L’accès à l’information au coeur des missions des bibliothèques

L’accès à l’information au coeur des missions des bibliothèques

LGBTIQ+ : un acronyme en constante évolution

Dans ce travail, j’emploie l’acronyme LGBTIQ+ pour désigner les personnes qui s’identifient comme lesbiennes, gays, bisexuel·le·x·s, transgenres, intersexes, queer, non binaires, en questionnement ou selon une autre identité de genre ou orientation sexuelle8. On trouve presque autant de formules pour désigner les communautés LGBTIQ+ qu’on parcourt de textes sur le sujet. C’est pourquoi, je souhaite brièvement expliquer les raisons pour lesquelles mon choix s’est arrêté sur celui-ci et mentionner quelques limites. Depuis quelques années, l’acronyme s’enrichit de lettres, on rencontre par exemple parfois le sigle LGBTIQA qui englobe aussi les asexuel·le·x·s ou LGBTIQAP pour les personnes qui s’identifient comme pansexuel·le·s. Pourquoi m’arrêter à LGBTIQ+ ? Tout d’abord, il me semble particulièrement important de rendre possible d’autres formes d’identification en incluant les personnes « en questionnement » dans l’explicitation de l’acronyme, ce qui est plus aisément rendu possible par la lettre « Q ».

De plus, je souhaitais rendre compte des autres possibilités que celles explicitées dans la description de l’acronyme retenu, c’est pourquoi j’ai choisi d’adopter le symbole « + » plutôt qu’un astérisque que l’on peut parfois rencontrer. Ce symbole suggère assez spontanément une ouverture à d’autres possibilités et porte en lui-même une dimension positive alors que l’astérisque renvoie davantage à l’idée d’un complément accessoire et peut ainsi porter une dimension dépréciative. Enfin, il s’agit du terme que j’ai rencontré au début de mes recherches et que j’ai choisi d’adopter pour communiquer mes appels à entretiens, en espérant que les personnes concernées se reconnaîtraient dans celui-ci. Il m’a donc paru plus approprié de continuer à l’employer dans ce travail, afin de faire preuve de transparence quant à la terminologie utilisée tout au long du processus de recherche.

Il est aussi capital de garder à l’esprit que le terme LGBTIQ+ ne renvoie pas à un ensemble homogène. Appréhender ces communautés comme un tout indifférencié et exempt de tensions internes est un réflexe commun lorsqu’on se place du point de vue dominant (Delphy 2008 ; Falquet 2020). Au contraire, ces communautés sont bien sûr plurielles, diverses et comme tout groupe social, traversées par des rapports de pouvoir. Par exemple, plusieurs auteur·trice·x·s relèvent l’invisibilisation des problématiques propres à plusieurs sous-groupes tels que les personnes intersexes, bisexuelles, non binaires ou encore les personnes transgenres (Astier Cholodenko, Matras et Topini 2019 ; Cottin 2019 ; Fédération genevoise des associations LGBT et Institut des études genre [2015] ; Hertig Randall et al. 2018).

Pour ne citer qu’un exemple, les personnes bisexuelles vivent souvent « un double rejet » (Cottin 2019, p. 5) puisqu’elles s’écartent à la fois du modèle de genre dominant et qu’elles sont parfois aussi exclues des communautés lesbiennes ou gays. On signalera aussi les individus qui sont à l’intersection de plusieurs groupes et qui subissent des discriminations imbriquées comme par exemple les personnes transgenres noires ou qui ne font pas partie de la classe moyenne (Falquet, 2019). Le manque d’études dédiées spécifiquement à ces sous-groupes est aussi le signe de leur double invisibilisation (Eisner, Hässler 2019 ; Astier Cholodenko, Matras et Topini 2019). Si cet acronyme ne reflète pas la réalité dans toute sa complexité et qu’il pourrait conduire à masquer des tensions internes, il permet néanmoins de désigner un ensemble qui éprouve des formes d’oppressions communes et qui peut donc aussi partager des luttes et des alliances communes (Astier Cholodenko, Matras et Topini 2019) :

« [Cela] a un sens de rassembler les revendications […] parce que tous ces groupes sont touchés par les discriminations pour une même raison : leur non-conformité au modèle sexiste et binaire des sexes, des genres et des relations sexuelles et amoureuses. Ce sont des existences qui « menacent » les principes sur lesquels notre société repose : la prétendue naturalité des différences entre hommes et femmes (sans prise en compte des personnes intersexes et des personnes transgenres), la supériorité du masculin sur le féminin et la complémentarité des sexes/genres (couples hétérosexuel et monogame, à visée reproductive). » (Cottin 2019, p. 8) En définitive, même s’il n’est pas exhaustif, cet acronyme permet de désigner adéquatement et de rassembler les personnes qui ne sont pas conformes aux normes de genre dominantes et il permet de représenter la fluidité qui existe dans les représentations des orientations affectives et sexuelles et des identités de genre (Mehra 2019), tout en ouvrant la possibilité à des alliances.

Orientation affective et sexuelle, identité de genre, expression de genre et rôle de genre Afin d’éviter toute incompréhension, il me semble judicieux de clarifier les distinctions entre des termes qui sont souvent confondus, à savoir l’orientation affective et sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre et le rôle de genre. L’orientation affective et sexuelle, plus souvent abrégée par le terme d’orientation sexuelle, désigne : « l’attirance affective et physique qu’une personne éprouve pour une personne de l’autre sexe (hétérosexualité), pour une personne de même sexe (homosexualité), indifféremment pour des personnes des deux sexes (bisexualité) ou indépendamment du genre de la personne (pansexualité). » L’identité de genre peut être définie par : « l’expérience intime et personnelle du genre, profondément vécue par tout·e un·e chacun·e, d’être un homme ; une femme ; pas uniquement femme ; ou pas uniquement homme ; les deux ; ou de ne pas se reconnaître du tout dans les genres homme/femme. » (Roux 2019, p. 30).

Par conséquent, l’identité de genre peut correspondre au genre auquel un individu été assigné à la naissance ou non. Le sexe biologique entendu comme « les caractéristiques sexuelles physiques à partir desquelles sont différenciés les corps masculins et féminins : les chromosomes, les gonades, les taux d’hormones, les organes génitaux et certains aspects de la morphologie » n’est pas déterminant ici (Arvy 2017, p. 5). Lorsqu’on parle d’identité, « ce qui est déterminant est […] plutôt le genre, c’est-à-dire la catégorie dans laquelle une personne a été placée légalement et socialement à sa naissance (après observation de ses organes génitaux externes) et qui oriente les attentes de son entourage envers elle » (Arvy 2017, p. 5). Autrement dit, le genre désigne le sexe social d’une personne et est le produit d’une construction sociale (Parini 2006). On trouve aussi la formule de sexe assigné à la naissance pour désigner le genre ou sexe social attribué de la sorte. En outre, lorsque « l’identité de genre d’une personne correspond au genre qui lui a été assigné à la naissance, [on parle de] personne cisgenre » (Arvy 2017, p. 5).

Dans le cas contraire, on parle généralement de transidentité. Il est important de signaler ici que de nombreuses personnes ne se reconnaissent pas dans ces catégories et se considèrent alors comme non binaires, agenres ou encore gender fluid (Cottin 2019b). Enfin, il faut encore introduire une clarification importante concernant le sexe biologique : de nombreuses études ont montré qu’il fallait appréhender le sexe biologique davantage comme un continuum que comme une donnée « naturelle » et fixe où seuls un sexe mâle et femelle existent avec leurs attributs anatomiques respectifs. On parle désormais de niveaux de sexuation et on sait qu’il existe une variété de possibilités de positionnement sur ce continuum (Cottin 2019b). Ainsi, les personnes intersexes sont des personnes nées « avec des caractéristiques sexuelles ne permettant pas une catégorisation conventionnelle stricte en tant que mâle ou femelle » (Arvy 2017, p. 55). En raison de cette ambiguïté ou non-conformité à la catégorisation conventionnelle, ces personnes sont souvent la cible de discriminations et de violences (interventions chirurgicales lourdes et mutilantes) (Arvy 2017 ; Cottin 2019b). Pourtant il faut souligner que la plupart des personnes – qui sont dans la norme – ne connaissent en réalité pas leurs propres niveaux de sexuation puisqu’ielles ne l’ont jamais examinés (Arvy 2017).

LGBTIQ-phobies dans les bibliothèques

Chaque année, l’ALA, par le biais de sa section consacrée à la liberté intellectuelle, the Office for Intellectual Freedom, publie un rapport qui recense les cas de censure ou de tentatives de censure ayant lieu dans les bibliothèques des États-Unis. Outre les documents contestés, le rapport pointe aussi les actions de valorisation (tables thématiques, etc.) et les actions de médiation culturelle ayant fait l’objet de polémiques. Ces données sont récoltées dans tout le pays, par le biais des professionnel·le·x·s qui sont appelé·e·x·s à signaler les cas de contestation ou de censures auxquels iels ont été confronté·e·x·s et en collectant les informations publiées dans les médias. En 2019, l’ALA a recensé 377 cas de censure ou de tentatives de censure qui ont visé 566 titres, sur un ensemble de 607 médias (comprenant aussi les films, journaux) (ALA 2020). La censure peut venir de différents acteur·trice·x·s : autorités de tutelle, groupes de pression religieux, plaintes émanant du public, etc. L’association souligne que les tentatives de censures d’ouvrages mettant en scène des personnages LGBTIQ+ ou abordant cette thématique ne cessent d’augmenter depuis les années 1990, période à laquelle elle a commencé à effectuer cette recension (ALA – Office for Intellectuel Freedom [2020]). Cette année encore, il s’agit de la principale raison avancée pour censurer un document : sur les 10 livres les plus contestés, 8 d’entre eux l’ont été en raison d’un contenu ayant trait aux thématiques LGBTIQ+, comme l’illustre bien la figure n°1 tirée de l’infographie qui synthétise les chiffres de 20199, présentée dans la page qui suit.

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Table des matières

Remerciements
Résumé
Liste des tableaux
Liste des figures
Sigles et abréviations
Introduction
1.1 Contexte
1.1.1 LGBTIQ-phobies : un état des lieux en Suisse
1.1.2 Quels enjeux pour les bibliothèques ?
1.2 Objectifs
1.3 Périmètre de recherche
1.4 Définitions des concepts
1.4.1 LGBTIQ+ : un acronyme en constante évolution
1.4.2 Orientation affective et sexuelle, identité de genre, expression de genre et rôle de genre
2.Diversité et inclusion dans les bibliothèques
2.1 LGBTIQ-phobies dans les bibliothèques
2.2 Bibliothèques, accueil et inclusion
2.2.1 L’accès à l’information au coeur des missions des bibliothèques
2.2.2 Inclusion
2.3 Principaux points d’attention
2.3.1 Collections
2.3.2 Médiation
2.3.3 Accueil
2.3.4 Gouvernance
3.Méthodologie de recherche
3.1 Approche méthodologique
3.1.1 Une posture inspirée de l’épistémologie féministe du standpoint
3.1.2 Les méthodes qualitatives comme démarche prédominante
3.2 Collecte des données
3.2.1 Littérature secondaire et littérature grise
3.2.2 Entretiens semi-structurés
3.2.3 Sondage
3.3 Limites et biais
4.Panorama de la situation en Suisse romande
4.1 Premier tour d’horizon
4.1.1 Présentation des participant·e·x·s
4.1.2 Premières impressions
4.2 État des lieux
4.2.1 Visualisation des bonnes pratiques d’inclusion des publics LGBTIQ+ dans les bibliothèques de Suisse romande
4.2.2 Discussion des résultats
4.3 Synthèse des résultats
Recommandations et pistes de mise en oeuvre
Conclusion
Bibliographie
Les chiffres 2019 de la censure aux États-Unis
Top 10 des livres les plus censurés aux États-Unis
Guide d’entretien I – professionnel·le·x·s de l’information
Variante I – spécialistes des questions d’inclusion
Guide d’entretien II – publics LGBTIQ
Variante II – spécialistes des questions LGBTIQ+
Photo-élicitation
Sondage
Diffusion du sondage – organisations contactées

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