La prise en charge orthophonique et diététique des patients dysphagiques

Phase préparatoire ou labio-buccale

   Elle est volontaire. Elle permet la préhension, la section, la mastication des solides et l’insalivation des aliments afin de former un bolus alimentaire homogène rassemblé sur le dos de la langue. Cette phase nécessite l’intervention des muscles et l’intégrité des nerfs suivants :
– l’orbiculaire des lèvres et le nerf facial VII pour la fermeture labiale
– les masséters, ptérygoïdiens et temporaux et le nerf trijumeaux V pour la mastication
– les muscles buccaux, jugaux et faciaux et le nerf facial VII pour la mise en tension de la bouche, des joues et de la face
– les muscles linguaux et le nerf hypoglosse XII pour les mouvements horizontaux et verticaux de la langue
– les muscles péristaphylins internes et le nerf pneumogastrique X pour l’élévation du voile du palais afin d’éviter le reflux des aliments dans les fosses nasales. Lors de cette phase, des informations sont envoyées aux centres moteurs corticaux, la consistance liquide ou solide est reconnue ce qui va permettre une déglutition adaptée à la texture des aliments. C’est à ce stade que sont stimulées les papilles gustatives qui favorisent le plaisir de manger, le péristaltisme intestinal ainsi que les sécrétions pancréatiques et biliaires. C’est également lors de cette phase préparatoire que débute la digestion des glucides grâce à la sécrétion de l’amylase salivaire.

Les mécanismes de protection

Ils sont au nombre de trois. Il s’agit de :
– l’inhibition des centres respiratoires
– la fermeture vélo-pharyngée
– l’ascension et l’occlusion du larynx
L’inhibition des centres respiratoires consiste en une interruption temporaire de la fonction respiratoire : le réflexe de déglutition s’accompagne d’un réflexe d’inhibition respiratoire avec apnée qui débute avant l’entrée du bol alimentaire dans l’oropharynx et se termine après son passage dans la bouche supérieure de l’œsophage. La fermeture vélo-pharyngée va protéger le cavum et les fosses nasales évitant ainsi tout reflux nasal. Le voile déjà relevé lors du temps oral s’applique contre la paroi postérieure du pharynx. Il se produit un rétrécissement de l’isthme pharyngo-nasal : les muscles pharyngo-staphylins rapprochent les deux piliers postérieurs et la paroi pharyngée se contracte grâce au muscle constricteur supérieur. Le voile s’épaissit et se raccourcit sous l’effet du muscle palato-staphylin ou azygos de la luette. L’ascension et l’occlusion laryngées sont indispensables à la protection des voies aériennes et vont permettre le passage du bol alimentaire vers l’hypopharynx. L’ascension laryngée ne peut se produire que lorsque la mâchoire est immobilisée, la déglutition n’est donc possible que la bouche fermée. Une fois la mandibule fixée, l’ascension laryngée peut se réaliser grâce à l’élévation de l’os hyoïde et du cartilage thyroïde qui entraînent le larynx en haut et en avant sous la base de langue. Les muscles du plancher buccal entrent en jeu : le mylo-hyoïdien, le génio-hyoïdien et le ventre antérieur du digastrique, auquel se joint le stylo-hyoïdien, élèvent l’os hyoïde. Celui-ci entraîne avec lui le cartilage thyroïde qui s’élève grâce à l’action du muscle thyro-hyoïdien. L’occlusion laryngée est obtenue par la fermeture des cordes vocales et des bandes ventriculaires et par la bascule en arrière de l’épiglotte. La fermeture des cordes vocales et des bandes ventriculaires s’effectue grâce à l’action des muscles thyroaryténoïdiens, constricteurs du larynx. La bascule de l’épiglotte sur le vestibule laryngé est le résultat de la pression de la base de langue, de la contraction des muscles aryépiglottiques et de l’ascension du larynx. Le positionnement de l’épiglotte et l’ascension du larynx sous la base de langue vont faciliter l’écoulement du bol alimentaire vers l’hypopharynx.

Temps œsophagien

   Cette troisième phase de la déglutition est réflexe. Elle correspond à la progression du bolus de la bouche supérieure au sphincter inférieur de l’œsophage. Cette progression s’effectue grâce à l’onde péristaltique œsophagienne qui se déclenche juste après le passage du bol alimentaire par la bouche supérieure de l’œsophage et qui assure son cheminement vers l’estomac. Le temps œsophagien est la phase terminale de la déglutition. À ce stade, le larynx, le pharynx et le voile du palais reprennent leur position initiale et la respiration peut reprendre. En cas de tumeur cancéreuse de la sphère ORL, particulièrement au niveau de la cavité buccale, du pharynx et du larynx, ces mécanismes de déglutition seront altérés. Ces perturbations peuvent être causées par la tumeur elle-même et varier en fonction de son étendue et de sa localisation ou être des séquelles des différents traitements carcinologiques : chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie.

Laryngectomie frontale antérieure avec épiglottoplastie ou intervention de Kambic-Tucker

   Ce principe chirurgical s’adresse aux tumeurs superficielles des deux cordes vocales respectant au moins l’un des aryténoïdes et n’atteignant pas le cartilage thyroïde. Cette intervention chirurgicale va entrainer l’ablation :
– des deux cordes vocales
– des deux bandes ventriculaires
– parfois d’un aryténoïde
– la moitié antérieure des deux ailes du cartilage thyroïde.
Le cartilage cricoïde, l’épiglotte, un ou deux aryténoïdes et la moitié postérieure des ailes thyroïdiennes sont conservés. La reconstruction du cartilage thyroïde est assurée par l’abaissement de l’épiglotte dans un plan frontal qui est suturée en bas au cartilage cricoïde et latéralement aux ailes thyroïdiennes restantes.

Perturbations du temps pharyngé

   C’est le temps le plus perturbé après une chirurgie partielle du pharyngo-larynx. On pourra constater les troubles suivants :
– une atteinte de l‘occlusion laryngée lors de la déglutition due à une altération de l’adduction des cordes vocales, des bandes ventriculaires et de la mobilité aryténoïdienne. La fonction sphinctérienne du larynx peut également être perturbée par la suppression d’un aryténoïde ou une atteinte du nerf récurrent qui affecte la fermeture laryngée.
– une altération de la protection des voies aériennes provoquée par une atteinte de l’ascension laryngée, une modification ou une résection de l’épiglotte et une apnée plus difficile à réaliser suite à la perte d’efficacité du sphincter laryngé.
– des troubles de la sensibilité pharyngée et laryngée qui s’expliquent par la section ou l’atteinte du nerf laryngé supérieur. La localisation de la nourriture et le réflexe de protection des voies respiratoires seront diminués et/ou retardés. Ces troubles de la sensibilité pourront être à l’origine de fausses routes.
– une perturbation du péristaltisme pharyngé, qui peut être une conséquence de la résection du sinus piriforme, et qui va altérer la propulsion du bol alimentaire vers la bouche supérieure de l’œsophage. L’ablation d’un sinus piriforme peut également provoquer des fausses routes dues à des stases alimentaires et salivaires.
– une production abondante de salive et de sécrétions provoquée par l’intervention chirurgicale. Celles-ci peuvent stagner au niveau du larynx et gêner le déroulement de la déglutition en entraînant des fausses routes.

Conséquences des glossectomies sur la déglutition

   L’importance des séquelles constatées après une des interventions décrites ci-dessus va varier en fonction de l’étendue de l’exérèse chirurgicale. Après une glossectomie, on peut constater les perturbations suivantes :
– une réduction, voire une perte de la mobilité linguale, qui va entraîner une altération de la mastication, du contrôle et de la propulsion du bol alimentaire vers le pharynx et, par conséquent, des stases alimentaires au niveau buccal
– des troubles de la sensibilité au niveau de la zone de résection et de la suture. Cette altération de la sensibilité et la présence de stases alimentaires vont favoriser les fausses routes avant la déglutition. Ces fausses routes avant la déglutition sont aggravées en cas de résection de la base de langue
– des fausses routes pendant la déglutition provoquées par les difficultés de propulsion du bol alimentaire
– un défaut de déclenchement du temps pharyngé
– une incontinence labiale salivaire et alimentaire

Conséquences de la BPTM sur la déglutition et l’alimentation

Après une BPTM, on peut constater les perturbations suivantes :
– des troubles plus ou moins gênants de l’ouverture et de la fermeture de la bouche qui peuvent entraîner des difficultés de préhension des aliments.
– des difficultés de mastication de certains aliments qui vont être majorées en cas de BPTM interruptrice
– des stases intrabuccales alimentaires et salivaires
– une insensibilité au niveau du menton et de la lèvre inférieure rendant l’occlusion labiale défectueuse et provoquant un défaut de contention des aliments et de la salive
– une altération de l’efficacité du sphincter vélo-pharyngé : elle est provoquée par une exérèse du voile du palais associée à une résection d’une partie de la base de langue et peut entraîner un risque de fausses routes avant la déglutition, notamment pour les liquides
– un retard de déclenchement du réflexe de déglutition dû à une altération de la sensibilité provoquée par la reconstruction par lambeaux.
– des stases au niveau des vallécules ou de la paroi de l’hypopharynx qui vont être à l’origine de fausses routes trachéales après la déglutition. Ces stases sont dues à une diminution de la force de propulsion des aliments provoquée par l’exérèse de la base de langue et/ou des muscles constricteurs du pharynx. En cas de BPTM interruptrice, l’exérèse de la branche montante de la mandibule entraîne une asymétrie de la remontée du larynx. Cette asymétrie limite l’ouverture passive du sphincter de l’œsophage et majore le risque de formation de stases valléculaires et de fausses routes trachéales. Des troubles de la déglutition peuvent également apparaître pendant ou après un traitement par chimiothérapie et/ou radiothérapie et peuvent être majorés si ce traitement est associé à une chirurgie.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : ASSISES THÉORIQUES
1. PHYSIOLOGIE DE LA DÉGLUTITION 
1.1 Temps oral
1.1.1 Phase préparatoire ou labio-buccale
1.1.2 Phase orale
1.2 Temps pharyngé
1.2.1 Les mécanismes de protection
1.2.2 Les mécanismes de propulsion
1.3 Temps œsophagien
2. CHIRURGIES PARTIELLES DU LARYNX ET CONSÉQUENCES SUR LA DÉGLUTITION 
2.1 Classification internationale des tumeurs du larynx
2.1.1 Classification T
2.1.1.1 Étage sus-glottique
2.1.1.2 Étage glottique
2.1.1.3 Étage sous-glottique
2.1.2 Classification N
2.1.3 Classification M
2.2 Chirurgies du larynx
2.2.1 Laryngectomie frontale antérieure avec épiglottoplastie ou intervention de Kambic-Tucker
2.2.2 Hémilaryngopharyngectomie supracricoïdienne
2.2.3 Hémilaryngopharyngectomie supraglottique
2.2.4 Les laryngectomies partielles supraglottiques
2.2.4.1 Limitées au larynx
2.2.4.2 Étendues au pharynx ou à la base de langue
2.2.5 Les laryngectomies partielles supracricoïdiennes
2.2.5.1 Avec cricohyoïdopexie (CHP)
2.2.5.2 Avec cricohyoïdoépiglottopexie (CHEP)
2.3 Conséquences sur la déglutition
2.3.1 Perturbations du temps oral
2.3.2 Perturbations du temps pharyngé
2.3.3 Perturbations du temps œsophagien
3. CHIRURGIES MAXILLO-FACIALES ET CONSÉQUENCES SUR LA DÉGLUTITION 
3.1 Les glossectomies
3.1.1 Classification internationale des tumeurs de la langue mobile
3.1.2 Les glossectomies totales
3.1.2.1 Glossectomie totale sans laryngectomie associée
3.1.2.2 Glossectomie totale avec laryngectomie
3.1.3 Les glossectomies partielles de langue mobile
3.1.3.1 Glossectomie marginale
3.1.3.2 Hémiglossectomie de langue mobile
3.1.3.3 Glossectomie transversale antérieure
3.1.3.4 Reconstruction
3.1.4 Conséquences des glossectomies sur la déglutition
3.2 La bucco-pharyngectomie trans-mandibulaire
3.2.1 Classification internationale des tumeurs de l’oropharynx
3.2.2 Indications pour une bucco-pharyngectomie trans-mandibulaire
3.2.2.1 Indications thérapeutiques pour une BPTM interruptrice
3.2.2.2 Indications pour une BPTM conservatrice
3.2.3 Principes chirurgicaux
3.2.3.1 Préparation de l’intervention
3.2.3.2 Exérèse chirurgicale
3.2.4 Conséquences de la BPTM sur la déglutition
4. CHIMIOTHÉRAPIE, RADIOTHÉRAPIE ET CONSÉQUENCES SUR LA DÉGLUTITION 
4.1 La chimiothérapie
4.1.1 Indications et facteurs de décision pour une chimiothérapie
4.1.1.1 Facteurs liés au malade
4.1.1.2 Facteurs liés à la tumeur
4.1.1.3 Traitements antérieurs
4.1.2 Principes thérapeutiques
4.1.2.1 Voies d’administration
4.1.2.2 Associations médicamenteuses
4.1.2.3 Associations thérapeutiques
4.1.2.4 Modes d’administration
4.1.3 Effets indésirables de la chimiothérapie
4.2 La radiothérapie
4.2.1 Indications pour une radiothérapie exclusive
4.2.2 Associations thérapeutiques
4.2.2.1 Association radiothérapie-chirurgie
4.2.2.2 Association radiothérapie-chimiothérapie
4.2.3 Effets indésirables de la radiothérapie
5. LA PRISE EN CHARGE ORTHOPHONIQUE THÉORIQUE 
5.1 L’information et l’écoute
5.2 Le bilan orthophonique
5.2.1 Objectifs du bilan
5.2.2 Étapes du bilan
5.2.2.1 L’anamnèse
5.2.2.2 Le bilan clinique
5.2.2.3 Le bilan fonctionnel : essais de déglutition
5.3 La prise en charge rééducative
5.3.1 Objectif de la prise en charge orthophonique
5.3.2 Travail préparatoire à la reprise de la déglutition
5.3.2.1 Préparation de l’environnement
5.3.2.2 L’expectoration
5.3.2.3 Détente cervico-scapulaire
5.3.2.4 Respiration
5.3.2.5 Travail praxique
5.3.3 Reprise de la déglutition et de l’alimentation
5.3.3.1 Postures de sécurité et positions de compensation
5.3.3.2 Reprise de la déglutition
DEUXIÈME PARTIE : DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL
1. OBJECTIF ET PROBLÉMATIQUE 
2. HYPOTHÈSES 
3. MÉTHODOLOGIE 
4. POPULATION 
TROISIÈME PARTIE : TRAITEMENT DES RÉSULTATS
1. LA COOPÉRATION ORTHOPHONISTE-DIÉTÉTICIEN : LE POINT DE VUE DES DIÉTÉTICIENS
1.1 Le rôle du diététicien
1.1.1 À l’hôpital 5
1.1.2 À domicile
1.1.3 En centre de rééducation
1.2. La prise en charge diététique des patients
1.2.1 En préopératoire
1.2.2 En postopératoire
1.2.3 Pendant la radiothérapie et la chimiothérapie
1.2.4 À distance
1.2.5 Les attentes des patients
1.3. La coopération diététicien-orthophoniste
1.3.1 Déroulement de la coopération
1.3.1.1 À l’hôpital Bon Secours de Metz
1.3.1.2 À domicile
1.3.1.3 Au centre de rééducation pour laryngectomisés Bon Sauveur d’Alby
1.3.2 Demandes spécifiques des orthophonistes auprès du diététicien
1.3.3 Bénéfices orthophoniques de la prise en charge diététique
2. LA COOPÉRATION ORTHOPHONISTE-DIÉTÉTICIEN : LE POINT DE VUE DES ORTHOPHONISTES 
2.1 Profil des orthophonistes
2.1.1 Type d’exercice professionnel
2.1.2 Type de patients pris en charge
2.1.3 Difficultés rencontrées lors de la prise en charge
2.2 La collaboration orthophonistes – diététiciens
2.2.1 Importance de la coopération
2.2.2 Apports de cette coopération à la prise en charge orthophonique
3. LA COOPÉRATION ORTHOPHONISTE-DIÉTÉTICIEN : LE POINT DE VUE DES PATIENTS 
3.1 Profil des patients
3.2 Séquelles du traitement carcinologique
3.3 Intérêts de la prise en charge orthophonique et diététique
3.3.1 Bénéfices de la prise en charge orthophonique
3.3.2 Bénéfices de la prise en charge diététique
3.3.3 Intérêts de la coopération entre orthophonistes et diététiciens
QUATRIÈME PARTIE : RÉSOLUTION DE LA PROBLÉMATIQUE
1. VALIDATION DES HYPOTHÈSES 
1.1 Première hypothèse
1.2 Deuxième hypothèse
1.3 Troisième hypothèse
2. DISCUSSION DES RÉSULTATS 
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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