La prévention des IST

L’adolescence, comme définie par l’OMS (1), est une période sensible où les jeunes peuvent adopter des comportements à risque notamment au niveau sanitaire. Si nous rajoutons à cela le fait qu’ils consultent peu, qu’ils se sentent en bonne santé, et qu’il existe un delta important entre les connaissances qu’ils allèguent sur le thème des infections sexuellement transmissibles (IST) et leur niveau réel de connaissances (2,3), cela en fait une frange de la population particulièrement vulnérable à la contamination par ces différentes IST. Les dernières données de la littérature nous montrent d’ailleurs que l’incidence des IST bactériennes (gonococcies, chlamydioses, LGV) sont en constante augmentation depuis plusieurs années sur le plan national ; dans le cadre des infections à gonocoques, les femmes de moins de 20 ans représentent plus de 30% des cas de primo-infection, soit la 2ème catégorie d’âge derrière les 20-30 ans, et dans le cadre des infections à chlamydia ces mêmes femmes représentent plus de 20% des cas de primo-infection, soit encore la 2ème catégorie d’âge derrière les 20-25 ans (4). Par ailleurs, après une diminution constante de 2003 à 2010, le nombre de diagnostics annuels de séropositivité VIH en région PACA n’est plus en régression (5). Pire, entre 2003 et 2012, le nombre de découvertes de séropositivité VIH a presque triplé (x 2,7) chez les jeunes hommes ayant de relations sexuelles avec des hommes (HSH) de 15 à 24 ans (6). Ce sont pour toutes ces raisons que la prévention et la lutte contre les IST sont un problème de Santé Publique (7). Mais dans la réalité de la consultation de médecine générale, entre timidité, gêne ou manque de temps, il existe encore beaucoup de freins à aborder ce sujet. C’est pourquoi dans ce travail nous avons voulu donner la parole aux premiers concernés : les adolescents. L’objectif principal était de déterminer parmi différents facteurs (présence des parents, âge et sexe du médecin, consultation dédiée…) lesquels pouvaient être des freins ou des motivations à aborder le sujet des IST avec son médecin généraliste. L’objectif secondaire était de rechercher une corrélation entre ces facteurs ainsi que d’autres (comme le fait d’avoir déjà discuté d’IST avec ses parents, l’intérêt porté aux IST, la confiance en son médecin généraliste…) avec le fait d’avoir déjà abordé ou de souhaiter aborder le sujet des IST avec son médecin généraliste.

L’objectif principal de notre travail était de déterminer parmi différents facteurs (présence des parents, âge et sexe du médecin, consultation dédiée…) lesquels pouvaient être des freins ou des motivations à aborder le sujet des IST avec son médecin généraliste. Notre étude nous a effectivement permis de mettre en évidence plusieurs facteurs favorisant nettement l’abord du sujet des IST en consultation de médecine générale :
– 56% des adolescents souhaitaient consulter seul contre seulement 5.5% qui tenaient à être accompagnés,
– 54 % des jeunes préféraient que ce soit le médecin qui aborde le sujet contre 7.5% qui tenaient à l’aborder eux-mêmes,
– Le sexe du médecin était aussi un critère très important puisque la majorité des adolescents, et en particulier les filles, était plus à l’aise pour discuter d’IST avec un médecin du même sexe qu’elle,
– Et enfin l’âge du médecin était aussi pris en compte et les élèves préféraient un médecin jeune (30 à 50 ans).

D’autres facteurs, bien que significatifs, étaient plus nuancés ; les adolescents préféraient plutôt consulter le même médecin que le reste de la famille (29% contre 10% pour un médecin différent) mais la grande majorité (60%) n’avait pas de préférence. Par ailleurs, 28% des élèves préféraient aborder les IST au cours d’une consultation dédiée, et 16% au décours d’une autre consultation, mais là encore la grande majorité, 56% n’avait pas de préférence. Enfin, en ce qui concerne le secret médical, moins de la moitié des élèves pensait que leur médecin pourrait ne pas le respecter, et c’était un frein pour moins de la moitié d’entre eux, soit un total de 20% des élèves.

En ce qui concerne les critères secondaires, le fait d’avoir déjà discuté d’IST avec son médecin traitant était significativement corrélé à l’intérêt porté aux IST, au niveau de confiance allégué en son médecin traitant, au sexe féminin, à un âge ou une classe plus avancés, au fait d’avoir déjà discuté d’IST avec ses parents, et au fait de ne pas attacher d’importance au secret médical. Le fait d’envisager de discuter d’IST avec son médecin généraliste était significativement corrélé au fait d’avoir déjà discuté d’IST avec ses parents et à l’intérêt porté au sujet des IST.

Qualité et validité 

Ces résultats sont à nuancer par certaines faiblesses de notre étude :
– Un fort taux de non-positionnement : à part à la question de la présence des parents, dans tous les autres cas, la proportion d’adolescents répondant « ça m’est égal » allait de 28% à 55%. Cette hésitation peut être expliquée par la population étudiée ; en effets certains adolescents pouvaient ne pas être intéressés par le sujet et il était alors pour eux difficile de prendre du recul et de choisir clairement. Nous aurions pour limiter la question à un choix dichotomique mais nous préférions laisser la possibilité aux élèves ne pas se positionner. Il faut aussi garder en tête que ces questionnaires ont été renseignés dans le cadre scolaire et que, même si la thématique était susceptible de les intéresser, il y a pu y avoir une défiance vis à vis de ce qui pouvait être perçu comme un travail scolaire supplémentaire et qu’il peut y avoir eu une gêne à être sollicités sur ce sujet sensible en présence de leurs camarades.
– Un biais de mémorisation : ce biais de mémoire se retrouve en examinant les résultats obtenus à la question « Avez-vous déjà abordé le sujet des IST en classe?». En effet l’éducation à la sexualité fait partie du programme de chaque établissement scolaire par le biais de 3 interventions annuelles (9), et les programmes de SVT abordent aussi l’immunologie et la vaccination. Alors, certes il est possible que les établissements scolaires ne proposent pas la totalité des 3 interventions, par manque de moyens ou de temps, mais il est fort peu probable qu’un élève de 1ère n’ait jamais entendu parler d’IST au cours de sa scolarité.
– La sélection de l’échantillon : pour des raisons pratiques notre étude a été menée dans un unique établissement. Dans notre étude, les filles étaient majoritaires puisqu’elles représentaient 59.21% des élèves. La moyenne nationale est légèrement inférieure, 53.8%, dans l’enseignement secondaire général et technologique (10). Malgré le nombre important de questionnaires analysée (456 pour un NSN à 384) et pour plus de représentativité, il serait intéressant, de diversifier le recrutement en incluant d’autres établissements généraux mais aussi professionnels, où il y a cette fois une majorité de garçons (2).
– L’absence d’autorisation éthique et parentale : le fait d’avoir abordé le sujet des IST avec ses parents était un des critères de notre étude. Nous avons fait le choix, en accord avec l’établissement, de ne pas demander d’autorisation parentale afin d’éviter un biais de sélection.

En effet, il était important de ne pas exclure des élèves dont les parents étaient moins à l’aise avec le sujet des IST et qui risquaient donc d’avoir moins abordé le sujet avec eux. Par ailleurs, l’éducation à la sexualité faisant partie du programme, l’établissement a considéré que notre étude permettait un nouvel abord. Nous avons par ailleurs omis de consulter le comité d’éthique, ce qui est en partie dû à la rapidité avec laquelle nous voulions réaliser l’étude avant le départ en vacances des élèves.

Comparaison à la littérature

Les résultats que nous avons obtenus sont globalement comparables aux résultats de la littérature.

En ce qui concerne les résultats de nos critères principaux :
56 % des adolescents interrogés préféraient consulter sans leurs parents, tendance que l’on retrouve dans d’autres études (11). De plus, rappelons que la HAS recommande que les consultations de l’adolescent se déroulent en trois ou quatre phases dont une sans la présence des parents (12), ceci afin de pouvoir garantir le secret médical comme prévu par l’article L-1111-5 du code de la Santé Publique (13). Malgré cela, peu de médecin déclarent proposer systématiquement ce temps seul avec leurs jeunes patients (14,15). En ce qui concerne la question de qui doit aborder le sujet, notre étude montrait que 54% des élèves préféraient que ce soit le médecin qui initie la discussion. Là encore la majorité des études met en évidence des chiffres similaires (16,17). Une seule étude montrait une tendance inverse (11), avec une majorité d’adolescents qui préférait aborder le sujet, mais il s’agissait d’une étude qualitative menée uniquement sur des garçons, ce qui peut expliquer cette différence de résultats. D’autant plus que dans notre étude les garçons étaient significativement moins attachés que les filles au fait que ce soit le médecin qui aborde le sujet. Ce travail a aussi permis de mettre en évidence que la préférence en ce qui concerne le genre du médecin était très fortement corrélée à celui de l’élève. Les filles préféraient très majoritairement consulter un médecin femme (53.7%) et les garçons un médecin homme (24.3%). Ces résultat se retrouvent de façon très similaire dans d’autres études (16,18). Dans notre étude l’âge du médecin paraissait aussi revêtir une importance non négligeable pour les adolescents ; ceux-ci, et notamment les filles, se déclaraient moins à l’aise avec un médecin âgé de plus de 50 ans pour parler l’IST. Ces résultats convergent avec d’autres études menées sur ce thème, où les jeunes interrogés préféraient un médecin plutôt jeune (11,16).

Parmi les autres critères principaux, notons premièrement que les élèves préféraient plutôt consulter le même médecin que leurs parents, même si la grande majorité n’avait pas de préférence (60%). Julien Pichon montrait dans sa thèse que les garçons de 15-18 ans avaient eux aussi une préférence pour leur médecin traitant (11), et Alice Grand montrait dans sa thèse que « avoir le même médecin que les parents n’influence pas le fait de parler ou non de sexualité (p > 0,999) pour les collégiens ayant consulté en 2010 » (16). Ensuite, dans notre étude, environ 20% des élèves se disaient potentiellement gênés par la peur que leur médecin ne respecte pas le secret médical et enfin, environ 29% des étudiants préféraient discuter d’IST au cours d’une consultation dédiée. Nous n’avons pas trouvé d’autre travail de recherche portant sur ce sujet. Par contre, un travail de thèse (19) montre que les médecins considèrent également la consultation dédiée comme utile. Et à ce propos, notons que depuis le 1er novembre 2017, l’Assurance Maladie a mis en place la « Première consultation de contraception et de prévention des maladies sexuellement transmissibles » qui s’adresse aux filles de 15 à 18 ans et qui est prise en charge à 100% (20).

En ce qui concerne les critères secondaires :
Notre travail a permis de montrer que le médecin avait une place prépondérante dans la liste des interlocuteurs potentiels en matière de prévention d’IST. En effet il arrivait en troisième position derrière « les personnes du même âge » et « les parents ». Il était le premier recours parmi les professionnels de santé. Dans deux études (11,18), on retrouvait un ordre identique (amis, parents, médecin traitant). Il y avait cependant une différence notable : dans notre étude, Internet arrivait en cinquième position, alors que dans ces deux études il était consulté avant le médecin voire les parents. La littérature montre qu’internet tient une place majeure dans l’information à la sexualité. Le baromètre Santé des jeunes 2010 nous dit que « 39% des 15-19 ans ont ainsi utilisé Internet pour des questions de santé au cours de l’année […] 30% ont consulté internet avant une consultation médicale et 17% après » (2). La différence avec notre observation peut s’expliquer par le fait que les études sus-citées étaient orientées vers la question de la sexualité en général et non spécifiquement vers les IST. D’ailleurs un article montrait que seulement « 7% des 15-30 ans qui utilisent internet ont fait des recherche liées au risques de la sexualité» (21). Ce travail au aussi permis de confirmer ce que la littérature montre, c’est-à-dire que les adolescents ont une haute estime de leurs connaissances en matière d’IST (2), alors que cellesci sont souvent insuffisantes .

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Table des matières

PARTIE I : INTRODUCTION
PARTIE II : MATERIEL ET METHODE
A. CHOIX DE LA MÉTHODE
B. MATÉRIEL
1) Bibliographie
2) Elaboration du questionnaire
3) Population étudiée
C. DÉROULEMENT DE L’ENQUÊTE
1) Lieux de l’enquête
2) Période de l’enquête
3) Réalisation de l’enquête
D. SAISIE ET EXPLOITATION DES DONNEES
PARTIE III : RESULTATS
1) Démographie
2) As-tu déjà abordé le sujet des IST en classe ?
3) As-tu déjà abordé le sujet des IST avec tes parents ?
4) Es-tu toujours suivi par le même médecin ? Et suit-il le reste de ta famille ?
5) Tu préfèrerais consulter avec ou sans tes parents ?
6) Qui aborde le sujet ?
7) Tu préfèrerais que ton médecin soit un homme ou une femme ?
8) Tu préfèrerais le même médecin que ta famille ou un autre médecin ?
9) L’âge du médecin
10) Préfèrerais-tu une consultation dédiée aux IST ?
11) La place du secret médical
12) La confiance en son médecin traitant
13) Te sens-tu bien informé sur les IST ?
14) Te sens-tu intéressé par le sujet des IST ?
15) Place du médecin généraliste parmi les autres interlocuteurs potentiels
16) As-tu déjà abordé le sujet des IST avec ton médecin généraliste ?
17) Envisages-tu de parler d’IST avec ton médecin généraliste ?
PARTIE IV : DISCUSSION
1) Qualité et validité
2) Comparaison à la littérature
3) Perspectives
PARTIE V : CONCLUSION

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