La pathologie confrontée à la période adolescente

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Parcours institutionnel

En aout 2004, Marcus bénéficie d’un suivi en centre médico-psychologique (CMP). En septembre 2005 en plus de sa présence à mi temps à la crèche, il bénéficie d’un suivi en centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP), en groupe 2 fois par semaine. En septembre 2006, il poursuit sa prise en charge au CATTP, il est alors scolarisé 2 demi-journées par semaine en petite section accompagné d’une auxiliaire de vie scolaire. En avril 2008, sa prise en charge au CATTP prend fin et Marcus reste au domicile avec sa mère (ou chez une nourrice lorsqu’elle travaille) jusqu’à son admission en IME le 17 novembre 2008 à 6 ans. Il s’agit d’un centre du même groupe que la Structure Ado qu’il intègre le 30 aout 2017 à 14 ans.
Il bénéficie en plus de sa prise en charge en psychomotricité, d’une prise en charge orthophonique en libéral à raison d’une fois par semaine.

Contexte familial

Marcus est né de deux parents d’origine congolaise, séparés depuis ses 3 ans. Il est le seul enfant du couple. La grossesse et en particulier l’accouchement a été vécu comme un moment difficile puisqu’elle relate avoir eu peur de mourir.
Son père travaille en tant que cariste dans la manutention, il est né au Congo et arrivé en France à l’âge adulte. Il a refait sa vie avec une autre femme et a deux filles qui présentent un développement normal. Il est très peu investi dans les prises en charge et l’orientation de Marcus qui vit avec sa mère et ne le voit que de temps en temps. Marcus est très proche de sa grand-mère maternelle qui s’est beaucoup occupée de lui lorsque ses deux parents travaillaient.
La mère de Marcus est d’origine congolaise mais est née en France. Elle a deux demi-frères nés de pères différents que Marcus connait, en particulier le plus jeune d’entre eux. Elle travaille régulièrement en tant qu’agent spécialisé des écoles maternelles. Madame a évoqué ses craintes face à l’institutionnalisation de Marcus lorsque la scolarisation est devenue difficile, elle dit avoir peur que son enfant soit « drogué » par des médicaments qu’on lui donnerait sans son avis. Elle a du s’arrêter de travailler pour assurer les accompagnements vers le CATTP et l’école.
Lorsque madame se rend compte qu’il faut intensifier les soins, Marcus est orienté vers un IME et elle pourra reprendre le travail a mi temps.

Bilan psychomoteur

Un bilan psychomoteur a été effectué en janvier 2018 qui a abouti sur un premier projet thérapeutique puis, un an plus tard, j’ai pu réaliser un bilan en février 2019 pour une réévaluation des compétences psychomotrices de Marcus dans le cadre de sa prise en charge. Il est coopérant dans un premier temps mais la fin du bilan se montre difficile en raison de sa grande fatigabilité. Le bilan psychomoteur a été réalisé à partir des tests suivants :
– Reproduction de figures sur le principe de l’épreuve graphique d’organisation perceptive de Santucci.
– Equilibre dynamique.
– Equilibre statique.
– Dessin du bonhomme.
– Schéma corporel – somatognosies.
– Examen du tonus.
– Connaissance des concepts spatiaux de base.
– Test de latéralité gestuelle innée et fonctionnelle reprenant des principes test de latéralité gestuelle innée de Bergès et test de Piaget-Head.
– Repérage temporel.
– Motricité fine : observation des coordinations bimanuelles et occulo-manuelles.
– Perception et reproduction de structures rythmiques de Stamback .
– Bilan graphomoteur.
– Evaluation de la motricité gnosopraxique distale (EMG) : reproduction de mouvements de mains et de doigts.
– Epreuve du sens musculaire.

La prise en charge en psychomotricité de Marcus

À la suite du bilan psychomoteur, un projet de prise en charge s’est dessiné pour Marcus. On retrouve notamment un trouble de la régulation tonique assez manifeste sur un versant hypertonique. Marcus présente un défaut d’ajustement tonique, il est tendu et crispé dans les tâches qu’il effectue. Par ailleurs le bilan est dominé par des capacités attentionnelles limitées, une agitation et une impulsivité. Marcus peut se désorganiser rapidement face à certaines stimulations et présenter des comportements stéréotypés qui peuvent se montrer envahissants.
Marcus bénéficie d’une prise en charge individuelle en psychomotricité d’une heure hebdomadaire. Durant ce créneau, un temps de relaxation psychomotrice lui est proposé afin de l’aider à canaliser les comportements d’autostimulation et l’agitation psychomotrice avec les axes thérapeutiques suivants :
● Abaisser son fond tonique et favoriser ses capacités de régulation et d’ajustement postural.
● Prendre conscience de ses limites corporelles.
● Faire émerger un sentiment de continuité.
Il lui sera proposé des exercices de relaxation pour l’aider à relâcher ses tensions tonico-musculaires pouvant entraver voire inhiber les schèmes moteurs spécifiques à une action. Ceci aura pour but de l’aider à canaliser son excitation psychomotrice afin de permettre de nouvelles émergences.

Evolution de la prise en charge

Marcus a 15 ans lorsque je le rencontre le 12 septembre 2018, il s’agit pour lui d’un début de prise en charge suite à un bilan psychomoteur réalisé quelques mois après son entrée à l’IME. Nous nous rencontrons directement dans la salle de psychomotricité. Cette première séance constitue une rencontre et une observation des particularités et du fonctionnement de Marcus. Il est très agité à son arrivée et ce tout au long de la séance. Il grince des dents bruyamment, et effectue des mouvements constants des mains et de la tête. Il est important de matérialiser et de délimiter l’espace à l’aide d’un cerceau afin de l’aider à s’installer à un endroit donné et à faciliter la compréhension. La première partie de la séance est réalisée par la psychomotricienne qui me laissera un temps plus tard dans la séance pour appréhender le contact avec Marcus.
Il lui est proposé dans un premier temps un travail de détente autour de la respiration et du relâchement musculaire à l’aide de mouvements simples. Nous observons immédiatement des particularités chez Marcus au niveau respiratoire en lien avec un tonus pneumatique. Nous lui proposons alors de petits objets à déplacer à l’aide du souffle ce qui le met en grande difficulté. Cette proposition fait augmenter considérablement le niveau d’excitation de Marcus qui se montre de plus en plus bruyant en chantonnant de plus en plus fort et ses mouvements de balancements s’intensifient. Je lui propose alors de lui passer une balle à picots sur le dos, les épaules qu’il secoue constamment, et les bras en nommant chaque partie du corps ce qui a pour effet de canaliser les stéréotypies motrices de Marcus et d’abaisser son niveau tonique assez instantanément. Il m’indique en déplaçant son corps son envie que je masse d’avantage les épaules, la nuque et les doigts. Cette demande n’est pas anodine puisqu’elle correspond aux zones les plus investies dans les mouvements stéréotypés de Marcus.
La fin de séance lui est annoncée quelques minutes avant l’horaire en question et s’annonce très difficile. Marcus refuse de sortir de la salle, il s’agite, se précipite dans un coin et sort du matériel en riant. Marcus finit par sortir de la salle pour que nous l’accompagnions au repas après plusieurs minutes et de nombreuses sollicitations de la psychomotricienne.

Au fil des séances.

 Septembre – La création d’une relation: Le mois de septembre correspond au début de la prise en charge en psychomotricité à l’IME pour Marcus. Les arrivées en séance et les départs sont difficiles et chaotiques. Marcus est agité et a des difficultés à tenir en place lors de chaque séance. L’espace doit être délimité afin de contenir l’agitation de Marcus. Les stéréotypies sont constantes et envahissantes et dominent les séances du mois de septembre.
Marcus s’immerge constamment dans un bain sonore sous forme de « chantonnements » ou de « grognements » qui rendent la communication et le contexte de détente difficile. Ce fond sonore a tendance à s’intensifier lorsque Marcus est en difficulté ou se désorganise.
Les temps de relaxation ne constituent à ce moment qu’une partie de la séance en raison des difficultés de Marcus à se poser et de la recherche d’une médiation à laquelle il se montrerait particulièrement sensible et réceptif. La création de la relation de confiance et de l’alliance thérapeutique sont les objectifs principaux de ce début de prise en charge. Le toucher dans les moments calmes est alors toujours médiatisé par du matériel et les moments d’apaisement durables sont encore impossibles.
 Octobre – La mise en place de rituels: Le mois d’octobre correspond à la mise en place progressive d’un rituel d’arrivée en séance qui a pour effets de structurer le temps et de rassurer Marcus en lui donnant des repères concrets. Les arrivées en séance de psychomotricité sont désormais plus calmes et Marcus se montre moins envahi par ses stéréotypies motrices et son agitation. A son entrée dans la salle, il installe avec mon aide 2 chaises et 2 ballons afin de pouvoir réaliser des auto-massages en imitation.
Le toucher est encore médiatisé par des objets comme des balles ou des bâtons de percussions. Marcus s’apaise de plus en plus lors de ces moments de détente mais l’abaissement de sa vigilance est encore très fluctuant en fonction des séances et des mobilisations qui lui sont proposées.
Les fins de séances se révèlent toujours très compliquées. Marcus refuse la fin du moment de détente et s’éparpille. Il refuse de se séparer des objets utilisés pendant ce moment et peut même aller jusqu’à les ressortir du placard une fois rangés. Ces attitudes peuvent se montrer provocantes puisqu’il recherche une réaction de la psychomotricienne et la regarde pendant l’action qu’il sait inappropriée. Ce comportement peut être en lien avec les difficultés de Marcus à accepter les transitions notamment lorsqu’un moment agréable prend fin. Le bénéfice de la détente relative obtenu durant le temps calme semble perdu face à la désorganisation massive de Marcus en sortant de la séance.
Nous avons tenté d’instaurer un rituel de fin de séance également afin de structurer d’avantage le cadre temporel de la séance auquel Marcus s’est montré très peu réceptif. La fin du temps de relaxation constitue en à elle seule un déclencheur de son agitation.

Vers la fin de la prise en charge

Marcus se saisit de plus en plus de ce temps, qu’il a maintenant complètement intégré à son emploi du temps. Les transitions sont mieux vécues si le cadre n’est pas perturbé par un élément extérieur que nous ne pouvons pas anticiper (arrivée d’un éducateur, absence etc.). Les séances constituent pour lui un moment de repos et de calme loin des excitations du groupe. Il peut à son retour avec les autres jeunes, se montrer plus apaisé sans rechercher immédiatement à s’écarter dans une autre pièce.
La prise en charge se poursuivra à la rentrée prochaine avec les mêmes objectifs. Marcus a su au cours de cette année montrer de réelles capacités de détente et des ressources même si les stéréotypies perdurent.
La psychomotricienne est en lien avec la famille afin d’échanger sur les moments d’agitation de Marcus dans le cadre du domicile. Elle donne des clés de compréhension et des moyens d’action aux parents en transposant ce qui est fait en séance à la maison.

Changements psycho-sociaux

A l’adolescence, la reconnaissance des pairs est indispensable dans le processus d’émancipation de la sphère parentale. L’adolescence entraine le rejet des images parentales de l’enfance au profit de nouveaux attachements. Le jeune se constitue une image des parents différente de celle forgée pendant l’enfance suite à l’évolution de ses relations. Ces nouveaux objets représentent souvent des substituts parentaux différents des objets originaux, des idéaux ou le plus souvent des pairs. Pour P. COSLIN, l’amitié est narcissiquement rassurante et sécurisante car elle va donner un sens nouveau à la vie du jeune et l’aider à construire un nouvel univers de valeurs. Ce nouveau type de relation permettra a l’adolescent de pénétrer dans le monde des adultes qu’il admire et redoute à la fois. Croyant avoir perdu le soutien du groupe familial, il rencontre le réconfort auprès de ses amis, et le fait de se sentir semblable lui procure un sentiment de sécurité, et le rassure sur sa propre valeur. L’adolescent cherche d’autres modèles d’identification qu’il emprunte et expérimente afin de se constituer son identité propre.
Cela entraine un réaménagement social concernant la proximité avec les parents avec lesquels on observe une véritable prise de distance physique et relationnelle et les autres adultes, qui constituent des supports identificatoires. Les relations groupales avec les pairs prennent une importance particulière en constituant un étayage identitaire et les relations inter sexes se complexifient avec l’avènement de l’érotisation.
Le statut du jeune dans la société se voit également modifié à travers l’affirmation de ses désirs, goûts, ambitions, valeurs etc

Avènement d’une identité sexuée

L’arrivée de la puberté donne néanmoins une nouvelle dimension au développement psycho-sexuel avec le développement des caractères sexuels primaires et secondaires et les modifications psychiques qui y sont associées.
Il y a à l’adolescence une prise de conscience de la sexualité. « Les enfants le découvrent progressivement, mais ne savent pas distinguer filles et garçons par leurs organes génitaux avant la fin du premier semestre de la seconde année. À trois ans, ils disent qu’ils sont des garçons ou des filles. Mais il existe une certaine androgynie. C’est seulement quand l’enfant est nu que la différence des sexes apparaît clairement par la différence des organes génitaux externes. »9. La puberté annonce la sortie de cette androgynie avec le développement de la pilosité, des seins, la mue de la voix etc.
Pour C. PAUMEL, l’adolescence est une période où il y a une importance de l’image que l’on renvoie à l’autre. Il y a un souci de « normalité », d’être comme les autres qui intervient quand le corps devient sexué. Le regard de l’autre intervient sur la façon de s’approprier son corps sexué et sur la façon dont la sexualisation joue un rôle dans la relation à l’autre. Il y a un changement de distance relationnelle irréversible : l’adolescent ne sera plus regardé comme un petit garçon ou une petite fille.
Ces changements peuvent être d’autant plus perturbants pour le jeune qui vit simultanément deux expériences : celle du corps de l’enfance, familier et qui a reçu toutes les expériences de plaisir et de déplaisir ; et celle du corps pubère qui est un corps nouveau, non familier, sexuel, et non représentable parce qu’il est le lieu d’éprouvés inconnus sensuels et sexuels.

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Table des matières

La Clinique
I. Cadre institutionnel
1. Présentation de l’IME
2. Place de la psychomotricité
II. Présentation de Marcus
1. Anamnèse
a. Présentation générale
b. Histoire personnelle
c. Parcours institutionnel
d. Contexte familial
2. Bilans
a. Bilan psychomoteur
b. Bilan éducatif
III. La prise en charge en psychomotricité de Marcus
1. Projet thérapeutique
2. Evolution de la prise en charge
a. Première rencontre
b. Au fil des séances…
c. Vers la fin de la prise en charge
Eclairage théorique
I. L’adolescent autiste
1. L’adolescence, une période marquée par les changements
a. Changements physiques
b. Changements psycho-sociaux
c. Avènement d’une identité sexuée
d. Représentations corporelles bouleversées
2. L’autisme
a. Définition et histoire
b. Classifications
c. Epidémiologie
d. Sémiologie de l’autisme
3. La pathologie confrontée à la période adolescente
a. Vie sociale
b. Autonomie
c. Conséquences de la puberté
II. Les stéréotypies motrices
1. Définition
2. Un critère diagnostique de l’autisme
3. Manifestations
4. Typologie des stéréotypies motrices
5. Fonctions
a. Une fonction protectrice
b. Un sentiment de continuité
c. La constitution d’une enveloppe
d. Un moyen de décharge
6. Retentissement au niveau psychomoteur
a. Au niveau tonique
b. Au niveau des coordinations et des apprentissages
c. Au niveau du temps
d. Au niveau de l’espace
e. Au niveau relationnel
f. Au niveau somatique
Discussion
I. La prise en charge en psychomotricité des stéréotypies motrices
1. Intérêts de la prise en charge psychomotrice
a. Un isolement renforcé
b. Une motricité entravée
c. Une source de douleur
2. La mise en place d’un cadre stable et contenant
II. Un outil clinique : la relaxation psychomotrice
1. Le déroulement d’une séance de relaxation
a. L’installation
b. Les inductions verbales et corporelles
c. Le temps de silence
d. La reprise
e. La verbalisation
2. Les objectifs de la médiation
3. Le travail du corps à l’adolescence
4. L’expérience en relaxation de Marcus
Conclusion
Bibliographie

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