L’appropriation d’une TIC à partir des questions relatives à l’usage pris dans son contexte

Depuis ces dernières années, en sciences de gestion et tout particulièrement en Système d’Information (SI) l’approche structurationniste s’impose progressivement dans le champ de l’étude des effets des technologies en milieu organisationnel. Les tenants de ce courant de recherche, dont le nom affiche la filiation avec la théorie de la structuration de Giddens (1977), avancent l’idée que pour comprendre les relations entre technologie et organisation, il faut moins se focaliser sur la technologie elle-même, que sur la façon dont celle-ci est utilisée par les individus. Il se forge ainsi une dimension d’analyse de l’appropriation d’une TIC définie à travers son usage, c’est-à-dire son utilisation dans des pratiques quotidiennes et récurrentes.

Les apports de l’approche structurationniste dans l’analyse de l’usage contextualisé d’une TIC 

L’approche structurationniste permet d’expliquer les usages à deux niveaux : individuel et structurel. Le premier considère le sens qu’attribue un individu à une technologie lorsqu’il l’utilise. Quant au second niveau, il concerne l’évolution ou le renforcement des structures de l’organisation à travers les usages de l’outil. De fait, nous mettrons l’accent dans cette section sur les apports structurationnistes à la définition de la technologie et des usages en sciences de gestion. Dans un premier temps, nous effectuerons un détour par la théorie originelle de Giddens (1979, 1984, 1987), dont nous expliquerons les grands principes. Ensuite, nous décrirons les premières applications de la théorie de la structuration à l’étude des technologies, notamment à travers les travaux fondateurs de Barley (1986) et le modèle structurationnel d’Orlikowski (1992). Puis, nous nous attacherons à présenter la théorie adaptative de DeSanctis et Poole (1994) et la perspective structurationniste de la technologie proposée par Orlikowski (2000).

La théorie de la structuration de Giddens et ses premières applications au cas des technologies

De nombreux auteurs soulignent les difficultés multiples à clarifier et synthétiser la théorie de la structuration (Rojot, 1998 ; Giordano, Groleau, 2004). Pourtant, cette théorie du social, « par son pouvoir de rupture et son pouvoir de généralisation » (de Vaujany, 1999 : 49), a inspiré de nombreux travaux et continue, aujourd’hui encore, d’être mobilisée de façons diverses.

Les clefs de compréhension de la théorie de la structuration de Giddens
Dès l’introduction de son ouvrage, Giddens (1987) affiche clairement l’ambition de dépasser la dualité existante jusqu’alors entre les approches prônant soit la domination du sujet individuel sur les structures sociales, soit l’inverse c’est-à-dire la détermination des structures sociales sur l’action humaine. Giddens propose d’aborder une perspective dialectique entre structure et action. Pour l’auteur, aucune ne prédomine, elles sont les deux faces d’une même totalité sociétale. L’originalité de Giddens (Rojot, 1998) est de combiner deux niveaux d’analyse, traditionnellement séparés : le niveau micro-social à travers les pratiques contextualisées de l’action et le niveau macro-social à travers l’étude des institutions, propre à la structure.

La théorie de la structuration repose sur trois concepts-clés : le structurel, la dualité du structurel, les systèmes sociaux. Le modèle théorique proposé par Giddens permet deux ruptures : la première réside dans la façon de concevoir le lien entre l’acteur et son action ; la seconde réside dans la façon de modéliser la relation entre l’acteur, son action et la structure.

Récursivité et réflexivité au cœur de la relation entre l’acteur et son action 

L’action humaine est au cœur de la théorie de la structuration. Cette action, menée par l’homme, est forcément contextualisée et dépendante du monde dans lequel celui-ci évolue et dont il ne contrôle pas les événements. L’action est une combinaison d’actes, un rapport entre l’acteur, le monde environnant et la cohérence que l’acteur associe à ses actes.

Pour Giddens, l’action permet à la fois de comprendre l’acteur et les institutions sociales. En effet, l’auteur fait l’hypothèse qu’il faut relier l’évolution des structures sociales au retour que chaque acteur effectue sur ses actes via son « potentiel de réflexivité ». Deux concepts-clés, en interaction, apparaissent : la récursivité et la réflexivité.

La récursivité est la base de la dynamique entre action et institutions sociales « les activités sociales des êtres humains sont récursives […] les acteurs sociaux ne créent pas ces activités, ou plutôt les recréent sans cesse en faisant usage des moyens même qui leur permettent de s’exprimer en tant qu’acteurs. Dans leurs activités, et par elles, les agents reproduisent les conditions qui rendent ces activités possibles» (Giddens, op.cit. : 50). Cette récursivité se fonde sur le potentiel de réflexivité de l’acteur. Il définit la réflexivité comme la capacité d’une personne à se donner des buts et à avoir des raisons de faire ce qu’elle fait et d’être capable de les expliquer. Rojot (1998) complète cette définition en ajoutant que la réflexivité est également « la conscience de soi, l’exercice de la capacité de situer l’action par rapport à soi. Mais [pas seulement]. Elle est aussi et en même temps la capacité de surveiller, de contrôler le flot continu de la vie sociale ou des contextes et de s’y situer » (Rojot, 1998). Pour Giddens, il y a deux types différents de conscience : la «conscience discursive » et « la conscience pratique ». La conscience discursive correspond à un état d’esprit où l’individu est capable de décrire explicitement ses motivations et ses actes. A contrario, dans le cas de la conscience pratique, l’individu a du mal à expliquer le pourquoi et le comment de ses actes, même si par ailleurs il exécute sans faute son activité. Cette notion est proche d’un autre concept clé dans la théorie de la structuration : celui de la routinisation. Pour l’auteur, les acteurs ont besoin de rentrer dans des « formes répétées d’activité » pour réduire leurs angoisses et se sentir protégé. Cette nécessité pour les individus est à la base de ce que Giddens appelle la nature récursive de la vie sociale.

Le contrôle réflexif renvoie à la capacité de l’acteur à situer son action par rapport à luimême. La rationalisation correspond à la capacité de la personne à expliquer pourquoi elle fait ce qu’elle fait. Quant à la motivation de l’action, elle renvoie aux désirs qui inspirent l’action. Ainsi, ce modèle se lit de deux façon : horizontalement et verticalement. Horizontalement, l’action est stratifiée par la relation « condition–mécanismes-conséquences ». Verticalement, il y a un jeu d’interactions entre réflexivité, motivation et rationalisation. A la lecture de ce schéma, on pourrait penser que l’action résulte d’une relation causale directe et presque maîtrisable. Or, ce serait oublier que l’action se déroule dans un contexte où toutes les conditions ne sont pas connues à l’avance par les acteurs. Afin de mieux faire comprendre ce dernier élément, Giddens prend le simple exemple d’une personne qui, actionnant un interrupteur de lumière, découvre dans la pièce un cambrioleur, qui prend immédiatement la fuite. Le sociologue explique que l’action intentionnelle de départ est simple et basique : il s’agit d’allumer la lumière en entrant dans une pièce. Or, dans ce contexte précis, la condition selon laquelle se trouve un intrus dans cette pièce n’est pas connue à l’avance par celui qui allume la pièce. De la même manière, toutes les actions qui s’en suivent (surprise du cambrioleur, sa fuite, son arrestation par la police, son emprisonnement…etc.) sont autant de conséquences non prévues.

La relation entre action et structure
L’objectif général de Giddens est de comprendre les mécanismes qui expliquent la façon dont un système social se constitue et évolue au-delà de la clarification des interactions entre l’action humaine et les institutions sociales. Dès les premières lignes de son ouvrage apparaît une rupture conceptuelle autour de la définition des notions de structure et de système social.

De la structure au structurel
Giddens explique sa difficulté à employer le terme « structure », qu’il considère trop connoté, trop figé. Le sociologue précise que certains d’entre nous se représentent le terme de « structure » comme un squelette ou encore comme un corps, d’autres vont opter pour l’image de la charpente d’une maison. Le sens que Giddens attribue à la notion de structure est foncièrement différent du sens commun. Pour s’éloigner des images d’armatures classiquement associées, il choisit l’emploi du terme structurel, qu’il définit comme un ensemble de règles et de ressources engagées de façon récursive dans la reproduction sociale. Le terme de système social correspond « à la formation, à travers l’espace-temps, de modèles régularisés de relations sociales conçues comme des pratiques reproduites » (Giddens, 1987 : 41), que l’on peut comprendre comme un ensemble de pratiques sociales qui se reproduisent dans le temps. Plus simplement, le structurel n’est pas quelque chose de palpable. Ce n’est pas un groupe d’individus. Ce n’est pas une idéologie, encore moins une organisation. Le structurel est une sorte de référent global en mouvement. Cette référence virtuelle se compose de propriétés dites structurantes, c’est-à-dire qui supportent et agrémentent un ensemble de pratiques sociales. Le structurel permet à cet ensemble de pratiques sociales à travers l’action humaine de réaliser deux choses qui peuvent paraître contradictoires de premiers abords. Le premier point est que les propriétés structurantes du structurel ont un caractère « hors du temps », ce qui permet d’inscrire les pratiques sociales dans la durée. Le second élément est que ces propriétés actualisent le structurel par moment, « sous la forme de traces mnésiques » chez les acteurs (Giddens, op.cit. : 74). Cette actualisation des propriétés du structurel par l’action humaine, ou cette « instanciation » comme la nomme de Vaujany (op.cit. : 50), permet au structurel de rester connecté à l’époque contemporaine des acteurs. Décrire le structurel consiste à décrire les actions et les interactions vécues ou anticipées de l’acteur. Le structurel n’est pas extérieur à l’acteur et à sa volonté.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1-Appréhender l’appropriation d’une TIC à partir des questions relatives à l’usage pris dans son contexte
Chapitre 2 : Analyser l’appropriation d’une TIC en entreprise : l’articulation entre usage et conception
Chapitre 3 : L’appropriation d’une TIC en entreprise à partir de son usage, de sa conception et de la vision des décideurs
Partie Empirique
Chapitre 4 : le choix de l’entreprise, de la méthodologie
Chapitre 5 La compréhension des usages de l’intranet RH par le Management Intermédiaire au centre de la Phase (1)
Chapitre 6: Résultats des phases (2) et (3) et discussions
CONCLUSION GENERALE
Eléments bibliographiques
Annexes
Index des « Noms attribués des acteurs »
Index des figures
Index des tableaux
Table des matières

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