LE CARBONE DES SOLS EN MILIEUX FORESTIERS

Contextes du parcours scientifique

  Les activités scientifiques que j’ai effectuées tournent principalement autour des enjeux du changement climatique à Madagascar et de certaines thématiques qui peuvent s’y atteler dans le secteur forestier, à l’instar du stockage de carbone (C). Plus spécifiquement, elles partent du fait que : les forêts, notamment tropicales, seraient des écosystèmes qui ont une grande influence sur le cycle du C et du climat global ; ceci, en raison de leurs grands réservoirs de 652 gigatonnes de carbone (Gt C) pour la végétation et 1 500 à plus de 2 000 Gt C pour le sol (jusqu’à un mètre de profondeur) (FAO, 2001 ; IPCC, 2007) et aussi leur capacité de fixer (fonction puits) ou de libérer (fonction source) le C stocké. En outre, à part la fonction de régulation du climat, ces activités tiennent aussi en considération des autres fonctions des ressources « Forêts » et « Sols », entre autres : la production, la protection et le social. Dans tous les cas, elles se penchent majoritairement sur la ressource Sol suite à la rareté de leurs études et aussi aux recommandations internationales (IPCC, 2006)) de devoir considérer tous les compartiments susceptibles de stocker du C ; à savoir : aérien, litière, bois mort, racine, matière organique du sol.Dans ce sens, tout au long des phases d’exercices de mon métier de chercheur, mes activités pourraient être cadrées dans les défis internationaux portant sur : le changement climatique (Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique-CCNUCC), la dégradation des terres (Convention sur la Lutte contre la Désertification-CLD) et la sécurisation alimentaire (inclus dans la Convention sur la Diversité Biologique-CDB). En termes d’initiatives internationales et nationales, ce sont donc des activités se cadrant dans le développement ou la mise en œuvre : du Mécanisme pour le Développement Propre  .Réduction des Emissions issues de la Déforestation et de la Dégradation des forêts-REDD+, et la Réduction des Emissions issues de tous les modes d’usage des terres REDD++.Ainsi, plusieurs thématiques et questionnements de recherche ont été considérés et qui peuvent être résumés comme suivent :
– En termes de taille : (i) quelle est la quantité de carbone (en termes de stock de C à l’unité de surface – en ha) renfermées par les écosystèmes forestiers malgaches ?; (ii) Quelles sont leurs variabilités ?; (iii) Compte tenu des contextes malgaches (richesse bio-pédo-climatique) Quelles seraient les méthodes apprpriées (lors des prélèvements sur le terrain et des calculs)
– Les divers compartiments (à savoir : l’aérien et le racinaire de la végétation (biomasse), la litière, la matière organique du sol, les bois morts) sont-ils d’une même importance en termes de contribution à ces quantités mesurées ?
– Quels sont les effets modes d’usage des terres existants en milieux forestiers à Madagascar, dans le cadre de la rente C (MDP et REDD+) ?
– Quels sont les devenirs des stocks de C mesurés par compartiment suite à ces changements d’usage des terres (trajectoires de la dégradation ou de la restauration des écosystèmes forestiers)?
– Quels sont les facteurs déterminants qui influencent et contrôlent ces quantités de C mesurées ; sont-ils les mêmes (type, nature et importance relative) pour tous les compartiments et aussi pour toute échelle d’étude ?
– En termes de modélisation: (i) quels modèles pour prédire les quantités de C d’un compartiment ou de tous les compartiments, ceci compte tenu de leurs variabilités et des complexités rencontrées? ; (ii) compte tenu des déterminants de stockage, quels modèles appropriés pour détecter le changement de ces stocks dans le temps et dans
l’espace en conséquence aux changements d’usage des sols et aussi des variabilités des facteurs pédoclimatiques ?
– Quels systèmes d’informations (incluant l’ingénierie et les aspects géographique et spatial) à instaurer afin d’archiver et exploiter au mieux ces données pédologiques et données sur le C pour une meilleure prise de décision à l’égard d’une bonne gestion des ressources « Sols » et de leur environnement?

DEA 2004-2005

  Dans cette première période, l’objectif principal était de contribuer à la connaissance des quantités de carbone des forêts denses sèche du Menabe central (région de Morondava), notamment de la forêt de Kirindy. Les compartiments considérés à travers les mesures directes assez simplifiées étaient : (i) la partie aérienne de l’arbre (feuille, branche, tronc) ou la biomasse aérienne; (ii) la partie racinaire de l’arbre (sans catégorisation des racines creusées sur 1m2 jusqu’à une profondeur maximale de 75 cm) ou la biomasse racinaire ; et (iii) la litière.Plus spécifiquement, les objectifs étaient d’abord de pouvoir développer des équations allométriques locales permettant de quantifier le stock de C des compartiments cités ci-dessus et à travers les mesures directes via abattage et de pesage d’arbres ; ceci en comparaison avec les équations allométriques standards internationaux, entre autres : celle de Brown1 (1997) pour la biomasse aérienne et celle de l’UNESCO2 (1979) pour la biomasse racinaire. Par la suite, il s’agissait de la valorisation des données d’inventaire déjà avancées sur la forêt de Kirindy pour évaluer les stocks de C sur une unité de surface ; des données catégorisant les classes de diamètre des arbres en cinq (5) classes3. Afin d’atteindre ces objectifs, les coupes et pesées des compartiments de la biomasse ont été faites sur dix (10) espèces dominantes avec des diamètres de 1-5 et 10 cm de cette forêt, combinées aux pesées des litières (sur 1m2 de surface) et aussi aux analyses au laboratoire auprès du FOFIFA Tsimbazaza pour la détermination des poids secs de ces compartiments et aussi de leurs éventuelles teneurs en C. Ces activités ont été menées sous la coordination des enseignants chercheurs de l’ESSAForêts et ont été appuyées financièrement par la Coopération Suisse-principal partenaire de l’ESSA-Forêts.

THESE 2006-2009

  Le schéma conceptuel correspondant à la Figure 2 présente le cadre des activités de recherche entreprises durant cette deuxième phase de mon parcours. Durant cette seconde phase, l’objectif principal était d’évaluer les potentialités des plantations d’Eucalyptus robusta à stocker du C dans ces différents compartiments. En effet, à part l’importance socio-économique de ces taillis, aucune connaissance n’a encore existé sur leur importance écologique en relation avec la régulation du climat (fixation ou émission de C) et ceci est aussi important compte tenu des contextes contraignants sur la viabilité de ces peuplements d’eucalyptus. Ces contextes sont, entre autres : la conduite des taillis d’eucalyptus des Hautes Terres malgaches (durée de rotation devenant de plus ne plus courte), de l’âge avancé des souches d’eucalyptus (jusqu’à plus d’un siècle, sans renouvellement des souches) et aussi de l’importante densité des rejets par souche (absence de traitement sylvicole sur la sélection de rejets). Afin de pouvoir évaluer ces potentialités, divers compartiments de C ont été considérés (aérien, litière, racinaire, matière organique du sol) et la recherche a aussi abordé le sujet à différentes échelles ; à savoir :
– l’échelle de l’arbre où l’on peut distinguer deux catégories de compartiments :
 les compartiments aériens de la plante qui sont non pérennes : constitués par les feuilles, les branches (qui chutent pour former la litière) et les troncs des rejets (ces derniers correspondent aux bois d’énergie, en substitution aux énergies fossiles),
 les compartiments sous terrains dans le sol qui sont pérennes : ce sont la souche et les racines qui constituent des organes de réserve de stock de C,
– l’échelle de la parcelle où on a :
 la densité des souches à l’unité de surface (ha) qui peut varier,
 le compartiment de la litière : qui se confond avec le mat racinaire et dont une certaine quantité de C de la litière est perdue au niveau de la parcelle d’eucalyptus  selon le flux de l’exportation en vue d’une valorisation en fumure organique dans les parcelles de culture,
 le type de végétation correspondant aux modes d’usage des terres : pied d’eucalyptus, cultures non pérennes et pseudo-steppe (comme végétation originelle de référence)
 le compartiment du sol : qui est approvisionné en C par la décomposition de la partie restante de la litière et aussi par les exsudations racinaires ainsi que la décomposition d’une partie de la biomasse racinaire après la récolte des rejets,
– l’échelle du paysage où :
 il y a exportation du C hors de la parcelle d’eucalyptus vers les villages, ce qui témoigne de la capacité de ces taillis d’eucalyptus en tant que bioénergie à éviter les émissions par la combustion des énergies fossiles,
 on rencontre la variation de l’âge des parcelles de plantation d’eucalyptus et aussi la variabilité morpho-pédologique de chaque parcelle (sous eucalyptus ou autres modes s’usage des terres).
En outre, en considérant le souhait de pouvoir évaluer l’éligibilité et l’importance des plantations forestières dans la séquestration de C contribuant ainsi à la mise en œuvre du MDP et de la rente C, les différentes mesures directes (inventaire forestier, échantillonnage des compartiments aériens et racinaires, échantillonnage des sols) ont d’abord été menée au niveau de la Commune Rurale (CR) de Sambaina dans le District de Manjakandriana. Par la suite, d’autres travaux de terrain, particulièrement ceux en relation avec le cadrage du MDP, ont été menés dans une autre CR- à Sadabe (toujours dans le District de Manjakandriana) qui présentait un front d’afforestation, très intéressant pour l’exercice d’évaluation des potentiels d’évitement.Les activités lors de cette phase ont été menées en étroite collaboration avec le CIRAD/FOFIFA – DRFP (Direction des Recherches Forestières et Piscicoles), sous la supervision de l’IRD-Unité de Recherche SeqBio à Montpellier et à Madagascar. Les principales sources de financement pour le fonctionnement de la thèse, tous les travaux de terrain et de laboratoire ont été le SCAC Ambassade de France à Madagascar et la bourse de thèse IRD.

Résultats sur les études de la dynamique temporelle des stocks de carbone

  On parle de différents types de modèles pour suivre l’évolution du C du sol dans le temps comme il est encore assez difficile dans les cas de Madagascar de disposer de placettes permanentes pour faire des suivis dans le temps. Les catégories de modèles sont entre autres : les modèles empiriques (dont la construction est basée sur les mesures directes et valeurs effectives de stocks sur terrain) et les modèles ou outils standards (développés pour la plus part du temps par les chercheurs du Nord et à la base de leurs placettes permanentes).
a) Recours aux modèles empiriques Il existe deux approches distinctes : diachronie (comparaison des résultats des mesures à deux dates différentes, donc suivie réelle d’une certaine chronoséquence) et synchronie (comparaison à une même date t les mesures sur une chronoséquence). Toutefois, par la suite de la différence de méthodes de mesure actuelle comparées à celles lors des premières études pédologiques (par l’ORSTOM vers 1970), les objectifs que l’on s’est fixé pour les études dans la région d’Antsirabe n’ont pas pu aboutir. Par conséquent, l’approche diachronique (basé sur les analyses des chronoséquence d’images satellites disponibles et appuyées par les travaux de terrain effectifs) sur les données disponibles dans l’Ecorégion Humide de Madagascar ont fait ressortir que : (i) malgré une variabilité sur les données obtenues (incarnant la complexité de la ressource Sol dans le temps et dans l’espace), la conversion des forêts en autres modes d’usage des terres impacte en la diminution du SCS qui est d’une importance en général sur les 10 à 15 premières années après la conversion , (ii) cette diminution qui correspond à une perte par rapport à l’état sous forêt va de 9,57 à 47,17% et elle varie suivant un certain nombre de facteurs (type de sol, nature de la conversion et de la pratique qui s’en suive, la région d’étude avec ses caractéristiques biophysiques, …), (iii) cependant, plus loin, le calcul des facteurs d’émission n’a pas été concluant compte tenu du peu de données disponibles sur les SCS ayant permis de déceler l’impact réel de cette conversion des forêts .Les facteurs d’émission et de variation de stock de C après déforestation correspondent aux différences des stocks « sous forêt naturelle » et « sous autres modes d’usage des terres » ; ils sont souvent exprimés en delta carbone (∆C) et sont vivement recommandés par IPCC (depuis 2006) de les établir au niveau local (Tier 3) pour les inventaires de gaz à effet de serre nationaux et communications nationales par les  (après 10 ans de conversion), mis à part l’impact des autres déterminants du SCS. Ces ∆C variaient de -10 à +15 MgC.ha-1pour forêt vs non-forêt en général et de -5 à +25 MgC.ha- 1pour forêt vs jachère en général.
b) Recours à l’outil Ex-ACT7 Cet outil qui est en fait un calculateur sous un tableur Excel compare les stocks de C fixés ou émis au cours des changements de situations (en termes de changement de surfaces en ha sous différents modes d’usage des terres après conversion des forêts) dans deux contextes distinctes : si on met en place le projet REDD (avec projet REDD) ou si on ne le met pas en place (sans projet REDD, la situation Business As Usual correspondant au niveau de référence). L’exercice a été mené dans toute l’île, en considérant les projets pilotes REDD+ mis en place depuis les années 2004 (donc incluant différents types de forêts : dense humide, dense sèches, mangrove, tapia, …) et il a visé en même temps : (i) à tester l’efficacité de l’outil pour une simulation sur 30 ans, (ii) en comparant les résultats issus des deux niveaux de précision qu’il offre (Tier1 recourant aux valeurs standards donc avec un niveau de précision plus faible ; Tier2 utilisant les valeurs nationales disponibles qui donnerait un niveau de précision plus élevé)) et (iii) en essayant de voir la contribution éventuelle du C du sol (sur 0-30 cm) dans cette simulation. Il en est sorti que : (i) la mise en place des projets REDD+ aboutit à un bilan négatif (réduction des émissions) de GES en équivalent carbone avec une part importante du compartiment sol (≈ 60% de séquestration et/ou d’évitement d’émission) par rapport au compartiment aérien de la végétation ; (ii) un potentiel de réduction d’émissions qui varie selon le type de forêt ; (iii) l’inexistence de différence des résultats obtenus entre les deux niveaux de précision (Tiers) mais quand –même avec une réduction des incertitude jusqu’à 15% de Tier1 à Tier2.
c) Recours au modèle RothC Cet autre exercice se focalise sur le devenir du C du sol dans le cadre de la REDD et en tenant compte des scénarii de continuité de la déforestation (en se basant sur l’historique de la déforestation à Madagascar) et aussi celui sur les projections climatiques à Madagascar. Le modèle Rothamshed ou RothC, tout comme l’outil Ex-ACT, prend en considération les changements d’utilisation des terres. C’est un modèle qui se focalisent sur le processus impliquant le mouvement et les transformations de la matière en énergie et il fonctionne à un pas de temps mensuel, tout en considèrant différents compartiments de matière organique qui sont caractérisés par leur nature et vitesse de minéralisation (Jenkinson et Rayer, 1977) s’agit donc de l’étude de la dynamique du stock de carbone du sol SCS sur 0-30cm, à l’aide du modèle RothC dans les zones des 5 principaux projets-pilotes REDD de Madagascar(les mêmes que pour Ex-ACT) dont la majorité est recouverte par une forêt dense humide sempervirente. Dans ce modèle, ont été tenus en compte les paramètres qui caractérisent à la fois ce modèle et les zones en question dont la teneur en argile, la couverture du sol ainsi que les paramètres climatiques : température et précipitations. IL en est sortie que : (i) le SCS diminue avec la perte de la couverture forestière, (ii) le SCS n’est pas très sensible aux changements climatiques simulés sur 30ans, et que le SCS est alors plus sensible à la déforestation qu’à l’augmentation de la température et à la baisse des précipitations, (iii) une baisse de SCS de plus de 75% a été notée pour l’ensemble de ces sites suites à la déforestation seule ou combinée aux changements climatiques (à peu près le même ordre de grandeur que le résultats de Ex-ACT).

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Table des matières

I. PRESENTATION SUCCINCTE DU PARCOURS SCIENTIFIQUE
II. SYNTHESE DES TRAVAUX DE RECHERCHE
II.1. Contextes du parcours scientifique
II.2. Première phase de la recherche (DEA 2004-2005)
II.2.1. Cadrage des activités de recherche
II.2.2. Les principaux résultats obtenus
II.3. Deuxième phase de la recherche (THESE 2006-2009)
II.3.1. Cadrage des activités de recherche
II.3.2. Les principaux résultats obtenus
II.4. Troisième phase de la recherche (2010- première moitié 2014)
II.4.1. Cadrage des activités de recherche
II.4.2. Les principaux résultats obtenus
III. PERSPECTIVES : QUATRIEME PHASE DES TRAVAUX DE RECHERCHE (2ème moitié 2014 à 2024)
III.1. Cadrage général
III.2. Approche à adopter et principaux résultats attendus
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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