La prise en charge des douleurs chroniques en médecine générale

Définition
Selon la définition officielle de l’Association Internationale pour l’Étude de la Douleur (IASP), “la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en des termes évoquant une telle lésion”. On distingue quatre composantes de la douleur : sensorielle, émotionnelle, cognitive et comportementale.(1). La douleur chronique est par définition une douleur évoluant depuis plus de trois mois. Elle correspond à un syndrome multidimensionnel avec des facteurs d’entretien psychologiques, sociaux et culturels, et des conséquences physiques morales et sociales telles que la désinsertion socio professionnelle. C’est une pathologie du système de perception de la douleur. Cette dernière, de par son caractère chronique perd sa valeur protectrice pour devenir destructrice. (2).

Epidémiologie

Selon Le Livre Blanc de la Douleur paru en 2017, au moins 12 millions de Français souffrent de douleurs chroniques, soit 30 % des adultes. 70 % d’entre eux ne reçoivent pas de traitement approprié. (3). La douleur constitue le premier motif de consultation aux urgences et en cabinet de médecine générale.(4) Elle concerne principalement les personnes âgées et les femmes (5) et on constate que moins de 3% des patients bénéficient d’une prise en charge dans un centre spécialisé (3). La prise en charge de la douleur chronique est un enjeu économique (du fait de son coût important) et social car elle présente une forte répercussion sur la qualité de vie des patients et est source d’une grande limitation dans les activités professionnelles et domestiques.(6). Selon l’enquête ECONEP, les arrêts de travail des patients douloureux sont plus fréquents que dans la population générale et 45% d’entre eux bénéficient d’arrêts d’une durée moyenne cumulée de plus de 4 mois. La douleur chronique constitue un enjeu moral car elle est aussi synonyme de souffrance qu’elle soit psychique, sociale et/ou existentielle : un tiers des patients douloureux chroniques estiment que la douleur est parfois tellement forte qu’ils ressentent l’envie de mourir. (7) Plusieurs circulaires depuis 1991 ont tenté de préciser sa prise en charge par les soignants. Trois plans gouvernementaux se sont succédé de 1998 à 2011, permettant la mise en place d’un réseau de consultations et de centres spécialisés sur l’ensemble du territoire. Ils ont aussi permis l’élaboration de pistes d’amélioration de la prise en charge de ces patients .

DISCUSSION

Comparaison avec la littérature existante

Les attentes des patients :
Dans la littérature, les études analysant la vision des patients douloureux chroniques sur leur prise en charge, une majorité des patients sont satisfaits même s’ils ne sont que partiellement soulagés. (10) Les patients apprécient la relation de confiance, l’écoute et la prise en charge globale proposée par leur médecin traitant comme le confirment nos résultats.(10) Ils attendent du médecin généraliste un rôle de coordinateur, une orientation personnalisée ainsi que la réalisation de synthèse pour centraliser les différents examens et avis.(11) Pour cela, une communication entre les spécialistes et les médecins généralistes est nécessaire afin de faciliter l’orientation et la discussion entre intervenants dans la prise en charge. Actuellement, comme le prouvent nos résultats, il existe très peu de liens directs entre eux.

Influence de la société dans la relation médecin-patient :
Un programme de médiatisation avait été effectué lors du plan gouvernemental de 1998-2000 afin de sensibiliser la société, les médecins et les patients à la douleur chronique. Les patients sont des grands consommateurs d’information santé à travers les médias, les sites médicaux et ont confiance en ces sources. (12) Ce fond culturel concurrence l’autorité médicale, et renforce la perception de vulnérabilité et de faillibilité des médecins. Ainsi, le patient se place sur un pied d’égalité avec son médecin (13) et cela l’encourage à demander encore plus de recherches, de certitude diagnostique et d’efficacité de prise en charge. (14) Or, la cascade iatrogène d’examens paracliniques et leur normalité est souvent source d’angoisse et accentue le caractère désespérant de la situation. (14) De ce constat, un nouveau modèle consumériste d’inspiration nord-américaine est en train d’apparaître : la relation médecin patient initialement basée sur un rapport de confiance bascule vers un rapport contractuel. L’acte médical est revendiqué comme un dû et non comme un service rendu ce qui accentue également le devoir de résultat du médecin.

Parallèlement, la tendance actuelle à la judiciarisation de la médecine est un facteur supplémentaire de sur-investigation des symptômes par les médecins. (14) Il est donc très complexe pour le médecin de mettre un terme à la recherche diagnostique, comme nous le souligne une de nos interviewés.

Etat des lieux des plans gouvernementaux existants
Nous retrouvons de nombreuses similitudes avec les résultats de notre étude et les différents plans douleur élaborés de 1998 à 2011.(16) Cependant nous constatons dans les différents axes d’amélioration des plans gouvernementaux une approche très hospitalo-centrée avec une absence de réflexion permettant d’impliquer davantage la médecine de premier recours.

Le manque de formation initiale et continue.
Les patients attendent de leur médecin généraliste qu’il ait une formation adaptée à leur pathologie, afin de pouvoir les conseiller et les éclairer au mieux.(11) Les mesures prises par les différents plans gouvernementaux ont permis la création d’un DESC de douleur et soins palliatifs, d’un DIU et d’un module d’enseignement consacré aux douleurs chroniques et soins palliatifs. Cependant, la mise en place et le volume horaire du module restent inégaux d’une faculté à l’autre.(17) Un renforcement des programmes de formation sur la douleur chronique dite rebelle dans le DES de médecine générale a pu être effectué, contrairement aux DES des autres spécialités médicales et chirurgicales qui n’en ont pas bénéficié. (17) Le manque de formation des personnels médicaux et paramédicaux a de nombreuses conséquences dont un phénomène de stigmatisation des patients. L’absence d’une cause organique claire permettant d’expliquer la persistance de la douleur rend certaines personnes sceptiques quant à la véracité des symptômes vécus et par conséquent remet en question la crédibilité de la personne souffrante. (18) Or, les patients douloureux chroniques s’isolent socialement à cause des répercussions de leur pathologie douloureuse. Cette stigmatisation sociale et médicale accentue ce phénomène d’isolement.(19) Il est donc nécessaire de mieux former les médecins ainsi que le personnel paramédical sur les phénomènes physiopathologiques impliqués dans la douleur afin d’améliorer leur compréhension et limiter ainsi la stigmatisation. Les difficultés de prescription concernant les paliers III sont des problématiques soulevées par le plan douleur 2006-2010 et par notre étude. Ainsi pour simplifier et sécuriser l’accès aux antalgiques de palier III la réalisation d’un mémento avait été réalisé afin d’aider les professionnels hospitaliers et libéraux dans leurs prescriptions.(17) Lors des entretiens réalisés avec les différents professionnels, les difficultés et la réticence à la prescription des antalgiques de palier III sont encore bien présentes.

Algologues : un manque de personnel.
Le plan douleur 2002-2005 a permis la création de nombreuses consultations spécialisées et de huit centres anti-douleurs au niveau national.(20) Pour faciliter l’accès, un renforcement en personnel au sein de ces structures avait été évoqué dans le plan douleur de 2006-2010 à travers une aide budgétaire.(17) Malgré cela, on constate une perte de personnel et un manque de moyens sous la pression de la restructuration hospitalière. Cela souligne une absence de transparence des crédits affectés par les ARS. En effet, de nombreuses équipes douleurs ne connaissent pas les crédits spécifiques attribués à leur établissement et leurs services .

Les thérapeutiques non médicamenteuses.
Le non-remboursement des soins non pharmacologiques reste un obstacle, ainsi que le manque de professionnels formés et la méconnaissance des médecins de certaines thérapeutiques. Le plan douleur de 2006-2010 avait pour objectif d’améliorer auprès des personnels de santé la connaissance des thérapeutiques non médicamenteuses. Les résultats de notre étude prouvent que cet objectif n’a pas été atteint, la formation restant insuffisante d’après les médecins interrogés.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
A. Définition
B. Epidémiologie
C. Objectif de notre étude
II. MATERIEL ET METHODE
A. Type d’étude
B. Analyse des données
C. Éthique
III. RÉSULTATS
A. Les difficultés
1. Concept incompris et stigmatisation des patients
2. Difficultés des médecins généralistes
3. Difficultés liées aux algologues
4. Difficultés liées aux patients
5. Difficultés liées aux thérapeutiques médicamenteuses
6. Difficultés liées aux thérapeutiques non médicamenteuses
7. Une triangulation de la prise en charge nécessaire
B. Les pistes d’amélioration
1. Un changement de vision
2. Médecins généralistes
3. Algologues : un accès facilité
4. Thérapeutiques non médicamenteuses
5. Importance de la communication
C. Modélisation
IV. DISCUSSION
A. Comparaison avec la littérature existante
1. Les attentes des patients
2. Influence de la société dans la relation médecin-patient
3. Etat des lieux des plans gouvernementaux existants
B. Forces et faiblesses de l’étude
C. Implications futures
V. CONCLUSION
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ANNEXES
A. Tableau des caractéristiques de la population
A. Guides d’entretiens
B. Résumé Français
C. Résumé anglais
VIII. ACRONYMES

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