La place de la culture dans la phénoménologie de Husserl 

La position husserlienne et la réduction phénoménologique : la mise entre parenthèses des « produits de la civilisation»

Toute saisie suppose déjà une croyance en l’existence

« Avant que s’instaure une activité de connaissance, des objets sont toujours déjà là pour nous, donnés dans une certitude simple ». Il faut entendre que « nous visons [les objets] comme étant et comme étant tels, comme s’imposant à nous avant la connaissance ». Husserl ajoute encore que « préalablement à tout jugement porté vers un objet visé s’impose l’évidence que l’objet est, existe ». Il ne s’agit pas encore de chercher à déterminer si l’objet visé existe bel et bien, et qu’il ne s’agit pas d’une hallucination ou d’une illusion. Husserl montre qu’avant toute entreprise de ce genre, il y a la croyance en l’existence de cet objet. En effet, il montre aussi que avant que s’institue le mouvement propre de la connaissance, nous avons des « objets visés », visés simplement dans la certitude de la croyance ; il en est ainsi jusqu’à ce que le cours ultérieur de l’expérience (…) ébranle cette certitude de la croyance, la modifie en « non ainsi, mais autrement », en fasse une « conjecture », ou bien qu’au contraire ils confirment dans sa certitude l’objet visé qui alors « est réellement tel ou tel », « est vraiment ».Ainsi, toute forme de scepticisme, ou même de détermination scientifique de l’objet, ne peut intervenir qu’ultérieurement, la croyance en l’existence de cet objet s’imposant toujours d’emblée, avant toute possibilité de former un jugement sur la nature de cet objet. Cette croyance s’impose à nous avec une évidence telle que nous ne pouvons jamais la nier, ni même en douter originairement, le scepticisme, encore une fois, ne pouvant intervenir qu’en second.
Autrement dit, l’objet perçu n’est jamais isolé, mais est toujours immergé dans un champ de divers autres objets, dans un « champ d’intuition », qui eux, ne sont pas directement visés, mais apparaissent et participent de l’expérience. Husserl dit encore : Saisir, c’est extraire ; tout ce qui est perçu se détache sur un arrière-plan d’expérience. Tout autour du papier [que je vise] sont des livres, des crayons, un encrier, etc. ; eux aussi sont « perçus » d’une certaine façon, offerts là à la perception, situés dans le « champ d’intuition » ; mais tout le temps que je suis tourné vers le papier je ne suis nullement tourné dans leur direction pour les saisir, pas même à titre secondaire. Ils apparaissent sans être extraits, posés pour eux mêmes.
En d’autres termes, il faut ici insister sur le vocabulaire spécifique qu’emploie Husserl. À chaque fois que l’on vise un objet, que l’on dirige notre attention vers lui, il se dégage d’un arrière-plan constitué d’autres objets. « Saisir », c’est donc extraire cet objet de cet arrière-plan qui l’accompagne toujours, arrière-plan qui, lui, n’est ni visé ni extrait, mais apparaît de manière passive, sans que notre attention ne soit portée vers lui, en tant qu’il entoure, de manière physique, matérielle, empirique, l’objet de notre visée.
Qu’est-ce que cela a à voir avec la croyance en l’existence de l’objet de notre attention qui précède toujours tout jugement ou détermination à son propos ? Cet arrière-plan, ce « champ d’intuition » introduit l’idée que plus encore qu’une croyance en l’existence de l’objet visé, nous avons toujours déjà la croyance en l’existence du monde présent autour de lui. En effet, Husserl montre notamment que « toute activité de connaissance a toujours pour sol universel un monde ; et cela désigne en premier lieu un sol de croyance passive universelle en l’être, qui est présupposé par toute opération singulière de connaissance ». Il s’agit de montrer que plus qu’un alentour, c’est l’existence du monde lui-même qui est toujours présupposée de façon passive, qui s’impose à nous sans que nous y portions le regard. Ce monde, d’ailleurs, « s’impose lui-même comme étant selon une évidence incontestable ». En d’autres termes, lors de la visée, avant tout jugement possible à propos de l’objet appréhendé, avant toute « activité de connaissance » à laquelle Husserl s’intéresse particulièrement à ce niveau d’Expérience et Jugement, nous avons la croyance inébranlable en l’existence de cet objet, mais aussi la croyance indéniable en l’existence du monde lui-même.

Pré-savoir et (in)déterminations de l’objet perçu

Il nous faut désormais insister sur « le fait que toute saisie d’un objet singulier et toute activité ultérieure de connaissance se jouent sur le sol du monde, ce fait indique quelque chose de plus que le caractère qu’a cette activité d’être dirigée vers le domaine de ce qui est pré-donné dans la certitude passive », et sur le fait que « jamais une activité de connaissance portant sur des objets d’expérience individuels ne s’accomplit de telle manière que ceux-ci soient donnés au point de départ comme des substrats indéterminés ». Qu’est-ce que cela signifie ? Il s’agit de montrer que si, avant toute tentative de détermination de l’objet – est-il vraiment ? Est-il tel ou tel ? –, il y a la croyance qu’il est, et qu’il est dans un monde lui aussi existant et se détache d’un champ d’objets environnants, il ne faudrait pas croire que cet objet est émancipé ou privé de toute détermination, c’est-à-dire de toute connaissance préalable à son sujet, même dans le cas où l’on verrait cet objet pour la première fois. Au contraire, Husserl montre que l’on sait toujours déjà quelque chose de cet objet et que ce « pré-savoir », – passif lui aussi, en tant qu’il n’est pas ajouté ou adjoint à l’objet de façon volontaire et consciente, mais détermine ou plutôt pré-détermine l’objet avant la formulation de tout jugement à son propos –, « est indéterminé dans son contenu, ou imparfaitement déterminé, mais il n’est jamais totalement vide ». En d’autres termes, l’objet visé est toujours déjà pourvu d’un « noyau » de significations. L’objet n’est pas parfaitement déterminé, mais n’est pas non plus totalement dépourvu de déterminations. Encore faut-il clarifier la nature de ces pré-déterminations. Jocelyn Benoist commente.
En d’autres termes, ces pré-déterminations consistent en un « fond d’expérience », c’est-à-dire en des données résiduelles issues d’expériences passées. Ainsi, « toute expérience a son horizon propre », horizon « toujours co-présent au départ » . Il s’agit de dire, comme le montre encore J.Benoist, que « la chose telle qu’elle est “reçue” n’est jamais nue », comme nous l’avons déjà vu. Plus que cela, l’« horizon » désigne une structure de l’apparaître « dans la mesure exacte où apparaître, c’est apparaître sous un certain horizon, dans la dé-limitation de la visée qu’il circonscrit, comme articulation du sens préalable de la visée et constitutive de la visée même » . C’est sur ce dernier point qu’il nous faut insister : cet horizon, ce fond d’expérience déjà constitué qui accompagne toute visée et toute saisie d’un objet conditionne d’emblée notre façon de l’appréhender. En le prédéterminant de la sorte, c’est cet horizon qui donne sens à l’objet appréhendé.

Horizons interne et externe, pré-donation et co-donation

Cet horizon et ses significations, inséparables de l’expérience, qui l’encadrent et lui donnent sens avant toute opération de connaissance, ne se situent pas, cependant, uniquement « en amont », avant la visée de cet objet, comme s’ils ne faisaient que le précéder pour en structurer la saisie, mais anticipent aussi les déterminations qu’il sera possible de lui attribuer une fois visé et saisi. En effet, Husserl montre notamment que Il existe donc un horizon interne, tel que nous l’avons déjà décrit, un fond d’expérience, accumulé au cours de la vie du sujet, qui fait partie intégrante de l’expérience et structure l’apparaître de l’objet, mais aussi un horizon externe qui conditionne les déterminations futures qui pourraient lui être adjointes. Sans doute n’est-il pas inutile d’insister sur l’idée que cet horizon externe est une structure de l’intentionnalité elle-même – que nous définirons ici de façon commode, quoique simplifiée, par la configuration de la conscience « orientée-vers » ou « dirigée-vers » un objet –, une intentionnalité « par anticipation », visant déjà les déterminations possibles, « en puissance », l’objet de connaissance étant déjà là dans l’attente de « devenir entéléchie ». Plus que l’objet visé lui-même, l’horizon externe est constitué – du moins en partie – par les objets environnants, par le champ d’intuition « co-donné » en même temps, qui entourent l’objet de notre attention, celle-ci pouvant toujours s’y porter.
Ainsi, J.Benoist montre que dans la structure d’horizon, « co-donation » et « pré-donation » s’enchevêtrent inextricablement pour constituer les conditions de possibilité du sens en tant que celui-ci n’est jamais isolable. Toute approche d’une chose met en jeu le tissu des choses et les possibilités de sens que j’y ai acquises.

Le monde-ambiant

Les déterminations du monde-ambiant

Le monde-ambiant (Lebens-unwelt) est un thème récurrent de La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale (1934-1937), au cours de laquelle intervient également la « science de l’esprit », et cela pour ainsi dire au premier plan.
Cette science de l’esprit s’intéresse au monde, comme le montre Husserl, « dans le “comment subjectif”des personnalités ». En d’autres termes, cette science ne s’intéresse au monde que tel qu’il apparaît aux individus, non en tant que tel : une telle tâche revient bien plutôt aux sciences de la nature. Il convient de noter que « ce monde ne se désagrège pas dans de simples “aspects” subjectifs individuels et constamment changeants dans le temps. Dans de tels aspects au contraire se constitue pour la communauté historique un monde-ambiant commun ». Il s’agit donc de dire que la diversité des subjectivités n’abolit pas ce mondeambiant comme si, finalement, chaque individu – subjectif – entretenait son propre monde. Si chacun, de par son histoire et sa vie personnelles, entretient un rapport particulier au monde qui l’entoure et qu’il appréhende, c’est bien la multiplicité des subjectivités qui constitue le monde-ambiant de la communauté. Pour le dire autrement, si chaque subjectivité particulière possède sa propre histoire, et par conséquent, un horizon qui lui est propre, cela n’empêche pas que la diversité des personnalités qui partagent un même espace et une histoire commune, et qui forment une même communauté, constitue, de par leurs échanges et leur histoire commune, un monde-ambiant qui est le même pour tous. C’est ce monde-ambiant qui « vaut pour elles [c’est-à-dire les multiples personnalités] et les détermine ». En ce sens, nous pouvons dire que c’est le monde-ambiant qui détermine l’horizon, aussi bien interne qu’externe, sous lequel apparaissent les objets visées : l’horizon interne parce que – comme nous l’avons déjà vu – l’objet tel qu’il nous apparaît est toujours-déjà pré-donné, pré-déterminé par un savoir déposé par ceux qui les ont déterminés avant d’une manière spécifique, tout objet, ainsi, dans notre communauté occidentale, apparaissant d’emblée comme étant scientifiquement déterminable, ce qui revient à dire que l’horizon interne est tributaire du monde-ambiant pris dans son historicité ; l’horizon externe parce que cet objet, comme nous l’avons également déjà mentionné, n’apparaît jamais seul, même s’il est le seul objet visé, mais se détache toujours d’un champ, d’une constellation d’objets différents eux aussi différemment appréhendés en fonction des déterminations qui y ont été déposées antérieurement, et entretiennent avec eux des rapports tout aussi déterminés. Toute communauté, historique et culturelle, entretient ainsi des rapports particuliers avec le monde-ambiant dans lequel elle évolue, monde-ambiant qui pour elle est le monde.
S’il est suffisant de dire que la phénoménologie est la discipline qui étudie les phénomènes tels qu’ils apparaissent à une conscience, ne faut-il pas dès lors envisager des phénoménologies différentes en fonction des époques et des cultures, qui appréhendent différemment les objets visés en fonction d’un horizon défini par, ou dépendant d’un mondeambiant propre à chaque communauté historique et culturelle ?

Intersubjectivité et liaisons égologiques

Les personnes du monde-ambiant occupent dans ce dernier une place particulière. Mais il y a une différence qui joue ici un rôle important, et c’est une différence thématique : ou bien les personnes (les autres personnes, mais moi-même aussi bien, éventuellement) sont prises comme des objets du monde-ambiant déjà donné d’avance à l’ego pratique – au sens le plus vaste de la pratique – c’est-à-dire à l’ego concret, qui vit dans le monde de façon éveillée (…) ou bien, du côté opposé, les autres sujets sont pris comme des co-sujets, avec lesquels on partage quelque chose de commun dans l’expérience, dans la pensée et dans l’action, avec lesquels on possède en commun la pratique du monde-ambiant, bien que chacun ait, à son tour, sa praxis propre.
Ces réflexions nous mènent vers une issue presque inévitable : l’étude du monde-ambiant nous mène à la question de l’apparaître de l’Autre, qui jusqu’à présent n’avait été mentionné que dans son historicité mais à peine effleuré en tant que constitutif de l’horizon culturel, sous lequel apparaissent les objets aux membres d’une communauté donnée. Il nous faut donc dès à présent insister sur l’intersubjectivité, thème récurrent dans la phénoménologie husserlienne.
S’il est possible de considérer l’Autre comme un simple objet, comme le verrait le « sujet pulsionnel » décrit par Husserl au cours de son manuscrit intitulé Esprit commun, dépourvu d’empathie, c’est-à-dire incapable de reconnaître dans l’Autre un autre « Moi », et le considérant uniquement comme moyen d’assouvir ses propres désirs, il est également possible – dans notre cas il le fauttout à fait – de reconnaître l’Autre comme un second « Moi », et plus encore, de s’y unir pour former un « Nous ». En effet, Husserl montre que la communauté des personnes (…) est quelque chose de particulier. Le premier pas, c’est d’être explicitement unis-dans-la-vie avec l’autre, dans une compréhension intuitive de son expérience, de sa situation vitale, de son action, etc. De là on passe au partage exprès et à la parole, et c’est déjà une relation égologique. Toute communication quelle qu’elle soit suppose naturellement déjà le caractère commun du monde-ambiant, lequel est produit dans la mesure où, d’une façon générale, nous sommes les uns pour les autres des personnes.
Il s’agit, ainsi, d’insister sur le rôle de l’Autre dans la constitution du monde-ambiant, dans la mesure où les relations « égologiques », d’un « Moi » à un autre « Moi » – à un « Tu » ou à un « Vous » – participent à la construction de ce monde commun partagé. L’autre, dans le mondeambiant, n’est donc pas seulement un objet qui a des déterminations particulières, qui varient de monde-ambiant à monde-ambiant. S’il est vrai que l’individu est un objet différemment envisagé en fonction des différentes cultures, ce qui nous intéresse ici, c’est que l’individu, comme « personne », à qui j’attribue une subjectivité comparable à la mienne, avec lequel je peux communiquer, auquel je peux manifester ma volonté et recevoir la sienne ; avec cet individu, dans nos relations « égologiques », dont la manifestation minimale semble être la communication, dans nos relations intersubjectives se constituent la culture commune et les déterminations partagées que l’on attribue par la suite aux objets du monde, dans nos relations intersubjectives se constituent l’horizon culturel et le monde-ambiant dans lequel nous vivons.
Mais une chose est dire que le monde-ambiant requiert nécessairement l’intersubjectivité, une autre est dire qu’il existe une intersubjectivité spécifique à chaque monde-ambiant. En montrant que la reconnaissance de l’Autre comme un autre « Moi », la parole et les autres genres de relations égologiques, sont essentielles à la formation du monde-ambiant, Husserl ne « particularise » aucun monde-ambiant mais énonce pour ainsi dire la structure générale de la constitution de tout monde-ambiant. Il s’agit dès lors de dire que notre embryon de phénoménologie fondée sur l’apparaître du monde à travers un certain horizon ne peut qu’être émancipé du contenu latent de cet horizon : ce qui intéresse le phénoménologue n’est pas la différence dans la façon dont un Chinois est affecté par un objet par rapport à la façon dont un Papou est affecté par le même objet en fonction de leurs horizons respectifs, mais bien la structure même de l’apparaître, déterminée par un horizon culturel dépendant d’un mondeambiant constitué par l’histoire et la culture d’une communauté intersubjective, sans s’intéresser aux contenus particuliers de chacun de ces horizons.

Le monde objectif

Le problème de l’attitude personnelle

Il semble important de noter désormais que le fait que chaque communauté, chaque multiplicité humaine partage un monde-ambiant commun qui lui est propre « n’exclut pas que [ces] communautés de personnes (…) ne puissent, en entrant en relation les uns avec les autres, ou en s’y trouvant déjà, posséder ou acquérir aussi un monde-ambiant commun qui rassemble cette diversité ». Il s’agit dès lors de dire que ces communautés ne sont pas des totalités fermées sur elles-mêmes, mais peuvent se rencontrer, puis constituer et partager un monde-ambiant commun, ou du moins en partie commun. Husserl pourrait ici – bien que cela ne soit pas assuré – faire référence aux philosophes du monde arabe, comme Avicenne et Averroès qui partageaient une pratique – la philosophie –, qui cherchaient la vérité pour ellemême, pratique caractéristique d’une communauté occidentale héritière des traditions grecques. Faut-il alors envisager que toutes les cultures puissent se rencontrer simultanément pour constituer par leurs échanges intersubjectifs un seul monde-ambiant? Si cette question peut être posée, elle ne semble pas servir la phénoménologie que Husserl tente de mettre en place. Bien plutôt, le phénoménologue continue : « cela n’exclut pas, donc, qu’elles [c’est-àdire les communautés de personnes] se sachent rattachées, par ce commerce, au même monde “réel”, trouvant seulement que chacune saisit le monde fort différemment et lui donne une tout autre effectivité ». Husserl exprime donc ici ce qui était sous-jacent à toutes nos réflexions, sans que nous le mentionnions distinctement : chaque culture appréhende différemment le monde, monde qui alors était considéré comme « monde-ambiant » possédant son horizon propre, mais c’est bien, à travers cet horizon, à chaque fois le même monde objectif, qui est visé. Husserl défend donc l’idée d’un monde objectif, identique pour tous mais différemment saisi. Ainsi, Husserl montre encore que le monde-ambiant est quelque chose de changeant, que dans la vie nous passons de monde-ambiant à monde-ambiant, changement dans lequel, cependant, c’est continuellement le même monde qui est éprouvé, tandis que le monde-ambiant devient le mode d’apparition de ce monde.
Il faut ici remarquer un aspect que nous avions – encore une fois – jusqu’à présent occulté ou du moins que nous n’avions fait que suggérer : un « monde-ambiant » n’est pas seulement constitué par une communauté historique et culturelle, n’est pas seulement le fait de la multiplicité entière que composent « les Allemands », « les Grecs », plus largement « les Occidentaux », ou « les Chinois », ou « les Asiatiques ». Chaque communauté, aussi petite et limitée en nombre soit-elle constitue un monde-ambiant qui lui est propre à son niveau : ainsi, une famille a son propre monde-ambiant, une ville possède le sien, une région, un pays puis la civilisation toute entière – niveau le plus élevé – bâtit son propre monde-ambiant, de sorte que sans cesse, l’individu, la personne, change de monde-ambiant. Mais ce qui alors, est modifié, c’est non plus le monde lui-même, mais pour ainsi dire sa « vision du monde ». Ainsi, Husserl ajoute que le monde donné d’avance en chaque personne, le monde qui vaut et est posé comme effectif par toute culture humaine en toute époque et pour chaque homme individuel dans ce qui fait chaque fois sa praxis, ce monde est justement monde chaque fois dans ses “modes d’apparition”, dans les aperceptions, ouvert à d’autres modifications qui en changeront la forme, qui changeront éventuellement l’être en non-être (illusions), modifications à travers lesquelles, bien que par des connections, se produit malgré tout l’unité d’un seul monde qui continue à valoir comme étant, ouvert toujours à d’autres déterminations.

L’être purement intentionnel du monde

Rappelons, afin de ne pas perdre le fil directeur de notre étude, la question initiale que nous nous étions posée : une phénoménologie culturellement marquée est-elle possible ? Ou encore : y a-t-il une place pour une phénoménologie culturellement marquée dans la philosophie husserlienne ? La direction, l’issue, que poursuit notre étude semble désormais être claire : si le monde peut recevoir des déterminations diverses en fonction de l’horizon sous lequel il apparaît, en fonction de l’attitude avec laquelle il est appréhendé, c’est toujours le même monde qui est visé, et cela de la même manière, selon la même structure, peu importent les particularités dirons-nous « sémantiques » qui lui sont adjointes au cours de la saisie. Ainsi, Husserl montre que ce monde de la vie [c’est-à-dire le monde dans lequel vit l’individu], dans toutes les relativités qui sont les siennes, possède malgré tout sa structure générale. Cette structure générale, à laquelle tout relativement étant est liée, n’est pas elle-même relative. Nous pouvons la considérer dans sa généralité et, avec la prudence qui s’impose, constater d’entrée de jeu son accessibilité une fois pour toutes et pour tout le monde.

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Table des matières

Introduction
Première partie : La position husserlienne et la réduction phénoménologique : la mise entre parenthèses des produits de la civilisation
Chapitre I : La place de la culture dans la phénoménologie de Husserl 
§1 : La question de l’horizon
1.1) Toute saisie suppose déjà une croyance en l’existence
1.2) Pré-savoir et (in)déterminations de l’objet perçu
1.3) Horizons interne et externe, pré-donation et co-donation
1.4) L’horizon culturel
§2 : Le monde-ambiant
2.1) Les déterminations du monde-ambiant
2.2) Intersubjectivité et liaisons égologiques
Chapitre II : La mise hors circuit de l’attitude naturelle 
§3 : Le monde objectif
3.1) Le problème de l’attitude personnelle
3.2) L’être purement intentionnel du monde
§4 : L’épochèet la réduction phénoménologique : la conscience pure comme champ de la phénoménologie
4.1) La mise entre parenthèses de l’attitude naturelle
4.2) La conscience pure et l’attitude transcendantale
Deuxième partie 
La réduction phénoménologique et la question des traditions
Chapitre III  :Les objections à la théorie de la réduction : la tentative de révocation de la réduction pour revenir aux produits de la civilisation 
§5 : Les objections à la théorie de la réduction dans le corpus husserlien et leurs solutions
5.1) L’impasse solipsiste
5.2) La disparition du sujet dans l’épochè
5.3) Abstention de la croyance en des êtres singuliers et abstention de la croyance en le monde dans sa globalité
5.4) L’absence de motivation de la réduction phénoménologique
§6 : Merleau-Ponty et l’impossibilité de la réduction complète
Chapitre IV :Attitude naturelle et attitude transcendantale ne sont pas contradictoires 
§7 : « Je n’ai (…) pas besoin d’invalider de quelque façon l’épochè »
7.1) Automne 1926 : les prémisses du refus d’une antinomie entre attitude naturelle et attitude transcendantale
7.2) Le « moi qui met en œuvre l’attitude naturelle est le moi transcendantal »
7.3) La vie transcendantale n’invalide pas la vie naturelle
7.4) La restitution des traditions
Troisième partie :Yoshihiro Nitta et la réduction transcendantale
Chapitre V :L’épochè comme méthodologie philosophique 
§8 : L’épochè comme point de départ de la réflexion phénoménologique
§9 : Attitude naturelle et naïveté :
9.1) L’objet visé comme objet de dévotion : la métaphore religieuse
9.2) L’attitude naturelle comme concept méthodologique
§10 : Le double-sens de l’ego
§11 : Attitude naturelle et évidence
11.1) Évidence et naïveté
11.2) La « thèse générale » et l’« intérêt du monde »
§12 : L’évolution du concept de réduction
12.1) La transformation de l’épochè
12.2) Les indices noématiques
12.3) La vie de conscience
12.4) L’épochècomme conversion religieuse
Conclusion

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