La perception et la représentation des métropoles dans la fiction postmoderne

Que se passerait-il si l’homme urbain rompait avec son espace de vie, avec son milieu? Que ferait-on de ce vide creusé entre l’homme et sa ville ? Quelles seraient les limites de cette solitude et quels seraient les remèdes ?

Un Parisien solitaire se fait tuer mais retourne (tel un revenant) vivre là où il habitait, sauf que son Paris s’est métamorphosé en « Section urbaine », enfer d’un univers bipolaire dont la deuxième extrémité se nomme « le Parc ». Un Stambouliote, à la recherche de sa femme et de son cousin, disparus mystérieusement tous deux, doit faire face à un Istanbul plus énigmatique que jamais. Au fur et à mesure, il sera emporté par l’impression de mettre le pied dans une ville autre que celle qu’il connaissait. Un New-yorkais qui, poursuivant un vieillard énigmatique, finira par découvrir qu’au fond, New York se veut l’incarnation de la mythique Tour de Babel. Voilà que dans ces trois cas, nous avons affaire à une image comprenant deux composantes majeures : l’homme et la ville. Le rapport de l’homme avec la ville, devient ainsi le thème central pour Jean Echenoz dans Au piano, pour Orhan Pamuk dans Le Livre noir, et Paul Auster dans Cité de verre (premier roman de sa Trilogie new-yorkaise).

Les manifestations de « la ville » dans l’histoire de la pensée ont été multiples, comme l’explique Kevin R. McNamara : d’une part, les villes symboliques (Athènes : le symbole de la démocratie) ou fictionnelles (villes utopiques) ; d’autre part, les villes dans les romans réalistes (ou historiques), voire dans les métafictions historiographiques , représentant la géographie culturelle, sociale et économique des villes réelles. Echenoz, Auster et Pamuk sont contemporains d’une littérature majoritairement urbaine qui arrive à son paroxysme lors de la seconde moitié du XXe siècle. Les villes des fictions qu’ils construisent, se placent entre les deux catégories que nous venons de citer. Paris, New York et Istanbul, dans les romans de nos trois romanciers, sont nés d’une écriture qui met l’emphase sur une incertitude ontologique se répercutant sur la question de la représentation de l’espace, de la géographie, dans le contexte d’une fiction postmoderne. Cette dernière est caractérisée par une autoparodie et une autoreflexivité, qui, selon Linda Hutcheon, restent distinctes du « contexte historico-politique dans lequel il [le texte] est intégré». En effet, la fiction postmoderne apparaît à un moment de l’époque contemporaine où se produisent des évolutions importantes dans le domaine de la production romanesque. Nous savons que le roman existentialiste précéda le Nouveau Roman. Ce dernier ne s’intéresse plus guère aux « états philosophico émotionnels de l’angoisse, de l’absurdité et la foi dans les engagements mimétiques d’un roman traditionnellement narré » . Il fait, à son tour, une large place aux théories déconstructivistes et au structuralisme (marqué par la cruelle indifférence à l’égard de l’humanisme agonisant de l’existentialisme) . S’éloignant de « l’antinarrativisme de la modernité », des auteurs comme Echenoz, Auster et Pamuk ont recours à une « renarrativisation du texte » qui récuse tout retour au conteur « naïf » et «omniscient». La fiction devient pour eux le lieu d’une « relecture critique » , « une anamnèse de la modernité » , ce qui, par son caractère déshistoricisé, est considéré par la plupart des théoriciens (Lyotard, Lodge, Hutcheon, Fokkema, McHale, etc.) comme un soubassement de l’écriture postmoderne.

En l’absence significative d’un regard historiciste , la pensée postmoderne devient le lieu d’un tournant dans la pensée contemporaine à l’égard des relations spatio temporelles. Dans le sillage des philosophes postmodernes, comme Foucault qui avait annoncé, lors d’une conférence en 1969, que l’époque actuelle serait « plutôt l’époque de l’espace », ou des philosophe marxistes comme Henri Lefebvre, qui avait porté un regard critique sur la question de la production de l’espace urbain (dans un œuvre éponyme, La production de l’espace, 1974), Edward Soja, géographe, parlera de Spatial turn , l’expression qui sera reprise par Fredric Jameson dans ses analyses du postmodernisme. Ainsi le postmodernisme annonce qu’il porte un intérêt tout particulier à la question de la spatialité. Le dernier quart du XXe siècle verra l’émergence d’une série de penseurs qui tenteront d’analyser la perception et la conception de l’homme postmoderne dans son rapport à l’espace.

C’est dans cette perspective que les œuvres des romanciers postmodernes, comme ceux de notre corpus, tissent des liens indéniables avec la question de la spatialité au sein des métropoles mondiales. La mondialisation postindustrielle promettait l’homogénéisation utopique du monde (donc des villes), mais elle a fini par générer un monde morcelé par les contreverses, un monde où le désordre que la modernisation tâchait de supprimer du monde, triomphe de nouveau dans les mégapoles .

La mission d’uniformisation du monde que certains (les modernes) conféraient à la mondialisation, n’a fait que créer des dystopies homogénéisantes dans les (grandes) villes modernes. C’est pour interroger ce souci d’homogénéisation mondialiste que les écrivains postmodernes se sont mis à critiquer les politiques urbaines modernes : Italo Calvino, à travers un regard critique, a évoqué son expérience des « villes continues »  dans ses Villes invisibles, Jean Echenoz mettra en question l’existence d’une vraie vie humaine dans les HLM devenues selon beaucoup de critiques des « non-maisons » , des « machines à habiter » . Paul Auster, en critiquant ces constructions, parlera de la recherche de « l’hôtel existence » . Georges Perec et Orhan Pamuk parleront de l’expérience des bidonvilles dans les métropoles modernes.

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Table des matières

Introduction
Partie I Métropole et Mobilité
I.1. La métropole : un espace infini pour la marche
I.2. La métropole au XXe siècle : une évolution accélérée
I.3. L’homme postmoderne et les modalités du parcours urbain
Partie II La métropole contemporaine et sa représentation romanesque
II.1. La métropole dans le roman postmoderne : un paysage subjectif
II.2. Le roman postmoderne et la lisibilité de la ville
II.3. La ville, la langue et l’espace conceptuel
Partie III Fiction postmoderne
III.1. La ville, la fiction postmoderne et les mondes possibles
III.2. Textualisation de l’espace, spatialisation du texte
Partie IV Ville utopique ou ville dystopique
IV.1. La métropole contemporaine : une utopie rêvée ?
IV.2. La métropole et la mondialisation
IV.3. Présentisme et nostalgie du passé
IV.4. L’homme urbain porteur d’une identité multiple
Conclusion

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