La souffrance néonatale

La souffrance néonatale

Autopsie verbale

Selon Fikrée et ses collaborateurs (10), l’autopsie verbale est un instrument épidémiologique largement employé pour attribuer les causes cliniques aux décès en interrogeant les parents endeuillés d’enfants qui n’étaient pas, le plus souvent, sous supervision médicale au moment de leurs décès, sur toutes les informations possibles qui peuvent permettre de déterminer la cause de décès. L’essentiel de la technique repose sur l’histoire de la maladie et sur les signes et les symptômes présents au cours de la maladie ainsi que sur leur séquence. Mais on recueille aussi toutes les informations sur les traitements reçus, surtout les ordonnances et les médicaments pris, qui viennent souvent aider ou au moins renforcer le diagnostic (5,11). Ainsi on se basant sur l’ensemble des symptômes déclarés par les mères, et en utilisant un algorithme, il est possible d’établir des syndromes pour identifier des causes possibles. Comme Causes des décès infanto-juvéniles dans une population du Haut Atlas il s’agit d’un algorithme, plus le nombre de critères pris en compte augmente, plus la probabilité que le diagnostic soit correct augmente (5).

La technique de l’autopsie verbale est une technique ancienne. Elle a été remise en vigueur et systématisée dans certains projets de recherche en santé publique dans les pays en voie de développement, notamment au Sénégal, ne possédant pas un système d’information médical systématique. En Mars 1989, un séminaire s’est tenu à l’université de John Hopskins aux états unis pour faire le point sur cette technique et recommander son utilisation plus large (10-11). Selon Garenne et ses collaborateurs (12), cette technique est de plus en plus reconnue et utilisée par plusieurs auteurs (Grubb et Al en 1987. Garenne et Fortaire en 1990. Reeves et Al en 1997, Anker en1997, Maude et Ross en 1997). Au Maroc, le questionnaire de l’autopsie verbale a été élaboré à partir de celui développé au Sénégal, et testé en Avril 1988 au niveau de Rabat et ses régions (5, 11). Le premier test du questionnaire sur le terrain a montré que les entrevues durent 45 à 60 minutes. D’un autre côté, les familles n’ont manifesté aucune réticence particulière à parler du décès ; la majorité des femmes répondent aux questions posées (11). Le fait que l’enquêtrice soit une femme facilite l’introduction dans les ménages.

Taux global de mortalité infanto juvénile

Au terme de notre enquête, sur 2251 naissances vivantes, nous avons enregistré un taux très élevé de mortalité infanto juvénile (244‰). Ce taux est 5 fois supérieur à celui enregistré à Marrakech Médina en 2000 (14) et 8 fois supérieur à celui enregistré au niveau de Marrakech et ses régions selon une enquête réalisée en 1997-2001(6). En comparant nos résultats aux chiffres nationaux, on constate des écarts importants. La figure 11 présente les différents quotients pour trois périodes quinquennales allant de 1989 à 2003. Selon ces enquêtes on note que les niveaux mortalité ont connu une baisse importante jusqu’à 1997. Puis entre 1997 et 2003, la mortalité infantile est restée plus au moins la même (7). Selon l’enquête sur la population et de la santé familiale (l’EPSF), et pour cette même période, le risque de mortalité infantile est évalué à 40 décès pour 1000 naissances vivantes, ce qui correspond à un 1 /6 du taux enregistré dans notre région (10).

La comparaison de ces résultats avec ceux de certains pays arabes voisins, ayant réalisé les mêmes enquêtes à quelques années près dans le cadre du projet PACHILD de la Ligue des Etats Arabes, montre que le Maroc et la Libye se situent au même niveau, environ deux fois inférieur à ceux de l’Algérie et la Tunisie d’une part, presque trois fois inférieur à celui de l’Egypte et 6 fois celui de notre région (15). Certains pays en développement ont des taux de mortalité, qui concordent avec nos résultats, estimés à plus de 200‰ naissances vivantes, parmi ces pays figurent notamment le Niger, Sierra Leone, Afghanistan, Malawi, Guinée, Guinée Bissau, Libéria et Somalie. Sept de ces huit pays appartiennent à la région de l’Afrique de l’OMS où le taux moyen est d’environ 150‰ conte 80‰ pour l’Asie de sud-est, 67‰ pour la méditerranée orientale, 46‰ pour le Pacifique oriental, 34‰ les Amériques et 18‰ pour l’Europe (14).

Dans les pays développés et déjà en 1999, un taux de mortalité infanto-juvénile de 3.4‰ a été rapporté en Suède, 4.8‰ au Québec et 7.1‰ aux Etats-Unis (16). Concernant le contrôle de la mortalité infanto-juvénile, un ralentissement a été observé ces dernières années. En effet, dans certains pays, la tendance à la baisse s’est stabilisée ou commence même à s’inverser. Ce ralentissement est particulièrement inquiétant dans l’Afrique et l’Asie du Sud-est car les taux de mortalité y sont relativement élevés et les pays concernés ont de graves problèmes économiques : au moins 57 d’entre eux n’ont pas atteint la cible de 75‰ (14). Les raisons de ce fort ralentissement ne sont pas tout à fait claires, mais il semble que les problèmes économiques, les troubles civils et les interventions mal choisies pour tenter de réduire les décès d’enfants figurent parmi les facteurs sous jacents (14). Dans notre région, le taux très élevé de la mortalité infanto juvénile (244‰) est lié aux conditions socio-économiques difficiles : cette population se caractérise par une grande précarité de ses conditions de vie, notamment, la pauvreté, le niveau d’instruction très bas et surtout l’éloignement des structures sanitaires.

Mortalité infanto juvénile selon l’äge du décès

Dans notre série, sur 2254 naissances vivantes, 180‰ meurent avant leur premier anniversaire. Ceci est dû particulièrement au haut risque de mortalité durant la période néonatale, avec un taux de 84‰, dont 52‰ décèdent au cours de la période néonatale précoce. Le taux de mortalité juvénile ou la probabilité de décéder entre le premier et le cinquième anniversaire, estimée à 64 ‰, ne représente que le tiers de la mortalité des moins de cinq ans. Dans notre région, les données vont de même que sur le plan national et mondial. Si on fait une comparaison entre nos résultats et ceux d’une enquête étudiant l’épidémiologie de la mortalité de l’enfant dans les hôpitaux de Marrakech et sa région sur une période allant de 1997 à 2001 (tableaux XIV) on constate qu’ils sont comparables concernant la fréquence des différentes composantes de la mortalité infanto juvénile. Ainsi on note une prédominance de la mortalité néonatale dont plus d’un tiers survient à la période néonatale précoce, par ailleurs, le taux de la mortalité post néonatale n’est que 8.5‰, suivi de la mortalité juvénile (3.03‰) (6). Sur le plan national, selon l’enquête EPSF (2003-2004), (tableau XII), le risque de mortalité infantile est évalué à 40 décès pour 1000 naissances vivantes. Le risque de mortalité juvénile représente 7%, quant aux composants de la mortalité infantile, ils se situent à 27% pour la mortalité néonatale et 14% pour la mortalité post-natale (7).

Dans la plupart des pays de la sous région Ouest-Africaine, la mortalité néonatale précoce représente près des ¾ de la mortalité néonatale. Selon une enquête menée au CHU de Lomé au Togo sur 10 ans, la mortalité néonatale est passée de 28.24% en 1981-1982 à 37.65% en 1991-1992. La mortalité néonatale précoce a pratiquement doublé passant de 34.6% en 1981-1982 à 60.47% en 1991-1992 (17). Des taux similaires ont été enregistrés dans 2 autres CHU de la sous région : 66.6% en 1980 à Abidjan en cote d’Ivoire et 75% en 1991 à Cotonou au Bénin (17). En 1973, la première cause de mortalité infantile en France, était la pathologie néonatale (56.6%) et les ¾ de ces décès survenaient au cours de la première semaine de vie (17). Dans le monde, 7.6 millions de décès périnataux se produisent chaque année, et 15% de cette mortalité concerne les nouveau-nés âgés de moins d’une semaine. C’est dans les pays en voie de développement que l’on dénombre la majorité de cas : 57‰ naissances vivantes (18). Ainsi, il est évident que la réduction de la mortalité des enfants de moins de 5 ans est largement tributaire de la réduction de la mortalité néonatale notamment la mortalité néonatale précoce, dont le taux reste un remarquable indicateur de façon dont sont assurés les soins dans un établissement, dans un pays et à une époque donné. Plusieurs facteurs de risque sont incriminés, notamment, la maternité précoce, la primiparité, l’irrégularité ou l’absence de consultation prénatales, l’absence de moyens de transports médicalisée des gestantes vers les lieux de l’accouchement et des nouveau-nés vers les centres pédiatriques, l’inexistence des unités de soins néonatals et de réanimation dans les maternités, et aux conditions socio économiques des parents (17).

Mortalité infanto juvénile dans les deux sexes

Selon nos résultats, les garçons sont légèrement plus représentés que les filles avec un sex ratio de 1.12 en faveur des garçons. Cette surmortalité des garçons par rapport aux filles a était rapportée par plusieurs auteurs (14, 19, 20-21). Ainsi, au niveau de Marrakech Médina, en 2000, la mortalité infanto juvénile était prédominante chez les garçons avec un taux de 48 ‰ contre 47‰ pour le sexe féminin (14). Nos résultats concordent également avec ceux rapportés en Algérie en 2002. Selon le rapport national sur les objectifs du millénaire pour le développement, il y a un écart de 5 points de pourcentage en faveur des filles pour la mortalité infantile et de 6.7 point pour la mortalité juvénile. Ce rapport a montré par ailleurs, qu’en 2004, l’espérance de vie à la naissance se situe à 73.9 ans pour les garçons contre 75.8 ans pour les filles (19).

Contrairement à ces résultats, une étude rétrospective réalisée en Inde par Khanna sur le sexe et la mortalité infantile, a mis en évidence une surmortalité féminine de l’ordre de 1.3 fille pour un garçon (22). Haton et Coll (20) ont trouvé une prédominance masculine avançant une explication possible portant sur la prématurité et le développent pulmonaire in utero. Les foetus féminins présentent plusieurs caractéristiques qui les avantagent par rapport aux foetus masculins, notamment une maturation plus avancée (23). Les différences selon le sexe seraient liées également au développement cérébral au cours du deuxième trimestre de la grossesse (24). Selon Garenne et Cantrelle (25), le sexe semble jouer un rôle très important dans la résistance de l’enfant contre les maladies. Les petites filles ayant un avantage potentiel du fait qu’elles portent une paire de chromosome X, chromosomes porteurs de gènes produisant les anticorps Ig M, alors que les garçons ne portent qu’un chromosome X associé à un chromosome Y.

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Table des matières

INTODUCTION
OBJECTIFS
MATERIEL ET METHODES
I- Cadre du travail
II- Matériel et méthodes
1- Type de l’étude
2- Population étudiée
3- Echantillonnage
4- Variables étudiées
5- Collecte des données
6- Saisie et analyse des données
7- Considérations éthiques
RESULTATS
I- Données épidémiologiques
1. Taux de mortalité globale
2. Taux de mortalité selon l’age
3. Taux de mortalité selon le sexe
4. Caractéristiques de l’échantillon
5. Circonstances du décès
5-1 Grossesse
5-2 Accouchement
5-3 Vaccination
5-4 Recours aux soins
5-5 la perception de la gravité de la maladie selon la famille Causes des décès infanto-juvéniles dans une population du Haut Atlas
II- Données étiologiques
1. Période néonatale
2. Période infantile
3. Période juvénile
DISCUSSION
I. Autopsie verbale
1. Définition
2. Historique
3. Intérêt
4. Critères de qualité
5. Inconvénients
II. Profil épidémiologique
1. Taux global de la mortalité infanto juvénile
2. Mortalité infanto-juvénile selon l’âge du décès
3. Mortalité infanto-juvénile dans les deux sexes
4. Circonstances du décès
4-1 Suivi de la grossesse et soins périnatals
4-2 Accouchement
4-3 Vaccination
III- Profil étiologique
1. Période néonatale
1.1 La souffrance néonatale
1.2 Les infections néonatales
1.3 La prématurité
1.4 L’hypotrophie
1.5 Syndrome hémorragique
2. Les causes des autres composantes de mortalité infanto-juvénile
2.1 Les maladies diarrhéiques et déshydratation
2.2 Les infections respiratoires aigues
2.3 Affections neuro-méningées
2.4 Malnutrition
IV- Perception de la maladie
1. Perception de la maladie dans notre région
1.1 Causes des décès selon les familles
1.2 Recours aux soins
2. Perception de la maladie dans les sociétés traditionnelles
2.1 Perception de la maladie
2.2 Conduites thérapeutiques
V- Facteurs déterminants de la mortalité infanto-juvénile
1. Les variations environnementales
2. Les variations biodémographiques
3. Les variations différentielles socioéconomiques
4. Le système sanitaire
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
ANNEXES
RESUMES
BIBLIOGRAPHIE

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