La production d’écrits au cycle 3 : construction de la cohérence textuelle chez les élèves

La cohérence textuelle dans les programmes de l’école primaire

     Tout d’abord, il faut noter que le terme cohérence textuelle n’apparaît pas en tant que tel dans les programmes actuels, mais il y est fait référence par le biais d’autres notions .À la lecture des programmes du cycle trois, on peut voir que la construction de la cohérence des textes ne se travaille pas uniquement en écriture. En effet, les programmes rappellent que l’enseignement de la lecture est étroitement lié à celui de l’écriture. A partir de la lecture de courts textes ou d’œuvres longues, les élèves déterminent ce qui assure la cohérence du texte : son organisation (paragraphes avec une idée principale qui est explicitée), le rôle de la ponctuation et des mots de liaison, mais aussi l’usage de pronoms et des champs lexicaux (qui se rapportent à la règle de répétition). Cet entraînement à la lecture analytique permet de dégager les principales caractéristiques du texte que les élèves pourront utiliser en production d’écrits. L’apprentissage de l’écriture de textes cohérents passe également par le biais de l’étude de la langue puisque la construction des phrases et du texte nécessitent d’étudier la grammaire, le vocabulaire et la conjugaison. Ainsi, la cohérence textuelle se travaille de façon transversale. De plus, elle se construit durant les trois années du cycle. A tous les cycles, les élèves sont amenés à travailler la répétition et doivent donc connaître et utiliser tous les outils de la langue permettant de l’éviter. Ensuite, cet apprentissage passe par la précision sous plusieurs aspects : dénomination des personnages et emploi des adjectifs au CE2, usage des pronoms et mots de liaison au CM1 afin de maîtriser l’ensemble de ces règles à la fin du CM2. La cohérence textuelle au sens des programmes se définit donc comme le fait de travailler avec précision, en utilisant tous les outils de la langue pour produire un écrit respectant les contraintes syntaxiques et orthographiques. La construction de la cohérence textuelle à l’école élémentaire passe donc par la compréhension des différentes unités linguistiques afin de les faire combiner entre elles. Mais cela passe également – avec l’aide de la lecture, par l’observation des schémas d’écriture. Ces objectifs rentrent dans l’acquisition des compétences prévues dans le socle commun des connaissances et des compétences, qui rappelons-le regroupe les compétences et connaissances que doivent maîtriser chaque élève à la fin de la scolarité obligatoire. Le socle commun rappelle qu’en terme de capacités, chaque élève doit pouvoir « rédiger un texte bref, cohérent, construit en paragraphe, correctement ponctué [tout] en respectant des consignes imposées » qui dépendent du type de texte à produire. Ensuite, l’élève doit pouvoir adapter son écrit à son destinataire. Mais il est aussi essentiel qu’il réfléchisse à la logique interne de son discours puisqu’il doit réfléchir à l’effet recherché par cet écrit. Il est donc attendu des élèves qu’ils maîtrisent l’écriture tant sur le plan syntaxique que discursif et qu’ils connaissent les codes des différents écrits (narratif, descriptif, etc.) qu’ils sont amenés à rencontrer.

L’oral comme outil de perfectionnement de la production écrite

      Avec l’écrit, le langage perd son côté immédiat. Il est différé, ce qui en change la teneur et suppose que l’auteur effectue des opérations intellectuelles différentes. Tout d’abord, il est nécessaire de transcrire certains éléments notamment ceux attrayant à la communication nonverbale (par exemple réussir à marquer son étonnement, qui à l’oral se matérialise par des modifications du ton et de la voix), tous les silences, hésitations mais aussi les gestes du corps ou des mains qui viennent en support à ce qui est dit. Tout ceci est à transcrire tout en concevant un écrit fluide. L’auteur doit donc choisir ce qu’il est important de transcrire pour faire correspondre l’atmosphère du texte avec ce qu’il veut faire apparaître. De plus, l’écrit étant différé, l’auteur doit « prévoir et anticiper les effets de son énoncé » (Faure, 2011 : 20). Lorsqu’il écrit, il doit pouvoir imaginer ce que pourrait ressentir le lecteur et élaborer avec justesse son récit. Il a été admis pendant de nombreuses années que l’écrit était perçu comme une forme de langage plus noble, une forme plus réfléchie de l’oral . Dans cette hypothèse, l’écrit est plus avancé et construit que l’oral et l’auteur de l’écrit doit avoir une connaissance de la langue plus approfondie. L’oral en revanche appartiendrait aux sociétés primitives, une langue n’étant une langue qu’à partir du moment où elle peut se transmettre par l’écriture. C’est d’ailleurs cette conception qui a été retenue pendant de nombreuses années pour caractériser les patois, pidgin ou dialectes connus, qui ne pouvaient être considérés comme car étant majoritairement dépourvus de coutume écrite (Manessy, 1995). Mieux encore, l’écrit serait un don réservé aux élus (Le Brun, 2007). C’est l’idée selon laquelle il y a une « prédisposition biologique spécifique pour la parole » tandis que « l’écrit utilise certaines ressources, mais il en engage d’autres non destinées à des fins langagières » (Bidaud et Megherbi, 2005). Cette conception a cependant bien évolué, il ne faut pas avoir cette approche dichotomique de l’écrit et de l’oral (Nonnon, 2002). Goody (1994) a d’ailleurs affirmé puis récusé cette dichotomie. Il rappelle « l’impossibilité de projeter sur l’expérience de membres scolarisés dans des sociétés actuelles les clivages qui ont pu être posés par les anthropologues pour les civilisations anciennes ». (Goody,1994). La parole ne doit plus être perçue comme une forme moins noble de langage. Aujourd’hui encore la langue est évaluée à partir de l’écrit dans les écoles, en témoignent les évaluations nationales ayant lieu au CE2 et au CM2 (Education nationale, 2013). Tous les domaines du français sont évalués mais ils le sont exclusivement sous la forme écrite. En revanche, au cours des activités scolaires, l’oral est travaillé aux côtés de l’écrit sans prévalence de l’un sur l’autre. Les situations sont mixtes et on fait appel à l’écrit pour les besoins de l’oral (écriture d’un discours, d’un dialogue pour une activité autour du théâtre par exemple) de la même façon que l’on utilise l’oral pour les besoins de l’écrit (commentaire, résumé d’un texte lu). Il y a donc, dans le cadre scolaire, une complémentarité des deux langages (Nonnon, 2002). Et cette complémentarité est originale puisqu’elle peut offrir à l’élève l’opportunité d’exercer une forme de « régulation réciproque ». Dans le cas où le langage oral est utilisé pour l’écrit, il permet ainsi d’améliorer l’écrit. L’oral peut ainsi être considéré comme une forme de révision des textes puisque l’oralisation est un retour en simultané sur le texte. Travailler la construction de la cohérence d’un écrit à partir de l’oral peut être considéré comme une forme de révision et d’amélioration puisque l’interaction entre l’oral et l’écrit apparaît comme l’occasion idéal d’étudier « les contaminations, les interférences, les mentions, les paraphrases » (Nonnon, 2002 : 77) ou tout autre donnée dans l’écrit qui en empêche la pertinence. L’oral est également une forme d’évaluation formative car « s’il intervient pendant l’écriture ou après, c’est au service de l’écriture pour la réguler, la commenter, orienter la révision ». L’oral peut donc être intégré dans le travail écrit afin de permettre à l’élève de construire la cohérence textuelle et de prendre conscience des progrès à effectuer sur le texte. Lorsqu’un élève va oraliser son écrit, ses camarades et lui-même pourront évaluer la cohérence de celui-ci : ce qui manque, ce qui est mal formulé, qui n’est pas à la bonne place, tout ce qui n’est pas assez explicité ou au contraire qui ne devrait pas être dit. Il va donc pouvoir compléter son texte. S’il y a des spécificités entre ces deux formes de langage, « l’écrit et la parole sont généralement des collaborateurs très efficaces » (Morais, 1994 : 50) auxquels on fait appel en fonction des objectifs que l’on souhaite atteindre. Le langage oral prend en compte la situation et les locuteurs adaptent leur parole en fonction de l’avancée de la situation de communication. Et c’est également le cas avec l’écrit. L’auteur du texte doit prendre en compte plusieurs éléments dans la situation tels que les lecteurs qu’ils visent, les caractéristiques du texte et le contexte dans lequel les lecteurs vont lire ce texte (Bidaud et al. 2005). Mais c’est cette réflexion sur le texte qui peut poser problème à certains enfants. Comme nous l’avons souligné précédemment, le langage oral relèverait de l’inné, d’une prédisposition que chaque individu a. Chaque individu effectue ce travail d’analyse de la situation presque en simultané avec le moment où il parle. La parole est donc plus facile dans le sens où elle est plus courante – à condition que l’individu ait été habitué à traduire sa pensée face à des interlocuteurs. Pour autant l’écrit nécessite la même réflexion sur la situation de communication qu’à l’oral et le fait qu’il soit différé peut encourager l’auteur à prendre le temps de réfléchir sur ce qu’il souhaite transmettre. L’avantage, si l’on peut considérer cela comme un avantage, est le temps supplémentaire que l’on a dans l’écrit, puisqu’il est possible de revenir sur son texte afin de le réviser, l’améliorer pour l’adapter aux attentes du lecteur et de ses attentes en tant qu’auteur.

Le genre de texte travaillé : une variable dans la réussite en production d’écrits ?

    Lorsque l’on prend en compte le rapport que peut avoir l’élève avec un genre littéraire, il faut se rappeler que la réussite de l’élève dans la production d’un écrit sur ce thème dépend aussi du degré d’investissement de l’élève face à un genre littéraire spécifique. En effet, si certains élèves affectionnent l’univers policier, d’autres en revanche le trouvent moins intéressant, ce qui peut modifier le degré de motivation chez l’élève et son aptitude à construire un texte cohérent. Le genre de texte étudié peut en effet avoir une incidence sur le degré d’investissement de l’élève pour l’écriture (Barré de Miniac, 2002). On ne peut donc pas toujours comprendre quels outils l’élève utilise pour construire une cohérence textuelle si les textes utilisés comme supports de production suscitent peu voire aucun intérêt chez ce dernier. Et même lorsque l’on prend en compte le fait qu’un élève aime écrire, cela ne signifie pas toujours qu’il aura la capacité de produire des textes et élaborer des stratégies d’écriture à partir de ses connaissances sur la langue. Plusieurs facteurs généraux sont à prendre en compte lorsque l’on juge les capacités d’un élève à s’approprier l’écrit : son vécu, comme nous l’avons démontré, ses conceptions et valeurs sur le monde, ses compétences langagières. En plus du rapport à l’écriture, le rapport de l’élève avec l’enseignement en général est à prendre en compte. L’élève en opposition avec la norme scolaire peut avoir plus de difficultés à s’approprier la norme écrite -dans l’hypothèse où il développe ses capacités d’écriture majoritairement à l’école (Barré de Miniac, 2002). Les écrits, quand ils sont normés, ne laissent pas forcément aux élèves la liberté de créer leur propre schéma narratif. On attend d’eux qu’ils respectent strictement le style du texte et qu’il y figure des éléments narratifs précis. Il est intéressant de travailler l’écrit narratif dans lequel il n’aura été formulé que le respect d’un thème aux élèves -voire laisser le choix du thème libre, afin de leur laisser construire leur propre schéma narratif et avoir une plus grande liberté d’écriture. Le passage par les modèles d’écriture est cependant nécessaire. Dans l’étude menée par Bosredon, C. (2014), il en ressort que certains élèves voient l’activité d’écriture comme le fait de raconter une histoire inventée (35% des élèves interrogés). Et même si les élèves reconnaissent qu’ils ont besoin d’un cadre -apporté par l’enseignant, pour travailler (Barré de Miniac, 2002), ces réponses peuvent traduire un besoin de liberté chez les élèves, de s’affranchir du cadre imposé tant sur le plan formel et que sur le type de texte à produire. Il semble donc intéressant de travailler plus souvent les écrits avec moins de contraintes tels que les récits narratifs dans lesquels il sera proposé un cahier des charges moins lourd (par exemple : une impression à retransmettre, un thème général) et plus de libertés dans le cadre pour les élèves. Ana Maria Margallo Gonzalez (2009) met en lumière un élément fondamental à prendre en compte en production d’un écrit littéraire : la divergence entre l’approche du projet d’écriture chez l’enseignant et chez l’élève. L’auteur rappelle en effet que l’enseignant, puisqu’il connaît les limites d’expression des élèves en écriture, va utiliser l’écriture comme prétexte à l’identification d’un genre et de sa norme. Le fait de ne pas retrouver le genre étudié dans les écrits des élèves peut mener l’enseignant à pratiquer une utilisation faussée de l’écriture et l’élève à se désintéresser de l’activité, voyant qu’il ne parvient à écrire comme l’enseignant le souhaite.

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Table des matières

Introduction
I – Définition
1. Définition scientifique
2. La cohérence textuelle dans les programmes de l’école primaire
II – Cadre théorique
1. Les élèves et l’univers policier
2. L’oral comme outil de perfectionnement de la production écrite
3. L’élève auteur : une posture pour la construction de la cohérence textuelle ?
3. Cadre conceptuel
III – Méthodologie
1. Population
2. Outils utilisés et conditions d’utilisation
V – Présentation et discussion des résultats
1. Les représentations et le vécu des élèves
2. L’oral au service de l’écrit
3. La posture d’écrivain
4. Discussion
V – Pistes d’exploitation
1. Le genre de texte travaillé : variable dans la réussite en production d’écrits ?
2. L’enjeu en écriture : la communication des productions
3. Le travail de compréhension
4. L’évaluation des productions écrites
5. Les prérogatives des nouveaux programmes
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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