L’autodétermination en déficience intellectuelle

L’autodétermination en déficience intellectuelle

La déficience intellectuelle: définition et prévalence

Depuis plus de deux cents ans, une variété de termes et de définitions est utilisée afin de circonscrire ce qui est aujourd’hui désigné comme la déficience intellectuelle (Schalock et al., 2007). Des termes tels qu’idiotie, imbécilité, faiblesse d’ esprit ou retard mental sont dorénavant remplacés par le construit de déficience intellectuelle. Les termes d’abord utilisés considèrent l’incapacité comme une condition ou une anomalie de la personne (American Association on Intellectual and Developmental Disabilities [AAIDD], 20 Il; Wehmeyer et al., 2008). Le construit de déficience intellectuelle se distingue de ces termes puisqu’il situe désormais l’incapacité comme le point de rencontre des forces d’ une personne et du contexte dans lequel elle évolue.
Ainsi, la conception actuelle de la déficience intellectuelle repose sur une perspective écologique de l’ incapacité (AAIDD, 2011; Schalock et al., 2007).
Une étude des définitions employées au cours des 50 dernières années par l’American Association on Mental Retardation (devenue l’American Association on Intellectual and Developmental Disabilities [AAIDD] en 2008) et l’American Psychiatric Association (APA) relève une constance quant à l’ utilisation de trois critères opérationnels pour définir la déficience intellectuelle: (1) des limitations significatives du fonctionnement intellectuel; (2) des limitations significatives du fonctionnement adaptatif; et (3) une apparition de ces limitations durant la période de développement (Schalock et al., 2007). La définition de la déficience intellectuelle proposée par Schalock et al. (2010/2011) tient compte de ces trois critères: « La déficience intellectuelle est caractérisée par des limitations significatives du fonctionnement intellectuel et du comportement adaptatif, lequel se manifeste dans les habiletés conceptuelles, sociales et pratiques. Cette incapacité survient avant l’ âge de 18 ans. »

Le principe de normalisation

Le principe de normalisation est introduit au Danemark par Bank-Mikkelsen à la fin des années 60 (cité dans Kemp, 1997), par Nirje  (1972) en Suède et par Wolfensberger (1972) en Amérique. Ce principe est d’ abord formulé dans le contexte d’une dénonciation croissante des conditions de vie des personnes dans les institutions (Flynn & Lemay, 1999). La normalisation consiste à tenter de normaliser les conditions de vie des personnes, c’ est-à-dire à leur donner accès aux mêmes milieux de vie que la population générale (Nirje, 1972). Le principe de normalisation implique également une certaine réciprocité dans la mesure où les personnes présentant une déficience intellectuelle et la société doivent s’ adapter l’un à l’autre. Pour Nirje (1972, 1999), cette adaptation réciproque est essentielle pour parvenir à une reconnaissance à part entière des personnes présentant une déficience intellectuelle puisqu’ un réel exercice des droits ne peut se réaliser que dans le contexte humain et culturel de sa communauté. Le principe de normalisation a un impact considérable sur les politiques sociales et les pratiques d’ intervention en déficience intellectuelle et est un déclencheur important du mouvement de désinstitutionnalisation à travers le monde (Flynn & Lemay, 1999). Les lignes directrices pour la mise en place de pratiques .
s’ appuyant sur le principe de normalisation sont les suivantes (Nirje, 1969) : (1) favoriser un rythme de vie quotidienne normal; (2) favoriser l’adoption d’une routine de vie normale qui n’ est pas toujours structurée; (3) favoriser un rythme de vie annuel normal impliquant des vacances et certains jours de l’année ayant une signification personnelle; (4) offrir des occasions de développement; ces expériences doivent correspondre au cycle normal de la vie; (5) considérer les choix et les désirs de la personne aussi souvent que possible et les respecter; (6) favoriser le contact avec des personnes des deux sexes; (7) favoriser l’accès aux mêmes conditions économiques que  celles qui prévalent dans la société; et (8) favoriser l’accès aux mêmes environnements que ceux que fréquentent les personnes de la communauté.

L’autodétermination en déficience intellectuelle

La recherche portant sur le concept d’ autodétermination dans le champ de la déficience intellectuelle a pris un essor important à partir des années 90 (Wehmeyer,  Abery, Mithaug, & Stancliffe, 2003). Les bases de données ERIC, FRANCIS, Repères et PsyInfo permettent de répertorier 206 articles portant sur l’ autodétermination et la déficience intellectuelle. La stratégie complète de repérage des articles est présentée dans le chapitre traitant de la problématique. L’analyse des études réalisées sur ce thème permet de distinguer trois grands angles par lesquels l’autodétermination est abordée. Elle est abordée en tant que construit afin de définir les caractéristiques d’un comportement autodéterminé et d’ identifier les liens entre l’ autodétermination et d’ autres concepts ou certaines caractéristiques individuelles et environnementales. Elle est également abordée comme un principe susceptible de guider l’intervention en déficience intellectuelle à toutes les phases de la vie. Enfin, elle est également abordée en tant qu’objectif d’intervention. Sous cet angle, la recherche porte sur l’ évaluation du niveau d’ autodétermination de différentes cohortes spécifiques et sur les interventions favorisant le développement des capacités des personnes d’ exprimer des comportements autodéterminés.

Le développement de l’autodétermination

Le développement de l’autodétermination fait l’objet de plusieurs études que l’on peut regrouper en trois catégories :(1) les programmes d’intervention visant le développement de  l’autodétermination; (2) la réalisation d’activités particulières favorisant le développement et l’exercice de l’autodétermination; et (3) l’utilisation de technologies de soutien à l’autodétermination.
Dans une recension portant sur différents programmes d’intervention, Malian et Nevin (2002) concluent qu’à partir d’ un curriculum précis, les personnes présentant une déficience intellectuelle peuvent développer les habiletés de base nécessaires pour exprimer leur autodétermination. Dans une méta-analyse de l’efficacité de programmes visant le développement de l’autodétermination, Algozzine, Browder, Karvonen, Test et Wood (2001) en arrivent à la conclusion que ceux-ci produisent un effet élevé sur le niveau d’autodétermination des participants. Wehmeyer et al. (2012) précisent toutefois que l’autodétermination est un construit multifactoriel et que les meilleurs programmes pour obtenir un impact sur l’autodétermination sont les programmes multidimensionnels (Wehmeyer et al., 2012). Bien que certains de ces programmes s’adressent à l’ensemble des dimensions de la vie de la personne (Abery, Rudrud, Arndt, Schauben, & Eggebeen; 1995; German, Martin, Marshall, & Sale, 2000), plusieurs d’ entre eux se sont développés en fonction de contextes de vie particuliers: la transition de l’ adolescence à l’âge adulte (Lachapelle & Boisvert, 1999; Snyder, 2002; Wehmeyer et al., 2012; Wehmeyer, Garner, Yeager, Lawrence, & Davis, 2006; Wehmeyer, Palmer, Lee, Williams-Diehm, & Shogren, 2011), la vie résidentielle (Faw, Davis, & Peck, 1996; Sheppard & Unsworth, 20 Il), les loisirs (Dattilo & Hoge, 1999; Mahon, 1994; Williams & Dattilo, 1997;) et la vieillesse (HelIer, Miller, Hsieh, & Stems, 2000).

Synthèse de la pertinence scientifique

Les personnes présentant une déficience intellectuelle ont un plus faible niveau d’autodétermination que la population générale. Cette situation apparaît problématique  dans la mesure où l’ autodétermination est corrélée positivement avec différents éléments désirables pour la personne (le niveau de qualité de vie, la participation sociale, les revenus, etc.). Toutefois, plusieurs études démontrent qu’il est possible d’ accroître le niveau d’autodétermination d’une personne par la participation à différents programmes, par la réalisation d’ activités ou par le biais du soutien de différentes technologies. Ce constat interpelle directement les différents intervenants qui soutiennent les personnes présentant une déficience intellectuelle. En effet, ces derniers ont la possibilité de jouer un rôle important dans le développement de l’autodétermination. Or, la perspective des intervenants sur l’ autodétermination ne constitue pas jusqu’ à maintenant un thème majeur de recherche en déficience intellectuelle. En effet, on ignore toujours dans quelle mesure l’ autodétermination exerce une influence réelle sur les pratiques professionnelles des intervenants. Pourtant, l’ accroissement des connaissances sur cette thématique permettrait de mieux comprendre les enjeux posés par l’ autodétermination et favoriserait le développement de pratiques professionnelles plus efficaces sur ce plan.

 

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Table des matières

Introduction
Contexte 
Pertinence sociale
La déficience intellectuelle: définition et prévalence
L’évolution des pratiques en déficience intellectuelle
Les pratiques basées sur des croyances surnaturelles et des superstitions
Les pratiques basées sur une conception médicale de la déficience intellectuelle
Les pratiques basées sur la reconnaissance du potentiel d’éducation des personnes
Les pratiques basées sur un encadrement institutionnel
Les pratiques d’institutionnalisation
Les pratiques basées sur la reconnaissance des droits de la personne et de son potentiel d’autodétermination
Le principe de normalisation
La valorisation des rôles sociaux
L’intégration sociale
La participation sociale
L’autodétermination
Synthèse de la pertinence sociale
Pertinence scientifique
L’autodétermination en déficience intellectuelle
L’autodétermination comme construit
Les composantes de l’autodétermination
Les liens entre l’autodétermination et d’autres concepts
Les liens entre l’autodétermination et des caractéristiques
personnelles et environnementales
L’autodétermination comme principe d’intervention
L’autodétermination comme objectif d’intervention
L’évaluation du niveau d’autodétermination
Le développement de l’autodétermination
Synthèse de la pertinence scientifique
Conclusion
Problématique
Stratégie de repérage des écrits scientifiques
Recension des écrits scientifiques
Les études portant sur les professionnels en milieu scolaire
Les études portant sur le développement professionnel des intervenants en regard de l’autodétermination
Les études portant sur la compréhension des enjeux rencontrés par les intervenants pour favoriser l’autodétermination
Synthèse de la recension des écrits scientifiques
But et questions de recherche
Cadre théorique
Théorie fonctionnelle de l’autodétermination
Définition constitutive de l’autodétermination
Définition opérationnelle de l’autodétermination
Théorie écologique de l’autodétermination
Postulats fondamentaux
Modèle écologique tripartite de l’autodétermination
Les compétences à l’exercice de l’autodétermination
Les différents niveaux systémiques
Approche socioécologique pour le développement de l’autodétermination
Premier niveau
Deuxième niveau
Troisième et quatrième niveaux
Cinquième niveau
Synthèse du cadre théorique
Cadre méthodologique
Une recherche descriptive
Un paradigme épistémologique constructiviste
Une approche collaborative
La méthode
Déroulement de la recherche
Les participants
Les outils de recherche
Le questionnaire
Les entretiens individuels initiaux
Les groupes de discussion
Rencontre 1
Rencontre 2 à 5
Les rencontres de débreffage
Les entretiens individuels finaux
La rencontre de validation de l’analyse et de l’interprétation
Le journal du chercheur
La stratégie d’analyse
Les critères de scientificité
Les critères éthiques
Comité d’éthique de la recherche
Résultats
Les conceptions de l’autodétermination
L’autodétermination comme construit
Les composantes de l’autodétermination
L’autonomie comportementale
L’autorégulation
L’autoréalisation
L’empowerment psychologique
L’autodétermination comme principe
L’universalité du principe
L’autodétermination comme besoin
La réponse au besoin d’autodétermination
La conséquence de la non-réponse au besoin d’autodétermination
L’autodétermination comme droit
Les droits rattachés à l’autodétermination
Les contraintes à l’expression de l’autodétermination comme droit
L’autodétermination comme capacité
Les avantages de considérer l’autodétermination comme une capacité
Les capacités rattachées à l’autodétermination
L’autodétermination comme objectif
La transposition de l’autodétermination en objectifs
Le réalisme de l’autodétermination comme objectif
La fréquence de l’autodétermination comme objectif
La priorité de l’autodétermination comme objectif
L’autodétermination comme moyen
L’autodétermination et les technologies
Synthèse et interprétation des résultats sur les conceptions de l’autodétermination
Les pratiques d’intervention en autodétermination
Les interventions réalisées auprès des personnes
Développer la connaissance de soi
Développer la connaissance de ses droits
Développer la capacité à communiquer
Développer la capacité à résoudre des problèmes et à se responsabiliser
Développer la capacité à s’autoréguler
Développer la capacité à identifier les conséquences de ses gestes et à tenir compte des risques
Favoriser des expériences accompagnées
Soutenir la personne dans la réalisation de ses choix
Favoriser la participation de la personne aux prises de décisions qui la concernent
Recourir à différents outils d’évaluation et programmes d’intervention
Les interventions réalisées auprès des systèmes
Famille naturelle
Développer la connaissance de l’autodétermination
Favoriser la participation de la famille naturelle
Travailler sur les valeurs, les croyances et les perceptions
Famille d’accueil
Développer la connaissance de l’autodétermination
Aider la famille d’accueil à revoir son fonctionnement
Aider la famille d’accueil à solliciter les compétences de la personne
Expliquer ses interventions pour favoriser l’adhésion
Travailler sur les valeurs, .les croyances et les perceptions
Les variables individuelles qui influencent les interventions
Le niveau de déficience intellectuelle
Les caractéristiques neurologiques
Le niveau de compréhension et sa conscience du danger
Les troubles de comportement
L’histoire de vie
La connaissance de soi, de ses forces et de ses limites
Les capacités
L’ estimation de ses capacités
Les préférences et aspirations
Le désir de plaire et la tendance à la soumission et la passivité
La volonté de recevoir ou non des services
Le réseau social
La situation financière
Les variables environnementales qui influencent les interventions
L’intervenant
La connaissance de l’autodétermination
La capacité à tenir compte de l’autodétermination dans ses différentes interventions
La connaissance de la personne
La relation avec la personne
L’ attitude envers la personne
La croyance au potentiel de la personne
La famille naturelle
Les souhaits pour la personne
Le niveau d’accord avec les décisions de la personne
Les craintes pour la sécurité de la personne
La relation avec la personne
L’accès à des services psychosociaux
Les ressources financières
La famille d’accueil
La relation avec la personne
L’attitude à l’endroit de la personne
La croyance au potentiel de la personne
Le fonctionnement quotidien
La collaboration entre les différents microsystèmes
La collaboration entre l’intervenant et la famille naturelle
La collaboration entre l’intervenant et la famille d’accueil
La collaboration entre intervenants
L’organisation
La nouvelle offre de service des CRDITED
La place de la personne dans les services
Le temps d’intervention disponible
Les responsabilités de l’organisation et de ses intervenants à l’égard de la personne
La disponibilité des ressources résidentielles
Le soutien de l’organisation à la famille d’accueil
Le mode de rétribution des familles d’accueil
La syndicalisation des familles d’accueil
La société
La conception de la personne présentant une déficience intellectuelle
Synthèse et interprétation des résultats sur les pratiques d’intervention en autodétermination
Interventions réalisées auprès de la personne et de son environnement
Variables individuelles
Variables environnementales
Discussion
Les conceptions de l’autodétermination
De l’abstrait au concret
Du général au particulier
Modélisation des conceptions de l’ autodétermination
Le cadran pratique
Le cadran éthique
Le cadran cadre d’ intervention
Le cadran fondements conceptuels et théoriques
L’ intervention
Les pratiques d’ intervention en autodétermination
La personne au centre de l’intervention
Les compétences de la personne
Le risque
La volition
Les interactions entre ces trois dimensions
Modélisation de l’intervention pour le développement de l’autodétermination
Le réseau naturel et professionnel
Les relations entre la personne et les membres de son réseau naturel et professionnel
Les relations entre les différents membres des réseaux naturels et professionnels
L’exosystème
Le macro système
Le temps
Synthèse intégrative
Conclusion
Contributions de la thèse à l’avancement des connaissances
Valeur épistémologique des connaissances produites
Limites de la thèse
Recommandations
Les intervenants
Les organisations
Les décideurs
Avenues de recherche
Références

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