La prise en soin de la fin de vie des patients atteints de troubles neurocognitifs sévères par les médecins généralistes

Avec le vieillissement de la population (1), le médecin généraliste va être confronté à de nombreux patients âgés et leurs problématiques dont les troubles neurocognitifs (TNC) majeurs, représentés à plus de 70% par la Maladie d’Alzheimer. Le plan Alzheimer débuté en 2008 a permis l’établissement de plusieurs recommandations pour la prise en soin de la démence d’Alzheimer. Ce plan a permis aussi le développement de structures d’accueil (accueil de jour, EHPAD avec unité Alzheimer…). Pourtant, devant l’évolution inéluctable vers la dépendance et l’augmentation du risque de décès, cette maladie ne bénéficie pas de prise en soin organisée de la fin de vie. En tant que médecin généraliste remplaçante, j’ai été confrontée à de nombreuses reprises à des patients atteints de TNC majeurs à des stades sévères. Ces patients présentaient une forte polymédication. J’ai été interpellée par ces questions : quels sont les symptômes me permettant de définir la fin de vie ? Comment introduire la limitation de soin ? Le médecin généraliste peut-il décider seul de cette limitation ? L’idée de cette thèse a donc émergé de ces réflexions pour en déduire cette question : comment les médecins généralistes prennent-ils soin de leurs patients atteints de TNC majeurs à un stade sévère ? La mesure 25 du plan Alzheimer montre l’importance des sciences humaines dans la recherche sur cette maladie. Il est écrit que les sciences sociales disposent d’analyses sur les systèmes de santé, les solidarités familiales ou la perception des malades qui peuvent être mobilisées et adaptées aux spécificités de la maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi nous avons fait le  d’une étude qualitative pour explorer cette problématique. Dans une première partie nous verrons la maladie d’Alzheimer, étant le TNC le plus fréquent, puis nous allons aborder les TNC sévères avec leurs aspects cliniques et leurs spécificités dans la fin de vie. Dans cette même partie nous rappellerons les notions qui couvrent les domaines de la limitation de soin et de la loi Leonetti. Ensuite, nous présenterons notre étude auprès de 13 médecins généralistes du Finistère et les résultats obtenus à propos de la prise en soin des patients atteints de TNC majeurs en fin de vie. Enfin, nous discuterons de ces résultats puis nous élaborerons des pistes de réflexion pour améliorer le soin de ces patients.

Maladie neurodégénérative et fin de vie

La maladie d’Alzheimer : Épidémiologie

Mondiale et Européenne
La majorité des études épidémiologiques portant sur les troubles neurocognitifs (TNC) se rapportaient à la maladie d’Alzheimer (MA) (2). Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 47,5 millions de personnes dans le monde sont atteintes de la MA, 7,7 millions de nouveaux patients chaque année (3). Dans le World Alzheimer Report 2015 (4), on dénombre 45 millions de personnes affectées par cette maladie, et on prévoit presque 131,5 millions en 2030. Selon l’étude coopérative européenne de Lobo A. et al (5), la prévalence de la MA serait de 4,4% dans la population étudiée (11 cohortes étudiées pendant plus de 10 ans). La prévalence passe de 1,2% entre 65 et 69 ans à 28,5% après 90 ans (6). Ces résultats restent cependant critiqués, leurs méthodologies étant remises en cause du fait de l’hétérogénéité des méthodes utilisées, des instruments diagnostiques employés et des populations étudiées.

En France

En France, le rapport Ménard, du Pr Joël MENARD (7), dénombrait 860 000 cas en 2007 (rapport qui a permis d’aboutir au Plan Alzheimer). De même, l’étude Paquid de 1994 (8) mise à jour en 2012 (9), cohorte prospective sur 25 ans, a estimé les cas prévalents de MA à 850 000 en 2008. Pourtant, ces chiffres restent controversés car les différentes caisses de sécurité sociale (Caisse primaire d’assurance maladie, Mutuelle sociale agricole, Régime social des indépendants) dénombraient 500 000 patients en affection longue durée 15 (ALD 15) (MA et démences apparentées). Cette différence pourrait être liée à un sous-diagnostic de la maladie ou à un surdiagnostic par l’étude Paquid. Selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), la maladie toucherait 2 à 4% de la population après 65 ans, et jusqu’à 15% après 80 ans. Le nombre de patients atteints de cette maladie devraient atteindre 1,3 million en 2020. Ces données concernent directement la Bretagne où, selon l’Agence régionale de santé (ARS) (10), l’indice de vieillissement (76%) est plus élevé que pour la moyenne française (67,4%).

Finistère

Pour le Finistère, l’indice de vieillissement, établi par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), est particulièrement élevé (80,9%). Selon les estimations, le nombre de patients de plus de 80 ans devrait augmenter jusqu’à 34,9% à l’horizon 2030 (11). Selon l’Organisme régional de santé (ORS) de Bretagne (11), les patients âgés de 75 ans et plus représentaient 289 000 habitants de Bretagne, soit environ 1 personne sur 10. L’ORS estimait qu’en 2015 ce nombre atteindrait 330 000 habitants. Grâce à l’étude Paquid et les estimations de l’INSEE, en 2007, il était estimé que les nouveaux patients atteints de MA ou apparentés étaient au nombre de 11 037 avec une projection à 13 619 nouveaux cas pour 2015. Le Finistère est le département le plus touché de Bretagne (tableau 1). Ils estimaient qu’environ 59 000 patients seraient atteints de MA ou apparentés en 2015, dont 16 846 en Finistère .

Maladie d’Alzheimer: Diagnostic et prise en charge

Les troubles neurocognitifs 

D’après le DSM-IV-TR , la démence est un syndrome qui doit regrouper :
• une altération de la mémoire
• associée à, au moins, une autre fonction cognitive altérée: langage, calcul, jugement, pensée abstraite, gnosie ou modification de la personnalité.

Ces 2 altérations doivent avoir un retentissement sur la vie quotidienne et durer depuis plus de 6 mois.

L’arrivée du DSM-V  a modifié ces critères. Les déficits cognitifs ne sont plus centrés sur les troubles mnésiques qui ne concernaient pas l’ensemble des syndromes cognitifs liés à des lésions cérébrales. On parle alors de troubles neurocognitifs (TNC) comprenant les TNC légers et les TNC majeurs (qui correspondent à la démence).

Les étiologies des TNC recensés par le DSM-V sont :
– La MA
– L’atteinte fronto-temporale
– La maladie à corps de Lewy
– L’atteinte vasculaire
– Le traumatisme crânio-cérébral
– L’abus de substance
– L’infection au VIH
– La maladie des prions
– La maladie de Parkinson
– La maladie de Huntington
– Les autres

On estime que 70 à 90% des TNC sont d’origine neurodégénérative. À différencier des affections à début brutal lors de la phase aiguë (accident vasculaire cérébral, méningoencéphalite herpétique…).

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Table des matières

Introduction
1 Maladie neurodégénérative et fin de vie
1.1 La maladie d’Alzheimer : Épidémiologie
1.1.1 Mondiale et Européenne
1.1.2 En France
1.1.3 Finistère
1.2 Maladie d’Alzheimer: Diagnostic et prise en charge
1.2.1 Les troubles neurocognitifs
1.2.2 MA : le diagnostic
1.2.3 MA: la prise en soin
1.2.3.1 Les traitements médicamenteux
1.2.3.2 Les traitements non médicamenteux
1.3 Maladie d’Alzheimer: Évolution et fin de vie
1.3.1 Évolution générale
1.3.2 Spécificités de la démence sévère
1.3.2.1 Identifier les stades de sévérité
1.3.2.2 Les troubles de la communication
1.3.2.3 La place des aidants
1.3.1 Identifier la fin de vie des patients déments
1.3.1.1 L’espérance de vie
1.3.1.2 Les facteurs prédictifs de décès
1.3.1.3 Les causes de décès
1.4 La fin de vie
1.4.1 Historique
1.4.2 Les soins palliatifs
1.4.3 La loi Leonetti
1.4.3.1 Les directives anticipées
1.4.3.2 La personne de confiance
1.4.3.3 Les problèmes posés par la MA
1.4.3.4 La collégialité
1.5 La limitation de soin
1.5.1 Cadre légal
1.5.2 Définitions
1.5.3 Abandon thérapeutique ou obstination déraisonnable ?
1.6 Particularité de la MA
1.7 Problématique
2 Matériel et Méthode
2.1 Étude qualitative
2.2 Choix de l’étude
2.3 Recherches bibliographiques
2.4 Le recrutement
2.5 La saturation des données
2.6 Caractéristiques démographiques de l’échantillon
2.7 Recueil de données
2.8 Méthode d’analyse des données
3 Résultats
3.1 Caractéristiques de la population étudiée
3.1.1 Sexe et âge
3.1.2 Exercice des praticiens
3.1.3 Formation complémentaire
3.2 La grille d’analyse
3.2.1 LA DÉMENCE
3.2.1.1 La vision de la démence
3.2.1.2 Une perte de chance pour le patient ?
3.2.1.3 Les symptômes
3.2.1.4 L’évolution
3.2.2 L’IDENTIFICATION LA FIN DE VIE
3.2.2.1 Les difficultés à définir la fin de vie
3.2.2.2 La temporalité
3.2.2.3 Les symptômes
3.2.2.4 Les causes de décès
3.2.3 LA DECISION DE LIMITATION DE TRAITEMENT
3.2.3.1 Quand ?
3.2.3.2 Description de la limitation de traitement
3.2.3.3 Vigilance particulière accordée à la souffrance physique et morale
3.2.4 LA COLLEGIALITE PROFESSIONNELLE
3.2.4.1 Comment ?
3.2.4.2 Qui ?
3.2.4.3 Pourquoi ?
3.2.5 LA LOI LEONETTI
3.2.5.1 La connaissance
3.2.5.2 Les modalités d’utilisation des directives anticipées et de la personne de
confiance
3.2.5.3 Les écueils
3.2.5.4 La vision de la loi
3.2.6 LE MÉDECIN GÉNÉRALISTE
3.2.6.1 Le médecin de famille
3.2.6.2 Le médecin généraliste versus les spécialistes
3.2.6.3 La solitude, les doutes, la frustration
3.2.6.4 La subjectivité dans le processus décisionnel
3.2.7 QUESTIONNEMENT ETHIQUE
3.2.7.1 Description de la mort
3.2.7.2 Le rôle du médecin
3.2.7.3 Description de la vieillesse
3.2.7.4 La démence et la mort
3.2.7.5 La démence et la perte d’autonomie
4 Discussion
4.1 L’étude
4.1.1 Originalité et force de l’étude
4.1.2 Les limites de l’étude
4.2 Les principaux résultats
4.2.1 La population étudiée
4.2.2 Les particularités des TNC
4.2.2.1 La sémiologie
4.2.2.2 La nosologie
4.2.2.3 La stigmatisation
4.2.3 Déterminer fin de vie : un enjeu majeur
4.2.4 La limitation de soin et les soins palliatifs
4.2.4.1 Le principe de proportionnalité
4.2.4.2 L’obstination déraisonnable
4.2.4.3 L’abandon thérapeutique
4.2.4.4 L’accès aux soins palliatifs
4.2.5 La loi Leonetti
4.2.6 La collégialité
4.2.6.1 Les modalités
4.2.6.2 Qui ?
4.2.6.3 Pourquoi ?
4.2.7 Le médecin de famille
4.2.7.1 La place centrale
4.2.7.2 La prise en soin holistique
4.2.7.3 Déplacer le cure vers le care
4.2.7.4 Attachement du médecin
4.2.7.5 Les proches dans la relation
4.2.8 Propositions
5 Conclusion
Bibliographie

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