La sociologie de la jeunesse, comme éléments de compréhension de la transition à l’âge adulte

La jeunesse, une catégorie floue, difficile à définir ?

La jeunesse peut se définir comme « le temps de la vie entre l’enfance et la maturité » (Le Petit Robert, 2006, p.1425), autrement dit comme un âge intermédiaire et transitoire entre l’enfance et l’âge adulte. La question de la transition entre ces deux âges, se pose dans l’ensemble des sociétés comme l’attestent les travaux réalisés par les ethnologues sur l’étude des rites de passage et d’initiation (Bourdieu, 1982 et Van Gennep, 1969, cités par Galland, 1997). Pour le sociologue Olivier Galland, « la jeunesse peut être définie sociologiquement comme la phase de préparation à l’exercice de ces rôles d’adultes, ce que les sociologues appellent la socialisation » (Galland, 2007, p.127). Des auteurs tels que Claire Bidart parlent de la notion d’individualisation des parcours pour expliquer cette difficulté de définition (Bidart, 2013). En effet, tout individu présentant des différences est amené logiquement à vivre différemment, donc à avoir une trajectoire de vie différente. La sociologie a permis de mettre en avant les facteurs socioculturels importants voire déterminants dans la transition à l’âge adulte (Ossipow et al., 2014).

Nous reconnaissons ainsi les rites de passage dans certaines cultures à un certain âge, ou le fait de se marier dans d’autres (Jeffrey, 2004 ; Bourdieu, 1982 et Van Gennep, 1969, cités par Galland, 1997). Cependant, dans le cadre de notre recherche, la compréhension et l’analyse du passage à l’âge adulte des jeunes sortant des institutions socioéducatives suppose de délimiter au préalable une population appartenant à une catégorie particulière qui est celle de la jeunesse. Comment définir cette dernière ? Pour Cécile Van de Velde (2008), auteure de Devenir adulte. Sociologie comparée de la jeunesse en Europe, « L’âge adulte perd de sa stabilité » (Van de Velde, 2008, p. 2). Comment, dès lors, définir la « jeunesse », quand son principal référent – l’âge adulte – échappe lui-même à son mode de définition antérieur, à savoir l’âge de la stabilité et de l’installation ? La jeunesse peut-elle encore être pensée comme une transition, quand on sait que cette transition peut désormais se prolonger tout au long de la vie ? (Van de Velde, 2008)

Les débuts de la jeunesse en Occident

Pour Goyette, Pontbriand et Bellot (2011), si la majorité légale marque le début de la responsabilité et transforme les droits et obligations qui influent sur la conduite, elle ne transforme pas « magiquement et dans toutes les dimensions un adolescent en adulte » (Goyette et al. 2011, p. 17). A quel âge devient-on mature alors, puisqu’à 18ans, la qualification d’adulte reste incorrecte? Jeffrey Arnett (2000) place la jeunesse entre 18 et 25 ans environ. Plus exactement, il recourt à l’expression « âge adulte émergeant » (emerging adulthood) pour désigner cette tranche d’âge, qui selon lui, « se distingue à la fois de l’adolescence et de l’âge adulte par cinq caractéristiques spécifiques : l’exploration identitaire, l’instabilité, l’entre-deux, les possibilités et l’égocentrisme » (Arnett, 2000, p. 16). Selon le sociologue Stéphane Moulin (2012), cette théorie met surtout l’accent sur le fait que cet âge est devenu la période la plus hétérogène du parcours de vie du fait du recul des principales étapes de l’entrée dans l’âge adulte et parce qu’elle est exceptionnellement peu structurée par les institutions (Moulin, 2012).

Pour Van de Velde (2008), la jeunesse est conçue comme un état transitoire antérieur au franchissement des trois seuils définissant l’entrée dans l’âge adulte – « emploi stable, résidence indépendante, mise en couple » (Van de Velde, 2008, p. 78). Ceci appelle à une réflexion sur la vie de chaque homme, sur sa situation familiale, principalement du point de vue financier, où une séparation nette entre différents stades de vie est remarquée. Dans ses travaux sur la jeunesse menés dans quatre pays, la France, l’Angleterre, le Danemark et l’Espagne, l’auteure arrive à la conclusion que les jeunes sont différents suivant leurs cultures, et que la perception que l’on a de la jeunesse est liée à l’intervention extérieure de l’Etat, de l’école et de la famille (Van de Velde, 2008). Nous nous sommes permis de reprendre le résultat de cette étude qui dégage « quatre formes d’expérience du “devenir adulte” », à savoir :

« Se trouver » : correspond à une manière de vivre sa jeunesse comme un temps long d’exploration et d’expérimentation dans une logique de développement personnel. Prise d’indépendance précoce, itinéraires sinueux et discontinus vécus sans urgence, construction progressive de soi et définition d’une identité sociale. Une prévalence significative parmi les jeunes Danois. « S’assumer » : est la manière britannique de devenir adulte. Cette seconde forme d’expérience de la jeunesse s’inscrit dans une logique d’émancipation individuelle, avec des trajectoires courtes orientées quasi exclusivement vers la recherche d’emploi. Dans ce parcours, le jeune homme et la jeune femme doivent faire les preuves de leurs capacités individuelles d’indépendance et d’autofinancement et à rompre eux-mêmes les liens qui les relient à la famille et à l’Etat. « Se placer » : est la variante française du modèle.

L’investissement dans le capital humain sous les espèces de la scolarisation et de la course au diplôme est le facteur principal. Il s’accompagne d’une dépendance prolongée de la famille. Le sentiment d’urgence est très prégnant : il faut s’intégrer à tout prix et le plus vite possible, une fois pour toutes et pour toute la vie. « S’installer » :s’inscrit au contraire dans une logique d’appartenance familiale. Partir de chez ses parents constitue la dernière étape d’un processus en trois actes: emploi stable, mariage, achat d’un logement. Ce modèle caractérise les jeunes espagnols. » (Van de Velde, 2008, pp. 14-17) La conclusion de cette recherche est que le processus de passage à l’âge adulte diffère d’un pays à l’autre, d’un contexte à l’autre. Le développement personnel est le point qui définit la jeunesse danoise, alors que l’émancipation individuelle concerne les anglais. En France, l’intégration sociale est le point qui permet de déterminer la jeunesse. L’installation matrimoniale est celle qui semble définir la jeunesse espagnole.

Le placement civil Actuellement, le placement civil en Suisse est régi par deux dispositions principales : le Code civil (CC) et l’ordonnance sur le placement d’enfants (OPE). Sans rentrer dans des considérations historiques, nous précisons que ces deux instruments juridiques datés de 1978 ont subi des révisions récentes, en raison notamment de leur insuffisance comme le mentionne Zatti (2005), à garantir la protection des enfants placés, en lien avec les changements sociétaux et le nouveau regard porté sur les droits de l’enfant. Avec l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2013, du nouveau Code civil Suisse (ci-après CC), les dispositions consacrées notamment à la protection des enfants ont été renforcées, les compétences des nouvelles autorités interdisciplinaires ont été d’une part uniformisées et d’autre part élargies par rapport à l’ancien droit, avec une professionnalisation des autorités de protection. Ainsi, le CC prévoit quatre groupes de mesures (art. 307 à 312 CC) allant du droit de regard et d’information au retrait de l’autorité parentale en passant pas les curatelles et le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant (art. 310 CC), anciennement dénommé droit de garde.

Ce dernier qui concerne notamment la mesure de placement de l’enfant en dehors de son milieu naturel stipule que « lorsqu’elle ne peut éviter autrement que le développement de l’enfant ne soit compromis, l’autorité de protection retire l’enfant aux père et mère ou aux tiers chez qui il se trouve et le place de façon appropriée » (art. 310 al. 1 CC). Selon Meier et Stettler (2014), la cause de la mesure doit résider dans le fait que le développement corporel, intellectuel et moral de l’enfant n’est pas assez protégé ou encouragé dans le milieu de ses père et mère, ou dans le milieu où ceux-ci l’ont placé. « Les causes de la mise en danger (circonstances objectives, comportement fautif de l’enfant, des pères et mère ou de l’entourage) sont sans importances » (ibid., p.850). Dans son rapport d’expert concernant le placement d’enfant en Suisse, sur mandat de l’Office fédéral de la justice (OFJ), Zatti (2005) met l’accent sur l’inadaptation, notamment en ce qui concerne le placement des enfants en Suisse, de l’ancienne ordonnance du 19 octobre 1977 réglant le placement d’enfant à des fins d’entretien et en vue d’adoption, devenue depuis le 1er janvier 2014, Ordonnance sur le placement d’enfants (OPE). La nouvelle révision de l’OPEE comble ainsi les défauts relevés par Zatti (2005) en renforçant les dispositions légales en matière de placement de l’enfant. Par ailleurs, en matière de placement civil, il faut souligner que du fait du fédéralise qui prévaut en Suisse, chaque canton édicte ses propres mesures protectrices qui sont mises en oeuvre par l’autorité de protection correspondante.

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Table des matières

INTRODUCTION ET PROBLEMATIQUE
I. CADRE THEORIQUE
1.1. La sociologie de la jeunesse, comme éléments de compréhension de la transition à l’âge adulte
1.1.1. La transition à l’âge adulte
1.1.2. Les débuts de la jeunesse en Occident
1.1.3. Les cultures et les dangers de la jeunesse
II. LE PLACEMENT ET L’AUTONOMIE
2.1. Le placement en institutions socioéducatives
2.2. L’autonomie
2.2.1. La construction de l’autonomie durant un placement : un enjeu institutionnel et relationnel
III. PRISE EN CHARGE ET DROITS DES ENFANTS PLACÉS
3.1. La prise en charge institutionnelle
3.2. Les droits des enfants placés
3.3. Le placement et les normes internationales
IV. METHODOLOGIE ET ETHIQUE
4.1. La méthode utilisée
4.1.1. La population interrogée
4.1.2. La construction du guide d’entretien
4.1.3. L’analyse du contenu
4.2. Les aspects éthiques de l’entretien
V. RECITS DE VIE DES JEUNES ADULTES
5.1. Les données
5.1.1. Placement : le départ, les souvenirs et les faits
5.1.2. Placement et dynamiques collectives
5.1.3. La construction de l’autonomie et la préparation à la sortie du placement
5.1.4. Sortie du placement et perceptions sur la vie post-institutionnelle
5.1.5. L’expérience du placement en institution
5.1.6. L’impact du placement en institution
VI. ANALYSE DES RECITS DE VIE
6.1. Le placement et la transition à l’âge adulte
6.2. Le placement et les dynamiques relationnelles
6.3. La construction de l’autonomie des jeunes en institution
6.4. L’impact du placement sur le passage à l’âge adulte
6.5. Les apprentissages effectués
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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