Le commerce international de médicaments

Le commerce international de médicaments

La mondialisation des échanges commerciaux

Le but de ma thèse est de montrer que depuis quelques années, toutes les étapes de la vie d’un médicament sont internationalisées : de la fabrication du principe actif, qui servira à produire le médicament, jusqu’à sa commercialisation, pour soigner le patient. Dans la plupart des cas, la fabrication d’un médicament n’est qu’un reconditionnement de la matière première importée. Aujourd’hui, la France exporte la moitié de ce qu’elle produit. Mais la mondialisation n’est pas sans poser de nouvelles problématiques, que nous essayerons d’expliquer à travers cette thèse. Pour la première fois, en 1997, l’Institut de médecine, instance de référence scientifique américaine, utilise l’expression, global health, que nous traduisons par santé mondiale : « Les pays du monde ont trop en commun pour que la santé soit considérée comme une question relevant du niveau national. Un nouveau concept de « santé mondiale » est nécessaire pour traiter des problèmes de santé qui transcendent les frontières, qui peuvent être influencés par des évènements se produisant dans d’autres pays, et auxquels de meilleures solutions pourraient être envisagées par la coopération »

La santé est un bien public universel, au même titre que l’éducation. La santé représente un investissement essentiel pour la croissance économique des pays en développement. Sans investissement en système de santé, l’espérance de vie est trop courte pour permettre d’accumuler suffisamment de capital et enclencher une spirale positive de développement. Comme l’avait dit Amartya Sen, prix Nobel d’économie, « ceux qui se posent la question de savoir si une meilleure santé est un bon instrument de développement négligent peut-être l’aspect le plus fondamental de la question, à savoir que santé et développement sont indissociables. Il n’est pas nécessaire d’instrumentaliser la santé pour en établir la valeur, c’est-à-dire d’essayer de montrer qu’une bonne santé peut également contribuer à stimuler la croissance économique ».

La santé mondiale est à la fois un outil sécuritaire, un investissement économique et un élément géopolitique (intérêts commerciaux, relations historiques). Selon Dominique Kerouedan, « la relecture de la santé indique que la tenue des premières conférences internationales sur le sujet, au XIXe siècle, était moins motivée par le désir de vaincre la propagation de la peste, du choléra ou de la fièvre jaune que par la volonté de réduire au minimum les mesures de quarantaine, qui s’avéraient coûteuses pour le commerce…. Ces tensions entre la médecine, la santé, les intérêts marchands et le pouvoir politique forment les termes d’une équation paradoxale inhérente à la question de santé publique » 2. « Nous vivons dans un monde indivisible où les riches ne peuvent plus ignorer les pauvres », avait déclaré Amartya Sen. Entre 2000 et 2007, les financements mondiaux des pays en développement, provenant de partenariats public-privé associant le secteur industriel et commercial, notamment les fabricants de vaccins et de médicaments, ont été multipliés par quatre (par trois pour la période 2001-2010), atteignant un pic de 28,2 Milliards de dollars en 2010. L’aide mondiale au développement a augmenté de 61% sur cette période, pour atteindre 148,4 Milliards de dollars en 2010 3.

C’est donc une occasion exceptionnelle d’établir de nouveaux partenariats entre les pays développés et ces nouvelles grandes puissances émergentes. La croissance des marchés pharmaceutiques des BRICS* (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), de 15% par an, en moyenne, depuis 5 ans, crée un besoin d’innovation, d’amélioration des politiques de santé. La demande croit au fur et à mesure que les revenus et le niveau de vie augmentent. Nous assistons aujourd’hui à une convergence BRICS-Triade (Amérique du Nord, Japon et Europe) et à un bouleversement inédit de la hiérarchie des puissances. Certes, les pays de la Triade ont été les centres d’impulsion de la mondialisation, mais les zones de relais aujourd’hui, sont les pays émergents. Ce qui est nouveau, c’est l’ampleur et l’accélération de cette globalisation au cours des dernières années.

Contextes actuels de l’industrie pharmaceutique en France par rapport à cette conjoncture difficile Malgré cette crise économique, l’industrie pharmaceutique représente le 5ème excédent commercial de l’industrie française (derrière notamment le luxe et l’aéronautique). Pour l’année 2013, l’excédent commercial (exportations – importations) est de 8 777 Milliards d’euros dégagées par les médicaments à usage humain, vétérinaire et la parapharmacie 4, contre 7 146 Milliards d’euros en 2012 et 5 300 milliards d’euros en 2011. Pour information, le solde national de la balance commerciale est de – 61 Milliards d’euros (Source : statistiques douanières). Nous verrons par la suite que le montant de la balance commerciale est à prendre avec précaution. Cependant, l’industrie du médicament traverse aujourd’hui une mauvaise passe. Bien que ce secteur ait connu pendant plusieurs décennies une forte progression, depuis 2011, il connaît une croissance nulle et pour la première fois en 2012, il est rentré en récession. Suite aux récentes crises sanitaires (Affaires Médiator et prothèse PIP (Dispositif Médical (DM*))), une crise de confiance du grand public est apparue. Dans le souci de retrouver cette confiance, auprès de leurs patients, les laboratoires dépensent de plus en plus, pour mettre au point des thérapeutiques de plus en plus sécurisées.

Selon un rapport de l’Agence Nationale de Sécurité des Médicaments et des produits de santé (ANSM*) de 2014, la consommation de médicaments reste importante en France, malgré un recul global 5. En effet, la cause principale à laquelle est confrontée l’industrie pharmaceutique, est la réduction du coût des dépenses de santé. Aujourd’hui, dans notre pays, dans le souci de contrôler les dépenses de la Sécurité Sociale, qui augmentent chaque année, les services de santé imposent un peu partout des baisses de prix aux laboratoires ou restreignent les conditions d’accès au marché et au remboursement. D’un côté, dans la Loi de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS*) de 2014, la Ministre de la Santé, Marisol Touraine, a demandé au Comité Economique des Produits de Santé (CEPS*) une économie de 971 millions d’euros sur l’enveloppe médicaments. C’est la quatrième année consécutive que des économies de l’ordre d’un milliard d’euros sont demandées. Celles-ci seront réalisées à égalité entre le médicament générique et le médicament princeps. Paradoxalement, selon les statistiques des Entreprises du Médicament (LEEM*), le médicament représente 16% des dépenses de santé et contribue à 56% aux économies de ce domaine, en 2012.

De plus, selon les articles 10 ter et 11 de l’Accord-Cadre du 5 décembre 2012, signés entre le CEPS et le LEEM 6, désormais, pour les thérapies innovantes très coûteuses, le CEPS souhaite acheter un résultat et non un produit supposé améliorer la santé. C’est ce qui est connu aux Etats-Unis sous le nom, payement for performance, et réalisé pour les produits très chers. Les patients auront accès plus rapidement au médicament (moins d’essais cliniques), mais en contrepartie, une évaluation en « vie réelle » du produit sera réalisée (exemple des nouveaux anticoagulants oraux ou le Sofosbuvir). Le but est de pouvoir suivre le médicament sur une plus grande population, dans les conditions réelles d’utilisation, validées par l’autorisation de mise sur le marché (AMM*). Selon les résultats des études post-inscription des industriels, cela conduira à un réajustement du prix par le CEPS. Une nouvelle aire apparaît où le prix sera conditionnel. Certains laboratoires internationaux ont déjà intégré ce changement de paradigme : « A l’avenir, les entreprises comme Novartis seront payées en fonction des bénéfices apportés aux patients, par opposition à la simple vente des pilules » 7. Il prend l’exemple de l’Aclasta, médicament destiné à soigner certaines pathologies osseuses. Si après avoir pris ce médicament, un patient vient à souffrir d’une fracture de la hanche, Novartis le remboursera des dépenses qu’il aura engagées à cette occasion.

Un Chiffre d’affaires France (ville – hôpital) en récession

Le graphique ci-dessous, sur la décomposition du chiffre d’affaires total réalisé par l’Hexagone, nous montre que la moitié du chiffre d’affaires France est réalisé sur notre territoire, et l’autre moitié est réalisée à l’international, via l’exportation. Notre production pharmaceutique n’est donc dépendante que pour moitié du marché national. Dans ces temps difficiles, c’est un point très important. La croissance qui fait dorénavant défaut en France, peut donc être recherchée à l’extérieur. De plus, nous pouvons voir que la partie la plus importante, en France, est représentée par le chiffre d’affaires remboursable, pris en charge par l’Assurance Maladie. Le reste à charge du patient ou ce qui est pris en charge par les mutuelles ou complémentaires, représenté par le chiffre d’affaires non remboursable, est dix fois moins important que le chiffre d’affaires remboursable. L’Assurance Maladie est donc le plus gros payeur en France.

Quant au secteur hospitalier, il ne représente qu’1/10ème du chiffre d’affaires total français et équivaut à moins d’un tiers du chiffre d’affaires remboursable, bien que les médicaments hospitaliers soient plus onéreux, que les médicaments en ville. Incontestablement, ce qui a le plus augmenté au cours de ces dernières années, ce sont bien les exportations françaises de médicaments. Les exportations de médicaments ont progressé de + 4% depuis 2012, pour atteindre un montant de 26,3 Milliards d’euros, en 2013. Les exportations retrouvent ainsi les grandeurs des années 2008 à 2010, après une année 2011 marquée par une dégradation de la conjoncture des pays acheteurs de médicaments. Pour 2013, le solde de la balance commerciale de médicaments s’établit à près de 9 Milliards d’euros (contre + 7 Milliards en 2012).

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Table des matières

Liste des abréviations
Table des figures
Table des tableaux
Introduction
La mondialisation des échanges commerciaux
Contextes actuels de l’industrie pharmaceutique en France par rapport à cette conjoncture difficile
Section I : La situation du marché pharmaceutique français entre 2012 et 2014
A/ Un Chiffres d’affaires France (ville-hôpital) en récession
B/ Evolution du chiffre d’affaires France fortement contraint par une pression constante sur les dépenses de santé
C/ Une rentabilité faible par rapport aux autres pays
Conclusion
Section II : L’achat des matières premières pharmaceutiques par la voie de l’importation : aspects réglementaires et économiques
Partie 1 : Pourquoi la mondialisation des matières premières à usage pharmaceutique ?
A/ Des changements importants dans la chaine de distribution : la segmentation de l’industrie pharmaceutique
B/ La réglementation européenne en française en vigueur sur l’importation des matières premières à usage pharmaceutique (MPUP) en 2014
a) Une nouvelle réglementation depuis 2013
b) Un premier moyen d’action : la confirmation écrite
c) Le second moyen d’action : le renforcement des inspections
d) Les différents dossiers existants pour démontrer la qualité des MPUP
e) L’arrivée des MPUP dans l’Espace Economique Européen
f) Le cas particulier des excipients
g) Les sanctions
h) Les craintes qui subsistent
i) Le cas particulier des Etats-Unis
Conclusion
Partie 2 : Quelles problématiques, la mondialisation entraîne-t-elle ?
A/ La problématique des prix de transfert : un effet déterminant sur la répartition du pouvoir d’imposer les bénéfices des groupes multinationaux
a) Contexte dans le secteur de l’industrie pharmaceutique
b) Les prix de transfert, fixés en marge du marché déterminent le montant du
bénéfice imposable, des entités d’un groupe multinational
c) La valeur en douane (OMC)
d) Exemple d’un cas concret
B/ Conséquences en France : des sources de rupture de stock, d’approvisionnement, de pénurie et falsification
a) Les ruptures d’approvisionnement et de stock
b) La falsification
c) Une demande croissante dans les pays émergents
Conclusion
C/ Quel avenir ? Vers une relocalisation possible ?
Conclusion de cette partie
Section III : Le commerce international de médicaments par la voie de l’exportation
Partie 1 : Aspects réglementaires de l’exportation des médicaments en 2014
Chapitre 1 : Dossiers visés par l’ANSM dans le cadre de l’exportation de médicaments à usage humain
A/ En application du Code de la Santé Publique : Déclaration d’Exportation (DE) pour les médicaments sans AMM
1.La Déclaration d’Exportation
1.1. Quels sont les médicaments concernés ?
1.2. Qui déclare ?
1.3. Comment constituer le dossier ?
La Déclaration d’Exportation Complémentaire (DEC)
2.1. Quels produits sont concernés ?
2.2. Qui déclare ?
2.3. Comment constituer le dossier ?
2.4. Recommandations concernant le formulaire de la DEC
2.5. Etats des lieux des Déclarations d’Exportation
B/ Autres documents non prévus par le CSP pour les médicaments bénéficiant ou non d’une AMM
1.Certificats OMS, selon la présentation de l’avis aux demandeurs, présenté le 27 septembre 2013, à l’ANSM, aux laboratoires et au LEEM
1.1. Quels produits sont concernés ?
1.2. Qui peut le demander ?
1.3. Comment constituer le dossier ?
2.Le Certificat Libre Vente (CLV)
2.1. Quels produits sont concernés ?
2.2. Qui peut le demander ?
2.3. Comment constituer le dossier ?
3.L’Attestation d’Exportation (AE)
3.1. Quels produits sont concernés ?
3.2. Qui peut le demander ?
3.3. Comment constituer le dossier ?
4.L’application concrète de cette réglementation à l’ANSM
5.Le cas particulier des médicaments psychotropes et stupéfiants
Chapitre 2 : Les exportations parallèles : voie de distribution « intra-communautaire » du médicament court-circuité par une technique particulière
A/ Origine des exportations parallèles
B/ Vers la fin du commerce parallèle ?
C/ Données de l’ANSM pour les exportations parallèles parties de France
Partie 2 : Aspects économiques de l’exportation des médicaments en 2014
Chapitre 1 : L’industrie pharmaceutique dans le monde : un contexte politico-économique qui ne peut être ignoré
A/ Le marché pharmaceutique mondial : un environnement global économique en pleine mutation
B/ La croissance par les pays émergents
Chapitre 2 : L’exportation de médicaments à usage humain par la France
A/ L’internationalisation des entreprises françaises encore insuffisante
B/ Des exportations françaises en progression
C/ Où la France exporte t-elle ?
1.L’Europe, un marché de proximité
2.L’Afrique, des liens privilégiés
3.L’Asie et le Moyen-Orient : des marchés à fort potentiel dans les années à 4.venir
5.L’Amérique ?
6.Evolution dans 5 à 10 ans
Chapitre 3 : L’importation vs l’exportation
Conclusion et perspectives
Bibliographie
Annexes

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