LA THELAZIOSE OCULAIRE DU CHIEN ET DU CHAT

LA THELAZIOSE OCULAIRE DU CHIEN ET DU CHAT

Position systématique du genre Thelazia

Les vers du genre Thelazia appartiennent à la classe des nématodes, il s’agit donc de vers ronds ; ils font partie de l’ordre des Spiruridés et de la famille des Thélaziidés (Otranto et al., 2003b). Les Spiruridés se caractérisent par un oesophage dont la portion glandulaire postérieure est plus longue que la portion musculeuse, deux spicules inégaux à l’extrémité postérieure spiralée des mâles et un cycle toujours hétéroxène ; ils parasitent les premières voies digestives ou des cavités de l’organisme. Au sein de l’ordre des Spiruridés, la famille des Thélaziidés regroupe deux genres (Thelazia spp. et Oxyspirura spp.) dont les mâles se distinguent car ils sont dépourvus d’aile caudale.

Le genre Thelazia parasite les mammifères et les femelles sont vivipares tandis que le genre Oxyspirura parasite les oiseaux et les femelles sont ovo-vivipares. Le genre Thelazia comprend de nombreuses espèces parasites fréquemment appelées «eyeworms» puisqu’elles sont présentes sur les annexes oculaires de nombreux mammifères, l’homme y compris (Shen et al., 2006). Le genre Thelazia comprend seize espèces décrites à ce jour dont la distribution est cosmopolite ; parmi elles, six sont d’intérêt vétérinaire ou médical : T. californiensis, T. callipaeda, T. gulosa, T. lacrymalis, T. rhodesi et T. skrjabini (Otranto et Traversa, 2005). T. callipaeda et T. californiensis ont la particularité de parasiter l’Homme (Otranto et Traversa, 2005).

Quelques caractéristiques des différentes espèces du genre Thelazia et leur répartition géographique

La thélaziose oculaire des carnivores domestiques est due à T. callipaeda (Railliet et Henry, 1910) et T. californiensis (Price, 1930). Le premier parasite de nombreuses espèces de carnivores domestiques et sauvages ; son spectre inclut le chien, le chat, le renard, le lapin, le loup, la fouine, le chat sauvage et le lièvre (Otranto et al., 2003a ; Otranto et al., 2007, Otranto et al., 2009). T. californiensis parasite lui aussi le chien mais aussi le mouton, le coyote l’ours et les cervidés (Anderson, 2000). Ces deux espèces sont aussi responsables de la thélaziose humaine (Shen et al., 2006 ; Otranto et Duto, 2008).

Le rôle de la faune sauvage dans l’installation et l’extension de la thélaziose canine en Europe est traité plus loin. Si T. californiensis est présent uniquement en Amérique du Nord, T. callipaeda est décrit en ex-URSS, à l’est de l’Asie : Inde, Chine, Corée, Japon, Indonésie, Thaïlande, Birmanie, Taiwan (Otranto et al,. 2003a ; Otranto et Traversa, 2005 ; Yang et al., 2006) et désormais de façon enzootique en Italie (Otranto et al., 2003a), en France (Dorchies et al., 2007 ; Bourdeau et al., 2008) et en Suisse (Malacrida et al., 2008). La présence de T. callipaeda est aussi décrite en Belgique (Janssens et Claerebout, 2006) sur des animaux ayant voyagé en Italie du Nord. En 2010, Magnis et al. décrivent le premier cas autochtone de thélaziose oculaire canine en Allemagne chez un chien vivant au Sud-ouest du pays, à 10 km de la frontière française. T. rhodesi, T. skrjabini, T. gulosa et T. lacrymalis sont plus spécifiques d’hôte et parasitent essentiellement les ruminants (T. rhodesi, T. skrjabini, T. gulosa) et les équidés (T. lacrymalis) (Anderson, 2000).

Variations génétiques au sein de l’espèce T. callipaeda

Bien que l’espèce T. callipaeda soit présente sur plusieurs continents et qu’elle parasite diverses espèces de mammifères, aucune variation morphologique n’a pu être trouvée entre des individus prélevés dans des pays différents et sur des hôtes définitifs variés (Otranto et al., 2005b). Otranto et al. montrent cependant en 2005(b) qu’il existe une variabilité génétique au sein de l’espèce T. callipaeda. C’est le gène codant pour la sous-unité 1 de la cytochrome c oxydase mitochondriale (cox1) qui est proposé comme marqueur de la variabilité génétique. Les cinquante spécimens adultes de T. callipaeda utilisés dans cette étude ont été prélevés sur des chiens, des chats et des renards provenant d’Italie, d’Allemagne et des Pays-Bas (soit 37 vers provenant d’Europe) et sur des chiens de Chine et de Corée (13 vers provenant d’Asie). 0,2 mm

Le gène cox 1 est ensuite amplifié par PCR puis séquencé pour chaque échantillon. La longueur du gène cox 1 est la même pour tous les spécimens analysés, soit 689 paires de bases (pb), mais 8 séquences différentes, appelées haplotypes ont été mises en évidence. Les haplotypes sont numérotés de 1 à 8 et sont nommés h1 à h8. Parmi les 37 spécimens d’Europe prélevés sur des espèces hôtes variées et couvrant une petite zone géographique, seul l’haplotype h1 est retrouvé. Par ailleurs, parmi les 13 spécimens d’Asie couvrant un large territoire, on retrouve les 7 autres haplotypes. Ces résultats sont à interpréter avec précaution à cause du faible nombre de parasites étudiés mais semblent montrer une faible diversité génétique dans la population européenne de T. callipaeda. On peut noter qu’une homogénéité génétique associée à une diversité d’hôte suggère une faible spécificté d’hôte pour le parasite. Les auteurs comparent ensuite les résultats obtenus par séquençage de cox 1 et ceux obtenus par la technique SSCP (Single-Strand Conformation Polymorphism) ; les résultats sont concordants pour les deux techniques. Cette dernière information est importante dans la mesure où on peut en conclure que l’analyse des mutations au sein du gène cox 1 par la méthode SSCP suffit pour différencier la majorité des haplotypes de T. callipaeda (seuls h3 et h7 sont confondus). Nous disposons donc d’un outil d’analyse génétique rapide et efficace pour étudier la population de T. callipaeda en Europe.

Afin de faire progresser la connaissance de la thélaziose oculaire et de connaître la biologie de T. callipaeda il faut être capable de mettre en évidence le parasite et ses stades larvaires chez l’hôte définitif mais surtout chez l’hôte intermédiaire. Une méthode consiste à disséquer chaque arthropode supposé vecteur et d’y rechercher les larves à différents stades. Il est évident qu’il s’agit d’un travail très lourd, fastidieux et manquant de sensibilité. Ainsi, Otranto et Traversa se proposent en 2004 d’étudier l’ADN ribosomal et plus particulièrement la région non codante appelée ITS1 (Internal Transcribed Spacer 1) de T. callipaeda, T. gulosa, T. lacrymalis, T. rhodesi et T. skrjabini. Ils montrent que la longueur de l’ITS1 varie de 357 pb pour T. lacrymalis à 905 pb pour T. callipaeda avec des variations interspécifiques de la séquence allant de 35 à 77%. Le polymorphisme d’ITS 1 en fait un outil d’identification très intéressant des espèces du genre Thelazia au sein de leurs hôtes définitifs ou intermédiaires, quel que soit leur stade de développement. L’identification moléculaire des thélazies et plus particulièrement de leurs larves dans leur vecteur est un outil de grand intérêt pour l’étude épidémiologique de la thélaziose, de sa prévalence et du rôle de vecteur des différentes espèces d’insectes.

Recherche et mise en évidence d’un vecteur pour T. callipaeda. Le cycle de T. callipaeda a longtemps présenté de nombreuses zones d’ombre. En effet, ce nématode était connu essentiellement en Asie et en ex-URSS et la majorité des publications sur ce sujet étaient écrites en russe ou en coréen. Ainsi, l’extension de la thélaziose oculaire vers l’Europe a d’abord été méconnue ou sous-estimée par la communauté scientifique internationale.

Faust observe en 1928 que des thélazies femelles adultes donnent naissance à des oeufs embryonnés capables de poursuivre leur développement in vitro jusqu’à un stade larvaire donné (probablement L1) mais ne vont jamais au-delà. Afin d’explorer l’éventualité d’un cycle direct il inocule des larves à des chiens et des lapins sains, mais n’observe jamais les stades larvaires suivants ; il rejette ainsi l’hypothèse d’un cycle direct. Il envisage ensuite l’intervention d’un arthropode en plaçant dans la même cage des lapins sains avec des animaux infestés ou avec des thélazies femelles en ponte ; il introduit ensuite diverses espèces de mouches (Hippobosca francilloni et Blatella germanica) ; aucun lapin ne se contamine. Cependant Faust n’écarte pas l’hypothèse d’un hôte intermédiaire d’une autre espèce. Dès 1963, le rôle de Phortica variegata comme vecteur est soupçonné puisqu’une publication de Kozlov décrit la présence de larves vivantes de T. callipaeda dans le proboscis de P. variegata collectées en Russie.

Par ailleurs, des connaissances plus anciennes sur les autres espèces du genre Thelazia parasitant le bétail et les chevaux ont orienté les recherches concernant le vecteur de T. callipaeda vers un diptère non-piqueur se nourrissant de sécrétions lacrymales. Dès lors, plusieurs hypothèses sont formulées et il a été montré que la mouche « domestique » Musca domestica n’est pas le vecteur de T. callipaeda (Otranto et al., 2005a).

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Table des matières

INTRODUCTION
LA THELAZIOSE OCULAIRE DU CHIEN ET DU CHAT
I. PRESENTATION DU GENRE THELAZIA
A. POSITION SYSTEMATIQUE DU GENRE THELAZIA
B. QUELQUES CARACTERISTIQUES DES DIFFERENTES ESPECES DU GENRE THELAZIA ET LEUR REPARTITION GEOGRAPHIQUE
C. CARACTERISTIQUES MORPHOLOGIQUES ET CRITERES DE RECONNAISSANCE DE T. CALLIPAEDA
D. VARIATIONS GENETIQUES AU SEIN DE L’ESPECE T. CALLIPAEDA
II. CYCLE EVOLUTIF DE T. CALLIPAEDA
A. DIFFERENTES ETAPES DU CYCLE EVOLUTIF DE T. CALLIPAEDA ET DESCRIPTION DES STADES LARVAIRES
B. HOTE INTERMEDIAIRE
1) Recherche et mise en évidence d’un vecteur pour T. callipaeda.
2) Quelques données biologiques et géoclimatiques concernant P. variegata. C. HOTE DEFINITIF
D. PARTICULARITES EPIDEMIOLOGIQUES DE LA THELAZIOSE
1) Saisonnalité
2) Non synchronisation des différents stades de développement
3) Phénomène « d’overwintering »
4) Transmission par les vecteurs mâles
5) Période à risque
III. POUVOIR PATHOGENE DES THELAZIES ET SIGNES CLINIQUES DE LA THELAZIOSE
A. POUVOIR PATHOGENE DE T. CALLIPAEDA
B. SIGNES CLINIQUES
IV. DIAGNOSTIC
V. TRAITEMENT
A. EXTRACTION
B. TRAITEMENT MEDICAL
1) Ivermectine
2) Moxidectine
3) Milbémycine oxime
VI. PREVENTION ET CONTROLE
A. MOXIDECTINE
B. MILBEMYCINE OXIME
VII. CONTAMINATION HUMAINE
VIII. NOTION DE MALADIE EMERGENTE EN EUROPE
A. DEFINITION ET DONNEES DE LA LITTERATURE
1) Émergence en Europe
2) Cas particulier de la France
B. HYPOTHESES CONCERNANT L’ORIGINE ET L’EXTENSION DE LA THELAZIOSE OCULAIRE EN EUROPE
ENQUETE EPIDEMIOLOGIQUE DANS LE SUD-OUEST DE LA FRANCE
I. OBJECTIFS ET DESCRIPTION DE L’ENQUETE
A. OBJECTIF
B. MATERIEL ET METHODE
1) Territoire et population ciblés par l’enquête
2) Diagnostic
3) Méthode de recueil des données
4) Récoltes de spécimens de T. callipaeda
II. RESULTATS
A. TAUX DE REPONSE
B. REPARTITION GEOGRAPHIQUE
C. AGE DES ANIMAUX
D. RACE DES ANIMAUX
E. REPARTITION TEMPORELLE DES CAS DE THELAZIOSE DIAGNOSTIQUES
F. REPARTITION DES CAS CLINIQUES DE THELAZIOSE EN FONCTION DU MODE DE VIE DES ANIMAUX
G. SIGNES CLINIQUES
H. TRAITEMENTS PRESCRITS.
III. DISCUSSION
A. LIMITES DE L’ENQUETE ET PRECAUTIONS PREALABLES
A L’INTERPRETATION DES RESULTATS
B. AGES, ESPECES ET RACES
C. REPARTITION GEOGRAPHIQUE DES CAS DE THELAZIOSE OCULAIRE
1) Analyse des résultats de l’enquête
2) Étude des caractéristiques environnementales en Dordogne en relation avec le nombre important de thélaziose canine dans ce département.
D. REPARTITION TEMPORELLE DES CAS DE THELAZIOSE OCULAIRE
1) Survie des thélazies adultes tout au long de l’année
2) Décalage entre la période d’infestation et l’apparition des signes cliniques
E. SIGNES CLINIQUES
F. TRAITEMENT ET PREVENTION DE LA THELAZIOSE OCULAIRE CANINE SUR LE TERRAIN. G. ROLE DE LA FAUNE SAUVAGE DANS L’INTRODUCTION ET LA PERSISTANCE DE T.CALLIPAEDA EN DORDOGNE.
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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