L’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville

Une stratégie festivalière adaptée aux ambitions de l’association

Comme tout festival ou manifestation ponctuelle, le Grand Bivouac peut exister et perdurer uniquement grâce aux publics, aussi diversifiés soient-ils : festivaliers et festivalières,invité·es, membres de l’équipe organisationnelle, bénévoles, médias et partenaires… La réalisation, le succès et la pérennité d’un événement tiennent à la cohérence amenée au projet, dans les ambitions, les enjeux et les missions qui en découlent. Il s’agit alors de penser conjointement le propos, la programmation et la communication afin de définir une identité à laquelle les publics se familiariseront et dont ils pourront s’emparer.

L’affirmation d’une identité singulière

Comme évoqué plus haut, bien qu’ayant une programmation que d’autres festivals et événements partagent, le Grand Bivouac tente de se démarquer et de garder une longueur d’avance. Affirmer sa singularité permet tout à la fois pour le festival d’exister au sein d’un milieu concurrentiel grandissant, de consolider et d’affiner son propos éditorial et de se montrer lisible auprès des partenaires et des publics. C’est dans cette logique que depuis 2018, le Grand Bivouac ajuste et confirme son double objectif d’aide à la compréhension du monde à travers l’image, le témoignage et la rencontre, et d’incitation au voyage et à la découverte. Cette évolution éditoriale s’accompagne d’une rigueur dans la programmation qui illustre majoritairement le propos du festival, à travers notamment les trois offres principales, à savoir la sélection des films documentaires, la programmation littéraire et les conférences-débats.
Ainsi, les rendez-vous et œuvres font l’objet de recherches plus significatives et récentes, et le panel d’invité·es est pensé comme devant davantage accompagner les interrogations des publics et conforter la notoriété du festival. Première édition témoin de la progression de la ligne éditoriale, l’édition 2019 a priorisé une approche du monde lui-même plutôt que celle centrée sur le processus de voyage. Malgré les regrets ou doutes, discrets et réduits, de la part de certains publics, l’engouement quasi général a démontré qu’une approche plus sensible de la compréhension du monde est la bienvenue. Cette progression, de toute évidence, chemine déjà depuis quelques temps, selon moi. En effet, les thèmes donnés à chaque édition depuis 2002 révèlent depuis plusieurs années une attention davantage portée à l’humain qu’au voyage. À partir de « Peuples des jungles et des montagnes » en 2004 ou « L’Himalaya » en 2006 par exemple, le Grand Bivouac s’est tourné vers « Mondes turbulents, voyageurs magnifiques » en 2011, « Quel beau chambardement » en 2018 et « Les mille et un voyages du vivant » en 2019.
Les choix thématiques sont mûrement pensés et doivent être percutants et efficaces pour refléter les interrogations sociales et sociétales qu’ils soulèvent. L’an passé était par exemple l’occasion de se pencher sur l’appréhension de l’existence en mouvement, à la fois « de l’Homme, de la nature, des cultures et des idées » , donnant ainsi à voir tous les chemins du vivant pour en célébrer leur diversité et leur richesse. Ces thèmes confèrent au festival une identification supplémentaire auprès des publics, le fil conducteur de l’édition soutenant la démarche de compréhension du monde au Grand Bivouac.
Par ailleurs, si un événement se définit principalement par sa programmation, les invité·es qu’il présente ou les sujets qu’il soulève, il est aussi apprécié pour l’ambiance générale qu’il génère. Comme j’avais pu le constater l’an passé au Festival du Film court en Plein air de Grenoble, ce sont les impressions et les ressentis vécus lors de l’événement qui inscrivent celui ci dans l’esprit et les souvenirs des publics. Une expérience positive, puissante et riche en émotions donnera probablement lieu à un sentiment d’attente et d’envie pour les éditions prochaines auprès des publics. Moment exceptionnel en ce qu’il anime le quotidien et la vie sociale, un festival est souvent vécu par les publics comme devant également être convivial, « associant aux propositions artistiques l’ambiance et l’univers du festival » . Mais la profusion de festivals en France ne banaliserait-elle pas l’idée d’événement en général ? Benoît Thiebergen, Directeur du festival Les Détours de Babel à Grenoble, répond en refusant cette connotation négative de l’« événementialisation de la culture » : « Mais si les festivals se multiplient, c’est que les gens ont envie de rompre avec le quotidien, ou plutôt de donner du relief à leur quotidienneté » . Donner du relief à une expérience vécue, cela peut passer par ce que l’on y découvre, ce que l’on y fait et ce qu’on y partage. Une majeure partie des publics semble effectivement sensible à l’espace laissé à la parole, à l’échange et à la rencontre, à la faveur de conférences, de débats qui font suite aux animations et aux rencontres au sein du festival. Depuis quasiment vingt ans, le Grand Bivouac cultive l’idée d’un festival rassembleur, chaleureux, dynamique et mobilisateur où les notions de festivité et de rencontre tiennent une place phare. « Quel bonheur de parcourir le monde avec vous ! » déclare Guy Chaumereuil dans son éditorial 2019, optant pour une écriture qui unit les familiers et familières du Grand Bivouac. Favorisant cette dynamique de partage et d’échange, il conclut cette ouverture du programme par « N’hésitez pas à nous questionner, à nous alerter, à nous enrichir de vos propres réactions, de vos propres attentes : chemin faisant, on se dit tout ».

Pour une appropriation des éditions par les publics

L’identité du Grand Bivouac étant posée et renforcée d’édition en édition, il s’agit également de la valoriser aux yeux des publics pour susciter leur adhésion et répondre aux problématiques, de fréquentation, de satisfaction et de pérennisation, significatives des festivals. Tirant parti du travail de recherche effectué l’an passé à partir du Festival du Film court en Plein air de Grenoble, je soulève une nouvelle fois l’idée que les stratégies de communication constituent l’un des piliers du développement d’un événement. Ce secteur encadre l’événement – le contenant illustrant le contenu – et sert d’intermédiaire auprès des publics, allant ainsi au-delà de sa dimension purement informative et se dotant d’une fonction qui se rapproche de la médiation. L’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville repose, tout comme la Cinémathèque de Grenoble, sur un travail approfondi accordé à la communication. Le changement d’intitulé du festival pour « festival du film documentaire et du livre » en 2019 offre notamment la possibilité d’être plus visible et compréhensible au regard des interlocuteurs et interlocutrices, publics et professionnel·les. Ce choix s’accompagnera d’un slogan percutant qui reste encore à définir ; simple et clair, il permettra d’éviter toute confusion à propos du festival. Il serait en effet dommage que certain·es envisagent le Grand Bivouac comme une manifestation uniquement pro-touristique, festival des globe-trotters, ou comme un événement altermondialiste, pro-écologique ou pro-environnemental. C’est justement la transversalité du Grand Bivouac qu’il est nécessaire de retenir. Si l’événement soulève plusieurs thématiques et s’adresse à des sensibilités diverses, il n’est pas pour autant cloisonné dans l’une d’elles, mais se veut « montrant » et « interrogeant ».

Compte-rendu des missions personnelles

Ma candidature pour l’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville s’est dans un premier temps faite auprès de Jean-Sébastien Esnault et d’Hélène Dubuisson-Duru. Quittant ses fonctions fin décembre 2019, elle m’a toutefois consacré deux demi-journées de formation accélérée en amont de mon arrivée en février 2020. Sous la direction officielle de JeanSébastien Esnault, je travaille en collaboration avec Virginie Lacroix, arrivée tout début mars, et Antoine Laurent. Deux stagiaires, Line et Fiona, ont rejoint l’équipe fin mai pour une durée d’un mois environ en renfort.
De manière générale, les organisations du Grand Bivouac et du Printemps de la Montagne font l’objet d’un travail transversal et d’une mise en commun régulière, favorisant une communication interne efficace. Dans ce fonctionnement, Jean-Sébastien Esnault accompagne et guide l’équipe de son expérience, sa créativité et son recul.
La crise sanitaire est venue bouleverser l’organisation normale de l’association et le travail de l’équipe, imposant un régime de télétravail à compter du 16 mars 2020, d’abord à temps plein puis à temps partiel, pour une durée indéterminée.

Les missions liées à la communication

Les missions qui m’ont été et me seront confiées concernent principalement la communication. Elles me permettent ainsi de mettre en pratique les acquis de ma formation, mais aussi les apprentissages que je retiens de mon stage pour le Festival du Film court en Plein air de Grenoble, de manière plus approfondie et au sein d’un champ plus large d’intervention.
L’été à venir constituera une période charnière pour l’organisation du Grand Bivouac en matière de communication, mais j’ai pu saisir et comprendre, à minima, les enjeux de ce qui me sera confié grâce aux missions réalisées pour le Printemps de la Montagne. J’ai principalement été missionnée pour la mise à jour et l’exploitation de fichiers de travail, la création et le suivi de supports de communication, la veille et la création de communication digitale, et le suivi de renouvellement de partenariats.
La création et l’actualisation de fichiers se sont illustrées notamment à l’occasion de la mise à jour du rétroplanning communication avec Virginie Lacroix, sur lequel sont mentionnées toutes les échéances, de la conception de l’édition jusqu’à sa réalisation. Bon nombre de formulaires en ligne sur le site web ont aussi nécessité une actualisation (formulaires d’adhésion, de bénévolat ou de réservations pour les Salons par exemple), ainsi que des conventions de partenariat après le renouvellement de la collaboration. De manière générale, il a été nécessaire de penser une stratégie de communication, pour le Grand Bivouac principalement, consistant à établir les moyens à mettre en œuvre pour répondre aux objectifs d’attractivité, de fréquentation et de pérennisation.
À mon arrivée début février, mes missions ont plus concerné le Printemps de la Montagne que le Grand Bivouac, même si des réflexions et des avancées étaient réalisées conjointement. La programmation et la ligne éditoriale de l’événement d’avril étaient quasiment bouclées. En charge de la recherche iconographique, j’ai été guidée par l’équipe pour trouver un visuel, le compléter par des éléments graphiques nécessaires et le décliner pour les réseaux sociaux. J’ai ainsi progressé davantage sur le logiciel Photoshop, et plus particulièrement sur InDesign, que je maîtrisais moins à mon arrivée et grâce auquel j’ai conçu le programme du Printemps de la Montagne. Ce programme, reprenant le même format A5, la même charte graphique et la même structure que celui du festival d’octobre – de manière bien plus réduite, huit pages contre cinquante-deux – regroupe l’éditorial, le sommaire, les détails de la programmation, des informations pratiques, les partenaires et les contacts principaux de l’association. Les soucis de lisibilité, de clarté et d’esthétique du programme n’ont évidemment pas été mis de côté, au contraire. Une fois les supports de communication réalisés, un kit média a été conçu afin de le transmettre aux journalistes intéressé·es, regroupant l’éditorial de l’événement, les visuels, les synopsis et les affiches des films projetés. L’éditorial, rédigé par Guy Chaumereuil, a également fait l’objet d’un nouvel onglet sur le site Internet et d’une newsletter à destination à la fois de la presse et des publics du Grand Bivouac. J’ai donc découvert le travail de rédaction et de mise un page de newsletters, via le logiciel Send in Blue, outil sur lequel je ne m’étais encore jamais exercée. Le travail de veille et d’apports sur le CMS20 du site m’a permis de me familiariser davantage avec cet outil que j’ai manié à minima à la Cinémathèque de Grenoble et pour le Printemps des Poètes l’an passé. Au-delà du contenu informatif, j’ai aussi alimenté en collaboration avec Jean-Sébastien Esnault le calendrier événementiel qui détaille chaque rendez-vous – projection, rencontre littéraire, soirée contes, concert – et permet de réserver ses places. Une grande partie du travail qui m’a été confié en matière de communication a concerné l’alimentation, l’animation et la veille des réseaux sociaux. De la même manière que pour le site internet, j’ai renseigné chaque rendez-vous sous la forme d’événements Facebook, permettant ainsi aux abonné·es de s’intéresser de plus près à la programmation. Bien que le Printemps de la Montagne n’ait pas pu se tenir en avril, il a accueilli des réactions positives sur les comptes Facebook et Instagram et les campagnes, très réduites, de diffusion d’affiches et de programmes ont suscité un intérêt pour ce nouvel événement. L’annonce du confinement dès le 17 mars 2020 a provoqué le nécessaire report du Printemps de la Montagne, qui a fait l’objet d’annonces (newsletter, réseaux sociaux et site internet) et de mesures de remboursements et d’avenants.
Au sujet du Grand Bivouac, les missions de communication reprennent dans les grandes lignes celles du Printemps de la Montagne : communication digitale par l’alimentation du site internet et la création de newsletters, veille, stratégie et animation des réseaux sociaux, suivi et diffusion des supports de communication, gestion et exploitation de fichiers de travail principalement. La communication numérique liée directement à l’actualité du festival s’étend de mai à octobre généralement, dévoilant le thème et l’affiche de l’édition, puis les invité·es, les événements, les rendez-vous et tout type d’informations relatives à l’édition. Pour parer au retard des annonces, l’équipe a établi une stratégie de communication digitale afin d’animer les communautés malgré le confinement. Un onglet Actualités a été pensé pour le site, des films gratuits en ligne ont été relayés sur la page Facebook et des souvenirs photographiques de films passés au Grand Bivouac ont été publiés sur le compte Instagram. Par ailleurs, conjointement aux avancées de la sélection des films documentaires, j’ai été amenée à créer une carte interactive présentant les différents pays où se déroulent les films – chaque icône représentant un film dont la couleur détermine la sélection à laquelle il appartient . Outil de travail permettant d’avoir un aperçu synthétique de la répartition, ce document pourra être utilisé à des fins communicationnelles sur le site et ailleurs. Ces supports digitaux, pour le site principalement, ont aussi été alimentés et actualisés par des documents et des formulaires mis à jour (adhérents, bénévoles, inscriptions aux Salons). Une fois la thématique de l’édition arrêtée, nous nous sommes mis en relation avec des photographes fidèles du Grand Bivouac, pour la recherche iconographique, bientôt finalisée. Le visuel fera l’objet de déclinaisons à destination de plusieurs supports, les affiches, programmes et banderoles, … Il s’agira alors de préparer aussi les envois de programmes en publipostage, de coordonner la diffusion des supports et de soutenir la gestion de la billetterie, en ligne et en accueil physique. De manière générale, j’ai aussi participé à d’autres missions de communication en collaboration avec l’équipe, notamment aux réflexions menées pour la création de la bande annonce du festival, composée d’extraits de films sélectionnés et répondant à une logique de propos préétablie.

Les missions liées à la programmation

En parallèle de ces missions de communication, j’ai participé à quelques tâches liées à la programmation et la production pour le festival. Aux côtés d’Antoine Laurent, j’ai participé à la création et au suivi d’un formulaire de recueil d’éléments – d’informations, de communication, de production – à destination des réalisateurs et réalisatrices sélectionné·es. Ce formulaire s’accompagne d’un outil de réception de ces éléments pour la quarantaine de films documentaires sélectionnés. Une fois le lien fait avec les intervenant·es, il s’agit de recueillir, télécharger et intégrer les informations connues dans les outils de réceptions (tableau de suivi et dossiers dans Google drive). Puis, ces éléments répertoriés, Line et Fiona ont pu construire petit à petit l’agenda du site internet. J’ai par ailleurs été intégrée aux discussions liées aux choix thématiques et à la programmation des rendez-vous du festival. Enfin, dès début février j’ai rejoint le comité de sélection des films documentaires qui visionne l’intégralité des propositions faites par le programmateur et discute de chaque œuvre à l’occasion des comités.
Ainsi, à raison de deux fois par mois – en présentiel puis par vidéo conférence pendant le confinement – le comité s’est réuni pour échanger, débattre, défendre et choisir les films de la programmation. Cette participation m’a énormément enrichie sur les plans à la fois personnel et « professionnel » puisque comme l’a dit Jean-Sébastien Esnault : « pour communiquer autour des films programmés, il est bon de les connaître » .

Pour une reconsidération de notions phares de l’événement

Afin d’appréhender davantage le Grand Bivouac et son événement, il s’agira de se pencher sur certains aspects de la programmation, du contenu éditorial, de la communication et de son rapport aux publics. Mais au-delà de ces points pratiques, le Grand Bivouac suscite mon intérêt pour les notions qu’il aborde et qu’il prend en compte.

Le nécessaire élargissement de la notion de culture

Considérant l’une des missions de l’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville de « favoriser auprès du grand public une connaissance et une approche du monde dans sa diversité et ses évolutions, animés par l’esprit d’enrichissement culturel » , on constate que la notion de culture fait partie intégrante du projet initial. Mais si l’on entend le terme de culture au sens uniquement artistique qui lui est trop souvent donné, il s’agirait d’une compréhension « en surface » et figée du terme, qui recouvrirait par exemple l’architecture, la musique ou la littérature. Non pas que le Grand Bivouac ne s’attache pas à diffuser des récits artistiques au travers de films, d’ouvrages ou de photographies, mais ne retenir que cette approche ne prendrait pas en compte la multiplicité des sens de la notion de culture. Qu’en serait-il des conférences et films documentaires qui abordent des questions environnementales, humaines, sociales, sociétales, identitaires et bien d’autres ? Ces éléments contribuent pourtant à faire du Grand Bivouac un événement culturel. Bien que les Beaux-Arts et le patrimoine permettent d’exprimer une forme d’humanité, il est nécessaire d’enrichir cette vision pour qu’elle soit pleinement valable. Il s’agit en réalité de penser ces secteurs purement artistiques comme étant une partie de la culture, au même titre que d’autres. Tous se répondent entre eux, se font écho, se complètent et s’enrichissent en cultivant leurs spécificités propres. Un film documentaire par exemple décuple sa force culturelle et déploie sa puissance démonstrative en mettant en avant une esthétique qui peut être photographique, musicale, poétique… C’est pourquoi nous sommes bien souvent touché·es par une œuvre qui tisse des liens entre les domaines et leurs traitements.
À l’occasion des comités de sélections au cours desquels nous avons évoqué les qualités esthétiques de certaines œuvres, j’ai constaté que celles-ci s’ajoutaient en réalité à la force d’un propos, d’une thématique, d’un récit ou d’une tradition. Cette profusion de champs que recouvre la culture est confirmée dans la définition que donne le préambule de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle (UNESCO, 2001). Elle est envisagée comme un « ensemble de traits distinctifs spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social, [et] englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les façons de vivre ensemble, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances ». Sans cette approche anthropologique, la pratique culturelle n’est pas prise en compte dans son ensemble et nie ainsi les appropriations, expressions et identifications des individus. Car si ces multiples facettes s’attachent à définir les disciplines culturelles, elles enrichissent également chacun·e dans l’expression de son humanité propre. C’est ce que définit la Déclaration de Fribourg (article 2.a) en regroupant sous le terme de culture : « les valeurs, les croyances, les convictions, les langues, les savoirs et les arts, les traditions, institutions et modes de vie par lesquels une personne ou un groupe exprime son humanité et les significations qu’il donne à son existence et à son développement ».
Avec cette appréhension plus globale de la culture s’éloigne la conception restreinte de la considération artistique au profit d’une vision plus dynamique davantage centrée sur l’humain.
C’est selon cette approche que le Grand Bivouac aborde la notion de culture, sans pour autant tomber dans une conception essentialiste ou cloisonnée. Pour éviter cet écueil, il semble nécessaire de concevoir la culture dans son sens transversal, prenant donc en compte les connections possibles entre les ressources. La culture n’appartient effectivement pas à une catégorie à part, et elle ne distingue pas non plus culture dite « savante » et culture dite « populaire », mais répond plutôt à une sorte de continuum. Telle qu’elle est envisagée par les droits culturels, la culture « [englobe] une diversité de références et de ressources qui sont autant d’expressions de notre humanité » comme l’explique Baptiste Fuchs dans « Droits culturels : une introduction ». Il ajoute également : « Sans pour autant bouder la recherche de l’excellence, on peut considérer que toutes les références culturelles se valent dès lors qu’elles servent un processus d’identification qui respecte la dignité des personnes ».

Vers la promotion du patrimoine immatériel

Comme évoqué dans la présentation du festival, le Grand Bivouac s’implante pleinement sur le territoire albertvillois pour la durée de sa manifestation. À travers l’investissement de lieux comme la Maison des Jeux Olympiques ou l’église Saint-JeanBaptiste, il est question de patrimoine culturel matériel. Accordant également une place notable à l’environnement directement lié au festival, une masterclass en immersion intitulée « Raconter la nature du parc national de la Vanoise » s’était déroulée en 2019, animée par le photographe et géologue Arnaud Guérin. Par ailleurs, l’équipe souhaite mettre en lumière la montagne à l’occasion du Printemps de la Montagne et de rendez-vous thématiques du festival d’octobre. En témoigne la « programmation Montagne » qui regroupera cette année plusieurs rendez-vous numériques ou en salle – séances, rencontres littéraires, conférence – autour de souvenirs d’ascensions mémorables, de problématiques actuelles liées à l’alpinisme, ou encore de réflexions sur la montagne en transition. Pour 2020, l’équipe souhaitait effectivement repenser l’alpinisme et la montagne à l’épreuve du changement climatique, un moyen d’engager une rencontre entre les enjeux de la manifestation et le patrimoine culturel naturel. L’édition 2019 accueillait, par exemple, le troisième volet d’un projet de randonnées de haute montagne et d’ascension de sommets par des jeunes d’Albertville et de Moûtiers, avec le soutien du CAF d’Albertville et du Grand Bivouac. Elle présentait également une conférence et un livre -Regards croisés sur la ville d’Albertville- dédiés à la ville du festival elle-même, sous le regard de quatre photographes, observant d’un œil neuf les rues et les visages. Les images, reconnaissables par les Albertvillois et pouvant évoquer des souvenirs, ont revêtu une nouvelle dimension, celle de « bien commun ». Pourrait-on parler de « patrimoine culturel » ? Il ne s’agit pourtant pas là de considération matérielle, esthétique ou d’ancienneté, facteurs souvent compris comme définissant le patrimoine culturel. Prendre en compte les ressources ou les souvenirs conduirait à penser le patrimoine culturel comme étant également immatériel, correspondant à un bien plus ou moins symbolique. Cette idée est confirmée dans la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine culturel pour la société, dite « Convention de Faro », adoptée par le Conseil de l’Europe le 27 octobre 2005. Elle considère le patrimoine culturel comme une sorte de langue commune, qui a ses spécificités propres, mais qui est constitutive des individus. Elle définit alors le patrimoine immatériel comme « les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire […] que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel » . À l’instar des deux autres notions reconsidérées plus haut – culture et diversité culturelle – celle du patrimoine culturel immatériel se réalise entre des individus, et prend en compte sa dimension évolutive, à partir des transmissions et des réinventions permanentes qu’elle recouvre. Ici aussi, les droits culturels sont un cadre propice à l’implication, la gestion et la protection du patrimoine culturel immatériel dans la mesure où toute personne a le droit « d’accéder […] aux patrimoines culturels qui constituent des expressions des différentes cultures ainsi que des ressources pour les générations présentes et futures » . Dans cette approche englobante et non figée, la notion de patrimoine culturel immatériel est prise en compte au sein du Grand Bivouac, au regard notamment de la reconsidération des espaces naturels. Par ailleurs, le festival diffuse des histoires de mémoires individuelles et collectives, à travers des reportages de guerre, des récits de vie, des dialogues entre les générations, des introspections et des rencontres de réalisateurs et réalisatrices avec des individus. Ainsi le festival 2020 programmera-t-il notamment un récit de vie du photographe reporter Abbas à travers ses images, un morceau de temps suspendu aux côtés de la vieille Malika qui tient un restaurant en plein désert ou encore l’errance d’une nonne tibétaine en quête d’un bouddhisme ancestral . Le patrimoine culturel immatériel apparaît comme constitutif des identités et comme ayant un rôle à jouer dans la préservation de la diversité culturelle en ce qu’il est partagé et évolutif.

Reconnaître le potentiel de chacun·e

Si la Déclaration de Fribourg reconnaît le droit et la liberté de chacun·e de participer à la vie culturelle, cela ne signifie pas pour autant que chacun·e est artiste, mais plutôt que toute personne détient en elle un potentiel de création, mais aussi de réflexion et d’humanité. Ce potentiel est plus ou moins développé chez les individus, et c’est pourquoi certain·es sont, par aptitude ou par choix, davantage en mesure d’enrichir les ressources culturelles et de faire culture autour de l’imaginaire commun. Ces personnalités, qui se déploient individuellement ou collectivement, sont celles qui peuvent éveiller, bousculer, stimuler, agiter les consciences des personnes pour qui le potentiel créatif est méconnu ou délaissé. Dans cette logique, le Grand Bivouac construit ses rendez-vous autour d’invité·es voyageurs, voyageuses et journalistes, mais surtout spécialistes dans des domaines susceptibles de décrypter l’actualité. Si la sollicitation de points de vue personnels prend le risque de restreindre ou de biaiser les pensées, il me semble que le festival reste vigilant et tente de contourner ces écueils. Ce, notamment, par la multiplication et la diversification des témoignages, ou par l’intervention de plusieurs spécialistes de secteurs différents au sein d’un même débat. L’édition 2019 accueillait par exemple une soirée regroupant François Sarano – océanographe et plongeur professionnel – et Arnaud Guérin – scientifique, vulcanologue, géologue et photographe, autour des eaux profondes et des mammifères marins. D’autres invité·es, avec leur plume, leur appareil photographique ou leur caméra, bousculent également les consciences avec des œuvres significatives. Celles-ci sont la plupart du temps centrées sur l’humain, son histoire, ses aventures, sa culture. Principalement illustrés à travers les sélections de films, ces « portraits » sont valorisés par le réalisateur ou la réalisatrice qui se fait témoin et intermédiaire auprès des publics. Et parfois même, ils sortent de l’écran et sont présents (visuellement ou virtuellement) au Grand Bivouac pour faire suite à la projection. Leur présence et les interactions qui peuvent se faire suscitent un vif intérêt auprès des festivaliers et festivalières qui, parfois, sont plus sensibles à une rencontre avec les protagonistes qu’avec l’équipe réalisatrice. Ces protagonistes, qui ne sont pas les « artistes » au sens de créateurs ou créatrices, suscitent l’attention en ce qu’ils et elles sont les acteurs et actrices du monde que les publics du Grand Bivouac ont pu découvrir. Si les réalisateurs et réalisatrices des films agissent en passeurs et passeuses qui témoignent des récits singuliers, les protagonistes des documentaires, eux, reflètent une diversité culturelle qui attire l’attention des spectateurs et spectatrices. Cette attention témoigne à la fois du fait que nous sommes tous et toutes riches de nos cultures, mais aussi du fait que nous avons en nous la volonté de découvrir celles des autres, que nous pouvons à la fois recevoir et contribuer. Car, si les publics du festival sont des témoins réceptifs de ce qui leur est proposé, ils sont aussi de potentiels transmetteurs de leur expérience de réception et donc d’éventuels contributeurs. C’est pourquoi l’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville tient à ces moments d’échanges.

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Table des matières
Remerciements
Déclaration anti-plagiat
Sommaire
Sigles et indications
Introduction générale
PARTIE 1 – EN STAGE AU GRAND BIVOUAC EN PÉRIODE DE PANDÉMIE
1.1. L’Association pour le Grand Bivouac d’Albertville
1.1.1. Présentation de la structure d’accueil
1.1.1.1. Le projet du Grand Bivouac
1.1.1.2. Le fonctionnement de l’association
1.1.1.3. L’appui sur un fort ancrage territorial
1.1.2. Une stratégie festivalière adaptée aux ambitions de l’association
1.1.2.1. L’affirmation d’une identité singulière
1.1.2.2. Pour une appropriation des éditions par les publics
1.1.2.3. Capacité d’adaptation et de renouvellement – l’édition 2020
1.2. Compte-rendu des missions personnelles
1.2.1. Les missions liées à la communication
1.2.2. Les missions liées à la programmation
Conclusion intermédiaire
PARTIE 2 – LE GRAND BIVOUAC, UNE RÉFLEXION AU REGARD DES DROITS CULTURELS
Introduction à la recherche
2.1. Pour une reconsidération de notions phares de l’événement
2.1.1. Le nécessaire élargissement de la notion de culture
2.1.2. Enrichir, valoriser et protéger la diversité culturelle
2.1.3. Vers la promotion du patrimoine immatériel
2.2. Dire notre monde avec les acteurs et les actrices d’aujourd’hui et de demain
2.2.1. Favoriser une démarche « premiers pas »
2.2.2. Un festival vecteur d’insertion et d’intégration
2.2.3. L’approche impressionniste du Grand Bivouac
2.3. Tous et toutes impliqué.es dans la fabrique culturelle
2.3.1. Reconnaître le potentiel culturel de chacun et chacune
2.3.2. Engager et accompagner les publics dans leur processus d’émancipation
2.3.3. Pour une compréhension de l’événement « en situation »
Conclusion générale
Bibliographie
Table des annexes
Annexes

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