Le lien entre représentations sociales et intégration chez des signataires du CIR

L’intégration est une notion polyphonique selon son contexte d’utilisation, bien que souvent employée dans des situations discriminantes envers les immigré-e-s. Elle est l’objet de nombreuses représentations sociales, notamment véhiculées par les discours stigmatisants des politiciens et des médias. Notre recherche portera, elle, sur les représentations sociales d’immigré-e-s. Alors que les immigré-e-s sont l’objet de nombreuses représentations sociales, nous avons souhaité analyser leurs propres représentations sociales vis à vis des acteurs sociaux de la société française. Ces représentations ont un lien direct avec le processus d’intégration des immigré-e-s. . L’intégration à une société implique l’appartenance à un ou plusieurs groupes sociaux et des relations sociales spécifiques entre les différents groupes. Ce phénomène entraîne la construction de représentations sociales sur son propre groupe d’appartenance comme sur les autres groupes. Notre recherche implique donc une réflexion sur l’intégration des immigré-e-s à la société française.

Pour les gouvernements de ces vingt dernières années, l’intégration passe par des mesures politiques discriminantes. Ainsi, “les lois Sarkozy” de 2003 et 2006 ont mis en place un amalgame entre droit au séjour et intégration (Danièle Lochak, 2006). C’est dans ce cadre que le CAI (Contrat d’Accueil et d’Intégration) a été institutionnalisé en 2005. La signature de ce contrat oblige les immigré-e-s à suivre une formation civique, et dans certains cas linguistiques, afin d’obtenir une carte de séjour. Le CAI a été remplacé par le CIR (Contrat d’Intégration Républicaine) en mars 2016. La gestion des CIR est effectuée par l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration).

Notre contexte de recherche et d’enseignement s’est déroulé au sein d’une formation linguistique de 100 heures prescrite par l’OFII. Nous avons été enseignante de français dans cette formation, et y avons mené une recherche sociolinguistique. Il s’agissait donc d’un cadre institutionnel, dépendant du programme de l’OFII. La formation a eu lieu au Greta  d’Aubervilliers. Les discours impliqués dans le programme de l’OFII et véhiculés par le pouvoir dominant (médias et politiciens) diffusent des représentations sociales stigmatisantes de l’intégration et des immigré e-s. Nous nous sommes intéressée, pour notre part, aux discours des stagiaires à propos d’eux et des Autres. A travers ces discours nous avons analysé l’expression de certaines de leurs représentations sociales, dans ce cadre institutionnel où l’intégration est conceptualisée comme nécessairement républicaine.

Différents travaux sociologiques traitent de la question de l’intégration en France. Une part de ces travaux compare la manière dont est appréhendée l’intégration par les mesures politiques en fonction de l’Etat-nation, avec la manière dont se met en place l’intégration comme phénomène social chez les immigrés (ouvrages de Dominique Schnapper dans les années 1990, travaux de Mohmand Kellil dans les années 2000 etc..). Ils ont contribué à illustrer la différence fondamentale entre l’intégration comme concept politique et l’intégration comme phénomène social, sur laquelle tous les travaux de sociologie se basent. En outre, ils nous ont fourni des éléments théoriques et généraux sur la socialisation des immigré-e-s. D’autres sociologues ont analysé les dispositifs politiques français de l’intégration et leurs implications souvent discriminantes (travaux de C. Gourdeau, A. Sayad etc. dans les années 2000). Ces études nous ont permis de mieux comprendre le contexte institutionnel dans lequel notre recherche a été effectuée, et les possibles conséquences qu’il a eu sur les discours des stagiaires. Enfin, certains travaux ont pour objet les discours médiatiques et politiques stigmatisants à propos des immigré e-s et de leur intégration (les études de Teun A. van Dijk, Christine Barats, Philippe Corcuff etc. dans les années 2000). Ils ont partiellement nourri notre recherche car ils nous ont permis d’avoir les moyens de mettre en parallèle les discours des stagiaires avec les discours du pouvoir dominant. En effet, nous nous sommes intéressée à la diffusion des représentations sociales du pouvoir dominant jusqu’aux stagiaires.

Tout d’abord, il est nécessaire de préciser les termes employés et choisis afin de désigner les personnes immigrées vivant en France, avec lesquelles nous avons travaillé au sein des cours au Greta.

L’emploi du terme de migrant-e est souvent problématique puisqu’il souligne un processus de migration en cours. Le Grand Robert définit un migrant comme une personne qui participe à une migration, c’est-à-dire à un déplacement volontaire d’un pays à un autre. Cette notion pose donc problème étant donné que les personnes immigrées ne sont plus en déplacement. Elle implique l’idée que les personnes arrivées en France ne sont pas entièrement présentes ni véritablement installées dans le pays, mais encore en mouvement. L’emploi de cette notion crée une barrière face à l’appartenance de ces personnes à la société française.

S’il l’on s’appuie sur la définition du Haut Conseil à l’Intégration un immigré est une personne née à l’étranger. Cette qualité d’immigré est considérée comme permanente, c’est-àdire qu’une personne qui acquiert la nationalité française continue d’être immigrée, mais n’est plus étrangère. Ainsi, l’appartenance à la société française n’est pas entièrement reconnue puisque qu’on insiste sur le caractère premier étranger de ces personnes. Cette notion a l’avantage de porter l’attention sur le pays d’arrivée, c’est-à-dire le pays où les personnes immigrées vivent actuellement, ici la France, au travers du préfixe im-. Dans notre analyse nous parlerons d’immigrés ou de « personnes immigrées » pour faire référence à des individus qui n’ont pas la nationalité française et connaissent des problèmes spécifiques de ce fait.

L’origine des immigrés présents en France est plus diversifiée qu’on pourrait communément le croire. En effet, la majorité d’entre eux est originaire d’Afrique (43,2%) puis d’Europe (36,8 %), et 14,4 % est originaire d’Asie. . Cependant, si on consulte les entrées d’immigrés, les données sont différentes : près d’un immigré sur deux entré en France en 2012 est né dans un pays européen , ce qui vient contredire la représentation d’une immigration exclusivement africaine En effet, les mouvements de populations intra-européens ne sont pas perçus socialement comme des phénomènes de migrations dans les discours communs et médiatiques: une étrangère espagnole ou anglaise ne sera pas qualifiée d’immigrée, au contraire d’une étrangère africaine. Ainsi, on assiste à une stigmatisation concernant l’origine des personnes immigrées, censée être majoritairement africaine, ce qui ne reflète pas la réalité. Ce type de stigmatisation va souvent de pair avec des représentations racistes et discriminantes dont nous parlerons ultérieurement.

Dans les phénomènes d’immigration, la question linguistique est importante car les langues sont le véhicule de la communication quotidienne, et parce qu’elle peut faire l’objet d’instrumentalisation politique.

Il n’y a qu’une seule langue officielle en France, le français, dite langue de la République. Historiquement, on n’accorde aucune reconnaissance aux autres langues, qu’elles soient régionales (breton etc.), présentes dans les territoires d’Outre-mer (divers créoles), ou issues d’autres pays (arabe etc.). Le rapport Cerquiglini de 1993 fait état de 75 langues en France ; il a permis de souligner la diversité linguistique présente en France. Cependant, toutes ces langues ne sont pas reconnues ni protégées par l’Etat, puisque la France n’a pas ratifié la Charte des langues régionales et minoritaires,  qui permet de protéger et promouvoir ces langues. Au niveau politique, on s’attend donc à ce que les personnes immigrées apprennent et communiquent au sein de la société française avec la seule langue reconnue, le français. C’est pourquoi le Contrat d’Intégration Républicain (CIR) impose une certaine maîtrise de la langue française comme nous le verrons plus loin.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Partie I L’intérêt sociologique de l’analyse des RS des stagiaires en lien avec leur
statut d’immigré et de signataires du CIR
Partie II Le poids du contexte dans les relations sociales et l’émergence de RS au
sein de la formation
Partie III L’articulation entre représentations sociales, identité sociale des
stagiaires et intégration
Conclusion

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *