La place de la création dans l’Éducation aux Médias et à l’Information

Développement de l’éducation aux médias et à l’information

Dans son ouvrage Éducation et médias : la créativité à l’ère du numérique Laurence Corroy, maître de conférences à l’Université Paris III spécialiste des relations qu’entretiennent les jeunes avec les médias, évoque l’évolution de l’Éducation aux Médias. Dans un premier temps, elle constate qu’avec le développement des médias de masse au XIXème siècle apparaît la nécessité d’éduquer les jeunes publics aux médias. Des théories se développent et vont dans ce sens notamment la théorie des effets directs des médias. Le public a en général une forte suspicion envers ces derniers. En 1927, la première approche mécaniste des médias, imagine que les médias peuvent avoir une influence sur les jeunes telle une drogue. Ainsi, l’Éducation aux Médias de l’époque se veut protectionniste car il s’agit de « préserver les jeunes publics de l’influence pernicieuse des journaux. »6. On parle même de panique médiatique à cause de la violence des images diffusées, de leur caractère pornographique, de la publicité. Cette vision se perpétue plus tard avec l’apparition des jeux vidéo en ligne. On cherche à protéger à tout prix les mineurs pour leur bien-être et pour leur santé mentale et physique. Cette vision influence l’Éducation aux Médias pendant toute la première moitié du XXème siècle. L’école a aussi un rôle dans cette mission notamment car elle était « considérée comme un sanctuaire, [et] se devait de constituer un rempart »7 face aux influences néfastes des médias. Mais les médias entrent difficilement à l’école, les enseignants ne se reconnaissant pas en eux et ne les cautionnant pas. Ce discours protectionniste est également soutenu pendant très longtemps par les politiques publiques et l’opinion générale. On constate même de nos jours que cette vision est toujours présente dans les spots télévisés contre la violence des images issus de la campagne de prévention du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) qui a pour slogans « Face aux écrans, soyons vigilants » ou « Les images violentes, il faut les éviter, sinon il faut en parler. ». Dans cette campagne, on note que la responsabilité des parents dans l’Éducation aux Médias et à l’Information est mise en avant car c’est sous leur surveillance que les enfants devraient regarder la télévision étant trop naïfs pour juger par eux-mêmes si le programme est adapté pour eux ou non.
Dans un second temps, Laurence Corroy aborde d’autres théories différentes du protectionnisme. En effet, au fil du temps, on considère que les enfants ne sont pas suffisamment pris en compte par l’approche protectionniste. En 1996, Jacques Piette, enseignant-chercheur à l’université de Sherbrooke spécialiste de l’Éducation aux médias, écrit « ces programmes considèrent les jeunes comme des masses d’individus atomisés qui réagissent de façon homogène aux messages des médias. »8. Cela signifie qu’à aucun moment on ne considère que le jeune public puisse avoir un recul face aux médias et que les médias seuls ne peuvent pas influencer les jeunes. L’auteure de Éducation et médias : la créativité à l’ère du numérique souligne aussi que des études menées par Elihu Katz et Paul Lazrsfeld, deux sociologues américains, dans les années 1950 sur l’impact de la communication de masse concluaient déjà sur le fait que celle-ci ne pouvait influencer seule les opinions, les attitudes et les comportements. Les effets des médias sont limités par les communications interpersonnelles (familles, amis, connaissances, école, etc…). Suite à cela se développe une approche critique des médias. L’éducation aux médias s’oriente vers un questionnement de la valeur des médias alors que précédemment on avait tendance à occulter cette approche plus compréhensive de leur fonctionnement. Au fur et à mesure, des programmes d’éducation critique à la télévision se développent en lien avec l’analyse critique du cinéma. Dans de nombreux pays, dans les années 1970-1980, on commence à réfléchir à un programme pour l’enseignement de l’Éducation aux Médias et à l’Information. En France et en Suisse à cette période, l’étude des images et des codes culturels présents dans les messages médiatiques sont au centre de ce qui est proposé en classe. Finalement, avec le mouvement des Cultural Studies, l’étude des contextes de production des messages médiatiques s’accentue et un rôle central est donné à l’interprétation. Les médias ne sont plus considérés comme des agents de contamination culturelle mais comme des moyens d’expression populaire. On ne fait plus de différence entre la « bonne » et la « mauvaise » culture et on pense l’objet culturel sous l’angle du pouvoir. Ce champ de réflexion veut étudier l’objet culturel même mais surtout son influence sur les personnes qui l’ont reçu et potentiellement intégré. On s’intéresse à l’usage public et non au bon usage. Selon Len Masterman, professeur à l’université de Nottingham spécialiste de l’enseignement des médias à l’école, note que l’Éducation aux Médias doit être basée sur le principe fondamental de la représentation. C’est-à-dire qu’en étudiant les médias il faut prendre en compte que ceux-ci ne présentent pas le monde mais qu’ils le représentent. Il ne faut donc pas oublier la non-transparence des médias et ne pas confondre reflet et représentation. On doit donc concevoir l’Éducation aux Médias comme ayant pour finalité l’exercice d’une pensée critique. L’école doit prendre cela en compte pour adapter ses enseignements.

L’Éducation aux Médias et à l’Information à l’école un enjeu français, européen et mondial

En France, c’est dans les années 1980 avec la réforme de René Haby qui autorise la presse d’information comme support pédagogique que l’école s’engage dans l’Éducation aux Médias et à l’Information. On ne se contente plus de prévenir l’usage des médias. Un rapport présenté à la demande de l’Éducation Nationale, par deux spécialistes dont Jacques Gonnet, préconise l’introduction de l’analyse des médias dans les programmes des établissements du premier et du second degré. C’est à cette époque, en 1983, qu’est créé le CLEMI (centre liaison d’enseignement des moyens d’information) qui fut dirigé dans un premier temps par Jacques Gonnet, un des rédacteurs du précédent rapport. Ce centre a pour mission « de promouvoir, notamment par des actions de formation, l’utilisation pluraliste des moyens d’information dans l’enseignement afin de favoriser une meilleure compréhension des élèves du monde qui les entoure tout en développant leur sens critiques. ». L’objectif du CLEMI est de mettre à disposition des spécialistes qui pourront :
– Accompagner les enseignants à la pratique pédagogique de l’éducation aux médias
– Organiser des formations spécifiques
– Faciliter la prise de contact avec des professionnels des médias
– Sensibiliser et accompagner l’expression médiatique des élèves
Ainsi, le CLEMI aide les enseignants, leur offre des ressources et crée même des événements pour donner des occasions particulières aux enseignants pour aborder le sujet des médias. De ce fait, en 1989, se crée la semaine de la presse et des médias dans les écoles.
L’Éducation aux Médias et à l’Information ne se développe pas qu’en France. La déclaration de Grünwald émise par l’UNESCO (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) en 1982 souligne ce besoin d’éduquer aux médias qui passe nécessairement par l’école dans le but de former des adultes capables d’un recul critique.
Lors de ce sommet mondial, l’évolution des médias depuis la déclaration de Grünwald est mise en avant, ce qui implique le besoin d’ajuster les objectifs de l’éducation aux médias. Sont définis alors trois objectifs qui permettent d’intégrer les TICs (technologies de l’information et de la communication) :
– Permettre l’accès à tous les types de médias, outils potentiels de compréhension de la société et de participation à la vie démocratique
– Former à l’analyse critique des messages, tant d’information que de divertissement
– Favoriser la production, la créativité et l’interactivité dans les différents registres de la communication médiatique
L’accent est mis sur la citoyenneté, l’Éducation aux Médias et à l’Information contribuant à l’émancipation et à la responsabilisation des individus dans la société.
C’est dans la continuité de ces échanges que l’Europe place en 2008 l’Éducation aux Médias comme neuvième compétence clé. Il s’agit, pour l’Europe, des connaissances, capacités et aptitudes qui fondent l’épanouissement personnel, l’inclusion sociale, la citoyenneté active et l’emploi. Elles sont à développer en milieu scolaire mais aussi tout au long de la vie. Ce sont des compétences « fondamentales pour chaque personne vivant dans une société basée sur la connaissance. ». En 2009, la commission européenne définit l’Éducation aux Médias comme « la capacité à accéder aux médias, à comprendre, et apprécier, avec un sens critique, les différents aspects des médias et de leurs contenus. L’éducation aux médias comprend également la capacité à communiquer dans divers contextes. […] Elle vise à sensibiliser davantage les gens aux diverses formes que peuvent prendre les messages médiatiques dans leur vie quotidienne. Par messages médiatiques, on entend les programmes, films, images, textes, sons et sites internet qui sont fournis par divers moyens de communication. »12. L’Europe adopte ainsi progressivement les « 7C » bases de l’Éducation aux Médias et à l’Information (et non plus seulement aux médias) : compréhension, critique, créativité, consommation, communication interculturelle, citoyenneté, conflits (cognitifs).
Lors de ce sommet mondial, l’évolution des médias depuis la déclaration de Grünwald est mise en avant, ce qui implique le besoin d’ajuster les objectifs de l’éducation aux médias. Sont définis alors trois objectifs qui permettent d’intégrer les TICs (technologies de l’information et de la communication) :
– Permettre l’accès à tous les types de médias, outils potentiels de compréhension de la société et de participation à la vie démocratique
– Former à l’analyse critique des messages, tant d’information que de divertissement
– Favoriser la production, la créativité et l’interactivité dans les différents registres de la communication médiatique
L’accent est mis sur la citoyenneté, l’Éducation aux Médias et à l’Information contribuant à l’émancipation et à la responsabilisation des individus dans la société.
C’est dans la continuité de ces échanges que l’Europe place en 2008 l’Éducation aux Médias comme neuvième compétence clé. Il s’agit, pour l’Europe, des connaissances, capacités et aptitudes qui fondent l’épanouissement personnel, l’inclusion sociale, la citoyenneté active et l’emploi. Elles sont à développer en milieu scolaire mais aussi tout au long de la vie. Ce sont des compétences « fondamentales pour chaque personne vivant dans une société basée sur la connaissance. ». En 2009, la commission européenne définit l’Éducation aux Médias comme « la capacité à accéder aux médias, à comprendre, et apprécier, avec un sens critique, les différents aspects des médias et de leurs contenus. L’éducation aux médias comprend également la capacité à communiquer dans divers contextes. […] Elle vise à sensibiliser davantage les gens aux diverses formes que peuvent prendre les messages médiatiques dans leur vie quotidienne. Par messages médiatiques, on entend les programmes, films, images, textes, sons et sites internet qui sont fournis par divers moyens de communication. »12. L’Europe adopte ainsi progressivement les « 7C » bases de l’Éducation aux Médias et à l’Information (et non plus seulement aux médias) : compréhension, critique, créativité, consommation, communication interculturelle, citoyenneté, conflits (cognitifs).

La place de la création dans l’Éducation aux Médias et à l’Information

Comme nous l’avons vu précédemment, pendant longtemps l’Éducation aux Médias consistait en une prévention contre les influences néfastes que ces derniers pouvaient exercer sur les jeunes générations. La production n’a été que peu mise en avant pour favoriser les apprentissages. Comme le souligne Laurence Corroy, beaucoup de recherches ont été menées mais la créativité n’a jamais été mise en lien avec l’Éducation aux Médias et à l’Information alors que des problématiques la sous-tendent21. Cette vision des choses a évolué tout comme les pratiques pédagogiques. L’auteure souligne que désormais « dans tous les textes internationaux, si l’éducation aux médias comprend le développement d’une compétence critique face aux médias, elle intègre pour ce faire une dimension créative et communicationnelle que seule la pratique des médias rend possible.22 ». On retrouve, en effet, cette idée dans le programme de formation pour les enseignants publié par l’UNESCO. L’idée que les élèves apprennent mieux par la pratique est formulée. En effet, « les élèves doivent être encouragés à envisager l’apprentissage à un niveau plus profond et plus significatif. La production de contenu médiatique et informationnel offre aux étudiants l’occasion de se plonger dans l’apprentissage par la découverte et la pratique. Par la production de textes médiatiques (ex. : audio, vidéo et/ou imprimé), les élèves peuvent découvrir la créativité et exprimer leurs propres opinions, idées et perspectives.23 ». Chaque apprenant, de l’élémentaire à l’université, peut produire à son niveau des médias et en comprendre le fonctionnement dans le but de les donner à voir.
La créativité est donc une compétence transversale de l’Éducation aux Médias et à l’Information. Laurence Corroy le met en avant dans le schéma qu’elle propose dans son ouvrage Éducation et médias : la créativité à l’ère du numérique :

La pratique plastique comme moyen de construire des savoirs et de déconstruire des pseudo-savoirs et représentations

Les recherches en sciences de l’éducation démontrent l’utilité de la pratique et de la manipulation pour un apprentissage plus efficient des savoirs. On retrouve cette idée dans les différentes pédagogies actives. Elles favorisent l’apprentissage par l’expérience en impliquant l’élève dans des situations fictives ou non qui lui permettent d’utiliser ses compétences et de les faire évoluer en fonction des besoins. Ce type de pédagogie a été particulièrement mis en avant dans un premier temps pour l’apprentissage des sciences, notamment par la fondation « la main à la pâte » qui met en avant la démarche scientifique dont une partie consiste en l’expérimentation ; tout comme le propose la théorie socio-constructiviste. L’enjeu pour les enseignants est de donner du sens aux apprentissages pour que l’apprenant soit au centre des apprentissages, qu’il n’apprenne pas uniquement pour acquérir des savoirs mais pour résoudre des problèmes. Pour cela l’enseignant se fonde sur ce que l’élève sait ou sur ce qu’il pense savoir (pseudo savoirs et représentations). Il faut que les savoirs soient rattachés à un contexte d’apprentissage et qu’ils permettent à l’élève de réaliser quelque chose. C’est le principe de John Dewey avec la théorie du learning by doing. Cette théorie s’étend à toutes les disciplines et non pas seulement aux sciences contrairement au dispositif « la main à la pâte ». La démarche de Dewey a pour but de donner du sens à l’école. Lire, écrire et compter sont des compétences qui ne disparaissent pas dans la pédagogie de Dewey mais elles sont intégrées dans des projets qui vont poser des problèmes aux élèves et qui vont les pousser à trouver les solutions. Dans « l’école laboratoire » de Dewey ouverte en 1896, les élèves sont mis en action autour de projets qui reprennent les compétences des métiers anciens nécessitant un véritable savoir-faire et des compétences d’activités quotidiennes : cuisine, couture, petite menuiserie, bricolage. Pour chaque projet des connaissances sont nécessaires : elles sont techniques, physiques, biologiques, culturelles, anthropologiques. C’est la conduite du projet qui motive la quête de savoirs.
Cette démarche est très peu exploitée telle que Dewey le faisait dans son école mais les documents d’accompagnement EDUSCOL tout comme les programmes d’enseignement mettent en avant l’intérêt de la démarche de projet en général. La formation des enseignants du premier degré souligne l’intérêt de la pédagogie de projet depuis plusieurs dizaines d’années, les recherches montrant que l’enseignement est plus concret et fait du lien entre les différentes disciplines. Catherine Reverdy, chargée d’étude et de recherche à l’ENS (École Normale Supérieure) de Lyon développe les intérêts de la pédagogie de projet dans son article « L’apprentissage par projet : de la recherche » paru dans le numéro 186 de la revue Technologie. Selon ses recherches, le projet serait une source de motivation pour les élèves. Ils seraient donc dans un contexte dans lequel ils ont envie d’apprendre. De plus, comme le soulignait Philippe Perrenoud, co-animateur du Laboratoire de recherche sur l’innovation en formation et en éducation, en citant Vygotski « le projet n’est pas une fin en soi, c’est un détour pour confronter les élèves à des obstacles et provoquer des situations d’apprentissage ». Il faut comprendre que pour l’enseignant la tâche finale du projet est un prétexte pour développer les compétences qui permettent de l’atteindre. Car, en effet, comme le précise également Catherine Reverdy dans son article, les élèves vont dans un premier temps s’appuyer sur leurs représentations initiales pour construire leur projet puis au fur et à mesure du projet vont déconstruire ce pseudo-savoir en corrigeant leurs erreurs26. Les étapes du projet vont permettre à l’élève de construire un nouveau savoir qui aura été acquis en contexte et qui sera donc vérifié puisqu’il permet la réalisation du projet.
La pédagogie de projet est favorisée dans l’enseignement des arts plastiques et visuels car elle ouvre à des perspectives interdisciplinaires. Le projet est d’ailleurs une compétence à développer en arts plastiques et visuels en cycle 2 et cycle 3 : Mettre en oeuvre un projet artistique. Lorsque l’élève a l’intention de réaliser quelque chose de personnel on entre déjà dans la démarche de projet. « Même dans ses formes les plus modestes, le projet permet, dès le cycle 2, de confronter les élèves aux conditions de la réalisation plastique, individuelle ou collective, favorisant la motivation, les intentions, les initiatives. ». Comme nous l’avons vu précédemment la pédagogie de projet permet de déconstruire des pseudo-savoirs en en construisant des nouveaux. Ainsi, la pédagogie de projet étant applicable aux arts plastiques et visuels, ces derniers peuvent dans ce cadre déconstruire des représentations et en construire de nouvelles par la réalisation d’un projet artistique, soit, par la pratique plastique.

Images complexes

Si l’analyse de l’image est une composante de l’Éducation aux Médias et à l’Information c’est bien parce que l’image n’est pas si évidente à saisir qu’il y paraît. En effet, tout comme pour les autres médias, l’image ne présente pas le monde mais le représente. Il faut prendre en compte cette notion lorsqu’on les fréquente et tente de les comprendre. Il est donc essentiel de former les élèves aux codes de l’image, qu’il s’agisse de ceux du cinéma, de la vidéo, de la photographie et du photomontage, de l’image publicitaire ou de la peinture. Comme le souligne le programme de formation pour les enseignants en Éducation aux Médias et à l’Information de l’UNESCO, il faut être conscient que la création d’images est soumise à des contraintes et qu’elles s’adressent en général à un public précis : « Reporters, auteurs, vidéastes, annonceurs, publicitaires, éditeurs et cinéastes utilisent des images, des messages audios et écrits pour transmettre une information sur un événement, une histoire ou un sujet. Ils sont habituellement confrontés à des contraintes de temps, d’espace, de ressources et à d’autres contraintes éditoriales pour travailler ces récits et les présenter au public. Aussi, selon l’histoire racontée ou le message véhiculé, il est souvent nécessaire de « re-présenter » des situations ou des événements en se référant à des caractéristiques comme l’origine, le genre, la sexualité, l’âge ou la classe sociale. »28. Chaque média, et donc aussi les images, implique une construction, une mise en forme, de l’information avant sa transmission. On retrouve cette idée également chez Léon Battista Alberti. Selon lui, la peinture est une « fenêtre ouverte par laquelle on [peut] regarder l’histoire29 ». L’histoire correspond ici à l’objet de la peinture qui résulte d’une invention et d’une composition achevée. La peinture correspond donc pour Alberti à l’art d’agencer des éléments en leur donnant du sens. La peinture est l’art de composer des images et non celui de donner à voir le monde. Des choix sont faits par les auteurs ce qui implique une complexité dans la lecture des médias et donc nécessairement dans la lecture des images.
Je me suis intéressée ici particulièrement aux images dans ce qu’elles ont de complexe, c’est-à-dire des images dont le sens peut être subtil à saisir car il faut croiser les connaissances, interpréter pour comprendre le message que l’artiste a voulu véhiculer à travers son oeuvre. Les images peuvent aussi être complexes dans la façon de les réaliser. En effet, une oeuvre d’apparence simple pour un oeil non initié peut avoir été réalisée grâce à des technologies de pointe. Cette complexité dans les images n’est pas nouvelle, il est possible de trouver de nombreuses traces de ces procédés dès la Renaissance, et de nos jours ces interprétations sont importantes dans la culture de masse que fréquente les élèves.

Des images complexes à la Renaissance

Des images complexes dans la technique

Dès l’Antiquité, on cherche à représenter au mieux la réalité. Pendant la Renaissance, on redécouvre l’Antiquité et les découvertes scientifiques de l’époque que l’on met au service de l’art. Les représentations s’éloignent progressivement de celles de l’art gothique dans lesquelles l’aspect symbolique domine sur la représentation de la réalité. On note qu’à cette époque la perspective est visuelle, les artistes tentent de représenter le monde tel qu’ils le voient « à l’oeil nu » pour en représenter la profondeur, ils rétrécissent les personnages les plus éloignés. On peut le voir sur le tableau de Gentille Da Fabriano, la suite de personnages venus voir le Christ est représentée de plus en plus petite vers le fond de l’oeuvre. On constate que la technique a évolué dans les oeuvres de la Renaissance, plus tard au XVème siècle dans la fresque de Raphaël qui utilise des lignes de fuite et donc une perspective linéaire.
De nombreuses oeuvres de la Renaissance sont arrivées jusqu’à nous. On constate parmi celles-ci une évolution dans les représentations. Il est important de rappeler qu’à l’époque ceux que nous appelons de nos jours artistes étaient des artisans. Leur art était leur fond de commerce. Ils se sont donc intéressés aux technologies qui se développaient à l’époque. La perspective évoquée précédemment a laissé des traces dans l’Antiquité qui ont été retrouvées très tard. Filippo Brunelleschi s’intéresse à cette technique au XVème siècle et s’en sert dans ses oeuvres. Elle change à cette époque la façon de représenter. Avec la perspective linéaire, on introduit une profondeur aux tableaux beaucoup plus réaliste que celle « à l’oeil nu ». La perspective linéaire permet en effet de représenter les trois dimensions d’un objet ou d’une scène sur une surface plane. C’est une méthode de représentation complexe car elle fait appel à des connaissances mathématiques notamment géométriques.
Les artistes, dès la Renaissance, se sont aussi emparés d’autres innovations technologiques. C’est le cas des lentilles et des miroirs. David Hockney, artiste anglais, s’est intéressé aux techniques, liées à ces outils, utilisées par les artistes à partir de cette époque. Il constate que celles-ci ont permis une précision plus importante dans les dessins, les peintures et une exécution des oeuvres plus rapides. Les artistes deviennent capables de représenter de plus en plus finement la réalité qui les entoure, plus que, ce qu’appelle David Hockney, le dessin « à vue de nez ». Pour cela, ils utilisent différentes méthodes :
– La camera lucida (ou chambre claire) qui est prisme sur une tige permettant de créer l’illusion d’une image qui se trouve en face de l’artiste sur la feuille se situant en dessous. On voit également la main et le crayon. Cette technique permet à l’artiste de faire les prises de mesure qu’il effectuait mentalement. Cette technologie rend la production plus rapide.30. L’image se trouve inversée comme avec un miroir.
– La camera obscura (ou chambre noire) est décrite par Léonard de Vinci en 1514 « En laissant les images des objets éclairés pénétrer par un petit trou dans une chambre très obscure tu intercepteras alors ces images sur une feuille blanche placée dans cette chambre. […] mais ils seront plus petits et renversés. », pour renverser l’image dans le bon sens, les peintres utilisent les miroirs. Ce procédé sera la base par la suite du sténopé et donc de l’appareil photographique.

Des images complexes dans leur sens

Si les artistes cherchent à représenter ce qui les entoure et composent leurs images, on peut supposer que c’est parce qu’ils ont des idées à faire passer à travers elles. Il ne s’agit pas de faire une simple imitation du réel. Les images sont pleines de symboles, ont une visée morale ou philosophique. On trouve déjà cette idée dans les représentations liturgiques au Moyen-Age, celles-ci permettant de faire comprendre les idées moralisatrices de l’Église à une population qui ne lisait pas et ne parlait pas latin, et donc ne comprenait pas la messe. A la Renaissance, avec le courant humaniste, les artistes s’intéressent à l’Homme. En 1514, Albrecht Dürer grave Mélancolie. Cette oeuvre est un sommet de technicité et également un sommet de reflexion philosophique. La multiplicité des symboles permet de donner un sens à l’image : l’être humain est bien malheureux de comprendre la réalité du monde qui l’entoure.
On constate que pour donner du sens à leurs oeuvres, les artistes ne peignent pas nécessairement des scènes réelles, observables. Ils assemblent pour donner du sens aux éléments. La chute d’Icare du peintre Pieter Brueghel illustre bien cette méthode qu’on pourrait comparer aux photomontages actuels. Il peint au premier plan un paysan bruxellois, représente la conquête du monde par une caravelle de Christophe Collomb au second plan alors qu’il ne les a jamais connues et en second plan, il représente le golfe de Naples. Cet assemblage d’éléments impossible en réalité lui permet de montrer que pendant la chute d’Icare les gens regardent ailleurs et d’où qu’ils viennent la vie continue. Il est remarquable pendant la Renaissance que les artistes s’évertuent à représenter la réalité ou du moins s’en inspirent pour composer des images auxquelles ils accordent du sens.

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Table des matières

Introduction 
1. Théorie
1.1. Complexité du sujet
1.2. Éduquer aux médias et à l’information
1.2.1. Définir l’Éducation aux Médias et à l’Information
1.2.2. Développement de l’éducation aux médias et à l’information
1.2.3. L’Éducation aux Médias et à l’Information à l’école un enjeu français, européen et mondial
1.2.4. L’Éducation aux Médias et à l’Information à l’ère du numérique
1.2.5. La place de la création dans l’Éducation aux Médias et à l’Information
1.3. La pratique plastique comme moyen de construire des savoirs et de déconstruire des pseudo savoirs et représentations
1.4. Images complexes
1.4.1. Des images complexes à la Renaissance
1.4.1.1. Des images complexes dans la technique
1.4.1.2. Des images complexes dans leur sens
1.4.2. Les images complexes du XVIIème au XXème siècle
1.4.3. Les images complexes de nos jours
2. Pratique de classe 
2.1. Intentions
2.1.1. Contexte d’application
2.1.2. Choix des oeuvres
2.1.3. Choix de logiciel de montage photo
2.2. Mise en place de la séquence
2.2.1. Présentation de la séquence
2.2.2. Séance 1 : Étude des oeuvres de Gilbert Garcin
2.2.3. Séance 2 : Travail préparatoire au photomontage
2.2.4. Séances 3-4 : Réalisation du photomontage
2.2.5. Séance 5 : Bilan/Évaluation
Conclusion de la mise en place de la séquence 
Conclusion générale 
Bibliographie

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