L’anthropologie politique de john locke

L’ANTHROPOLOGIE POLITIQUE DE JOHN LOCKE

John Locke et le contexte de rédaction des Deux Traités

John Locke est né le 29 août 1632 près de Bristol d’une famille de marchands, il avait seize ans au moment de la première révolution d’Angleterre. Son père s’enrôla dans l’armée du parlement. En 1652, il entra à Oxford et étudia la médecine mais n’a pas eu le grade de docteur. En 1666, il rencontra Lord Ashley , plus tard comte de Shaftesbury, qui eut une vie politique mouvementée dont Locke subit les contre coups. Il fit en France deux séjours, l’un en 1672, l’autre de 1675 à 1679, où il passa un an à Montpellier pour se soigner. Mais ce second séjour se prolongea jusqu’à la fin de la disgrâce du comte de Shaftesbury. En 1684, il dût à nouveau s’éloigner d’Angleterre. En effet, le comte, après avoir échoué dans sa tentative de provoquer une révolution, avait dû se réfugier en Hollande. Locke, suspect au pouvoir, jugea prudent de gagner à son tour la Hollande. Il devait y rester jusqu’à la révolution de 1688. Revenu en Angleterre en 1689, il refuse, pour des raisons de santé, le poste d’ambassadeur auprès de l’électeur de Brandeboug, que le nouveau roi lui propose et il accepte les fonctions de commissaires des appels. Occupé par des questions politique et religieuse, il doit aussi répondre à de nombreuses critiques. Il décide alors de se retirer à Oates et y reste jusqu’à sa mort en 1704.

Suite à sa lecture de Descartes, il s’intéressa à la philosophie. Il fut également influencer par d’autres savants tels que Robert Boyle, Sydenham. Dans l’hiver 1670 1671, à la suite d’une discussion entre amis, il s’aperçut que « les principes de la morale et de la religion révélée ne pouvaient être établis solidement avant d’examiner notre propre capacité et de voire quels objets sont à notre portée ou au-dessus de notre compréhension ». C’est ainsi qu’il rédigea l’Essai sur l’entendement humain publié en 1690 où il fait une analyse critique des pouvoirs de l’entendement, afin de déterminer les limites de la connaissance humaine. En effet, Locke va se donner pour objectif de déterminer l’origine, les degrés de certitude et l’étendue des connaissances, leurs fondements et les degrés de foi qu’on peut leur accorder.

Sur le plan politique, Locke a lutté durant toute sa vie contre la monarchie absolue de droit divin. Après la parution du Patriarcha de Sir Robert Filmer en janvier 1680 où il défend la monarchie absolue de droit divin, John Locke a entrepris de rédiger les Deux Traités du Gouvernement Civil dont la première partie est consacré à la réfutation des fondements absolutistes du pouvoir politique défendus par Filmer dans son ouvrage. En effet, Robert Filmer considère que l’homme n’est pas libre par nature, par conséquent, il ne peut choisir son gouvernement puisque l’Etat est d’origine divine. Le pouvoir absolu du monarque ayant été donné à Adam qui lui même l’a transmis aux rois, ceux-ci ne tirent finalement ce pouvoir que de Dieu. Le pouvoir est donc un bien patrimonial transmissible qui donne tout pouvoir à celui qui le détient. Cependant, Locke soutient l’homme est la créature d’un ouvrier tout puissant qui lui a donné la vie et lui recommande, par l’intermédiaire de la loi de nature, de faire tout ce qui à son pouvoir pour se préserver et préserver le reste de l’humanité. En ce sens, dit Locke, aucun homme ne peut prétendre détenir un quelconque droit sur la vie d’autrui puisqu’il n’en est pas l’auteur. Mais, à cause d’une mauvaise condition des hommes dans l’état de nature, ce devoir de préservation n’est possible que dans la société civile. C’est ainsi que les hommes se constituent en corps par le pacte social et deviennent le souverain arbitre des différends qui peuvent surgir entre eux. Une fois associé, ils se donnent un gouvernement qu’ils peuvent aussi destituer lorsque celui-ci trahit sa mission sans que cela ne produise la dissolution du lien social lui-même. Le pouvoir suprême revient alors entre les mains de la communauté. Dans ces conditions, le détenteur de l’autorité ne possède aucun pouvoir absolu et arbitraire et le gouvernement est bel et bien limité par la fonction que le peuple lui a assignée lors de son institution et dont il demeure, en tant que corps, le surveillant perpétuel.

Le libre consentement individuel comme seul fondement légitime du pouvoir politique

Malgré leur diversité, les doctrines du contrat social se proposent toutes de trouver dans l’individu le fondement de la société, de l’État, ou simplement de l’autorité politique. À cet égard, elles diffèrent radicalement, et même s’opposent aux doctrines qui voient dans la société ou dans l’État une réalité une et définie, distincte de ses parties, qu’il s’agisse de la doctrine juridique allemande de l’État ou de la pensée sociologique, dont l’apparition et le développement au XIX siècle ont coïncidé avec le déclin de la théorie du contrat. Le postulat fondamental des doctrines du contrat est en effet l’idée que la société, ou tout au moins l’État, n’est pas un phénomène naturel, mais une création artificielle et donc volontaire. Pour elles, la nature finit à l’individu. Il faut par conséquent supposer que la société a été créée par une décision des hommes qui la composent, et que les règles qui la régissent, les droits et obligations de ses membres peuvent être expliqués, voire déduits de cette décision constitutive, ce qui implique que l’on s’interroge sur son essence. Si le pouvoir est considéré comme artificiel, il est clair qu’il n’existe pas entre les hommes, antérieurement à la décision constitutive de la société, de relations d’autorité, mais seulement d’égalité et que, dès lors, les individus ne peuvent être liés qu’en vertu de leur consentement. D’où il ressort que la décision constitutive ne peut être qu’un contrat : le contrat social ou pacte social. La référence à la notion de contrat social permet ainsi de faire dévier le problème juridique du fondement de l’autorité politique vers un problème historique et philosophique, celui de l’origine de la société et de l’État. Par-delà les postulats communs, il existe pourtant, parmi les théories qui se rattachent à la doctrine du contrat social, une très grande diversité qui porte sur les diverses notions auxquelles fait appel la doctrine.

Parmi les théoriciens du contrat social figure John Locke (1632-1704) qui tente d’examiner l’origine du pouvoir politique. En effet, le problème que pose l’auteur du Traité du gouvernement civil est de savoir comment il est possible d’envisager le passage d’un état de nature libre et égalitaire, à un état de social où l’acceptation d’une autorité politique et l’obéissance aurait été choisie sciemment et librement. Il affirme dès le début du deuxième chapitre du Traité Du Gouvernement Civil que « pour bien entendre en quoi consiste le pouvoir politique, et connaitre sa véritable  origine, il faut considérer dans quel état tous les hommes sont naturellement » . L’état de nature serait donc à l’origine de la société civile et du gouvernement. Mais en quoi consiste cet état de nature ?

Pour mieux saisir l’essence du pouvoir politique, il est primordial de faire son historique, c’est-à-dire de considérer l’état dans lequel se trouvaient les hommes avant l’avènement de la société. Ainsi, l’état de nature est un détour méthodologique, une hypothèse de travail qui permet de justifier l’origine de la société civile et de comprendre la situation actuelle de l’humanité. Dès lors, l’état de nature n’est pas un événement historique repérable dans le temps et dans l’espace. Il désigne le mode d’existence originel des hommes. Dans cet extrait du Traité du Gouvernement Civil, Locke définit l’état de nature comme suit : « C’est un état de parfaite liberté, un état dans lequel, sans demander de permission à personne, et sans dépendre de la volonté d’aucun autre homme, ils peuvent faire ce qu’il leur plait, et disposer de ce qu’ils possèdent et de leurs personnes, comme ils jugent à propos, pourvu qu’ils se tiennent dans les bornes de la loi de la Nature. » En d’autres termes, l’état de nature est un état de liberté dans la mesure où chaque individu est libre en tant qu’il règle ses actions et dispose de ses biens comme il l’entend. L’état de nature est aussi un état d’égalité en ce sens que les hommes sont nés tous égaux, sans aucune distinction et ont droit aux mêmes avantages de la nature. Par conséquent, il n’y a ni subordination ni sujétion entre eux. Dans l’état de nature, nul ne détient d’autorité législative. L’égalité est une conséquence de cette liberté, car il n’existe aucun rapport naturel de sujétion personnelle, c’est par l’absence de distinction manifeste entre les hommes : tous ont les mêmes facultés.

Néanmoins, comme l’admet un commentateur de John Locke du nom de John Dunn, « bien que ce soit un état de liberté, ce n’est pas une licence » , dans la mesure où il existe une loi de la nature donnée par Dieu, et connaissable par le secours des facultés naturelles de l’homme. Loin d’être inscrite par nature dans le cœur de l’homme, cette loi ne saurait, au contraire, être découverte que par le travail de la raison et des sens. Cette loi, qui oblige universellement tous les hommes, tire son obligation à la fois de la volonté de notre Créateur et de la qualité convenable des actions qu’elle ordonne pour une créature raisonnable telle que l’homme. En outre, il est exclu, dit Locke, que cette loi puisse se confondre avec ce que les hommes désirent ou trouvent utile d’une manière générale : s’il est vrai que Dieu a voulu que ce qui était ordonné par lui fût aussi de la plus grande utilité pour l’ensemble du genre humain, ce n’est pas l’utilité des actions ordonnées qui en fonde l’obligation, mais le double fait que Dieu les commande et qu’elle conviennent à notre nature telle que Dieu l’a voulue et créée.

Cette conception d’une loi de nature donnée par Dieu pour régler les conduites des hommes forme le contexte essentiel de la pensée politique de Locke. Les hommes sont des créatures de Dieu, et à ce titre ils ont des devoirs, tant envers eux-mêmes qu’envers leurs semblables et envers leur créateur. L’établissement de la société civile ne saurait être légitime que dans la mesure où cela est nécessaire à l’accomplissement harmonieux de ses devoirs. En effet, les hommes ont pour premier devoir de se préserver eux-mêmes et de préserver l’ensemble du genre humain ; or la paix est une condition essentielle de cette préservation universelle et, en la rendant possible, l’autorité politique répond à la volonté du créateur et permet aux hommes de remplir leur devoir de préservation. On voit donc que l’état de nature préconisé par Locke n’est pas vide de juridiction. Elle est régie par une loi divine dont la transgression implique des sanctions. Ainsi, l’homme est revêtu, dans cet état, du pouvoir de juger et de condamner les violations faites à la loi de la nature. En ce sens, Locke dit : « Lorsque quelqu’un viole la loi de la nature, qu’il s’éloigne des droites règles de la raison, et fait voir qu’il renonce aux principes de la nature humaine, et qu’il est une créature nuisible et dangereuse; chacun est en droit de le punir ». Si dans l’état de nature l’homme est aussi libre qu’on le dit, s’il est le maître de sa personne et de ses biens, alors pourquoi se dépouillet-il de cette liberté pour se soumettre à une autre autorité ? Pourquoi les hommes ont-ils fondé des sociétés politiques si leur nature les destine à vivre en paix sous la loi de nature ? Pour répondre à cette question, il faut revenir à la loi de nature. Celle-ci serait vaine, dit Locke, si les hommes n’avaient pas le pouvoir de la mettre en exécution et de sanctionner les offenses commises à son encontre. C’est pourquoi il faut admettre l’idée selon laquelle chacun possède, dans l’état de nature, deux pouvoirs : le premier consiste à faire tout ce qu’il juge bon et nécessaire à sa conservation et à celle des autres. Ce pouvoir va être abandonné partiellement par l’homme lors de son entrée dans la société civile afin qu’il soit réglementer par la communauté. Le second pouvoir dont dispose l’homme dans l’état de nature est de juger qu’autrui à violer la loi de nature, et ce pouvoir s’étend jusqu’à prononcer les sanctions que requiert cette violation et à mettre ces décisions à exécution, par conséquent, à appliquer la peine à celui qu’on a jugé coupable. Lors de son entrée dans la société politique, l’homme abandonne entièrement ce pouvoir et le confie à la communauté. Ainsi, dans la société civile, ces deux pouvoirs naturels représentent respectivement le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif que nous allons étudier dans le troisième chapitre de ce mémoire.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I : L’ANTHROPOLOGIE POLITIQUE DE JOHN LOCKE
1.John Locke et le contexte de rédaction des Deux Traités
2.Le libre consentement individuel comme seul fondement légitime du pouvoir politique
3.L’aménagement institutionnel du pouvoir politique
CHAPITRE II : LES DIFFERENTES INTERPRETATIONS DE LA CONCEPTION LOCKEENNE DE LA GOUVERNANCE
1.Harold Joseph Laski et Karl Marx : critique de l’utilitarisme de l’Etat
2.Léo Strauss et l’interprétation de la loi de nature lockéenne comme produit de la raison humaine et non un commandement divin
3.John Dunn et les fondements théologiques de la loi de nature
CHAPITRE III : REFLEXION SUR QUELQUES PRINCIPES DE BONNE GOUVERNANCE
1.Le principe de responsabilité dans la gestion du pouvoir
2.La transparence dans la gestion des biens publics comme dimension de la responsabilité
3.La participation à la vie politique comme principe fondamental de la citoyenneté
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE GENERALE

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