L’Action catholique spécialisée et la Jeunesse agricole catholique

L’Action catholique spécialisée et la Jeunesse agricole catholique

Les catholiques impliqués dans la société, Rerum Novarum

Le mouvement qui est traité dans ce mémoire se développe dans le cadre de l’apostolat organisé des laïcs. Ce dernier repose sur l’implication des laïcs, membres non cléricaux de l’Eglise catholique, dans la diffusion de la foi. Il connaît un tournant dès la fin du 19ème siècle et devient alors essentiel aux yeux de Rome. Bien que l’Action catholique prenne son essor au cours des années 1920, elle découle d’initiatives à propos du rôle des laïcs dans l’Eglise et la société lancées dès le 19ème siècle. Ces dernières sont liées à une crainte croissante du phénomène qui sera nommé déchristianisation de la société qui est notamment lié à la sécularisation progressive des institutions publiques. A la fin du 19ème siècle, Rome réagit officiellement à ce phénomène qui préoccupe énormément les esprits à cette époque, particulièrement au sein du milieu ouvrier1. Le Pape Léon XIII, qui officie entre 1978 et 1903, publie de nombreux documents traitant de la nécessité d’une plus grande implication de l’Eglise dans la société, surtout concernant la question sociale. Publiée en 1891, l’encyclique Rerum Novarum en est le point culminant et illustre le besoin de rénovation de l’Eglise catholique2.

Rerum Novarum est l’encyclique qui trouvera le plus d’écho dans le monde catholique à son époque mais également durant les décennies à venir. Lors de sa publication en 1891, elle a déjà été travaillée depuis plusieurs années car le Pape est sensible à la question des diverses écoles de catholicisme social qui se développent à l’époque3. Il considère également l’urgence de la question sociale par les diverses figures du monde catholique4. L’écho incontestable de cette encyclique est principalement dû à son innovation car la papauté s’implique à nouveau dans le domaine temporel dont elle s’était éloignée depuis un certain temps: « Elle partait, fait nouveau, d’un diagnostic social à partir duquel elle réintroduisait, dans son statut, une mission temporelle dont le Saint-Siège avait été évincé par l’affirmation de l’État-nation »5. Avec cette encyclique, la papauté espère réduire le fossé qui sépare la société de la mission de l’Eglise catholique. Il offre une solution basée sur les valeurs catholiques et pose ainsi les « jalons d’une doctrine sociale »6. Avec Rerum Novarum, le pape est « soucieux de pourfendre l’erreur moderne »7 qui est notamment liée au phénomène de l’industrialisation. L’encyclique s’adresse en premier lieu au monde ouvrier qui est le premier milieu touché par la déchristianisation.

L’idée que l’ouvrier oeuvre pour l’ouvrier8 émerge avec cette encyclique et révèle l’apostolat des laïcs comme fondement de l’A.C. Bien que l’encyclique Rerum Novarum ne touche pas directement tous les groupements de catholiques ou ne définisse par clairement l’A.C., elle encourage à « retisser les liens fraternels propre au christianisme qui, depuis les premières communautés, pouvait retrouver son sens social initial »9 par le concept central de charité. L’impact du message adressé au cas spécifique des ouvriers se généralise et les différentes organisations catholiques de l’époque s’y reconnaissent et commencent à appuyer leur action sur cette doctrine. Ces groupements considèrent la question sociale avant la publication de l’encyclique mais cette dernière leur offre des arguments qui soutiennent leur cause10. Rerum Novarum lance le mot d’ordre qui atteint un grand nombre d’organisations catholiques présentes au 19ème siècle mais restent encore éparses. Initiateur de l’Action catholique, l’encyclique de Léon XIII ne l’exprime toutefois pas sous ce nom et ne donne aucune information précise concernant son organisation. Son successeur, Pie X, publie l’encyclique Il fermo Proposito en juin 1905. Ses fondements reposent sur la promotion de l’action sociale, tout comme la célèbre Rerum Novarum. Toutefois la perspective du Pape sur ce sujet est modifiée et le texte insiste sur le fait qu’ « elle n’exclut absolument rien de ce qui, d’une manière quelconque, directement ou indirectement, appartient à la mission divine de l’Église »11. Le champ d’action de l’A.C. ne se limite donc plus uniquement au monde ouvrier. Le terme d’Action catholique y est pour la première fois exprimé sans toutefois expliciter sa fonction et la manière dont elle s’accomplit. L’organisation pratique et les fondements de l’Action catholique sont définis une quinzaine d’années plus tard à travers les nombreuses lettres et encycliques du Pape Pie XI, aussi nommé « Pape de l’Action catholique »12. 0000000000000000000000000000000 Le modèle d’Action catholique de Pie XI Le pontificat de Pie XI (1922-1939) est caractérisé par un intense travail concernant le développement de l’Action catholique. Ce dernier forge un corpus de documents traitant de la définition et de l’organisation de l’A.C13. Ces différents écrits permettent de comprendre le modèle idéal de l’A.C que la papauté constitue. Le sous-chapitre suivant se base particulièrement sur l’encyclique inaugurale du Pape datant de décembre 1922, Ubi Arcano Dei Consilio, ainsi que sur la lettre Quae Nobis, datant de décembre 1928. La définition que nous choisissons pour exprimer le concept d’Action catholique n’est pourtant pas issue de ces documents mais d’une lettre envoyée à un Cardinal allemand le 28 août 1934. Le temps écoulé depuis les débuts de l’A.C. indique la difficulté de définir un tel mouvement: « L’Action catholique qui par définition est la collaboration du laïcat à l’apostolat hiérarchique, ainsi que l’exige sa nature même, est une aide à la hiérarchie sacrée, à laquelle elle se subordonne, tout en se conformant et en s’adaptant à sa structure et à son organisation »14.

La fonction principale de l’A.C. consiste à « étendre le royaume du Christ » 15 à l’aide des laïcs qui promettent d’assister la hiérarchie catholique dans la transmission d’un message de foi. La définition insiste sur l’importance du respect de la hiérarchie par les divers mouvements. Selon cette dernière, l’unité de direction de chaque paroisse, diocèse ou pays demeure la même et permet ainsi de préserver la concentricité nécessaire au bon développement des mouvements16. Un encadrement strict des laïcs demeure au sein de l’A.C. bien que l’encouragement à leur participation puisse être considéré comme une évolution de la part de l’Eglise catholique au 20ème siècle. Un mandat est obligatoire pour les mouvements désirant être affiliés à l’Action catholique et illustre ainsi le contrôle de l’autorité ecclésiastique17. Les mandats ont une fonction double. Tout d’abord ils sont une autorisation au niveau spirituelle accordée aux organisations. Le mandat est aussi le terme utilisé pour les documents qui attestent du droit des organisations de se réclamer du mouvement de l’A.C18. Leur utilisation est justifiée par la nécessité de structurer l’A.C. ainsi que de s’assurer que les valeurs défendues par l’A.C. sont respectées.

La participation à l’A.C. est universelle à condition d’adhérer à la doctrine promue par la papauté: « sans exclusion d’âge, de sexe, de condition sociale, de culture, de tendances nationales et politiques »19. L’A.C. se développe suivant divers modèles qui s’adaptent à la nation ou région dans laquelle elle est exercée. Les modèles sont parfois combinés afin de trouver la solution la plus adaptée20. Toutefois, l’A.C. promue par Pie XI se base sur le modèle à 4 piliers qui est le modèle le plus ancien. Ce dernier sépare les catholiques en diverses branches selon leur sexe et leur âge avec des organisations pour les hommes, les femmes, les jeunes gens et les jeunes filles. Ainsi, selon la lettre Quae Nobis, leur action est adaptée à leur condition : [I]l paraît nécessaire de séparer les générations : « les organisations de jeunes gens s’appliqueront surtout à un travail de formation et de préparation à leurs travaux futurs, tandis que les hommes déjà mûrs se livreront généreusement à l’apostolat sur un champ plus vaste, sans exclure ni négliger aucune forme d’activité bienfaisante » […] il convient de particulariser mouvements masculins et mouvements féminins, non seulement par moralisme soupçonneux, mais plus encore par volonté de tenir compte des psychologies différentes et des ferveurs inégales21.

A travers l’A.C., l’activité des membres de ces mouvements permet un double effet ; premièrement d’apporter de l’aide à la hiérarchie catholique par leur apostolat et ensuite d’offrir une formation. Le but de cette dernière est de « poursuivre pour chacun sa propre perfection chrétienne » 22 avec l’appui des Evêques. Cette formation a une portée sur tous les domaines de vie des membres, autant dans la vie publique que dans la vie privée, incluant la formation religieuse, morale, familiale, professionnelle, sociale23. Elle laisse une place privilégiée à l’aspect spirituel et tend vers la formation d’Hommes complets24. Comme l’illustre le terme Action catholique, l’action permet aux membres de non seulement acquérir leur formation mais aussi de transmettre un message de foi.

Vers une Association populaire catholique suisse (APCS) L’union des catholiques prend plus de temps à se mettre en place en Suisse que dans les nations voisines. Ce retard est notamment dû à la position minoritaire des catholiques dans les grands centres urbains helvétiques menant à un phénomène que l’historien Urs Altermatt nomme le ghetto catholique25. L’infériorité des catholiques suisses se cristallise avec le Kulturkampf, « conflit religieux et culturel entre l’Eglise catholique et le catholicisme politique d’une part, l’Etat post-absolutiste et le libéralisme anticlérical de l’autre »26. Il faut noter que le Kulturkampf ne se manifeste pas dans des cantons comme le Valais dont la population et les autorités au 19ème siècle sont majoritairement catholiques conservatrices. Dans de telles régions, les catholiques ne subissent pas la même pression que dans les régions où ils sont minoritaires27. Bien que ce mémoire porte sur le Valais spécifiquement, un point concernant le développement vers l’union des catholiques est nécessaire étant donné que le canton y participera plus tard.

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Table des matières

Introduction
I.Etat de la question
II.Problématique
III. Méthodologie et présentation du Corpus
Emergence de l’Action catholique en Valais et les débuts de la JAC
Vers une Action catholique : Léon XIII, Pie X et Pie XI et la Suisse
Les catholiques impliqués dans la société, Rerum Novarum
Le modèle d’Action catholique de Pie XI
Vers une Association populaire catholique suisse (APCS)
Le Valais et l’ACJV, Association catholique de la Jeunesse valaisanne
La naissance de l’ACJV, ses buts et son organisation
L’Association catholique de Jeunesse valaisanne féminine (ACJVF) et initiatives de l’Action catholique
L’Action catholique spécialisée et la Jeunesse agricole catholique
Action catholique spécialisée: Structure et organisation de la JAC en Valais
La méthode et les actions typiques de la JAC en Valais
La JAC, un modèle ambigu au fil des années
L’ambivalence de l’action de la JAC face à la modernisation de la société valaisanne
La JAC, défenseur du monde rural
Une adaptation à la modernité malgré tout
Collaboration des laïcs à l’apostolat hiérarchique et autonomie du militant∙e
La JAC soumise à la hiérarchie catholique en Valais
La formation de la JAC, moteur de l’indépendance du militant∙e
Renforcement du modèle par la collaboration
Liens entre les diverses sections de JAC valaisannes
Création de l’Action catholique romande
Le Valais et le Mouvement International de la Jeunesse Agricole et Rurale catholique (MIJARC)
La JAC en Valais, plus qu’une simple société de village ?
L’impact des méthodes de la JAC sur la société valaisanne
Réticences face aux méthodes adoptées par la JAC
Le travail de la JAC reflété dans la presse
L’influence de la JAC sur la politique valaisanne
Difficultés et solutions pour le maintien des sections de JAC en Valais 118
Les difficultés liées à l’émergence de nouvelles sections
Les problèmes pratiques face à l’idéal de la JAC
La JAC valaisanne, résistante face aux difficultés des années 1950 ?
Conclusion
Annexes
Tableau représentant le pourcentage de jacistes travaillant dans et en dehors du domaine de l’agriculture. DE CHASTONAY Josiane, « L’Action catholique en Valais et le mouvement jaciste en particulier », p.38. En référence à la page 98 de ce travail.
Rapport des visites de sections, juin 1936, Action catholique du Bas-Valais, Archives de l’Evêché de Sion, AES/427.148. En référence à la page 93 de ce travail.
Photos
Chronologie des évènements marquants de la JAC en Valais entre 1935 et 1955
Bibliographie
Sources
Littérature secondaire
Curriculum Vitae

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