La réalité spatiale portugaise : les conséquences actuelles d’une histoire passée

Retour sur l’histoire du pays

Petit pays longiligne s’étendant sur 560 km du nord au sud et large de 220 km d’ouest en est, le Portugal marque l’extrémité ouest du continent européen. Il se situe à l’interface entre l’océan Atlantique et l’Espagne. Son ouverture vers le monde mise en valeur grâce à cette proximité avec l’océan va être un avantage essentiel pour le développement du Portugal, aussi bien au profit du développement spatial qu’économique.

Le Portugal offre des paysages variés qui sont nés de reliefs différenciés sur l’ensemble du pays. Alors que le nord du Portugal se caractérise par une région montagneuse, le sud possède un territoire de vastes plaines légèrement vallonnées. En plus de cette dualité nord sud, il s’observe aussi une opposition est ouest où d’un côté il existe un arrière pays rural au faible développement face à un littoral attractif où se concentre l’essor du pays.

Une première phase d’ouverture sur le monde : des invasions à l’essor colonial portugais 

L’histoire du pays a surtout été façonnée par sa position tournée vers l’océan Atlantique. Cette ouverture vers le monde, caractérisée par près de 850 km de frontière maritime, a été la porte d’entrée pour de nombreuses invasions. La monarchie portugaise a su repousser les différents envahisseurs et faire du Portugal un pays indépendant au XIIIème siècle. Le Portugal est alors un des premiers pays européens a avoir fixé ces frontières, frontières qui seront peu voire pas modifiées par la suite.

Du XVème au XVIIème siècle, c’est au tour du Portugal de profiter de son ouverture vers le monde pour le conquérir. Les navigateurs portugais se lancent dans une série de voyages à la rencontre de nouveaux territoires. La période des « Grandes Découvertes » débute par la date symbolique de 1415 à laquelle les portugais partent à la conquête de Ceuta sous l’impulsion de Jean Ier. Durant cette période, le Portugal sera à l’initiative de la découverte, entre autres, des Indes, du Brésil ainsi que de Madère et des Açores qui feront partie du territoire lusitanien à l’avenir. En exploitant ces nouveaux territoires, le Portugal a développé un système économique colonial grâce au commerce de cultures exotiques telles que les épices, le sucre… Les colonies portugaises, surtout celles établies sur le continent africain, ont également participé à la traite négrière européenne.

Les colonies portugaises permettent au territoire lusitanien de s’étendre sur l’ensemble de la planète. La période des « Grandes Découvertes » marque l’essor du Portugal et représente la fierté de la population qui semble souvent nostalgique de cette phase de leur histoire.

La dictature salazariste : un pays qui se renferme sur lui-même 

Après sa période de gloire, le Portugal connait des guerres, notamment contre les armées de Napoléon Bonaparte, ou encore la perte de certaines colonies, comme le Brésil qui signe son indépendance en 1825. Tout cela fragilise la monarchie qui tombe en 1910, année à laquelle débute la République du Portugal.

A partir de la fin des années 1920, une longue période marque profondément le pays. A l’instar de beaucoup de pays de l’Europe du sud, un régime dictatorial s’impose pendant 40 ans au Portugal. C’est lors du coup d’état militaire de 1926 qui met fin au régime parlementaire, que commence la Deuxième République du Portugal, aussi qualifiée de dictature nationale. Le nom d’António de Oliveira Salazar apparaît alors sur la scène politique. Pendant quatre ans, l’homme politique se fraye un chemin jusqu’au plus haut poste du gouvernement. La personnalité de Salazar s’impose totalement en 1933 lorsqu’il instaure la nouvelle Constitution ou « Estado Novo » qui lui confère à vie les pleins pouvoirs et le contrôle total de l’Etat. Le régime autoritaire consolidé, le Portugal est alors soumis aux ordres du dictateur Salazar qui crée un parti unique, l’Union Nationale, et s’appuie sur une police omniprésente qui réprime toute opposition.

Il s’ensuit alors une période de dictature de plus de 40 ans pendant laquelle le pays ne s’ouvre plus au monde et s’enferme dans sa ruralité afin d’éviter le désordre dont la ville est supposée être génératrice (Carrière, 2000). A cette époque, près de 80% de la population portugaise vit en campagne. L’ensemble du pouvoir est regroupé au niveau de l’Etat et aucune compétence n’est évidemment déléguée aux échelons inférieurs. Ce blocage de l’urbanisation va avoir d’importantes conséquences dans le pays notamment dans son organisation administrative.

Après la Guerre Civile espagnole, durant laquelle il soutient Franco, et la Seconde Guerre Mondiale, où il signe un pacte de neutralité dans le conflit afin de conserver ses intérêts et ses alliances avec les deux opposants, Salazar doit affronter les guerres coloniales. En effet, en tant que fervent défenseur d’une politique colonialiste, Salazar souhaite maintenir l’unité territoriale portugaise. Alors que les autres pays européens commencent progressivement à décoloniser le continent africain, le Portugal s’enlise dans une guerre coloniale qui dure de 1961 à la Révolution des Œillets en 1974. Cette date historique marque la fin du régime autoritaire porté par Salazar puis son successeur Caetano, qui est renversé le 25 avril 1974. Le Portugal entre ainsi dans une nouvelle ère de démocratisation qui permet au pays de sortir de son isolement.

1986 : L’adhésion à l’Union Européenne

A partir de la Révolution des Œillets, le Portugal entre dans une nouvelle dynamique de développement. Le pays souhaite rattraper le retard que les années Salazar ont accumulé, notamment en termes d’urbanisation. Le dictateur laisse derrière lui un vieux pays rural (Carrière, 2000). Avec son changement politique et sa volonté de démocratisation ainsi que son intégration à la division internationale du travail, le Portugal donne un élan important à son urbanisation. Des chiffres recensés par l’Instituto Nacional de Estatísticas appuient ces propos. Entre les deux recensements de population de 1981 et 1991, il est observé que la population résidente dans des localités de plus de 5000 habitants a augmenté de 730 000 alors qu’il n’est constaté qu’une faible croissance démographique de 34 000 habitants pour le même intervalle de temps (INE, Carrière, 2000). Il est mis en exergue ici, un mouvement migratoire de population des petites localités vers celles aux dimensions supérieures. Les portugais affluent vers les villes récemment reconnues, notamment vers celles situées sur le littoral.

L’urbanisation est également favorisée par l’adhésion du Portugal à l’Union Européenne en 1986. Le pays bénéficie des avantages que lui offre l’Union Européenne pour redresser son économie. En effet, les savoir-faire portugais en termes de production manufacturière, dont le coût de la main-d’œuvre est faible par rapport à ces voisins européens, connaissent un fort intérêt augmentant ainsi radicalement les exportations. Le Portugal lance par la même occasion un appel massif aux investissements directs étrangers très suivi, le taux d’investissement atteignant 25% par an, soit deux fois plus élevé que dans l’Union Européenne. Les secteurs d’activités économiques sont très spécialisés et localisés au Portugal. Le nord du pays est connu pour ces productions de biens manufacturiers tels que le textile, la chaussure ou encore le cuir, alors que la région de Lisbonne développe des activités tertiaires ou de services, et le sud comme l’Algarve est davantage réputé pour le tourisme. Les IDE renforcent cette surspécialisation productive (Carrière, 2000) en concentrant les investissements sur un secteur. Il en découle la formation de déséquilibres sectoriels puis par voie de conséquences des disparités territoriales. Les régions productives sont plus attractives pour les investisseurs mais également pour la population qui y trouve l’emploi.

Ainsi, l’adhésion du Portugal à l’Union Européenne en 1986 pousse le pays vers le haut et l’encourage à récupérer son retard par rapport à ses homologues européens. L’ouverture des frontières et par conséquent l’ouverture de son économie à l’international va certes assurer un développement économique du pays, mais un développement qui va accentuer les disparités régionales.

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Table des matières

Introduction
1ère PARTIE LA REALITE SPATIALE PORTUGAISE : LES CONSEQUENCES ACTUELLES D’UNE HISTOIRE PASSEE
1 Retour sur l’histoire du pays
1.1 Une première phase d’ouverture sur le monde : des invasions à l’essor colonial du Portugal
1.2 La dictature salazariste : un pays qui se renferme sur lui-même
1.3 1986 : L’adhésion à l’Union Européenne
2 Un littoral fortement urbanisé : place de la métropolisation portugaise
2.1 La bipolarisation urbaine du Portugal
2.2 La place des métropoles portugaises dans l’armature urbaine de l’Europe
3 La hiérarchie administrative du territoire portugais
3.1 Les divisions administratives du Portugal : un échelon local privilégié
3.2 L’absence de régions administratives : un manque dans la hiérarchie institutionnelle ?
3.3 L’institutionnalisation métropolitaine inachevée et mal maîtrisée
2ème PARTIE L’AIRE METROPOLITAINE DE PORTO
1 Comment s’est traduit administrativement la métropolisation à Porto ?
1.1 L’aire métropolitaine de Porto, un territoire défini depuis 1991
1.2 La région urbaine de l’Arco Metropolitano do Litoral Norte
1.3 L’unité statistique du Grande Porto
1.4 L’agglomération urbaine : Aglomeração metropolitana do Porto
1.5 Conclusion sur ces différentes limites métropolitaines
2 Les dynamiques métropolitaines du territoire et de la population portuenses
2.1 L’aire métropolitaine de Porto : un territoire qui dépasse les limites administratives
2.2 L’étalement urbain de la région littoral nord
2.2.1 Une aire métropolitaine divisée en plusieurs bassins d’emploi
2.3 L’organisation des réseaux de transport de l’aire métropolitaine
2.4 Les déplacements pendulaires générés par l’espace métropolitain
2.5 Synthèse du système urbain de l’aire métropolitaine de Porto
3ème PARTIE ESSAIS DE REPONSE POUR UNE EVOLUTION DU TERRITOIRE METROPOLITAIN DE PORTO MIEUX ADAPTE A LA REALITE URBAINE
1 1er scénario : L’élargissement des limites administratives de l’Aire Métropolitaine de Porto
1.1 L’intégration de nouveaux municípios dans l’aire métropolitaine de Porto : une démarche simple
1.2 L’intégration à l’aire métropolitaine de Porto : Quels avantages pour les municípios ?
1.3 La délimitation du nouveau périmètre à adopter
1.4 Des compétences renforcées
1.5 Pour un renforcement de la gouvernance métropolitaine et une avancée démocratique de la métropolisation au Portugal
1.6 Vers un meilleur financement métropolitain
1.7 Récapitulatif du 1er scénario
2 2ème scénario : Les régions administratives pour répondre aux enjeux métropolitains
2.1 Le territoire métropolitain à l’échelle régionale
2.2 Vers quelle forme de gouvernance à l’échelle régionale ?
2ème Scénario : Vers des nouvelles formes d’interterritorialité
3.1 L’association intermunicipale : Vers des projets de territoire plus cohérents ?
3.2 L’étude de l’Inter-SCOT de la métropole lyonnaise : Un exemple à considérer pour la métropolisation de Porto ?
4 Récapitulatif des trois scénarii
Conclusion
Bibliographie

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