Le diagnostic de sécurité dans les carrefours

Un diagnostic de sécurité s’appuie en général sur le relevé de certains événements du trafic comme les accidents. Les accidents sont-ils les seuls événements qui permettent d’étudier le risque et le comportement des usagers dans les carrefours ? Sont-ils les plus pertinents ? Nous définissons d’abord les entités élémentaires traitées dans ce travail, discutons les types d’événements du trafic les plus intéressants, les accidents, les conflits de trafic et plus généralement toutes les interactions entre usagers.

Les éléments du monde

Le trafic routier est un système complexe, dans lequel interagissent de très nombreux acteurs. Le monde que nous étudions se divise en trois ensembles d’entités :

les usagers : les usagers sont les êtres humains présents sur la route, i.e. la chaussée ou les trottoirs. Ils peuvent conduire un véhicule ou circuler à pieds (piéton). Les usagers les plus vulnérables dans le trafic et les moins susceptibles de causer des dommages aux autres usagers sont appelés usagers vulnérables : il s’agit essentiellement des piétons et des conducteurs de deux-roues.

les véhicules : les usagers utilisent un véhicule pour se déplacer sur les routes. On peut distinguer les véhicules légers, les poids lourds, les transports en commun, et les deux-roues.

l’environnement : le reste, i.e. tous les éléments inertes du système routier font partie de l’environnement. Les éléments notables d’infrastructure sont la chaussée, le trottoir, les constructions, les feux de circulation, le mobilier urbain. Un sous ensemble de l’environnement pertinent pour la sécurité est celui des éléments avec lesquels un véhicule peut entrer en collision, que l’on qualifie d’obstacle.

Deux précisions à ces définitions. La première concerne l’appartenance à la catégorie obstacle de certains véhicules à l’arrêt. Nous faisons la différence entre les véhicules en déplacement sur un carrefour, qui peuvent être à l’arrêt momentanément selon le trafic, et les véhicules en arrêt pour une longue période. L’ensemble constitué par un usager avec le véhicule qu’il conduit ou simplement un piéton définit un mobile. Les piétons s’intègrent dans notre cadre, mais ne sont pas étudiés dans nos travaux pour des raisons liées aux données expliquées plus tard. Nous n’étudions pas non plus les obstacles dans ce travail. Un mobile est un usager en déplacement, avec ou sans véhicule. C’est le sujet principal des études que nous présentons ici. Nous ne rappelons pas dans la suite les définitions classiques d’ingénierie du trafic, en particulier les variables courantes. Le lecteur peut se référer pour cela à (Cohen, 1993).

Il nous faut aussi préciser nos capacités d’observation car les descriptions des événements du trafic doivent y être adaptées pour être opérationnelles dans notre système automatique. Nous décrivons plus tard les capteurs dont nous disposons pour étudier le trafic. En particulier, ils nous permettent de percevoir les mouvements des mobiles, mais pas d’étudier la psychologie des usagers, leurs motivations et états d’esprit, éléments que nous ne pouvons pas faire entrer en jeu pour définir les événements étudiés dans le trafic. Nous qualifions nos capacités d’observation du trafic d’extérieures, i.e. extérieures au mobile. Lorsqu’ils se déplacent sur le réseau routier, les mobiles entrent en interaction les uns avec les autres. Nous étudierons la relation de ces interactions à la sécurité dans la suite.

Le carrefour à feux

Nous reprenons dans cette partie un certain nombre de définitions du guide de l’AFNOR (Anonymous, 1991). Nous étudions le trafic routier dans une partie particulière de l’environnement, les carrefours à feux. Les carrefours sont des lieux critiques pour la sécurité des personnes qui s’y déplacent. Le carrefour est le lieu de croisement d’au moins deux routes. Ces routes sont caractérisées par leur largeur, le nombre de voies et le sens de circulation sur ces voies. Les routes se croisent de nombreuses façons, tant du point de vue de l’infrastructure que des règles de franchissement. La figure 2.1 représente un carrefour simple de deux routes à sens unique, qui sera appelé plus spécifiquement intersection dans la suite, et précise les zones fonctionnelles : la zone de conflit, avec deux zones de stockage en amont des lignes de feux. Un carrefour peut être très complexe, composé en fait d’un ensemble de carrefours plus simples suffisamment rapprochés et imbriqués les uns dans les autres pour apparaître aux yeux de l’usager comme un seul carrefour. Nous nous intéressons dans ce travail à un type particulier de carrefour, les carrefours à feux, dont l’accès est contrôlé par des signaux lumineux d’intersection situés sur chaque voie d’entrée sur le carrefour. La signalisation lumineuse d’intersection couvre l’ensemble des signaux lumineux d’intersection tricolores, piétons et d’anticipation. Nous nous intéressons par la suite essentiellement aux signaux tricolores, appelés aussi feux tricolores ou de circulation. Un feu tricolore est caractérisé par sa couleur (vert, jaune ou rouge), un éventuel pictogramme désignant l’usager concerné et le fait qu’il clignote ou pas.

Un mouvement est défini par son origine et sa destination. A chaque type de mouvement ne correspond pas une voie dédiée. Ils sont regroupés par deux ou trois sur une même voie mixte et constituent des courants. Un courant de véhicule est défini comme l’ensemble des mouvements de véhicules provenant d’une même branche d’accès à un carrefour et admis simultanément au moyen d’un même groupe de signaux. Un point conflictuel résulte de la rencontre, en un même lieu, de mouvements antagonistes de mobiles. Certains trouvent une solution dans le respect des règles du Code de la Route, mais ils doivent être examinés avec soin en fonction de la visibilité et de l’importance respective des mouvements (cf la réglementation en vigueur dans (Anonyme, 1996)). D’autres doivent être systématiquement éliminés dès lors que l’on implante une signalisation lumineuse d’intersection. La zone de conflit est constituée des points conflictuels du carrefour.

La durée pendant laquelle un ou plusieurs courants sont admis simultanément dans le carrefour constitue une phase. L’enchaînement des différentes phases constitue le cycle des feux. Le cycle désigne aussi la durée entre deux passages successifs de l’ensemble des feux d’un carrefour à feux par le même état, en supposant que des phases ne sont pas escamotées. Dans ce cas, la stratégie est dite acyclique. Un plan de feux est l’ensemble des données définissant tout ou partie du fonctionnement d’un carrefour à feux, ou d’un ensemble de carrefours à feux, en particulier les phases du carrefour, leur succession et leur durée.

La régulation dans un carrefour à feux

La régulation du trafic en milieu urbain se donne différents objectifs (cf (Braban et Boillot, 2003; Anonyme, 1988)) : avant tout assurer la sécurité des usagers sur la voirie, en particulier dans les carrefours où les points conflictuels sont les plus nombreux, mais aussi maîtriser les retards, les congestions, la pollution, le bruit, conséquences d’une augmentation incessante du trafic, enfin assurer un certain confort. Pour répondre à ces objectifs, la régulation revêt plusieurs aspects : d’abord un aspect statique par le choix d’une infrastructure urbaine doublée d’une signalisation appropriée ; ensuite un aspect dynamique par des actions sur les flux de mobiles au moyen de feux tricolores, de la présence d’agents de la circulation, de panneaux à messages variables et de systèmes embarqués d’information et de guidage. Nous nous intéressons dans ce travail aux méthodes de régulation par les feux tricolores.

La régulation par les feux 

Les feux tricolores permettent de faire beaucoup de choses. En premier lieu, ils permettent de supprimer certains points conflictuels en partageant dans le temps l’utilisation d’un même espace, la zone de conflit précisément, entre des flux conflictuels. Par le choix des durées de chaque état des feux , et la synchronisation des feux entre eux, ils permettent aussi de gérer l’écoulement de la demande. Une des difficultés tient à la variabilité de la demande du trafic. La demande de trafic sur une entrée de carrefour varie de façon importante au cours d’une même journée, d’un jour ouvrable à un jour de fin de semaine, et une exploitation en temps fixe (phases et cycles fixés) ne permet pas d’offrir un bon niveau de service aux usagers. Il y a deux types de variations de trafic, celles régulières et prévisibles, et les autres exceptionnelles et aléatoires. Par exemple, les migrations pendulaires des jours ouvrables (soir et matin) sont à l’origine d’importantes variations régulières. Les périodes de vacances, manifestations populaires, sont sources de variations exceptionnelles. Il faut donc chercher à adapter l’offre de l’infrastructure à la demande du trafic, selon différents critères, comme le temps d’attente de tel ou tel type d’usager, le nombre d’arrêts, la consommation de carburant, la pollution, tout en assurant une sécurité maximale pour les usagers. Tous ces critères d’optimisation s’opposent parfois, en particulier ceux qui favorisent les différentes classes d’usagers (par exemple les automobilistes, les piétons, et les transports en commun).

Différentes méthodes et une multitude d’outils existent pour cela. Le plan de feux fixe dans le temps reste la base d’un système de gestion des feux. S’y ajoutent des méthodes pour tenir compte des fluctuations du trafic (cf (Braban et Boillot, 2003; Anonyme, 1988)),

la programmation horaire (aussi appelée multiprogrammation à temps fixe) pour les variations régulières et prévisibles. Cette méthode consiste à disposer de plusieurs plans de feux correspondant aux situations types prévisibles du trafic et à les mettre en œuvre selon un calendrier programmé. Souvent, trois plans de feux suffisent, les heures de pointe (matin, midi et soir), les heures creuses du jour et les heures creuses de la nuit. Une méthode classique de calcul des carrefours à feux est décrite dans (Cohen, 1993),

la micro-régulation pour les variations exceptionnelles et aléatoires, prenant en compte l’analyse instantanée de la demande pour modifier la durée, l’occurrence ou l’ordre des phases dans le déroulement d’un plan de feux. Elle agit uniquement à l’échelle d’un carrefour ou d’un petit ensemble de carrefours,

la macro-régulation pour tous les types de variations, agissant à l’échelle d’une partie du réseau (regroupant plusieurs carrefours) sur des durées plus longues, pour coordonner ces carrefours. L’INRETS a développé un programme baptisé CLAIRE (Scemama, 2002), pouvant s’interfacer avec des méthodes de micro-régulation : il détecte les congestions, et donne des recommandations pour chaque axe (favoriser ou retenir le trafic) (Scemama, 2002).

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Contexte
1.2 La problématique
1.3 Contributions de ce travail
1.4 Plan du document
2 Le diagnostic de sécurité dans les carrefours
2.1 Introduction
2.1.1 Les éléments du monde
2.1.2 Le carrefour à feux
2.1.3 La régulation dans un carrefour à feux
2.2 La sécurité et le risque
2.2.1 Les interactions
2.2.2 Hypothèses fondamentales : la hiérarchie des interactions et la sévérité
2.2.3 Le risque
2.3 Les méthodes de diagnostic de sécurité
2.3.1 L’usage de l’exposition
2.3.2 L’analyse des accidents
2.3.3 Les Techniques des Conflits de Trafic
2.3.4 Autres méthodes de sécurité
2.4 Conclusion
3 Le diagnostic de sécurité pour notre problématique
3.1 Une modélisation des interactions
3.1.1 Quelles interactions ?
3.1.2 Les catégories d’interaction
3.1.3 Le risque et la sévérité
3.2 Le système expérimental
3.2.1 Le laboratoire Carrefour Intelligent
3.2.2 Le site expérimental
3.2.3 Les données
3.2.4 La base de données
3.3 Que détecter dans les données ?
3.3.1 Adaptations nécessaires
3.3.2 Quels indicateurs de sévérité ?
3.3.3 Limites et discussion
3.3.4 Objectifs du travail et interprétation des données
3.4 Conclusion
4 Conclusion

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