La signification des notions d’espace scolaire et d’école inclusive

Aujourd’hui encore, la persistance des inégalités et des discriminations envers les personnes en situation de handicap interroge notre rapport à l’altérité, mais aussi l’accès à l’espace public dont les établissements scolaires font partie. Ainsi, malgré la Loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, trop souvent encore ce sont aux individus concernés par le handicap de s’adapter à l’environnement dans lequel ils se trouvent. Ce constat découle d’un vécu personnel et d’observations réalisées en Établissement Public Local d’Enseignement (EPLE) en 2019 et 2020. Le passage d’une École d’abord séparative, puis intégrative et depuis 2005 inclusive réactualise la nécessité de rendre accessible l’environnement physique en l’adaptant aux usagers atteints de troubles des fonctions motrices (bâtiment, mobilier, signalétique, etc.). Aussi, en tant que future professeure documentaliste garante de l’organisation du Centre de Documentation et d’Information (CDI), de l’accueil du public et de la mise à disposition des ressources, il me semble intéressant de mener une réflexion autour de l’aménagement de l’espace documentaire. En effet, la réorganisation de l’espace physique du CDI permettrait de satisfaire aux exigences imposées par la Loi du 11 février 2005 en termes d’accessibilité, mais aussi et surtout d’accompagner les élèves à besoins éducatifs particuliers, précisément ceux en situation de handicap moteur disposant d’un Projet Personnalisé de Scolarisation (PPS) vers la réussite et l’autonomie.

L’école inclusive et ses espaces : mise en perspective et enjeux

Si de nos jours l’Éducation nationale ambitionne à une école qui soit inclusive, pour autant cette notion demeure nébuleuse pour un large public et ce, « […] même pour les enseignants » (Fumey & Ventoso-Y-Font, 2019, p. 9). En effet, l’entrée dans les textes législatifs et institutionnels de celle-ci n’efface en rien la nécessité d’en tracer les contours qui comprend notamment l’accessibilité des lieux. Il semble donc important pour notre objet d’étude de saisir la relation existante entre espaces scolaires et École inclusive en abordant préalablement leur définition, puis le contexte historique, législatif et institutionnel. Ceci permettra d’établir un cadre auquel se référer dont l’objectif visera à une meilleure compréhension des notions et des enjeux sousjacents.

La signification des notions d’espace scolaire et d’école inclusive

L’espace scolaire
Pour nombre d’auteurs en sciences humaines et sociales qui se sont emparés du sujet, l’espace scolaire revêt plusieurs caractéristiques. Dans un article paru en 2006 dans la revue Information géographique, il est indiqué que l’espace scolaire renvoie à un « […] espace géré par l’établissement scolaire et qui révèle une grande originalité, une étonnante complexité derrière son apparente banalité. » (Sgard et Hoyaux, 2006, p. 89). Aussi, cet espace où coexiste un rapport à soi et à l’autre peut également s’entendre comme un « lieu pratiqué » (De Certeau, 1990, cité par Lehmans & Mazurier, 2017). Ici, on retiendra toutefois une définition de l’espace scolaire qui semble aujourd’hui faire consensus et qui désigne « […] l’ensemble des lieux dédiés aux différentes formes d’apprentissage des savoirs et de socialisation de celle et ceux qui le fréquentent » (Mazalto et Paltrinieri, 2013, p. 31). Selon ces auteurs, la notion d’espace scolaire loin d’être monosémique et universelle ne se limiterait pas à la salle de classe. Un hors-série des Cahiers pédagogiques (2018) consacré aux « Espaces et architectures scolaires », ainsi que le chapitre « Ergonomie » tiré de l’ouvrage Pour une école bientraitante. Prévenir les risques psychosociaux scolaires, sous la direction d’Hélène Romano psychologue, laissent entrevoir l’importance de ces derniers sur les apprentissages scolaires, sociaux et psycho-sociaux, mais aussi sur le climat scolaire et le « vivre ensemble ».

Plus récemment, dans le dernier dossier de veille de l’Institut Français de L’Éducation (IFÉ) où il est question de l’espace scolaire du point de vue des élèves, Catherine Reverdy met en exergue le « besoin d’interactions et de véritables espaces physiques » que le virtuel ne parvient pas à combler (Reverdy, 2020, p. 32). Si l’espace scolaire est généralement considéré comme « un agent d’apprentissage en soi » (Musset, 2015, p. 41), ici on s’intéressera particulièrement à l’environnement physique des EPLE qui se redessine au fil du temps et de l’évolution des politiques éducatives. Sans remonter à l’historiographie de l’architecture scolaire, force est de constater que les bâtiments scolaires s’ils sont le reflet du système social, et des valeurs qui le portent, sont aussi empreints du dualisme existant entre modernité et tradition. En octobre 2017, le résultat d’une enquête menée par le Conseil National d’Évaluation du Système Scolaire (CNESCO) pointe ainsi « Un besoin de modernisation et de modularité » de l’architecture scolaire en France et en particulier l’accessibilité des lieux qui n’est pas encore effective partout et ce, malgré la décentralisation dans les années 1980 dont l’un des effets a été la délégation des travaux de reconstruction/réhabilitation des bâtiments scolaires aux collectivités territoriales. De fait, même si l’on remarque une amélioration du bâti depuis, l’accessibilité des lieux aux personnes en situation de handicap et ce, en dépit de la Loi de 2005 demeure insatisfaisante (CNESCO, 2017). Aussi, entre l’instruction obligatoire initiée au XIXe siècle, la Loi Haby (1975) inscrite dans le Code de l’Éducation qui insuffle la création du collège unique pour tous, l’homogénéisation des contenus disciplinaires, l’uniformisation architecturale des bâtiments scolaires et l’instauration de la Loi de 2005, le principe d’égalité, pilier central du système éducatif français se réactualise à travers la notion d’École inclusive. Dans ce contexte, il apparaît donc opportun de mesurer l’accessibilité des espaces physiques à l’aune de cette notion qu’il convient de définir.

De la notion d’inclusion scolaire à celle d’école inclusive

Suite à la Loi du 11 février 2005, l’UNESCO en 2006 propose de définir l’inclusion comme « une approche dynamique permettant de répondre positivement à la diversité des élèves et de considérer les différences entre les individus non comme des problèmes, mais comme des opportunités d’enrichir l’apprentissage ». Son usage apparaît pour la première fois dans la législation française avec Loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République qui modifie à cet effet l’Article L.111-1 du Code de l’Éducation en reconnaissant que « tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser » tout en veillant « à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction ». La notion d’inclusion a pour origine un changement de politique publique et se substitue à celle d’intégration (Philip, 2019). En France, en janvier 2019, une nouvelle Loi  dite « petite Loi » nommée « Pour une école vraiment inclusive » est adoptée par l’Assemblée nationale. Elle stipule notamment « De veiller au respect du concept d’école inclusive envers les élèves à besoins éducatifs particuliers », et de tenir compte « pour le projet de construction ou de réhabilitation, des recommandations pour une École inclusive de l’Observatoire National de la Sécurité et de l’Accessibilité des Établissements d’Enseignement ». S’en suivra la Circulaire de rentrée de 2019 parue dans le Bulletin Officiel de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports et intitulée « Pour une école inclusive ». Afin de rendre compte de ce que sous-entend la notion d’inclusion scolaire, on reprendra la proposition faite ici :

[…] dans une situation d’inclusion scolaire, les enfants concernés sont membres à part entière de l’établissement, ils appartiennent à la communauté scolaire, au même titre que les autres, au nom de leur droit d’appartenance et de l’égalité de leurs droits. Cette autre étape signifie par conséquent que la tâche d’adaptation n’est plus prioritairement du côté des enfants, mais du côté des responsabilités des établissements scolaires et des adultes qui s’y trouvent. En bref, ce ne serait plus aux enfants de s’adapter aux normes scolaires, mais au contraire aux dispositifs scolaires de s’adapter aux différences présentées par les élèves. (Plaisance & Schneider, 2013, p. 91-92)

Toutefois, depuis la Loi de 2013 on relèvera qu’une distinction entre inclusion scolaire et école inclusive s’est effectuée. En effet, bien qu’ayant pour fondement une approche éthique et humaniste le terme inclusion emprunté au vocabulaire anglais souffre d’une certaine ambigüité dans son interprétation et son usage en français. Au-delà d’un emploi parfois rhétorique, il contribue à alimenter les débats entre ceux qui pensent qu’il s’agit d’un paradigme relevant de l’utopie effaçant les différences et ceux qui estiment qu’au contraire il autorise une différenciation (Plaisance & Schneider, 2013). En outre, il peut également être, paradoxalement, producteur d’une « inclusion excluante » (Lapeyre, 2020, p. 41). Ainsi, entre catégorisation difficile et/ou inconcevable, formalisation et normalisation, l’usage du terme inclusion issu du latin includere qui signifie enfermer, renfermer, peut, dans un contexte scolaire, ne pas répondre aux objectifs fixés par la Loi de 2013. (Lapeyre, 2020). Il serait donc plus adéquat d’employer l’adjectif inclusif car il permet de comprendre pourquoi l’École inclusive ne se résume pas seulement à de l’individualisation « Une École est inclusive lorsqu’elle est vraiment capable d’accommoder, de compenser, suppléer, contourner » (Lapeyre, 2020, p. 42). Ce qui révèle alors l’ampleur de la complexité dans la scolarisation des élèves en situation de handicap moteur face aux manques de moyens pour y parvenir, comme le souligne l’Assemblée nationale dans son Rapport du 18 juillet 2019 relatif à « l’inclusion des élèves handicapés […] quatorze ans après la Loi du 11 février 2005 ». Enfin, il est important aussi de comprendre que l’école inclusive s’inscrit dans un contexte socio-politico-historique international, européen et national concernant l’éducation pour tous, et qu’elle demeure un défi permanent en voie d’évolution et d’amélioration « L’inclusion n’est pas un objectif mais une finalité. C’est un idéal et une valeur éducative, une utopie réalisatrice » (Philip, 2019).

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Table des matières

INTRODUCTION
1. L’ÉCOLE INCLUSIVE ET SES ESPACES : MISE EN PERSPECTIVE ET ENJEUX
1.1. La signification des notions d’espace scolaire et d’école inclusive
1.1.1. L’espace scolaire
1.1.2. De la notion d’inclusion scolaire à celle d’école inclusive
1.2. La scolarisation des élèves en situation de handicap
1.2.1. Une brève approche diachronique
1.2.2. L’accessibilité des lieux pour une « École vraiment inclusive »
1.3. De l’espace scolaire à l’espace CDI
1.3.1. L’espace CDI et les missions du professeur documentaliste
1.3.2. L’accessibilité dans l’espace CDI
2. REPENSER L’ESPACE PHYSIQUE DU CDI POUR RÉPONDRE AUX BESOINS DES USAGERS
2.1. La culture participative pour l’aménagement de l’espace physique du CDI
2.1.1. Le design universel pour une accessibilité universelle
2.1.2. Le design thinking
2.2. Une « spatialité de l’altérité » au service de la réussite des élèves en situation de handicap
2.2.1. Le réaménagement du CDI : un levier pour la réussite
2.2.2. Des ressources pratiques pour anticiper les besoins
2.2.3. Exemple d’un CDI en voie de restructuration
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
INDEX DES ANNEXES

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