La rentabilité de l’investissement dans la responsabilité sociale d’entreprise ”RSE”

Résultat des méta-analyses

Méta-analyse Une méta-analyse est une étude statistique intégrative   permettant de synthétiser les résultats empiriques d’un champ de recherche tout en testant l’influence d’artefacts statistiques et méthodologiques pouvant expliquer la variabilité des résultats. C’est donc un outil pertinent pour dégager un consensus empirique et pour estimer l’impact des biais de spécification dans un champ de recherche caractérisé par une forte hétérogénéité méthodologique (MA2). C’est également une alternative plus robuste aux revues de littérature utilisant des méthodes dites de « vote-counting » (MA1), c’est-à-dire qui synthétisent les résultats empiriques de la littérature en comptant le nombre d’effets positifs, négatifs et neutres, sans tenir compte des artefacts statistiques pouvant biaiser les résultats, en particulier la taille des échantillons (voir par exemple Griffin et Mahon 1997; Margolis et Walsh 2003) ; une méthode dont la validité est limitée parce que son pouvoir explicatif décroît lorsque le nombre d’études augmente (MA1), ce qui la rend inadaptée à la synthétisation des résultats d’un champ de recherche. L’apport des méta-analyses réside dans la clarification du champ de recherche par des méthodes statistiques intégratives permettant d’identifier un consensus pouvant servir de base de travail pour les futures recherches. Le lecteur peut se reporter au tableau 3 en fin de chapitre pour une vue récapitulative et comparative des méthodes et résultats de ces méta-analyses.

Le modèle de la RSE stratégique

   Baron (2001) identifie le critère permettant de construire une définition de la RSE : la finalité économique, c’est à dire la rentabilité de cette politique pour l’entreprise. Ce modèle prend le nom de « RSE stratégique ». Dans un cadre conceptuel économico-managérial, il définit la RSE comme une politique privée « private politics » de provision de bien public. Les entreprises agissant pour maximiser leur intérêt individuel, et ce par définition d’après la théorie économique classique,peuvent être amenées à aller au-delà de leurs obligations légales pour fournir à leurs partenaires stratégiques des biens qui, tout en ayant pour objectif de répondre à leur propre intérêt, contribuent en même temps à l’intérêt général. Par exemple, financer des programmes de santé complémentaire pour les salariés de l’entreprise est rentable pour une entreprise, tout en apportant une contribution à la réalisation d’objectifs de santé publique ; par exemple, selon Porter et Kramer (2006), la multinationale américaine Johnson et Johnson a financé un programme d’aide à l’arrêt du tabagisme avec une rentabilité estimée de 2,5 dollars par dollar investi par réduction de l’absentéisme et augmentation du temps de travail productif. Dans ce modèle, la RSE se définit comme un investissement stratégique privé dans un objectif de rentabilité privée qui contribue collatéralement au bien commun. Le critère définitionnel de la RSE est donc que l’action RSE soit subordonnée à l’objectif économique de l’entreprise. L’impact sociétal de la RSE est un effet collatéral, c’est-à-dire secondaire et subordonné à la contribution de la RSE à la rentabilité de l’entreprise. L’apport de la théorie de la RSE stratégique réside dans la clarification de ce lien de subordination entre les deux plans d’analyse, économique et sociétale, contenus dans le concept de RSE : Il s’agit d’analyser une relation moyen/fin, les entreprises ne faisant de RSE que dans leur intérêt économique bien compris.

RSE et utilitarisme

   Si la RSE est fondamentalement compatible avec le système économique libéral, c’est parce que le critère d’intérêt des acteurs, clé d’analyse de l’économique classique, à savoir ce qui maximise la fonction d’utilité des acteurs économiques, permet d’expliquer que les agents mobilisent des ressources afin de développer des actions RSE. Dans le modèle d’A. Smith, c’est le fait que les intérêts particuliers convergent dans l’intérêt général qui permet de résoudre la tension entre les objectifs privés et les intérêts sociétaux : « En poursuivant son propre intérêt, [l’individu] promeut souvent aussi celui de la société, bien plus efficacement que quand il a l’intention de le faire lui-même » (Smith, 1776). Une partie de la littérature sur la RSE fait donc référence à Adam Smith pour justifier l’alignement des intérêts des différentes constituantes de la société produit par la RSE (Brown et Forster 2013). La réinterprétation contemporaine de l’œuvre d’A. Smith à la lumière de la notion de RSE permet également de nuancer les interprétations néolibérales de sa doctrine économique. Le postulat selon lequel les décisions économiques seraient amorales – problème connu sous la dénomination « separation thesis » dans le champ des études « business ethics » – n’est pas valable si les thèses économiques d’A. Smith sont remises dans le contexte plus général de ses écrits philosophiques, et notamment de sa Théorie des sentiments moraux, qui montre comment les comportements égoïstes – le facteur principal retenu par l’interprétation économique néo-libérale – sont équilibrés par des sentiments de sympathie et de justice, induisant une part de motifs bienveillants et donc de comportements prosociaux dans les actions humaines (Newbert 2017, cf. infra, §1.3). La conception de la RSE stratégique est également partiellement congruente avec l’analyse de M. Friedman (1970) selon laquelle la seule responsabilité des entreprises est économique. La définition stratégique de la RSE, parce qu’elle se place du point de vue de la logique économique de l’entreprise, est consistante avec la thèse de Friedman : si les entreprises intègrent des considérations éthiques ou normatives dans leurs activités, c’est parce qu’elles ont un intérêt économique à le faire. La définition stratégique de la RSE diffère de celle de M. Friedman par la déduction : là où M. Friedman réduit la RSE à un coût de communication nécessaire à la gestion du risque de réputation de l’entreprise, « hypocritement » déguisé en bienfaisance, le courant de la RSE stratégique propose de faire de la RSE un investissement dans lequel convergent les intérêts des actionnaires et de l’ensemble des partenaires de l’entreprise.

Le modèle de la RSE altruiste

   Ce champ d’étude regroupe toute approche dans laquelle il existe un critère de décision supérieur à l’intérêt économique d’un acteur privé. Il relève du choix discrétionnaire d’un acteur économique d’investir de façon non financièrement optimale dans la RSE, et plus largement dans le bien commun. Ces arbitrages sont le fait d’acteurs privés qui ont la liberté économique et juridique de les choisir : historiquement, l’investissement socialement responsable « ISR » est une démarche visant à placer les fonds d’organisations religieuses en cohérence avec leurs valeurs, quel que soit le coût d’opportunité de cette posture éthique. Actuellement, ces approches d’investissement dans lesquelles l’objectif éthique est la priorité et les rendements financiers sont le collatéral se regroupent sous la dénomination « impact investing » (Novethic, 2017). Une très grande diversité d’approches peut ici être traitée : de la philanthropie, don privé sans contrepartie financière (prôné par M. Friedman comme la seule redistribution privée légitime, en lieu et place de la RSE), à des modèles économiques hybrides en phase d’émergence, comme l’entrepreneuriat social « social business » qui consiste à créer des entreprises à objectif social avec une viabilité économique minimale et une absence totale de rémunération des apporteurs de capitaux (« no loss no dividends », M. Yunus, 2009). Complexité des motivations L’économie de l’altruisme est un champ d’innovation socioéconomique qui traite des modèles économiques alternatifs à la maximisation des profits individuels, qui est pourtant le postulat fondamental du système économique libéral dans son interprétation néo-classique contemporaine. L’étude des contreparties non financières des transactions économiques, c’est-à-dire de leurs rémunérations symboliques, a des racines théoriques dans les sciences sociales, comme l’anthropologie (Mauss, 1923) et la sociologie des organisations (Alter, 2009), ce qui mêle la question des transactions économiques avec les enjeux plus larges de la fonction identitaire et sociale de l’échange. Les études en économie des incitations montrent que les liens entre motivation intrinsèque ou symbolique, et motivation extrinsèque c’est-à-dire économique, sont complexes ; par exemple rémunérer les donneurs de sang est totalement contreproductif, tandis que rémunérer certaines actions bénévoles peut être incitatif à partir d’un certain niveau de compensation pécuniaire (Beauvallet 2008). Des études en économie comportementale montre que les comportements prosociaux (ex : philanthropie) ne s’expliquent pas seulement par l’altruisme mais aussi par un bénéfice d’image et dans certains cas également par des motifs économiques, l’ensemble ce ces motivations étant entremêlées de façon complexe (Bénabou et Tirole 2006). Cas des dirigeants-propriétaires Le champ de l’économie de l’altruisme s’intéresse également à une catégorie d’acteurs économiques spécifique, les dirigeants-propriétaires (Baron 2007, Segrestin et Hatchuel 2011, Crifo et Forget 2014). Il s’agit du cas dans lequel l’entrepreneur est àla fois l’investisseur et le décideur : cette configuration économique et juridique permet à l’entrepreneur des arbitrages privés non contraints par des obligations juridiques ou financières de rentabilisation des capitaux, comme par exemple ne pas délocaliser une entreprise familiale, tant que cette position est économiquement tenable dans son univers concurrentiel. Ce statut spécifique du dirigeant-propriétaire, qui lui permet d’équilibrer de façon discrétionnaire les objectifs économiques et les motivations éthiques de son activité, est une caractéristique remarquable des entreprises de personnes par opposition aux entreprises de capitaux, de sorte que certains chercheurs appellent à s’appuyer sur cette liberté de jugement des dirigeants propriétaires pour « refonder l’entreprise » en opposant « une alternative forte aux doctrines actionnariales » (Segrestin Hatchuel 2011). Sur le plan juridique, « toute société est constituée dans l’intérêt commun de ses associés » (article 1833 du Code civil), mais en pratique, la notion d’intérêt de l’entreprise, c’est-à-dire d’une rentabilité pérenne de son activité, se confond dans certaines formes juridiques (sociétés de capitaux) avec l’intérêt « social », c’est-à-dire celui des sociétaires apporteurs de capitaux qui cherchent à maximiser la rentabilité de leur investissement, ce qui peut, en fonction du niveau et de l’horizon temporel de cette rentabilité, entrer en conflit avec l’objectif de pérennité de l’entreprise

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Table des matières

Liste des tableaux
Liste des figures
Liste des abréviations
Introduction générale
PARTIE 1 : ETAT DE L’ART ET RECOMMANDATIONS 
CHAPITRE 1 : CORRELATION POSITIVE ET FAIBLE RSE/FI 
§ 1. Résultat des méta-analyses
➢ Méta-analyses
➢ Résultats
§2. Importance du biais de spécification dans le corpus
➢ RSE environnementale
➢ Réputation RSE
➢ Artefacts, une influence à limite
§3. Implications et recommandations pour les futures recherches
➢ Hypothèse de travail
➢ Implications
➢ Recommandations pour les futures recherches
CHAPITRE 2 : PARAMETRES METHODOLOGIQUES POUR L’ETUDE DE LA QR RSE/FI 
I- PARAMETRES THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE RSE
§1. Définition préalable
§1.1. Le modèle de la RSE stratégique
§1.2. Implications
– RSE et utilitarisme
– RSE et capitalisme libéral
– RSE et convergence des intérêts socio-économiques
§1.3. Comparaison de la RSE stratégique avec les modèles classiques
§1.3.1. Le modèle de la RSE altruiste
– Complexité des motivations
– Cas des dirigeants propriétaires
§ 1.3.2. Le modèle d’égoïsme contraint
– Obligation morale des acteurs économiques
– Pression des normes sociales
– Problème de l’ambiguïté
– Posture amorale
§1.4. Limites et perspectives de la RSE stratégique
– Limites de la régulation privée
– Complémentarité avec le droit
– Autres outils de régulation économique
– Coûts complets public-privé
§2. Modèle théorique
§2.1. Hypothèses théoriques
– Théories des parties-prenantes
– Management stratégique des ressources
§2.2. Mécanismes de création de valeur
§2.3. Implications et limites du cadre théorique
– Effets intrinsèques et effets d’image
– La RSE concurrentielle, un postulat controversé
– La RSE, un actif immatériel ?
§2.4. Intégration du cadre théorique à l’hypothèse de travail
§3. Variables RSE
§3.1. Biais méthodologiques
§ 3.1.1. Présupposés théoriques des notations RSE
– Méthode de notation des agences
– Définition et modèle de la RSE dans les notations
– Utilisation des notations d’agence dans la littérature académique
§3.1.2. Les problèmes de l’agrégation
– Hypothèse de fongibilité
– Hypothèse de commensurabilité
§ 3.2. Biais perceptuel des mesures de la RSE
– Biais perceptuel structurel
– La notation RSE, un service aux investisseurs ISR
– Biais de communication
– Biais d’acteurs
§ 3.3. Recommandations pour les futures recherches
II- PARAMETRES THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE FI
§1. Variables comptables et variables de marché
– Variables de marché
– Variables comptables
– Consensus et recommandations sur le choix des variables FI
§2. Indicateurs financiers intermédiaires
§3. Actifs immatériels
III- MODELE d’INTERACTION RSE/FI
§1. Corrélation linéaire
§2. Sens et temporalité de la régression
§3. Variables de contrôle
– Secteur
– Taille
– Risque
§4. Problèmes de spécification des modèles de corrélation linéaire RSE/FI
– Omission de variables déterminantes
– Incohérence de la corrélation testée
– Assomption de linéarité
– Approche par la contingence
P2 : DESCRIPTION DES DONNEES
CHAPITRE 3 : DONNEES ECONOMIQUES 
§1. Données
§2. Univers
§3. Analyse descriptive des indicateurs de performance financière
CHAPITRE 4 : DONNEES RSE 
§1. Référentiel de notation
§2. Analyse de la méthode de notation
§2.1. Dimensions de la RSE et construction des notes
§2.1.1. Choix et pondération des dimensions de la RSE
§2.1.2. Construction des notes agrégées et par dimension
§2.2. Pondération sectorielle
§2.3. Types de pratiques RSE évaluées
§3. Statistiques descriptives des notes RSE
§ 3.1. Notes générales
§3.2. Notes par dimension RSE
§3.3 Comparaisons et interactions entre les notes RSE
§3.3.1 Comparaison des notes RSE en niveau
§3.3.2 Comparaison des notes RSE en progression
§3.3.3. Matrices de corrélation des notes RSE
PARTIE 3: METHODE, RESULTATS, DISCUSSION 
CHAPITRE 5: METHODE 
§1. Modèle de régression linéaire « REG »
§1.1. Hypothèse
§1.2. Modèle empirique
§1.3. Variables
– §1.3.1. Variables RSE
– §1.3.2. Variables FI
– §1.3.3. Variables de contrôle
§1.4. Cas
§2. Modèle de médiation « MED »
§ 2.1 Modèle théorique
– Médiation RSE/FI par des actifs immatériels
– Capital humain « Cap.H »
– Hypothèses
§2.2. Modèle empirique
– §2.2.1. Procédure statistique
– §2.2.2. Variables médiatrices
§2.2.2.1. Variable médiatrice TO
TO et RSE
TO et FI
§2.2.2.2. Variable médiatrice InvF
InvF et RSE
InvF et FI
§2.2.3. Variable FI intermédiaire : productivité de l’effectif « ROCEff »
CHAPITRE 6 : EVIDENCE EMPIRIQUE
§1. Statistiques descriptives
§2. Régressions
§2.1. Variable FI de marché : Valo_Gr
§2.2 Variables FI comptables
– §2.2.1. Taux de rentabilité économique : Moc_Gr
– §2.2.2. Productivité de l’effectif : ROCEff
§3. Médiations
§3.1. Relations MEDIATEURS/RSE
– §3.1.1. Relations TO/RSE
– §3.1.2. Relations InvF/RSE
§3.2. Relations MED/FI
– §3.2.1. Relation TO/FI
– §3.2.2. Relation InvF/FI
§3.3. Processus de médiation RSE/FI par Cap.H
– §3.3.1. Médiation avec Valo_Gr
– §3.3.2. Médiation avec ROCEff
CHAPITRE 7 : DISCUSSION 
§1. Valorisation boursière et note environnementale
§1.1 Comparaison avec la littérature
Cohérence théorique
Consensus empirique
§1.2. Implications théoriques
– §1.2.1 Cadre théorique
§1.2.1.1 Théorie de l’efficience des marchés
§1.2.1.2. Investissement socialement responsable « ISR »
La rationalité de l’ISR en question
L’ISR sélectionnerait des entreprises plus performantes
– §1.2.2 Modèles d’anticipation des notes RSE
§ 1.2.2.1. L’hypothèse de l’évolution de la valeur comptable
§1.2.2.2. L’hypothèse de la note RSE comme signal
Théorie du signal appliquée à la RSE
Anticipation rationnelle de création de valeur
Anticipation rationnelle de maîtrise des risques
§1.3. Limites et futures recherches
– § 1.3.1. Limites et futures recherches sur le modèle théorique
Survalorisation des enjeux environnementaux ?
Surréaction au risque ?
Futures recherches
– § 1.3.2. Limites du modèle empirique
§1.4 Conclusion
§2. Médiation par le capital humain
§2.1. Consensus théorique et évidence empirique comparable
– Médiation par le capital humain
– Relation RSE/TO
§2.2. Implications
– §2.2.1. Modèle économique de la RSE
Contribution du capital humain au modèle économique de la RSE
Eléments de chiffrage de l’investissement RSE et de son ROI
La question des contingences
– §2.2.2. Modèle causal RSE -> TO
Déterminants du TO : la qualité perçue du travail
HR+ et satisfaction des salariés, une relation connue
RSE, capital humain et facteurs psychologiques
Implications économiques, stratégiques et financières
§2.3. Limites et futures recherches
Données
Variables
Modèle
Conclusion
Annexe 1 : Article 225
Annexe 2 : Lien entre niveau et progression des notes RSE
Annexe 3 : Tests exploratoires « Pool RH »
Annexe 4 : Tests exploratoires sur l’actionnariat
Annexe 5 : Sorties Stata
Bibliographie
Résumé

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