La phosphatase PPM9 de Plasmodium

Une maladie ancestrale toujours d’actualité 

L’historique de la maladie 

« Depuis la nuit des temps ».

Le paludisme est, vraisemblablement, une des plus anciennes maladies à laquelle l’humanité a dû faire face. Des écrits évoquent le paludisme à différentes périodes historiques, même les plus anciennes et au sein de différentes civilisations. L’origine précise de la maladie est difficile à affirmer. Des traces écrites ont été retrouvées, datant de l’antiquité chinoise (environ 2700 av JC). A l’époque, le paludisme est représenté par un dragon à trois têtes, représentant la triade de la clinique des Plasmodium spp : les céphalées, les frissons et bien évidemment la fièvre caractéristique de l’accès palustre symptomatique. La maladie fut également évoquée, dans des papyrus égyptiens (1570 av JC) ainsi que dans des livres sacrés d’Inde (VIe siècle av JC). Les grecs ont également contribué à la description de la maladie. Parmi eux, l’un des plus célèbres médecins, Hippocrate, a également décrit sur le plan clinique, la triade classique : frissons, sueur et fièvre (400 av JC). Durant plus de 2500 ans l’idée que le paludisme est causé par les miasmes des marais se répand. A cette époque, grecs et romains affirment que les fièvres intermittentes sont causées par une proximité avec le mauvais air des marécages : le terme italien malaria (du latin « mal’aria» = mauvais air) traduit ce phénomène. Il faudra ensuite attendre la Renaissance pour que l’histoire autour du paludisme avance de plusieurs chapitres. A cette époque deux inventions majeures voient le jour, le thermomètre et le microscope, et contribuent à l’avancée des connaissances autour de la maladie (Schlagenhauf, 2004) (Cox, 2010).

La recherche pour découvrir l’étiologie du paludisme s’intensifie grâce notamment à Antoni van Leeuwenhoek qui met en avant en 1676 l’hypothèse que ce sont les microorganismes qui sont la cause des maladies infectieuses. Il est suivi par Louis Pasteur et Robert Koch en 1878 et 1879 et leur théorie de développement de germes lors de l’infection (Cox, 2010). La compréhension du paludisme prend son envol lorsque Charles Louis Alphonse Laveran, un officier de l’armée française, découvre en 1880 les parasites dans le sang de patients atteint du paludisme (Bruce-Chwatt, 1981). En 1897, Ronald Ross met en évidence les moustiques comme vecteurs de la maladie et le cycle de transmission entre les culicidés et les oiseaux (Ross, 1897). Puis, entre 1898 et 1900, le cycle de transmission entre l’Homme et les anophèles est décrit par des parasitologues italiens : Giovanni Battista Grassi, Amico Bignami, Giuseppe Bastianelli, Angelo Celli, Camillo Golgi et Ettore Marchiafava. La phase asymptomatique durant laquelle les parasites se développent dans le foie avant d’entamer leur cycle érythrocytaire a été découverte par Henry Shortt et Cyril Garnham en 1948 (Schlagenhauf, 2004) (Cox, 2010).

L’historique de la lutte antipaludique

A chaque époque, l’Homme a cherché à combattre le paludisme. Il a peu à peu construit un arsenal thérapeutique utilisé de façon isolée dans le passé puis dans une approche plus globale de nos jours. Historiquement deux principes actifs naturels extraits des plantes ont été utilisés pour lutter contre le paludisme : l’artémisinine et la quinine. Au Pérou dans les années 1640, la guérison spectaculaire des fièvres de la comtesse de Cinchon, grâce à une poudre préparée à partir de l’écorce de quinquina est l’une des anecdotes qui a mis en lumière la quinine, alcaloïde naturel (Lévy et Azoulay, 1994). En 1820 Pelletier et Caventou ont caractérisé et isolé la quinine. La quinine a traversé les âges car elle est toujours utilisée dans le cadre de l’accès palustre grave à P. falciparum. L’artémisinine est le principe actif isolé de la plante Artemisia annua. Cette plante appartient à la famille des Asteraceae. Les vertus thérapeutiques de l’artémisinine sont connues en Chine depuis plus de 2000 ans. En effet, des écrits rapportant comment faire tremper les feuilles et les branches de la plante comme remède contre la fièvre datant de 168 av JC, ont été retrouvés. Cependant, ce n’est que dans les années 1970 que le principe actif purifié est obtenu à l’issu d’un criblage de plus d’une centaine de plantes, réalisé par le Professeur Youyou Tu. Elle est lauréate du prix Nobel de médecine 2015, pour cette fabuleuse découverte. Il a fallu attendre l’année 2001 pour que l’OMS (Organisation  Mondiale de la Santé) déclare l’artémisinine comme étant « le plus grand espoir mondial contre le paludisme » (Tu, 2016).

Bien avant la création de l’OMS, le 7 avril 1948 (Najera, 1989), d’autres organismes internationaux s’étaient penchés sur l’enjeu majeur que constituait le paludisme. La nécessité d’une lutte globale et coordonnée contre le paludisme s’est peu à peu imposée. La commission panaméricaine du paludisme fut créée en 1938, avec pour but d’étudier l’épidémiologie de la maladie, les thérapeutiques en place ainsi que la lutte contre le vecteur (Najera, 1989). A la suite de la seconde guerre mondiale, le succès de la chloroquine et du DDT (Dichlorodiphényltrichloroéthane) ont permis à l’OMS d’adhérer à l’idée que l’éradication du paludisme était désormais possible (Najera, 1989) (Litsios, 1997). La huitième assemblée mondiale de la santé, lança en 1956 une campagne d’éradication mondiale du paludisme (Najera, 1989). La situation du paludisme se détériorant à l’entrée des années 90, l’OMS organise une conférence sur le paludisme aux Pays-Bas. A l’issue de celle-ci, sont adoptées une déclaration et une stratégie mondiales de lutte antipaludique (Trigg et Kondrachine, 1998). En 1998, l’OMS décida de mobiliser les actions et ressources nécessaires pour faire reculer le paludisme et créa un partenariat global, le Roll Back Malaria (RBM) (Kolaczinski, 2005). En l’an 2000, les huit objectifs du millénaire pour le développement (OMD) sont adoptés. Le sixième objectif s’intitule « combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies ». Il a notamment pour objectif d’inverser l’incidence du paludisme d’ici 2015. Cette année 2000 est un tournant dans cette lutte, l’OMS recommande la fameuse utilisation des CTA (Combinaison Thérapeutique à base d’Artémisinine). De 2000 à 2014 vont s’enchaîner les forums, les déclarations, les partenariats et les créations de fonds. Lors de cette période les raisons d’être optimistes sont nombreuses ; en effet, nombreux sont les pays qui (i) contrôlent la maladie, (ii) réduisent l’incidence de transmission, (iii) voire deviennent exempts du paludisme (RBM 2014).

Enfin, l’OMS évoque l’année 2016 comme une croisée des chemins ; en effet après une période de succès sans précédent en matière de contrôle du paludisme, le progrès semble paralysé. En 2016, 216 millions de cas sont rapportés à travers le monde, soit 5 millions de plus que l’année précédente. Ce constat semble se confirmer, la baisse de l’incidence est ralentie depuis quelques années et le paludisme progresse dans des pays d’Afrique qui payaient déjà un lourd tribut (WHO 2019).

Les chiffres actuels et l’échéance de 2020

L’investissement en ressources humaines, financières et interventionnelles demeure insuffisant pour atteindre les échéances de 2020, 2025 et 2030 de la Stratégie Technique Mondiale de lutte contre le paludisme 2016-2030, adoptée en 2015 par l’Assemblée Mondiale de la santé en concertation avec le partenariat RBM (GTS). Actuellement, les combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (CTA) ont un rôle non négligeable dans le succès de la lutte contre le paludisme. En 2018, la Chine et le Salvador n’ont pas rapporté de cas indigènes de paludisme, pour la seconde année consécutive. L’Iran, la Malaisie ainsi que le Timor oriental n’ont pas rapportés de cas indigènes pour la première fois .

Une dizaine de pays participant à l’« Initiative E-2020 » sont en passe d’éliminer le paludisme d’ici 2020. Ceci a encouragé l’OMS et le RBM à lancer en 2018 « High burden to high impact », une stratégie moins « universelle » mais plus ciblée pour s’adapter aux pays les plus sévèrement touchés. En 2018, 228 millions de cas de paludisme ont été rapportés, pour la plupart en Afrique. Le nombre de décès associé s’élève à 405 000. Au cours de cette année, le paludisme a particulièrement frappé les populations les plus vulnérables (les femmes enceintes et les enfants en Afrique). Les enfants de moins de 5 ans représentent 67% (272 000) des décès associés au paludisme dans le monde. Pour protéger les femmes enceintes en Afrique, l’OMS préconise un traitement préventif intermittent pendant la grossesse en trois doses à base de sulfadoxine-pyriméthamine. La chimioprévention du paludisme saisonnier est préconisée chez l’enfant, et s’accompagne d’une prise en charge intégrée de diverses causes de mortalité infantile (paludisme, pneumonie et diarrhées) (WHO 2019). Pour atteindre les objectifs essentiels du GTS, il est nécessaire d’augmenter l’investissement alloué à la recherche et au développement (R&D), notamment dans la découverte de nouveaux antipaludiques, à l’instar du « Malaria Challenge » (publié par l’OMS en septembre 2019 et préconisant d’investir dans une R&D innovante). Au total 2,7 milliards de dollars US par an sont alloués au contrôle et à l’élimination du paludisme, bien loin des 5 milliards estimés nécessaires pour atteindre les objectifs du GTS. Le financement global de la lutte contre le paludisme est relativement constant depuis 2010, l’accent a cependant été mis sur le secteur de la recherche. Dix-huit millions de dollars US en plus ont été consacrés à la recherche fondamentale en 2018, comparé à l’année précédente. De plus, le financement de la R&D a atteint un niveau historique en 2018 en passant de 228 à 252 millions de dollars US en l’espace d’un an. Le secteur pharmaceutique privé a fortement investi, notamment dans des essais de phase II de nouvelles entités chimiques.

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Table des matières

1- Introduction
1.1- Le Paludisme
1.1.1- Une maladie ancestrale toujours d’actualité
1.1.1.1- L’historique de la maladie
1.1.1.2- L’historique de la lutte antipaludique
1.1.1.3- Les chiffres actuels et l’échéance de 2020
1.1.2- Un enjeu majeur de santé publique, 3 acteurs
1.1.2.1- L’agent pathogène : Plasmodium
1.1.2.1.1- Classification et description
1.1.2.1.2- Les espèces infectant l’Homme
1.1.2.2- Lutter contre le vecteur de la maladie ?
1.1.2.3- Protéger les populations à risque
1.1.3- Cycle biologique de Plasmodium falciparum
1.1.3.1- Chez l’Homme, hôte intermédiaire
1.1.3.1.1- Gagner le foie et échapper au système immunitaire de l’hôte.
1.1.3.1.2- Le cycle érythrocytaire (réponse immunitaire et pathogénèse)
1.1.3.2- Chez l’anophèle femelle, hôte définitif
1.1.4- Clinique du paludisme à P. falciparum
1.1.4.1- L’accès palustre simple
1.1.4.2- L’accès palustre grave
1.1.5- Diagnostic
1.1.5.1- l’Observation au microscope
1.1.5.2- Test de diagnostic rapide
1.1.5.3- Méthodes basées sur la PCR
1.1.6- Arsenal Thérapeutique et prise en charge thérapeutique
1.1.6.1- Molécules antipaludiques
1.1.6.1.1- Prise en charge de l’accès palustre simple à P. falciparum
1.1.6.1.2- Prise en charge de l’accès palustre grave
1.1.6.2- Stratégies vaccinales
1.1.7- Principal obstacle de la lutte antipaludique : la résistance
1.2- Recherche & Développement de nouveaux médicaments : le cas des antipaludiques
1.2.1- Stratégies de découverte de nouveaux médicaments.
1.2.1.1- L’amélioration de succès existants
1.2.1.1.1- Des dérivés synthétiques de l’artémisinine : OZ277 et OZ439
1.2.1.1.2- Au-delà de la résistance à la chloroquine
1.2.1.2- L’importance de la cible et de sa structure.
1.2.1.3- Le criblage phénotypique
1.2.1.3.1- La Cipargamine : KAE609, un inhibiteur de la PfATP4
1.2.1.3.2- La ganaplacide : KAF156, un succès en phase IIb mais sans cible identifiée
1.2.1.3.3- MMV048, un inhibiteur de la PfPI4K
1.2.1.4- Synthèse : cibles et modes d’action de candidats antipaludiques parmi les plus prometteurs du portefolio actuel
1.2.2- Pipeline actuel des antipaludiques
1.2.3- L’antipaludique idéal
1.2.3.1- Introduction sur les TPP et TCP
1.2.3.2- Les différents TCP
1.2.3.2.1- Le TCP-1 : clairance du stade sanguin asexué
1.2.3.2.2- Le TCP-2
1.2.3.2.3- Le TCP-3 : ciblage du stade hypnozoïte de Plasmodium
1.2.3.2.4- Le TCP-4 : Ciblage du stade schizonte hépatique
1.2.3.2.5- Le TCP-5 : Blocage de la transmission
1.2.3.2.6- Le TCP-6 : Effet direct sur le vecteur de la maladie.
1.3- Les phosphatases de Plasmodium : cibles idéales ?
1.3.1- Plasmodium : régulation de son cycle de vie
1.3.1.1- Les différents niveaux de la régulation : du gène à la protéine
1.3.1.2- La phosphorylation, une modification post-traductionnelle incontournable
1.3.2- Les kinases
1.3.3- Les phosphatases
1.3.4- La famille des PPM
1.3.4.1- PP2C : structure et mécanisme d’action
1.3.4.2- Membres et fonctions chez l’Homme
1.3.4.3- Les PP2C chez Plasmodium
1.4- Cadre et Objectifs du travail de thèse
1.4.1- Cadre
1.4.2- Objectifs
1.4.2.1- Objectif général de la thèse
1.4.2.2- Objectifs spécifiques et méthodes
1.4.2.2.1- Caractérisation moléculaire de PfPPM9
1.4.2.2.2- Caractérisation fonctionnelle de PfPPM9
1.4.2.2.3- Structure 3D et Drug Design
2- Matériels
2.1- Plasmides
2.2- Amorces
3- Méthodes
3.1- Caractérisation moléculaire de PPM9 de P. falciparum
3.1.1- Analyse in silico
3.1.2- Clonage de la séquence nucléotidique de PfPPM9
3.1.3- Production de PfPPM9 sous forme de protéine recombinante (PfPPM9r)
3.1.3.1- Les étapes de production
3.1.3.2- Contrôles de purification
3.2- Caractérisation fonctionnelle de PPM9
3.2.1- Etude de l’activité enzymatique de PfPPM9r
3.2.1.1- Mesure de l’activité enzymatique
3.2.1.1.1- Le test pNPP
3.2.1.1.2- le test au vert de Malachite
3.2.1.2- Rôle des ions métalliques dans l’activité enzymatique.
3.2.2- PPM9 chez Plasmodium falciparum
3.2.2.1- Purification d’anneaux et transfection
3.2.2.2- Localisation cellulaire et essentialité de PPM9 chez P. falciparum
3.2.2.2.1- Le système KO SLI-TGD
3.2.2.2.2- KO conditionnel (iKO) utilisant l’introduction de sites loxP
3.2.3- PPM9 chez Plasmodium berghei
3.2.3.1- Purification de schizontes et transfection
3.2.3.2- Localisation cellulaire de PPM9 chez P. berghei
3.2.3.2.1- Construction plasmidique
3.2.3.2.2- Extraction de l’ADN génomique et génotypage
3.2.3.2.3- Spectrométrie de masse
3.2.3.2.4- Immunolocalisation
3.2.3.3- Essentialité de PPM9 chez P. berghei
3.3- Construction d’un modèle 3D virtuel du site catalytique de PfPPM9 et découverte d’inhibiteurs spécifiques
3.3.1- Construction du modèle 3D
3.3.1.1- Stratégie
3.3.1.2- Le modèle 3D
3.3.1.3- Affinement du modèle 3D
3.3.2- Validation du modèle 3D
3.3.2.1- La position des ions manganèse
3.3.2.2- Production de la protéine de 45 kDa correspondant au modèle 3D
3.3.3- Criblage in silico et identification d’inhibiteurs
3.3.3.1- Criblage et filtres du premier modèle, PP2C humaine
3.3.3.2- Criblage et filtres du second modèle, T. gondii PP2C
3.3.4- Evaluation de l’activité antipaludique in vitro des inhibiteurs
3.3.5- Etude en RMN de l’interaction cible-composé
3.3.5.1- Stratégie
3.3.5.2- Conditions expérimentales
4- Conclusion

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