La terminologie du football en bamanankan

La promotion des langues nationales est, depuis quelques décennies, au centre des débats linguistiques et même politiques dans plusieurs états africains. Pourtant lorsqu’on parle de développement en Afrique les langues nationales sont rarement évoquées. Voilà pourquoi Diki-Kidiri et al.,(2008 : 15) affirment que : « Lorsqu’on parle de développement à propos de pays, on pense immédiatement à un développement économique qui se traduit par des infrastructures à profusion (réseau de communication denses et diversifiés, établissements, également divers et variés, de productions, services et de formations etc. » .

Aujourd’hui le besoin d’accorder plus de valeurs aux langues nationales dans toutes les sphères de la vie sociale se fait sentir de plus en plus. Cela est lié à un constat d’échec dans plusieurs systèmes éducatifs dont la langue de formation est une langue étrangère, issue de la colonisation qui n’est pas comprise par une grande majorité des apprenants et des populations en général. Ces langues étrangères bénéficient du statut de langues officielles. Elles sont : le français, l’espagnol, l’anglais le portugais.

Au Mali, le français est la langue officielle. Il est la langue de l’éducation (l’école), de l’administration, des institutions (Assemblé nationale, Cour et tribunaux, etc.). Sa maîtrise est une garantie de promotion sociale. Pourtant le français n’est compris que par une minorité de la population malienne. Selon Samaké. M., (2004), « parler et écrire correctement le français est le privilège d’une petite très puissante minorité de 20% de la population malienne ». Le bamanankan à l’instar des autres langues nationales du Mali par rapport au français n’est perçu que comme une simple langue de communication familiale et n’offre pas une garantie certaine sur le marché de l’emploi. Les langues nationales sont reléguées au rang de langues de seconde zone. Pour détacher ces langues dites « locales » de cette image négative qui fait d’elles des « langues tribales », nous devons les remettre au centre de toutes les priorités pour un développement endogène permettant à nos citoyens de retrouver leur identité socio-culturelle et avoir accès au savoir scientifique technique moderne dans leur langue. (Cf. Macky Samaké, 2004 :5). C’est dans ce cadre qu’au Mali, après les indépendances des travaux visant à promouvoir et à instrumenter les langues nationales furent entamés. Pour cela, quatre langues furent dotés d’un alphabet : il s’agit du bamanankan, du fufulde, du songhai, et du tamasheq par le décret N° 85/PGRM/ du 26 Mai 1967.

Ensuite treize langues parmi lesquelles les quatre citées dessus se sont vu attribuer un alphabet par le décret N°159/PGRM/ du 19 Juillet 1982. Il s’agit du bamanankan, du fulfulde, du songhaï, du tamasheq, du soninké, du bozo, du bomu, du syenara, du mamara, du dↄgↄsↄ, de l’arabe hassanya, du malinké, du khassonkakan. Ces langues ont servi de langues d’enseignement dans le domaine de l’alphabétisation et des différentes phases d’expérimentations dans l’éducation formelle sans être réellement introduites comme langues d’enseignement.

Pour accompagner cette politique de promotion et d’instrumentation des langues nationales on a assisté à la création successive de différentes structures chargées de promouvoir et d’instumenter les langues nationales. Parmi ces structures on peut citer la DNAFLA (Direction Nationale de l’Alphabétisation Fonctionnelle et de la Linguistique Appliquée), l’ILAB (Institut des Langues Abdoulaye Barry) devenue aujourd’hui l’AMALAN (Académie Malienne des Langues), l’ACALAN (Académie Africaine des Langues) etc. Malgré ces efforts, des travaux d’aménagement linguistique importants doivent être effectués pour permettre à ces langues notamment le bamanankan d’être de véritables outils de transfert de connaissances, de savoir et de savoir-faire. L’un des travaux les plus urgents, pour que ces langues nationales puissent répondre aux différents besoins sera de les doter de terminologies adéquates pour rendre les concepts scientifiques techniques et modernes, dans ce monde en perpétuel mouvement. C’est dans cette perspective que s’inscrit le thème de notre étude : « La terminologie du football en bamanankan : une analyse morphologique et sémantique » .

L’omniprésence du football dans presque toutes les sociétés du monde est aujourd’hui une réalité. Comme le souligne Diki-Kidiri et al., (2008 : 182) : «Le football est un domaine d’activité spécialisé qui a envahi notre monde. Sa percussion est si grande et si immédiate qu’il est devenu le centre d’intérêt de puissantes organisations nationales et internationales qui essayent par tous les moyens de s’attribuer l’exclusivité des transmissions de matchs de football. Il s’ensuit que des aspects de ce sport sont diffusés dans des journaux et divers moyens de communication de masse, facilitant par conséquent la circulation de sa terminologie.» Cette citation illustre toute la dimension que ce sport a pris et continue de prendre dans le monde.

Le football est la discipline sportive au Mali qui suscite la grande passion et le plus grand intérêt des populations devant le basket, l’athlétisme, le cyclisme et d’autres disciplines sportives. Il est suivi par une grande majorité des populations à travers les radios, la télévision et dans les stades. Le moyen privilégié par le public malien reste la transmission des matchs et des émissions sportives par les médias. La langue de retransmission des matchs à la télévision au Mali est le français et d’autres langues étrangères comme l’anglais, le poruguais, l’arabe. Les chaînes de diffusion des matchs sont : l’ORTM (la chaîne de télévision nationale) dont la langue de transmission est le français, langue officielle du Mali. En ce qui concerne les chaînes étrangères de diffusion de matchs, elles sont : le groupe CANAL+ qui a pour langue de transmission le français, et récemment le groupe Bein Sport (chaine multilingues) qui a pour langue transmission le français, l’anglais, l’arabe, et le portugais. La plupart des téléspectateurs ne comprenant pas cesdites langues se contentent de regarder les images sans accorder la moindre attention aux commentaires qui peuvent être des sources d’informations importantes sur le football.

Tenant compte de la non maîtrise de ces langues de transmission de matchs citées dessus par la plupart des amateurs ou passionnés du ballon rond, un nouveau phénomène est né dans les années 1990, il s’agit de la retransmission des matchs de football et d’émissions sportives en bamanankan dans certaines radios de proximité au Mali. Ce phénomène s’est répandu grâce à un bon nombre de radios privées à travers des journalistes et des animateurs de retransmission de match dont l’un des précurseurs est Sy Souleymane Sy, animateur de la radio Bamakan à Bamako. Aujourd’hui presque toutes les radios maliennes, situées dans des zones où le bamanankan est la langue dominante ont dans leur programme des émissions sportives en bamanankan. Beaucoup d’auditeurs de radio s’intéressent aux retransmissions de matchs et des émissions sportives en bamanankan.

Ce phénomène qu’est la retransmission des matchs et d’émissions sportives en bamanankan a généré et continue de générer des termes nouveaux dans le lexique du bamanankan, toute chose qui contribue sans doute à l’enrichissement et au renouvellement lexical du bamanankan, indispensable pour la survie de toute langue. Comme le souligne Deroy. L. cité par Naima.Y . : « Les langues qui vieillissent et finissent par mourir, ce sont celles qui n’évoluent plus » (L. Deroy., Néologie et néologismes : essai de typologie générale, la banque des mots n°1,1971, pp. 5-12). Toutes les langues sont donc soumises à cette règle de renouvellement lexicale pour répondre aux besoins d’expressions des locuteurs sous peine de disparaître.

Justification du choix du sujet

Tout d’abord nous commencerons par justifier le choix de la langue d’étude qu’est le bamanankan. Ensuite nous parlerons de notre domaine d’étude qu’est le football.

Justification du choix du Bamanankan

Appelé « bamanankan » par certains, « bambara » par d’autres, d’après Macky Samaké l’appellation bambara ne serait qu’une «déformation coloniale». En réalité les bamanans se reconnaissent plus sous l’appellation bamanan (nom de l’ethnie bamanan) et bamanankan (langue ou parler des bamanans) que « bambara » une appellation française. Le bamanankan est une langue nationale du Mali. Il appartient à la famille des langues nigéro-congolaise et du groupe des langues mandingues qui comprend principalement outre le bamanankan (Mali), le Jula (Côte d’Ivoire, Burkina Faso) le Malinké (Guinée, Sénégal, Mali). D’après Gérard Dumestre (2003 : 7) le nombre de locuteurs partageant les langues mandingues s’élèverait à quinze millions. Le groupe mandingue est selon Dumestre, le plus grand groupe des langues dominantes en Afrique de l’ouest. Cette situation de domination du mandingue ne date pas d’aujourd’hui et les raisons sont multiples. Selon Delafosse (1929 : 19) citer par Dumestre (2003 :7), « … pour des raisons d’ordre historique, politique, économique, administratif et militaire, la langue mandingue est arrivée à occuper, parmi les multiples idiomes de l’Afrique de l’ouest, une situation notoirement prépondérante, d’autant plus solide qu’elle a commencé à s’établir et qu’elle ne cesse de se développer et de s’affermir de nos jours ».

En ce qui concerne le bamanankan Dumestre (2003 : 7) affirme qu’il est la langue la plus parlée au Mali, comme langue maternelle, mais aussi, et de très loin, comme langue seconde. Et d’après lui, le bamanankan est utilisé par les trois quarts de la population malienne. Selon le rapport de l’INSTAT du 4ème Récensement Général de la Population et de l’Habitat du Mali (RGPH-2009), le bamanankan est la langue maternelle de 46% de la population malienne.

La majeure partie des locuteurs du bamanankan se trouvent dans les zones géographiques des régions de Ségou, Sikasso, Koulikoro, Kayes et Bamako la capitale où il est la principale langue de communication. Il est à noter que même s’il est parlé dans les régions du centre et du nord, le bamanankan n’est pas la seule principale langue de communication puisque les langues peulh, songhai et tamasheq bénéficient d’une large diffusion dans ces zones.

Dans le domaine médiatique, le bamanankan est la principale langue de communication. Les adresses à la nation du président de la république se font généralement en plus du français en bamanankan. Cela dénote de la suprématie du bamanankan sur les autres langues locales, mais aussi par le fait que l’écrasante majorité de la population malienne maîtrise cette langue (à l’oral). Le bamanankan a investi pratiquement tous les domaines de la vie moderne, en passant par les medias, la musique, le cinéma, la politique etc… . Il est aussi la langue la plus utilisée pour l’expansion des religions chrétiennes et musulmanes. A notre connaissance le bamanankan est aujourd’hui la seule langue malienne dans laquelle des matchs de football sont retransmis.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES
1.1.Justification du choix du sujet
1.1.1 Justification du choix du Bamanankan
1.1.2. Justification du choix du football
1.2.Hypothèses
1.3.Guide de lecture du bamanankan
1.3.1.Valeurs phonétique des lettres
1.4 La définition de quelques concepts clés
1.4.1 La terminologie
1.4.2 Le terme
1.5 La méthodologie de recherche
1.6 La revue de la litterature
CHAPITRE 2 : Présentation du corpus de la terminologie bilingue français-bamanankan du football
2.1. Remarque liminaire
2.2. Présentation des données terminologiques
CHAPITRE 3 L’ANALYSE MORPHOLOGIQUE
3.1La dérivation
3.1.1Les préfixes
3.1.2 Les suffixes
3.1.3. Les paradigmes dérivationnels
3.1.4 La dérivation impropre
3.2La réduplication
3.3. La composition
3.3.1 Les composés non figés
3.3.2. Les composés figés
3.3.3. La composition hybride
3.4 L’ellipse
3.5Les sigles et les acronymes
3.6 Les unités lexicales simples
3.7 Les emprunts
CHAPITRE 4 L’ANALYSE SÉMANTIQUE
4.1 La néologie sémantique ou l’extension de sens
4.2 Les procédés de création lexicale par l’utilisation des figures de rhétoriques
4.2.1 La métaphore
4.2.2 La métonymie
4.2.3 La synecdoque
4.3 Les emprunts
4.3.1 Les emprunts de luxe
4.3.2 Le calque
4.4 La variation dénominative ou la synonymie
4.5La polysémie
Les perspectives
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
ANNEXE

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