L’angle vie et spiritualité

Ce récit d’expériences relate un parcours de recherche en création atypique en arts visuels. Détenant un baccalauréat en cinéma, je suis retournée à l’université poussée par l’impression que je ne pourrais rien faire d’autre dans ma vie qu’être artiste en arts visuels. Ayant déjà eu l’opportunité de m’amuser sérieusement avec le médium photographique, c’est sur cette base que j’ai commencé à explorer les avenues possibles. C’est dans cet état de je-ne-sais-pas que s’entame cette maîtrise.

En quête d’un positionnement (comme artiste parmi ses contemporains), j’ai choisi de lire les textes de théoriciens de l’art et de philosophes, pensant que j’y trouverais mon camp, pour réaliser qu’il me manquait l’expérience de la pratique artistique même. J’ai remédié à la situation en m’affairant à réaliser mes propres expériences afin de construire ma propre pensée. C’est ainsi que j’ai marché sur ma peur et domestiqué l’erreur grâce à des circonstances opportunes, dont trois d’entres-elles sont décrites au premier chapitre. Celui-ci présente clairement la genèse de ma démarche artistique. Par le biais de trois projets effectués en marge du parcours académique, je souligne mes intentions, les gestes posés ainsi que les conclusions qui m’ont amenée à prendre une voie différente pour le projet suivant. Ces suppositions artistiques matérialisent des questionnements théoriques du moment qui métamorphosent ma pensée au fur et à mesure des expériences. De chacune d’elle naît le besoin de tenter une bifurcation. Ce changement de direction emprunté est loin d’être radical, je dirais plutôt qu’il est forage; chacune de ces réflexions étant nécessaires pour atteindre la suivante. Devant ce grand je-ne-sais pas, je tente un premier projet {Les grues) avec des participantes, parce que je suis convaincue que le médium humain va constituer une source de nourriture à l’inspiration, c’est-à-dire que l’idée de ce projet va naître de cette rencontre avec l’Autre. Le projet suivant {L’après-midi «show» des femmes) demande aussi la participation du public, mais j’y prends une nouvelle place, celle plus affirmée de créatrice. Le public ne participe pas à la mise en œuvre de la proposition, il répond aux consignes que je lui transmets, dans une performance de l’instruction. Dans ce cas-ci, on peut parler d’un reenactment : la performance est inspirée d’une technique de dessin (dessins-respirés) de Sylvie Cotton. Je me la suis appropriée en déployant l’exercice à plus grande échelle (plusieurs dizaines de participants dessinant simultanément) et en la déplaçant dans le contexte du 8 mars, pour un hommage aux femmes et plus encore aux femmes-artistes. À cette époque (2012), il y a déjà plusieurs mois que la méditation s’installe doucement dans mon quotidien. Au troisième projet (oisivologié), j’ai pris assez d’assurance pour réaliser cet in situ seule, je fais confiance à mon intuition. J’apprécie cette rencontre avec moi-même, je sens des changements subtils se produire dans l’ordinaire; déjà faut-il être attentive pour les percevoir. Dans l’atelier commencent à surgir des gestes nouveaux.

L’ANGLE VIE ET SPIRITUALITÉ 

Notes sur l’Introduction aux conditions de l’art expérimental 

Méthodologie de départ, de l’écriture même
Théoricien de l’art et professeur en sciences politiques, Laurent Jeanpierre défend la thèse d’un art politique dans l’art expérimental. L’art expérimental est une façon de critiquer les formes de pouvoir. Il est question de transformer le monde plutôt que de l’interpréter. Quant au contexte historique, il faut retourner à mai 68, soutenu par des textes de Deleuze et Guattari, où il n’est pas encore question d’art, mais de politique, au temps où les consciences psychanalytiques et philosophiques ont proposé de « transformer les structures institutionnelles » en « sphères expérimentales » . Une fois posés sur la table les arguments qui soutiennent l’expérimentation, reste à savoir comment elle se réalise. La théorie de l’intensification d’expérimentation de Deleuze et Guattari provient alors des arts plutôt que de la science, soutenue par l’analyse des propositions artistiques de John Cage. Selon Jeanpierre, l’art expérimental veut intensifier la réalité; intensification qui a lieu par « la nécessité de reconstruire un univers, un matériau, les perceptions du spectateur ou bien le corps même de l’artiste afin de développer une expérience sensible  ». L’auteur se réfère à Claude Bernard et déplore l’approche « rétrospective où prédomine la finalité  » des textes qui accompagnent les œuvres. Ce conseil est noté. Me voilà à l’écriture, au moment où je ne sais pas encore où je vais. Je dois noter mes doutes et mes difficultés, les raisons d’avoir pris une direction plutôt qu’une autre. Dans ce sens, les conditions de l’art expérimental sont devenues une méthodologie de travail. Le créateur qui veut expérimenter doit se défaire de ses habitudes afin de se « refaire une réalité augmentée ». Je ne cherche pas les raisons d’une pratique formellement expérimentale, mais une méthode appliquée à un moment précis de mon expérience artistique, soit le commencement, le point 0 de ma pratique. L’art expérimental est une recherche de l’étonnement qui se doit d’aboutir dans l’inconnu. Même s’il y a une idée, une intention de départ (telle que des oiseaux en papier fabriqués dans un parc avec des inconnues), la pratique de l’art assume une énorme part de bifurcation, d’événements non calculables. En cela, la subjectivité de l’artiste n’est jamais complète puisque des éléments du réel interviennent dans son travail. « Cette recherche consciente du nouveau est ce qu’on appelle expérience, il s’agit de localiser le point expérimental ». Cette introduction est nécessaire pour situer l’influence de Jeanpierre dans ma recherche-création qui, a priori, n’est pas de l’art expérimental, même si l’art expérimental est partout, car« nulle activité de création n’y échappe tout à fait ». À l’été 2011, je ne sais pas encore que ma pratique va prendre la tangente de l’Art et la Vie. L’héritage des avant-gardes historiques, qui ont mis au monde l’art expérimental (grandement intensifié au Black Montain College, à New York, dans les années 30), me permet de jouer avec leurs règles. J’en fais une méthode ready-made, même si l’art expérimental n’est pas un jeu dirait Jeanpierre avec sérieux. Je suis fortement attirée par la formule de l’invention, puisque j’en suis à inventer une démarche qui n’existe pas encore. Je place des objets et pose des gestes qui vont modifier ma façon de percevoir le réel. Ce texte sur l’art expérimental est une piste de départ. La pratique s’allume en pensée avant de se déployer dans l’atelier. «L’expérimentation est une affaire philosophique, mais son résultat peut être explosif », dira Kaprow. Dans mes doutes et mes incertitudes, je me sens proche de nombreux non-artistes, comme s’ils me laissaient la permission de créer. Un non-savoir à l’avantage de l’expérimentation, et son lieu de prédilection est caché dans le temps que prend l’art à surgir. Le sujet de mon expérience (sa machine) sera mon corps, que je transformerai doucement. À l’été 2012, je ne connais pas encore l’être qui va naître de ce processus. Des actes se succèdent dans la vie concrète (dans mon quartier, ma cour, ma maison, ma pratique). Cette méthodologie de la transformation et du devenir appelle à ma propre maturation et à devenir vecteur de l’énergie créatrice.

Robert Filliou et l’état d’esprit et la création

Création permanente
En continuité avec l’influence du zen et du tao dans la pratique de Filliou, celui-ci nous introduit à l’outil conceptuel de Création permanente qui y est directement lié. L’attitude créative permanente est un état d’esprit. Dans l’art Dharma, l’état d’esprit de l’artiste est une magie d’éveil qui rend possible la Création permanente, c’est-à-dire une attitude créative dans le quotidien, jusque dans l’ordinaire des tâches domestiques et dans tout lieu imaginable. Le terme art ne l’intéresse plus parce que synonyme de finalité; tandis que celui de création est relié au processus. Il n’est pas le seul, ni le premier à apporter cette distinction. Avant lui Beuys, Internationale Situationniste, John Cage, et encore plus tôt les futuristes et Dada, l’ont fait. Le faire est valorisé au détriment de l’objet d’art.

Le principe de la Fête permanente
Selon Filliou, la Fête permanente a remplacé l’avant-garde. Il s’agit d’un réseau éternel qui annule toute possibilité pour l’art de se fixer en un centre. Partout l’art peut s’exprimer, dans un chapeau (la Galerie Légitimé), à son domicile, etc. New York ou Paris ne sont plus les centres de l’art contemporain puisque l’art est partout. « L’art, c’est là où tu vis, c’est là où tu travailles. »

CONCLUSION

L’Art et la Vie est un sujet très vaste qui a été utilisé à toutes les sauces artistiques. C’est par le lien spirituel qui les relie qu’il s’est révélé à moi. Je ne nie pas qu’il y ait une distinction entre les deux sphères, mais j’ai découvert, dans cette recherche, qu’il y avait un lien invisible entre elles. C’est par cette démarche intime que se brouillent les différences entre les deux concepts. L’art et la vie peuvent être approchés par la même qualité d’éveil (Chôgyam Trungpa) ou, pour utiliser un terme plus artistique, une attitude créative (Robert Filliou). De là surviennent des déplacements dans les phénomènes observés autant dans l’atelier que dans le quotidien.

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Table des matières

INTRODUCTION 
DES PROJETS POUR TÂTER L’EXPÉRIENCE D’UNE PROPOSITION FAITE 
1.1 Les grues : le récit d’une expérience de don de soi, un engagement dans un projet artistique collaboratif communautaire
1.2 Le 8 mars 2012 : L’après-midi « show » des femmes culturelles
1.3 Oisivologie
L’ANGLE VIE ET SPIRITUALITÉ 
2.1 Notes sur l’Introduction aux conditions de l’art expérimental
2.1.1 Méthodologie de départ, de l’écriture même
2.1.2 L’échec éclaire les phénomènes
2.2 Robert Filliou et l’état d’esprit et la création
2.2.1 Création permanente
2.2.2 Le principe as la Fête permanente
2.2.3. La Galerie Légitime
2.2.4 Principe d’équivalence
2.2.5 FLUXUX
2.2.5 La Recherche sur l’origine de Robert Filliou, à partir de la thèse de Cyrille Bret
2.3 Une artiste inspirante : Sylvie Cotton
2.3.1 La rencontre
2.3.2 Le concept d’i» spiritu
2.3.3 L’atelier intérieur
2.3.4 La transformation
2.4 Notes sur l’art Dharma
2.5 Notes sur Lygia Clark
2.5.1 Le vide-plein
2.5.2 La forme intérieure
2.5.3 La surface
2.5.4 La maison
APPRIVOISER DES MATERIAUX, UNE RENCONTRE AVEC SOI-MEME 
3.1 La photographie : le commencement d’une série de transformations apportées à la réalité
3.1.1 L’inconnu invite aux accidents heureux
3.1.2 La chambre noire
3.1.3 La numérisation
3.1.4 Le noir, le blanc et les gris
3.1.5 La lumière
3.2 Deux pratiques conjointes : la méditation et la création artistique
3.2.1 Au sujet des dérives
3.2.2 Ma cour
3.2.3 Les installations intimes
3.3 Le dessin
3.3.1 L’atelier intérieur
3.3.2 Un fragment dans un dessin
3.3.3 La composition
3.3.4 Les formes naissent d’accumulation de traits
3.3.5 Des formes concentriques
3.3.6 Proposition sur les formes dans mes dessins : formatage des images photographiques
3.4 Les sculptures
3.4.1 Ergonomie de l’atelier chez Massimo : mise en place de l’espace pour favoriser une jonction fluide entre la méditation et la pratique même
3.4.2 Appropriation d’une méthode : retour à la maison
3.4.3 Notes sur la finalité : superposition des couches et répétition des gestes; une transgression.
CONCLUSION

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