Le conservatoire du littoral, analyse juridique

UN ETABLISSEMENT PUBLIC ADMINISTRATIF PROTECTEUR DU LITTORAL FRANÇAIS

Le célèbre juriste Maurice Hauriou définissait l’établissement public comme « un service public personnalisé ». En effet, l’établissement public, en plus d’être doté de la personnalité morale, est régi par le principe de spécialité. Le conservatoire a pour spécialité le littoral et sa préservation. Toujours d’un point de vue administratif, le Conservatoire du littoral relève de ces modes d’administration locale que l’on appelle « régimes combinés » c’est-à-dire avec des éléments de décentralisation et des éléments de déconcentration. En effet, le conseil d’administration est composé de représentants de l’état et de représentants des collectivités locales. De plus, notons que géographiquement, il y a un siège puis des antennes régionales. Enfin, et surtout, la création en 1975 en même temps que le conservatoire, des conseils de rivages, composés de membres élus par les conseils des collectivités locales, dont la mission est d’éclairer par leur avis le Conservatoire, est un indice supplémentaire permettant de parler de « régime combiné ».

Concernant ses relations avec l’état, il convient de parler du « Contrat d’objectif » qui lie l’état et le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres. Plus précisément, il s’agit d’un contrat passé entre le ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire et le conservatoire. Actuellement le contrat d’objectif 2010/2011, deuxième contrat de ce type, remplace le contrat 2006-2008. L’objet de cette convention est le suivant : « faire en sorte que le Conservatoire conforte ce rôle d’acteur de référence qu’il a progressivement su développer en matière de préservation et de valorisation des espaces naturels littoraux, à la fois terrestres et maritimes, et qu’il poursuive, dans l’esprit de profonde transformation de notre société qui inspire l’action publique nationale, ses démarches d’expérimentation, d’innovation, de création de lien social dans la gestion durable des espaces dont il est responsable, afin de contribuer aux changements nécessaires à la démonstration sur le terrain de leur bien fondé ».

Ce nouveau contrat est également l’occasion de faire le bilan du premier, dont de nombreux points positifs ressortent. Parmi les points les plus importants on note : une augmentation significative des moyens financiers, une progression importante du domaine terrestre et maritime ou encore de fortes avancées en matière d’organisation et de management. Mais il subsiste des lacunes comme l’absence de statut des agents travaillant pour le Conservatoire. De nouveaux objectifs ambitieux (comme l’acquisition de 20 000 ha de zones humides d’ici 2015) ont été fixés dans le nouveau contrat qui prennent en compte des éléments nouveaux comme « l’ampleur du changement climatique désormais confirmé ».

Cette partie est consacrée à la présentation de cet établissement public qu’est le conservatoire ; ainsi, seront abordées la zone d’action du Conservatoire, la structure fonctionnelle de l’établissement et ses ressources.

Le champ d’action territorial du Conservatoire

Le nom de l’établissement public fournit un premier indice sur le champ d’action du Conservatoire du littoral (Adj. : relatif contact de la terre avec la mer) et des rivages (n.mas. : bande terre qui borde une étendue d’eau ou partie de la terre soumise à l’action des vagues et de la marée) lacustres (Adj. de lac : qui est situé sur les bords ou dans les eaux des lacs).

Plus précisément, le législateur a prévu que le Conservatoire sera compétent dans « les cantons côtiers, dans les communes riveraines des mers, des océans, des étangs salés ou des plans d’eau intérieurs d’une superficie supérieure à 1 000 hectares, dans les communes riveraines des estuaires et des deltas lorsque tout ou partie de leurs rives sont situées en aval de la limite de salure des eaux » Son intervention peut également être étendue par arrêté préfectoral et après avis de son conseil d’administration à des secteurs géographiquement limitrophes des cantons et des communes littorales constituant avec eux une unité écologique ou paysagère ainsi qu’aux zones humides situées dans les départements côtiers. Actuellement, le Conservatoire intervient sur 22 régions, 46 départements et 1140 communes.

Ce vaste champ d’intervention mérite d’être précisé et analysé (Para I) d’autant que depuis la « loi de démocratie de proximité de 2002 », le conservatoire peut se voir attribuer également le Domaine Public Maritime . Même si les textes ne sont pas à ce sujet de la plus grande clarté, le Conservatoire a également un rôle international qu’il accomplit en signant des partenariats avec d’autres pays, afin de leur faire bénéficier de son expertise .

Un périmètre en constante évolution 

En 1975, la loi créant le Conservatoire, prévoyait l’intervention de celui-ci dans « les cantons côtiers et les communes riveraines des lacs de plus de 1000 ha ».

S’agissant des lacs, en 2002, ils représentaient 3 % du patrimoine du Conservatoire soit 2 000 hectares, ce qui est très peu important ; on peut expliquer cette faiblesse par la complexité de cette compétence dans la mesure où la situation de chaque lac est très différente (certains subissent une pression foncière comparable à celle subie par la Cote d’Azur quant d’autres ne sont fréquentés qu’occasionnellement) mais également parce qu’il n’y a pas de cohérence géographique entre tous les lacs concernés. Notons que, comme nous le verrons dans le chapitre consacré à la structure du Conservatoire, le législateur, conscient de cette diversité, a crée un Conseil de rivage consacré uniquement aux lacs.

La loi de 86 « la loi littoral » est venue ajouter aux lacs et aux cantons côtiers, les « communes littorales ». Rappelons que les cantons sont une subdivision territoriale de l’arrondissement . Maître Loïc Prieur rappelle que les communes littorales (comme les cantons côtiers) sont littorales de plein droit et qu’il « suffit qu’une partie, même très réduite, de leur territoire borde le rivage de la mer pour que les dispositions particulières au littoral s’appliquent » . (L’annexe 3 montre les progrès accomplis en matière de protection des façades littorales). En 1977, l’intervention du Conservateur est étendue par le décret du 1er septembre , aux communes d’outre mer et à Mayotte depuis le décret du 23 mars 1995.

En 1995 la loi donne lieu une nouvelle extension de compétence avec la possibilité pour le Conservatoire d’intervenir « Dans les communes riveraines des estuaires et des deltas lorsque tout ou partie de leurs rives sont situées en aval de la limite de salure des eaux » Contrairement à ce qui a été dit précédemment pour les cantons côtiers et pour les communes littorales, les communes riveraines des estuaires et des deltas ne sont pas communes littorales de plein droit. Elles seront considérées communes littorales que si trois conditions, fixées par la loi littoral, sont réunies (L321-2 du Code de l’Environnement) :
– La commune doit être située en aval de la limite de salure des eaux
– La commune doit participer aux équilibres économiques et écologiques littoraux
– Enfin elle doit être désignée par décret en conseil d’état (décret du 29 mars 2004)
La liste de ces communes est consultable à l’annexe 4. L’annexe 5, quant à elle, renseignera le lecteur sur les estuaires. Notons que le Contrat d’objectifs 2009/2011 rappelle que le Comité scientifique se penche depuis 2008 sur la problématique des estuaires et que ce document impose au Conservatoire d’apporter une attention toute particulière à ces derniers.

La loi Paysage de 1993 prévoit, elle, une extension aux secteurs géographiques limitrophes constituant une unité écologique et paysagère ; disposition codifiée dans le Code de l’environnement dans le III de l’article L322-1 : « Son intervention peut être étendue par arrêtés préfectoraux et après avis de son Conseil d’administration à des secteurs géographiquement limitrophes des cantons et des communes mentionnés au I (que nous venons d’évoquer) et constituant avec eux une unité écologique ou paysagère ainsi qu’aux zones humides situées dans les départements côtiers ». C’est l’article R322-3 qui donne la liste de ces secteurs (liste donnée dans l’annexe 6). La réforme de 2002, modifiant le périmètre du champ d’action du Conservatoire, mérite une attention toute particulière.

La réforme de 2002 : extension du périmètre d’intervention au DPM 

Le Domaine Public Maritime est une notion qui n’est pas dénuée de complexité.

Le Domaine Public Maritime naturel est « constitué du sol et sous-sol de la mer compris entre la limite haute du rivage (c’est-à-dire celle des plus hautes mers en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles) et la limite, côté large, de la mer territoriale, du sol et du sous-sol des étangs salés en communication directe et permanente avec la mer, des lais et relais de mer et de la zone dite « des cinquante pas géométriques » pour les DOM ». Ce à quoi il faut rajouter (art.L.2111-4 du CGPP) les terrains réservés en vue de la satisfaction des besoins d’intérêt public d’ordre maritime, balnéaire ou touristique et qui ont été acquis par l’Etat, et enfin les terrains soustraits artificiellement à l’action du flot demeurent compris dans le DPM naturel.

Le Sénateur Louis Le Pensec, dans son rapport au Premier Ministre rendu en 2001 (document déjà cité) appelait le législateur à réformer le champ d’action du Conservatoire en faisant en sorte que « Les espaces naturels du Domaine Public Maritime soient plus facilement et plus fréquemment confiés au Conservatoire, soit pour que celui-ci puisse mettre en œuvre une protection cohérente entre ses terrains et les espaces maritimes qui forment avec eux une unité écologique, soit lorsque des espaces qui ne sont pas situés au droit de ces terrains ont vocation à faire l’objet d’une préservation définitive ».

Et le Sénateur fût entendu car un an après c’était chose faite avec l’article 160 de la loi du 27 février 2002 dite « loi de démocratie de proximité » . Cependant, comme le souligne l’administrateur de première classe des affaires maritimes Romain Guillot, la réforme permettant l’attribution du DPM au Conservatoire a mis du temps à se concrétiser. En effet, entre 2002 et 2007 seul le site des Oiseaux dans le bassin d’Arcachon fût attribué au Conservatoire (en 2004).

Ainsi, le gouvernement a-t-il décidé de donner une nouvelle impulsion grâce à la Circulaire du 20 février 2007 . Deux modalités juridiques d’intervention du Conservatoire sont possibles : l’attribution et l’affectation définitive. L’affectation c’est lorsque l’Etat confie la gestion d’une de ses propriétés à un tiers pour une durée indéterminée. L’attribution c’est lorsque l’Etat confie la gestion d’une de ses propriétés à un tiers pour une durée de 30 ans .

Cette circulaire apporte des précisions sur le DPM susceptible d’être affecté ou attribué : Il s’agit du DPM naturel (qui, rappelons le, est inaliénable et imprescriptible) tel que décrit à l’article L.2111-4 du Code Général de la propriété des personnes publiques. La colonne d’eau ne fait pas partie du DPM naturel (comme le montre le schéma ci-dessus). De plus, la largeur d’attribution maximale se situera en deçà d’un mille à partir de la laisse des plus basses mers. Ensuite, le législateur différencie le DPM mouillé (défini comme étant le « DPM couvert par les plus hautes mers en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ») et le DMP sec (défini comme étant « le DPM au-delà du rivage de la mer, constitué par les lais et relais de mer »). Le DPM mouillé n’a pas vocation a être affecté au Conservatoire du littoral à titre permanent et sera donc « seulement » attribué au Conservatoire.

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Table des matières

Introduction
Partie I : Un établissement public protecteur du littoral français
Chapitre I : Le champ d’action territorial du Conservatoire
Chapitre II : L’administration du Conservatoire
Chapitre III : Les ressources financières du Conservatoire
Partie II : L’action du Conservatoire : de l’acquisition à la gestion
Chapitre I : L’acquisition du foncier
Chapitre II : La gestion du domaine et son usage
Chapitre III : La garderie du domaine
Conclusion

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