La violence, un problème de santé mondiale

Les multiples facettes de la violence

Le soin psychique, de part son intrusion dans la vie privée d’autrui, de la mise en sens et de l’interprétation du monde que l’on fait pour l’autre, comporte une part inévitable de violence (Ciccone et al., 2014, p. 2). L’organisation et le fonctionnement institutionnels représentent une autre source de violence dans les soins. L’hospitalisation provoque la confrontation du patient à un certain nombre de facteurs de stress environnementaux pouvant augmenter le risque d’un passage à l’acte violent (Salamin, Schuwey-Hayoz & Giacometti Bickel, 2010, p. 23). Ceux-ci peuvent être liés à la structure même de l’unité (fermeture des portes, manque d’intimité, sur-occupation de l’unité engendrant un manque d’espace psychologique ou social). Les patients sont alors davantage en contact les uns avec les autres et le risque d’intrusion dans l’espace personnel est exacerbé, et peut entrainer une augmentation du stress (Salamin et al., 2010, p. 23). Cette notion de territorialité fait écho au facteur éthologique à l’origine de l’agressivité. Les facteurs influençant le risque d’un passage à l’acte sont également liés au type même de l’unité. En effet, il y a plus d’acting out1 dans les unités d’admission, les unités fermées ou semi-fermées et les unités traitant les addictions que dans les autres unités (Salamin et al., 2010, p. 26). En outre, le nombre d’entrées influence significativement la survenue d’évènements violents. Quant à leur gravité, elle est associée au changement de patients, c’est-à-dire au nombre d’entrées et de sorties et non pas au taux d’occupation de l’unité (Salamin et al., 2010, p. 26). Ceci explique la raison pour laquelle les unités d’admissions sont plus sujettes à des évènements agressifs : le taux de rotations et d’admissions des patients y est plus élevé. Ces changements fréquents sont à l’origine de réorganisations groupales, sociales et spatiales qui peuvent avoir un impact sur le sentiment de promiscuité des patients et leur stress (Salamin et al., 2010, p. 28).

Dans les soins en psychiatrie, les soignants sont de ce fait parfois auteurs de violence, mais aussi à leur tour sujets de violence dans les soins. Selon Ciccone et al., (2014) la psychiatrie est en effet bien souvent un lieu de souffrance pour les soignants (p. 50). Cette souffrance provient du sentiment d’impuissance, d’inutilité et de désespoir face à la prise en compte de la souffrance psychique. « La souffrance des soignants est due aux logiques institutionnelles, organisationnelles, logiques de pouvoir, rapports de force idéologiques, qui prennent souvent le pas sur la tâche primaire qui est de soigner. » (Ciccone et al., 2014, p. 51). Cependant, il est aussi possible de voir la violence du soin infligée par le soignant. Ceci peut se produire, notamment lorsque il y a un contre-transfert dans la relation au patient. (Ciccone et al., 2014, p. 27). Il peut alors y avoir confusion sur l’objet des soins, il peut s’adresser inconsciemment au soignant au lieu du patient en tant que préoccupation primaire. Une élaboration insuffisante de ce contre-transfert peut faire vivre au soignant des situations émotionnelles violentes et les actes de soin peuvent alors montrer une ambivalence et être à l’origine de violences à l’encontre du patient (Ciccone et al., 2014, pp. 59-60). Parmi les formes de violence que contient le soin, on peut aussi nommer la séduction qui vise à convaincre le patient qu’on lui veut du bien et qu’il doit participer à un projet de soins qui peut ne pas être le sien mais reste celui du soignant (Ciccone et al., 2014, p. 2).

De la violence aux mesures de contrainte

La relation entre le soignant et le soigné se trouve souvent dans une certaine asymétrie (Davous et al., p. 180). La vulnérabilité de la personne soignée, qui se sent impuissante et qui a perdu sa capacité d’agir, compense cette perte de « pouvoir » par la violence qui peut s’exercer à l’encontre des soignants (Davous et al., 2014, p. 278). Le patient qui vit une situation de tension intérieure met en jeu des tentatives pour rompre cet état de tension psychique qui peuvent se traduire par un agir violent. Lorsqu’on choisit de se préoccuper en particulier de la réponse des soignants face à la violence des patients, on ne peut s’empêcher de parler de la contrainte dans les soins. En effet, la réponse primaire et principale face à un comportement qui est perçu comme violent et dangereux (mettant en danger la sécurité des autres patients ou des soignants) est l’utilisation de formes de contrainte. Selon l’Office fédéral de la statistique, on compte actuellement en Suisse environ 600 à 700 mesures de soins sous contrainte prononcées par année, par des mesures pénales (Pascal & Hanon, 2014, p. 231). Il est cependant difficile d’avoir une idée du nombre exact de mesures civiles imposant des soins psychiatriques sous contrainte puisque, en Suisse, ce domaine est régi par des instances hiérarchiques diverses et que les statistiques hospitalières sont souvent imprécises (Pascal & Hanon, 2014, p. 232). On note néanmoins que ce sont des soins qui existent.

La violence

Afin de comprendre le thème de la violence dans les soins il est tout d’abord nécessaire de définir le concept de la violence et des termes que l’on peut y associer couramment. En effet, on fait souvent le lien entre violence et agressivité qui sont des termes associés mais difficiles à distinguer. Selon Morasz (2002), l’étymologie du terme violence fait référence à une force vitale, une pulsion naturelle (p. 27). Il existe aussi le concept de violence fondamentale qui est défini par Bergeret comme « un authentique instinct violent, naturel, inné, universel et primitif. » (Morasz, 2002, p. 27). Cette notion est dépourvue de signification haineuse et obéit à un instinct de conservation et une pulsion de vie. La personne en face n’a pas d’importance car la quête de la violence est d’empêcher la souffrance et non pas de nuire à cette personne (Morasz, 2002, p. 31). Pour Bergeret « il s’agit d’une violence fondamentale qui n’est ni bonne, ni mauvaise en soi, mais plutôt d’une pulsion de vie mise en action dès lors que l’individu perçoit une menace réelle ou supposée » (Gbézo, 2011, p. 16). Mais on peut aussi prendre une définition psychosociologique dont l’attrait réside dans l’inclusion des différents types de violence, l’intérêt porté au point de vue de la victime et la prise en compte de l’interaction présente dans la situation (Morasz, 2002, p. 10). Il y a violence quand, dans une situation d’interaction, un ou plusieurs acteurs agissent de manière directe ou indirecte, massée ou distribuée, en portant atteinte à un ou plusieurs autres, à des degrés variables, soit dans leur intégrité physique, soit dans leur intégrité morale, soit dans leurs possessions, soit dans leurs participations symboliques et culturelles (Michaud, 1978, cité par Morasz, 2002, p. 10).

L’agressivité Quant à l’agressivité, elle est définie comme une tendance à attaquer (Morasz, 2002, p. 12). Selon Laplanche et Pontalis (1992), il s’agit de tendances ou ensemble de tendances, qui s’actualisent dans des conduites fantasmatiques, celles-ci visant à nuire à autrui, à le détruire, le contraindre, l’humilier… L’agressivité connaît d’autres modalités que l’action motrice violente et destructrice ; il n’est aucune conduite aussi bien négative (refus d’assistance par exemple) que positive, symbolique (ironie par exemple), qu’effectivement agie, qui ne puisse fonctionner comme agression…(Morasz, 2002, p. 12). L’agressivité comprend donc la notion d’intentionnalité, d’envie et de plaisir à agresser (Morasz, 2002, p. 12). Elle « prend l’autre en considération dans un mouvement de totale ambivalence, où s’expriment à la fois haine et amour. » (Gbézo, 2011, p. 16). Elle est aussi influencée par des pulsions. L’agressivité humaine peut avoir plusieurs causes. Elle peut être un instinct nécessaire pour la structuration des relations sociales, avoir une cause neurobiologique en conséquence à un stress ou encore une cause psychologique qui dépend de facteurs groupaux, culturels et sociaux (Morasz, 2002, pp. 17-18). Il existe donc des violences motivées par un désir d’agression, des actes faisant violence mais dépourvus d’agression (telle que la contention physique en cas d’agitation) et des agressions qui ne font pas violence à la personne visée (tels que certains propos délirants) (Morasz, 2002, p. 15). Le ressenti de la personne autour de la nature de l’acte, considéré comme violent ou agressif, occupe une place importante dans le vécu de l’acte. L’intentionnalité de l’individu à l’origine de cet acte, où l’agression sert à réduire un malaise, à éviter une situation stressante ou être une forme d’expression de violence, influence l’impact de l’acte (Morasz, 2002, p. 11).

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Table des matières

1. Introduction
1.1. Problématique
1.1.1. La violence, un problème de santé mondiale
1.1.2. La violence et la santé mentale
1.1.3. Composantes conceptuelles de la problématique
1.1.4. Moyen thérapeutique efficace ou pratique d’un autre âge ?
1.1.5. Importance du soin relationnel en psychiatrie
1.2. Cadre théorique
1.2.1. Ancrage disciplinaire
1.2.2. Métaconcepts
1.2.3. Méthodologie de la pratique
1.3. Formulation de la question de recherche
2. Méthode
2.1. Sources d’information et stratégie de recherche documentaire
2.1.1. Équations de recherche sur CINHAL
2.1.2. Types de recherche retenus
2.1.3. Qualité des revues
2.1.4. Répartition géographique des études retenues
2.2. Diagramme de flux
3. Résultats
3.1. Analyse critique des articles retenus
3.1.1. Qu’est-ce que la violence dans les soins en psychiatrie ?
3.1.2. La contrainte, un soin controversé face à la violence
3.1.3. La contrainte vue par le soignant
3.1.4. La contrainte vue par le patient
3.1.5. Les alternatives et améliorations possibles
3.1.6. Quelles recommandations proposer?
3.1.7. Quel est l’enjeu de la relation thérapeutique ?
3.2. Tableau comparatif
4. Discussion
4.1. Conflit des logiques thérapeutiques et sécuritaires
4.2. Etat des lieux sur la situation en Suisse
4.3. Une problématique complexe
4.3.1. Des résultats à nuancer
4.4. La relation interpersonnelle, une alternative à la contrainte ?
4.4.1. Phase d’orientation
4.4.2. Phase de travail
4.4.3. Phase de résolution
5. Conclusion
5.1. Apports et limites du travail
5.2. Recommandations
6. Références
6.1. Liste de Références Bibliographiques
6.1.1. Articles scientifiques généraux
6.1.2. Articles scientifiques analysés
6.1.3. Ouvrages et manuels
6.1.4. Documents électroniques
6.2. Liste Bibliographique
6.2.1. Articles scientifiques
6.2.2. Ouvrages et manuels
Annexe 1 : Définition des composantes éthiques intervenant dans les soins sous contrainte, selon l’ASSM
Annexe 2 : Fiche de lecture : analyse critique d’une étude qualitative

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