans le fait que le marché doit être perçu comme légitime pour exister, qu’elle n’est pas dissociable aux préférences et choix des consommateurs, et qu’elle permet de cadrer le marché par les limites qu’elle donne aux biens et services à marchander. Dans un même ordre d’esprit, Aspers et Beckert (2011) non seulement que le marché n’est pas préexistant à une pratique, qu’il se constitue par les échangistes et les marchandises, mais qu’il est également constitué par des dispositifs matériels permettant aux consommateurs de faire leurs choix. Parmi ces dispositifs, ils citent en premier lieu les dispositifs de qualification comme le packaging, les marques et les labels porteurs de certaines garanties, l’utilisation de forum et de guides gastronomiques. Puis ils évoquent les dispositifs de calcul qui cadrent les réalités prises en compte, les articulent et les valorisent de façon à calculer des coûts, des valeurs et des prix. Il y a ensuite la présence de dispositifs de captation qui vise à attirer et à conserver les clients, comme les cartes de fidélité, des bons de réduction, des bases de données ou encore les structures organisationnelles.

Pour terminer, les auteurs évoquent les réseaux personnels permettant de guider l’acheteur. En somme, ces différents dispositifs diminuent l’incertitude de l’acheteur, en permettant à ce dernier d’établir des catégories et un ordre dans le marché. Adopter une conception sociale du marché consiste donc à considérer ce dernier non comme préexistant à une pratique, mais émergeant de cette dernière. Loin de se restreindre uniquement aux interactions entre les individus, il implique d’autres dimensions à prendre en compte dans une étude globale comme son contexte d’insertion, et les dispositifs lui permettant d’émerger, de s’organiser et d’orienter l’acteur dans ses choix. Or, ce travail présente la limite de ne pas approfondir les différents dispositifs utilisés par les acteurs et présentés ci-dessus selon Aspers et Beckert (2011). Il se concentre spécifiquement sur l’étude des acteurs qui créent et vendent leur marchandise, au sein d’un marché artisanal textile qui émerge de ces pratiques.

L’origine de l’intérêt pour l’artisanat textile

D’après Bréchet, Journé-Michel & Schieb-Bienfait (2008, p.57), l’artisan est caractérisé par ses capacités à associer « le savoir-comprendre », « le savoir-faire » et « le savoir-combiner », trois capacités qui permettent à l’artisan non seulement de construire un objet, mais d’élaborer une réflexion autour de ce dernier afin d’imaginer les meilleures stratégies à adopter pour le réaliser tel qu’il est souhaité. En complétant cette définition et en me référant aux données empiriques de mon terrain de recherches, je considère comme « artisan » les individus qui utilisent les matières premières et leurs composantes pour produire, transformer ou modifier des matériaux. Ce sont non seulement des designers développant l’idée d’un objet, mais aussi des bâtisseurs qui oeuvrent à la réalisation concrète de l’objet imaginé, et, de surcroît, des inspecteurs des travaux finis, évaluant si l’objet créé assouvit les attentes escomptées. Ainsi, le fait de réaliser l’ensemble du processus de création d’un objet, allant de l’imagination de ce dernier jusqu’à sa réalisation, voire sa vente, en passant par le choix des matériaux et outils à utiliser, porte des significations positives et est fortement valorisé par l’ensemble des acteurs rencontrés dans mon étude. Toutefois, cette envie ou ce besoin de réaliser soi-même ses productions matérielles prend différentes formes au sein des discours et des pratiques des artisans que je propose ci-dessous de développer.

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Table des matières

1 Pour une genèse du présent travail sur l’artisanat et la création
1.1 Il crée et vit que cela était bon
1.2 Jurez-vous de dire toute votre vérité, rien que votre vérité ?
2 Pour une méthodologie proche des acteurs
3 Présentation des acteurs
4 Structure du travail
5 Le processus dynamique d’économisation de l’objet textile artisanal
5.1 Les sciences sociales de l’économie ou la « triste » fin de l’homo oeconomicus
5.2 L’ordre du marché dépendant des conditions sociales
5.3 L’artisan-créateur, acteur du marché artisanal textile du canton de Neuchâtel
5.4 « L’économisation » de l’objet textile artisanal à travers un processus de « valuation »
6 L’artisan-passionné
6.1 L’origine de l’intérêt pour l’artisanat textile
6.1.1 Le besoin de créer, capacité « organique » et « innée » de l’artisan-créateur
6.1.2 L’héritage familial et social de la fibre créative
6.2 La nature de l’intérêt pour l’artisanat textile
6.2.1 Le processus créatif
6.2.2 La passion pour les matériaux
6.2.3 L’objet en soi et l’objet comme marqueur d’ « identité » sociale
6.2.4 La passion et la cité inspirée
7 L’artisan-entrepreneur
7.1 Les valeurs morales en ligne de fond de la pratique artisanale
7.1.1 Développer une pratique respectueuse de l’environnement
7.1.2 Développer une pratique soucieuse de la justice sociale
7.1.3 Se reconnecter à une « vraie réalité
7.1.4 Les valeurs morales comme outils de marketing
7.1.5 Des valeurs morales qui balancent entre complémentarité et ambivalence
7.2 L’évaluation de l’objet et de la pratique artisanaux
7.2.1 Un objet et ses différentes qualités évaluées
7.2.2 L’objet artisanal textile, témoin des compétences des réalisateurs
7.2.3 Le réseau social au service de l’insertion de l’artisan dans le marché textile
7.3 La valorisation du produit et son juste prix : un compromis sur la valeur de l’objet
7.4 La discrétion des prix ou le rapport des artisans aux prix fixés
8 Discussion : pour un processus d’« économisation » dynamique de l’objet textile
9 Pour une suite à cette recherche…
10 Bibliographie

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