La question de la révolution chez KWAME NKRUMAH

Le culte de la personnalité

   Marcus Garvey, durant sa carrière politique aimait arborer certains titres tels que sa « grandeur » ou encore le potentat c’est-à-dire celui qui a la souveraineté absolue dans un grand État. Il proposa, pour faire opposition à la Maison Blanche, la création d’une Maison noire où un nègre élu aurait durant quatre ans présidé aux destinées de ses semblables des Etats- Unis. Organisant le corps des infirmiers de la croix noire, il créa ordres militaires et distinctions et se proclama « Président provisoire des Etats-Unis d’Afrique ». Il est considéré comme le père du sionisme africain dans la mesure où il prône le retour en Afrique des esclaves affranchis. Ces idées sionistes le pousse à se proclamer le Moïse des noirs, chargé de les ramener sur la terre promise, l’Afrique. Ne croyant pas que les Afro-américains pourraient vivre libres et respectés hors d’Afrique, il veut unifier les Noirs internationalement, et réclame le droit au « rapatriement » en Afrique notamment au Libéria des Afro-américains de tous pays.

L’influence du Congrès panafricain de Manchester

   Avant le congrès de Manchester, il y en a deux voire trois qui l’ont précédé. Il s’agit du premier congrès qui s’est tenu à Versailles, le second qui s’est tenu à Londres et le quatrième qui s’est tenu à Manchester. Le dernier a été très déterminant dans la pensée de Nkrumah. Le premier Congrès s’est tenu en 1919 sous l’impulsion du leader afro-américain Du Bois. L’évènement était considérable toute la communauté négro-africaine de Paris y était présente. De toutes parts affluent à Paris leaders et patriotes de minorités asservies et de pays en quête d’émancipation. Le mérite Du Bois aura été non seulement de dénoncer la prétendue infériorité des Noirs de les guérir de leurs complexes séculaires par un admirable travail historique et sociologique, politique et scientifique, mais de favoriser la rencontre des Noirs d’Afrique et du nouveau monde et aussi tous les autres peuples qui se sentaient opprimés. Le second Congrès s’est tenu le 28 et le 29 Août 1921 au central Hall de Londres. Il y avait là des membres du parti britannique, des spécialistes des questions coloniales. Il y avait des représentants venus d’Afrique, des Etats-Unis, d’Europe et des Antilles. Mais une des grandes faiblesses des congrès panafricains était que le mouvement était essentiellement composé d’intellectuels et n’avaient pas d’assise populaire. En outre la plupart des délégués qui y sont venus l’ont fait à titre individuel, ils ne représentaient pas à vrai dire des organisations. Après le troisième, tout comme le quatrième, qui n’a pas été très significatif, vint le cinquième congrès panafricain de Manchester car ceci a été le plus déterminant. Il s’est déroulé du 15 au 21 octobre 1945. Véritable succès populaire, le congrès proclame la « détermination des Africains à être libres » et adopte le socialisme comme philosophie politique. En effet, l’objectif de ce congrès était de mettre en marche l’idée d’une fédération destinée à unir économiquement et culturellement les pays africains. Par-delà les Congrès qui l’ont précédé, les historiens sont unanimes sur l’importance de ce congrès, tant pour le nationalisme africain que pour la formation idéologique de Nkrumah. Pourquoi donc ce congrès est-il important à leurs yeux ? Quel est son apport au rêve d’unité chez Nkrumah ? Plusieurs raisons ont été évoquées. On insiste d’abord sur le nombre important des délégués venus des quatre coins du monde.25 Dans L’Afrique doit s’unir, Nkrumah précise que ce congrès rassembla plus de deux cent délégués venus du monde entier. Le plus important, de l’avis de Kwame Nkrumah : « C’est que pour la première fois, les délégués qui y participaient étaient des hommes d’action d’un tour d’esprit pratique et non pas comme aux quatre occasions précédentes, de simples idéalistes se contentant de rédiger des thèses, mais tout à fait incapables ou peu disposés à jouer un rôle actif pour la solution du problème africain. » On voit bien donc que Nkrumah considère ce Congrès comme un évènement phare pour les peuples noirs, victimes d’injustices, de se retrouver pour réfléchir sur les problèmes de l’Afrique. A l’issue de cette rencontre, les congressistes ont adopté l’unité comme une nécessité au succès de la lutte de libération. En le faisant, ils reconnaissent que le problème du nationalisme africain existe dans son manque d’unité. Le Congrès de Manchester a donc le mérite de corriger cette erreur, et mieux, de se dresser sur un programme qui recherche l’indépendance de l’Afrique dans l’unité. Cet ultime point va influencer toute la politique africaine de Kwame Nkrumah quand il prendra le commandement du Ghana indépendant. Le Congrès de Manchester enfin, aura aiguisé chez Nkrumah, le sens de la révolte à l’endroit des pays impérialistes. Mais Nkrumah n’a pas seulement été influencé par les mouvements panafricanistes qui se sont mobilisés pour la cause des noirs, des penseurs comme le russe Vladimir Illitch Oulianov et celui de l’Allemand Karl Marx, l’ont tout de même inspiré dans sa démarche révolutionnaire contre l’impérialisme européen.

L’historique de la révolution en philosophie : Thalès

  Il y a de cela très longtemps, le monde était rempli de dieux et ces derniers régnaient sur tout : les cieux, les eaux, la terre, l’air, le feu et les hommes. Ils étaient à l’origine de tout : la fondation des villes, les codes des lois, la royauté. Bref, les hommes justifiaient tout par les dieux. Ainsi, on devinera aisément le droit suprême qu’avaient le prêtre et le clergé et l’influence qu’ils exerçaient envers la société. C’est la raison pour laquelle Nkrumah affirme: « C’était inévitable que le clergé prenne un certain pouvoir, et là où les prêtres ont accaparé le pouvoir politique, la théologie ne se contente plus d’expliquer les phénomènes naturels : elle veut aussi expliquer les phénomènes sociaux » . Ce qui signifie que le clergé et le prêtre, s’ils ne voient pas d’obstacles pour leurs ambitions, vont certainement abuser de leurs pouvoirs et les transformer en un véritable autoritarisme qui va se traduire par des oppressions. Il en est ainsi parce que les prêtres avaient fondé leur pouvoir et toute la hiérarchie sociale sur leur explication surnaturelle du monde. Ce qui va dès lors causer la rébellion des premiers philosophes traduisant leur opposition à l’ordre social qui était jusque-là justifié par une explication théologique des phénomènes naturels. Il fallait donc, pour ces penseurs, réduire le pouvoir que détenaient les prêtres. C’est dans ce sens que Kwame Nkrumah parle en ces termes : « Pour anéantir le pouvoir sacerdotal et la structure sociale arbitraire qui en découlait, il était nécessaire de leur retirer leur fondement, donc de donner du monde une explication naturelle. Par-là, la philosophie devenait un instrument de justice sociale ». Ce qui traduit qu’avec l’avènement de la philosophie, l’homme s’est démarqué de toute tentative d’explication de l’origine des choses en faisant recours au mythe. Et Thalès, en effet, fut l’un des premiers penseurs qui ont eu le mérite de se démarquer de cette pensée collective grecque. Nkrumah déclare ceci : « Thalès fut à l’origine de deux révolutions. La première fut due à sa tentative pour expliquer la nature en termes de nature ; la seconde consista en sa croyance que l’unité de la nature résidait non dans son essence, mais dans sa matérialité.» Donc si l’on croit Nkrumah, l’attitude de Thalès a sans doute marqué une révolution dans l’histoire de la Grèce. En effet, avec Thalès, on ne tente plus d’expliquer l’origine des choses en faisant recours aux dieux mais plutôt d’expliquer l’origine des choses à partir des causes naturelles. Nkrumah nous le raconte d’ailleurs comme suit ; « Ce fut quand leur religion devint moins communautaire et plus individuelle que le pouvoir des prêtres, déjà implicitement mis en question par les philosophies nouvelles, diminua sensiblement. La montée de la classe commerçante, qui s’appuyait sur les arts mécaniques plus que le rituel, tendit à réduire l’importance sociale du prêtre et favorisa l’individualisation de la religion grecque. C’est cette diminution de l’importance du prêtre que Thalès sanctionna en se passant complétement des dieux pour expliquer les phénomènes naturels ». Ce que Nkrumah veut dire ici c’est que le pouvoir du prêtre a commencé à disparaitre avec notamment la fin d’une religion communautaire et le début d’une religion individuelle instaurée par une nouvelle conscience intellectuelle. Dès lors, les dieux et leurs représentants, à savoir le prêtre et le clergé, qui s’avéraient très importants aux yeux des grecs aussi bien dans leur croyance que dans leur pensée, seront privés de leur pouvoir étiologique et leur influence envers la société sera neutralisée. Mais si cet acte révolutionnaire de Thalès est à saluer, il importe de retenir qu’à cette époque, il  voulaient un changement radical de cette stratification sociale. C’est ce que le philosophe ghanéen nous rappelle lorsqu’il affirme : « Si Thalès put mener pacifiquement cette révolution intellectuelle, reflet d’une révolution sociale, c’est que le clergé grec ne constituait pas une classe au sens strict du terme : se méfiant de l’énorme pouvoir de contrainte que pourrait exercer le clergé s’il formait une classe, les Grecs ne suivirent pas l’exemple de l’Orient ; ils évitèrent d’avoir des prêtres à vie, et souvent fixèrent la durée du sacerdoce » On voit bien donc que les Grecs ne voulaient pas commettre la même erreur que celle des peuples de l’Orient. Il fallait abolir cet ordre social qui traduit l’hégémonie du prêtre et du clergé vis-à-vis des autres. Donc la révolution, comme il est affirmé plus haut, est un fait historique. Et c’est justement à partir de cette attitude révolutionnaire de Thalès dans l’histoire de la Grèce antique que Nkrumah tente de montrer l’importance de la révolution dans la société africaine.

Le capitalisme, une idéologie inadéquate à la société africaine

   Le capitalisme, comme le soutient Nkrumah, est un système qui résulte de l’anarchie du marché, il est très souvent source de gaspillages et des souffrances sociales considérables. En d’autres termes, le capitalisme engendre de profondes inégalités sociales et favorise une minorité riche, aussi bien à l’intérieur des pays capitalistes qu’au niveau de l’économie capitaliste mondiale. Et parmi ces inégalités on peut citer essentiellement les inégalités économique, sociale, culturelle et politique. Inégalité économique c’est-à-dire les différences entre les niveaux de revenus, de ressources, de richesses et de capital, le niveau de vie et l’emploi. Inégalité sociale c’est-à-dire les différences entre le statut social de différents groupes de populations et inégalités résultant du mauvais fonctionnement des systèmes sociaux d’éducation, de santé, de justice et de protection sociale. Inégalité culturelle c’est-à- dire les discriminations fondées sur le genre, l’appartenance ethnique, le groupe racial, la religion, et d’autres groupes identitaires. Et enfin inégalité politique c’est-à-dire les différences dans la capacité des individus et groupes à influencer les processus de prise de décision politique, à bénéficier de ces décisions et à participer à l’action politique. En fait, ce qui est dangereux dans le capitalisme, c’est que le pouvoir économique et le pouvoir politique sont de plus en plus concentrés dans les mains d’un petit nombre, ce qui risque de menacer la croissance, la cohésion sociale et la santé des démocraties. Marx et Engels auront donc raison d’affirmer dans le Manifeste du parti communiste ceci : « L’existence et la domination de la classe bourgeoise ont pour conditions essentielles l’accumulation de la richesse aux mains des particuliers, la formation et l’accroissement du capital ». Ce qui veut dire que tant que le système capitaliste continue à subsister dans une société, il y aura toujours en celle-ci, et sans commune mesure, la domination d’une classe minoritaire qui détient le monopole de la décision sur une classe majoritairement pauvre qui est obligée de travailler pour cette dernière afin de survivre. C’est ce qu’affirme Nkrumah : « Dans le capitalisme, qui n’est qu’une théorie de sociologie politique où les notions capitales d’esclavage et de féodalité ont été raffinées, il faut une société stratifiée pour que le fonctionnement soit bon : une société dans laquelle la classe ouvrière soit opprimée par la classe dirigeante (…). Ce n’est pas la société qui s’épanouit »

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LA GENESE DE L’IDEE DE REVOLUTION CHEZ NKRUMAH
Chapitre 1 : L’influence du panafricanisme sur le nationalisme de Nkrumah
I. L’influence de certains précurseurs du panafricanisme
L’influence de Marcus Garvey
Le culte de la personnalité
Ses Idées
L’impact de l’enseignement du Dr Kwegyir Aggrey
II. L’influence du Congrès panafricain de Manchester
Chapitre 2 : L’influence de certaines figures révolutionnaires : Marx et Lénine
L’influence de Karl Marx
L’influence de Lénine
DEUXIEME PARTIE : LE SENS DE LA REVOLUTION DANS LA PENSEE DE NKRUMAH
Chapitre 1 : La révolution comme rupture de l’ordre ancien
L’historique de la révolution en philosophie : Thalès
La révolution comme instauration d’un nouvel ordre
Chapitre 2 : la révolution, voie de résolution de conflit idéologique et social
Sur le plan idéologique
Sur le plan social
TROISIEME PARTIE : LA PHILOSOPHIE REVOLUTIONNAIRE DE NKRUMAH : ENJEUX ET PERSPECTIVES
Chapitre 1 : L’Afrique face aux deux idéologies rivales : Le capitalisme et le socialisme
Le capitalisme, une idéologie inadéquate à la société africaine
Le socialisme, le système convenable à l’équilibre social africain
Chapitre 2 : La philosophie révolutionnaire de Nkrumah à l’épreuve des problèmes actuels de l’Afrique
Le problème de l’Afrique, c’est l’Afrique elle-même
Le conflit pour le leadership
La faillite des politiques
La corruption, un fléau dévastateur du continent
1. Sur le plan politique
2. Sur le plan de l’éducation
La libération de l’Afrique passe par la jeunesse africaine
L’exemple du « printemps Arabe »
Le cas du Sénégal, du Congo et du Burkina Faso
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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