LA TRACHEOTOMIE EN UNITE DE NEUROREANIMATION

Vascularisation

Artères trachéales Au niveau cervical, les artères proviennent principalement des artères thyroïdiennes inférieures, avec du coté gauche l’artère thyroïdienne inférieure qui donne trois branches collatérales latéro-trachéales étagées, destinées à l’œsophage et à la trachée. Au niveau thoracique, la vascularisation artérielle provient surtout des artères thymiques et de l’artère bronchique droite.
Veines trachéales Les veines du segment cervical de la trachée sont nombreuses et de petit calibre. Elles se jettent, par les veines thyroïdiennes inférieures et les veines œsophagiennes, dans le système cave supérieur. Au niveau thoracique, les veines se drainent également dans les veines œsophagiennes.
Vaisseaux lymphatiques Au niveau cervical, les vaisseaux lymphatiques se dirigent latéralement et en dehors pour rejoindre les noeuds lymphatiques qui s’échelonnent à la face latéro-postérieure de la trachée. Ce sont les chaînes ganglionnaires récurrentielles en rapport étroit avec le nerf récurrent. Les lymphatiques du segment thoracique, quant à eux, se drainent dans les noeuds lymphatiques latéro-trachéo-œsophagiens.

Trachéotomie en cas de ventilation invasive prolongée

     De nombreuses maladies neurologiques et musculaires peuvent provoquer une défaillance plus ou moins prononcée de la fonction ventilatoire motivant une intubation trachéale dans un premier temps puis une trachéotomie secondairement. Les atteintes neuro-musculaires avec recours nécessaire, transitoire ou chronique, à la ventilation invasive sont les pathologies associant troubles de la commande et de la mécanique ventilatoire, troubles de la déglutition, absence de toux, et faiblesse musculaire avec atteinte des muscles respiratoires. Concernant les atteintes du parenchyme cérébral, il pourra s’agir d’accidents vasculaires cérébraux (AVC), de traumatismes, de tumeurs ou d’infections. Pareillement, les atteintes médullaires cervicales peuvent être responsables d’une insuffisance respiratoire, qu’elles soient d’origine traumatique, ischémique, tumorale, inflammatoire ou secondaire à une compression médullaire. Les myopathies ou la sclérose en plaques à un stade évolué ainsi que la sclérose latérale amyotrophique (SLA), responsables d’une insuffisance respiratoire restrictive, peuvent également conduire à la réalisation d’une trachéotomie.

La trachéotomie chirurgicale

    La technique chirurgicale est la première méthode de trachéotomie connue. La procédure est standardisée et réalisée sous anesthésie générale par un chirurgien ORL. Le patient est en décubitus dorsal avec la tête en hyper-extension, un billot est placé sous les épaules avec les bras le long du corps. Une incision cutanée horizontale est réalisée sous le relief du cricoïde à une distance variable selon la morphologie du patient. La dissection se fait de la superficie vers la profondeur, plan par plan, de manière strictement médiane et verticale (avec palpation régulière au doigt pour contrôler que l’opérateur ne dévie pas latéralement par rapport à la position de la trachée). Sauf s’il reste à distance du champ opératoire, l’isthme thyroïdien doit être systématiquement sectionné après ligature et/ou coagulation. Pour limiter la dévascularisation des tissus, l’exposition de la face antérieure de la trachée est limitée au strict nécessaire. L’incision trachéale se fait verticalement et médialement entre le 2éme et 3éme anneau sous-cricoïdien. Des fils de rappel sont mis en place puis un contrôle minutieux de l’hémostase est effectué (Figure 13). La canule de trachéotomie est introduite dans la lumière trachéale ainsi exposée, aidée par une légère traction latérale exercée sur chacune de ces boucles (Figure 14). Ces fils provisoires (5 à 10 jours selon les équipes) sont fixés sur la peau du thorax par des bandes collantes de façon visible, bien latéralisés et facilement décollables. En urgence en cas de décanulation accidentelle, leur légère traction permet de maintenir ouvert le trachéostome facilitant ainsi l’oxygénation et la recanulation. La canule est ensuite fixée par un cordon ajusté de façon minutieuse autour du cou pour limiter les mouvements de la canule et éviter toute décanulation accidentelle. Une auscultation pulmonaire bilatérale et comparative vérifie l’absence de canulation sélective ainsi qu’une radiographie cervico-thoracique pour vérifier la position de l’extrémité inférieure de la canule par rapport à la carène et contrôler l’absence de pneumothorax ou de pneumomédiastin immédiats.

Complications post-opératoires précoces

      Les complications précoces de la trachéotomie comprennent les complications survenant jusqu’à 7 jours après la réalisation du geste. Elles sont relativement peu nombreuses et essentiellement liées aux problèmes techniques de positionnement de la canule, aux hémorragies et à l’infection de l’orifice de trachéotomie.
Les défauts de positionnement de canule résultent :
 D’une difficulté technique d’insertion (insertion paramédiane)
 D’un défaut de fixation de la canule responsable soit :
 D’une obstruction de la canule (dans ce cas, une difficulté immédiate de la ventilation du patient est observée qui, en l’absence de « bouchons » aux aspirations trachéales, doit faire suspecter une obturation de la lumière par un repli muqueux de la trachée)
 D’une décanulation précoce (accident redoutable en raison de la difficulté potentielle à recanuler la trachée avant que le trajet ne soit organisé, ce qui prend sept à dix jours. Cette difficulté de réinsertion de la canule est plus importante en cas de technique percutanée de par la plus petite taille de l’orifice cutané et l’absence de plans nets de dissection).
Ainsi, le changement de canule devra être programmé avec à la moindre suspicion de difficulté d’insertion, l’utilisation d’un guide échangeur creux pouvant si besoin permettre l’oxygénation du patient lors de la manœuvre.
L’hémorragie du site opératoire : L’érosion du tronc artériel brachiocéphalique est une complication à redouter devant un saignement trachéal abondant, ou une pulsatilité de la canule. En général, ces signes apparaissent 48 heures après la trachéotomie, le plus souvent située au-delà du 3éme anneau trachéal. Dans tous les cas la mortalité de cette complication est élevée et nécessite une intervention chirurgicale urgente [49,51].
L’infection de l’orifice de la trachéotomie demeure une complication importante et fréquente des trachéotomies [52]. L’incidence est significativement plus importante pour les trachéotomies chirurgicales par rapport aux trachéotomies percutanées [46]. Les facteurs de risque d’infection de l’orifice de trachéotomie sont l’agitation du patient, l’immunodépression du patient, et le défaut de soins locaux [52].

Les indications de la trachéotomie.

     L’unité de neuroréanimation du service de neurochirurgie du CHU de Fann accueille en priorité les patients atteints de pathologies neurochirurgicales et neurologiques. L’intubation trachéale associée à la ventilation mécanique y est une pratique très courante. Elle permet d’assurer une optimisation des échanges gazeux, de lutter contre l’hypertension intracrânienne, d’instituer une sédation, et de protéger les voies aériennes inférieures. Une fois le patient intubé et ventilé, il peut se poser le problème du sevrage de ladite ventilation mécanique, traduisant une absence d’autonomie ventilatoire du patient, et se soldant par une ou des réintubations. Dans 53,85 % des cas, cet échec du sevrage ventilatoire avait été une indication de la trachéotomie. Dans la série d’Halun, la trachéotomie avait été indiquée pour faciliter le sevrage ventilatoire dans 62% des cas et Blot dans une enquête nationale, rapportait que 48% des praticiens avaient recours à la trachéotomie en cas d’échec de l’extubation [51]. L’échec de l’extubation peut être imputé à l’amyotrophie due essentiellement à la dénutrition, à l’importance de l’eau pulmonaire extra-vasculaire chez ces patients alités et perfusés de nombreux jours. L’intérêt principal de la trachéotomie chez ces patients à extubation difficile réside dans la baisse significative des résistances au frottement de l’air, de l’espace mort. Ce qui contribue à la baisse du travail ventilatoire du patient, comme l’a montré les travaux de Diehl et Heffner [9,68]. Par ailleurs, la trachéotomie reste utile en cas d’échecs d’extubation itératifs en ce sens qu’elle permet de s’affranchir des risques traumatiques et infectieux inhérents aux réintubations répétées. En facilitant la gestion des voies aériennes, elle rassure, par ailleurs, les cliniciens qui se montrent alors moins méfiants dans leurs tentatives de sevrage de la ventilation mécanique. La ventilation mécanique d’emblée prolongée était la seconde indication de la trachéotomie dans notre série (42,30%). Dans les séries de Blondonnet, d’El Meddahya et de Kiran cette indication était retrouvée dans des proportions respectives de 78, 68,75 et 83,60 % [63,57,59]. Chez les patients qui présentaient une souffrance neurologique sévère avec des possibilités de récupération lente, la trachéotomie avait été proposée pour favoriser l’autonomie ventilatoire ultérieurement, prévenir les lésions laryngées secondaires à l’intubation prolongée, améliorer le confort et pour permettre une mobilisation active plus précoce favorisant ainsi le retour à l’autonomie [69]. Dans ce groupe de patients, la trachéotomie avait aussi permis de diminuer les besoins en substances sédatives et analgésiques. Ainsi la trachéotomie présente des avantages certains. Mais des inconvénients existent comme le montre le tableau XII et doivent être pris en compte.

Les complications

    Notre étude n’a pas mis en évidence de complications peropératoires en raison probablement de la maîtrise de la technique chirurgicale de la trachéotomie. S’agissant des complications per-opératoires de la trachéotomie chirurgicale, d’importants progrès ont été réalisés, comme le montre une méta-analyse sur les trachéotomies chirurgicale et percutanée [46]. En effet, le taux de complications graves (décès péri-opératoires, arrêt cardiaque, pneumothorax et pneumomédiastin), les complications de type intermédiaires (désaturation artérielle, hypotension, lésion de la paroi postérieure de la trachée, mauvais positionnement de la canule, inhalation bronchique) et celles dites mineures (hémorragie, difficulté d’insertion ou fausse route de la canule, emphysème sous-cutané) sont évaluées à moins de 1 % [98,99,100]. Quant à la trachéotomie percutanée, elle engendre moins de complications hémorragiques peropératoires, et d’infections de l’orifice de trachéostomie et apporte un bénéfice esthétique ultérieur [101]. Mais elle peut être la source de complications peropératoires graves dont lalacération trachéale, la perforation œsophagienne, mais aussi de pneumothorax, d’emphysème sous-cutané, ou de malposition de la canule. Ces complications per-opératoires sont, par ailleurs, exceptionnelles avec la trachéotomie chirurgicale [93,94]. Les complications post-opératoires (57,70%) ont plus été notées dans notre étude, tout comme dans la série d’El Meddahya (56,2%) [57]. Il s’agissait d’obstructions de canule par un bouchon muqueux (15,38%%), de décanulations accidentelles (11,54%), pneumopathies nosocomiales (15,38%), mais aussi d’infection de l’orifice de trachéotomie (3,85%), de douleurs à la déglutition (3,85%), de sténose trachéale (3,85%) et de granulome (3,85%). L’obstruction de la canule de trachéotomie par un bouchon muqueux et la décanulation accidentelle sont des complications potentiellement graves mettant en jeu le pronostic vital du patient par asphyxie. Aucun décès par arrêt cardiaque hypoxique n’a été noté dans notre série. L’infection de l’orifice de la trachéotomie demeure une complication importante et fréquente des trachéotomies avec une incidence significativement plus importante pour les trachéotomies chirurgicales par rapport aux trachéotomies percutanées [46,49,52]. Ce point serait à rapporter à une incision chirurgicale de plus petite taille et à un décollement moins important des plans musculo-cutanés lors des trachéotomies percutanées. Les autres facteurs de risque d’infection de l’orifice de trachéotomie sont l’agitation du patient, l’immunodépression du patient, et le défaut de soins locaux [52]. Kiran a rapporté d’autres complications post-opératoires à type d’hémorragies locales [59]. Ces hémorragies peuvent relever d’une érosion du tronc artériel brachiocéphalique. Il s’agit d’une complication bien connue et potentiellement mortelle de la trachéotomie. Elle est à redouter devant un saignement trachéal abondant ou parfois devant de petites hémorragies « banales » pouvant simuler des aspirations traumatiques. L’autre signe évocateur étant une pulsatilité de la canule. L’incidence de cette complication de 0,2 % à 12,5 % est plus élevée dans la trachéotomie percutanée que dans la trachéotomie chirurgicale. Une proportion de 15,38% de patients trachéotomisés avait développait une pneumopathie nosocomiale acquise sous ventilation mécanique. Mais la relation de cause à effet entre la trachéotomie et les pneumopathies nosocomiales acquises sous ventilation mécanique est difficile à établir d’autant plus que la grande majorité de nos patients admis en unité de neuro-réanimation présentait une inhalation bronchique décelée dés l’intubation trachéale. Cette inhalation bronchique apparaît comme étant un facteur majeur de développement des pneumopathies nosocomiales acquises sous ventilation mécanique. A ce jour, aucune étude n’a pu isoler la place de la trachéotomie, comme un facteur de risque supplémentaire par rapport à la sonde trachéale translaryngée dans la survenue des surinfections broncho-pulmonaires chez les patients de réanimation ventilés artificiellement [52]. De même aucune étude n’a pu mettre en évidence de différence entre la trachéotomie chirurgicale et la trachéotomie percutanée dans la survenue de pneumopathie nosocomiale [102]. Une sténose de la filière laryngo-trachéale avait été notée chez un patient. Elle pourrait être due à un surgonflage du ballonnet de la canule de trachéotomie responsable d’une ischémie de la muqueuse trachéale ou à une érosion de ladite muqueuse lors de l’introduction vigoureuse de la canule. La sténose trachéale est une complication connue et fréquente des trachéotomies avec une incidence de 15 % dont 4 % de situations graves nécessitant une chirurgie [48]. Leur genèse est multifactorielle [50]. En effet, les causes sont nombreuses pouvant être liées au patient : état de choc, infection, immunodépression, dénutrition ou liés à des facteurs techniques : trachéotomie trop haute au-dessus du premier ou du deuxième anneau trachéal, résection du cartilage, existence de microtraumatismes répétés de la canule sur la trachée (mauvaise position ou fixation de la canule, agitation du patient, etc.) et surtout absence de contrôle de la pression d’insufflation du ballonnet de la canule.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. LA TRACHEE
1. Anatomie
2. Situation
3. Morphologie
4. Orientation
5. Dimensions
6. Rapports anatomiques
6.1 – Rapports anatomiques de la trachée cervicale
6.1.1 – Rapports antérieurs
6.1.2 – Rapports postérieurs
6.1.3 – Rapports latéraux
6.1.4 – Rapports anatomiques de la trachée thoracique
6.1.4.1 – Rapports à l’entrée du thorax
6.1.4.2 – Rapports dans le thorax
6.2 – Vascularisation
6.2.1 – Artères trachéales
6.2.2 – Veines trachéales
6.2.3 – Vaisseaux lymphatiques
6.3 – Innervation
7. Rappels physiologiques
7.1 – Respiration
7.2 – Phonation
7.3 – Drainage muco-ciliaire
7.4 – Barrière immunitaire
II. LA TRACHEOTOMIE
1. Historique
2. Ethique
3. Indications de la trachéotomie en réanimation
3.1 – Trachéotomie en cas de ventilation invasive prolongée
3.2 – Trachéotomie secondaire à une difficulté de sevrage de la ventilation mécanique
3.3 – Trachéotomie en cas d’obstruction des voies aériennes
4. Contre-indications de la trachéotomie
5. Délai pour réaliser la trachéotomie
6. Matériels et techniques de trachéotomie
6.1 – Matériels
6.1.1 – Les canules de trachéotomie
6.2 – Techniques
6.2.1 – La trachéotomie chirurgicale
6.2.2 – La trachéotomie percutanée
6.3 – Complications de la trachéotomie
6.3.1 – Complications per-opératoires
6.3.1.1 – De la trachéotomie chirurgicale
6.3.1.2 – De la trachéotomie percutanée
6.3.2 – Complications post-opératoires précoces
6.3.3 – Complications postopératoires tardives
6.4 – Suivi et devenir des patients trachéotomisés
6.4.1 – Surveillance post-opératoire du trachéotomisé
6.4.2 – Soins du patient trachéotomisé
6.4.3 – Décanulation
6.4.4 – Morbi-mortalité associée à la trachéotomie
DEUXIEME PARTIE
1. CADRE D’ETUDE
2. PATIENTS ET METHODES
2.1- Patients
2.1.1 – Critères d’inclusion
2.1.2 – Critères d’exclusion
2.1.3 – Population d’étude
2.2 – Méthodes
2.2.1 – Type d’étude
2.2.2 – Période d’étude
2.2.3 – Paramètres étudiés
2.2.4 – Collecte et analyse des données
2.3 – Ethique
3. RESULTATS
3.1 – Incidence
3.2 – Epidémiologie
3.2.1 – Age
3.2.2 – Genre
3.3 – Etude descriptive
3.3.1 – Motif d’hospitalisation en neuroréanimation
3.3.2 – Indications de la trachéotomie
3.3.3 – Délai de réalisation de la trachéotomie
3.3.4 – Technique de trachéotomie
3.3.5 – Statut de l’opérateur
3.3.6 – Type et taille des canules trachéales
3.3.7 – Complications de la trachéotomie
3.3.7.1 – Complications per-opératoires
3.3.7.2 – Complications post-opératoires
3.3.8 – Devenir des patients trachéotomisés
3.3.8.1 – Durée de canulation
3.3.8.2 – Décanulation et évolution
4. DISCUSSION
4.1 – L’incidence des trachéotomies en neuroréanimation
4.2 – L’âge
4.3 – Le motif d’admission en réanimation
4.4 – Les indications de la trachéotomie
4.5 – Le délai de réalisation de la trachéotomie
4.6 – Les techniques de trachéotomie
4.7 – Les canules trachéales
4.8 – Le statut de l’opérateur
4.9 – Les complications
4.10 – Le devenir des patients trachéotomisés
4.11 – La mortalité
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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