La neige du plateau antarctique. Surface spécifique et applications

Le manteau neigeux dans le système climatique global 

Le climat de la Terre fait intervenir de nombreuses constituants : la biosphère, la géosphère, l’hydrosphère, l’atmosphère et la cryosphère. Une étude quantitative du climat nécessite en premier lieu la connaissance du bilan énergétique de chaque composante. La principale source d’énergie externe au système Terre vient du Soleil et cette énergie n’est pas répartie de façon uniforme à la surface de la Terre. De par la géométrie sphérique de notre planète, une même quantité d’énergie est reçue sur une plus petite surface à l’équateur qu’aux pôles. Par conséquence, l’équateur reçoit un excès d’énergie par rapport aux pôles et on observe généralement de faibles températures dans les régions polaires. L’océan y gèle et les précipitations y ont lieu essentiellement sous forme neigeuse, de sorte qu’aujourd’hui, les régions polaires sont recouvertes de neige la plus grande partie de l’année.

En effet, la neige recouvre jusqu’à 50% de la superficie de l’hémisphère nord en hiver [Robinson et al., 1993] et de façon permanente l’Antarctique et le Groenland. De plus, la neige est la surface qui réfléchit le plus le rayonnement solaire incident de sorte que le déficit énergétique des régions polaires est largement accru par la présence de neige. Du fait de leurs faibles températures et de la présence de neige et de glace, les hautes latitudes ont un fort impact sur le climat de la Terre et son évolution [Goody, 1980; Warren, 1982; Lemke et al., 2007]. La cryosphère, qui représente toutes les portions de la surface de la Terre où l’eau est présente à l’état solide, apparaît donc comme un acteur majeur du système climatique global.

Le manteau neigeux est tout d’abord étudié pour son impact radiatif car la présence de neige modifie les échanges énergétiques entre le sol, l’océan et l’atmosphère [Sturm et al., 2002; Van den Broeke et al., 2008]. Pour quantifier le bilan radiatif d’une surface, on définit son albédo, c’est-à-dire la fraction du rayonnement solaire réfléchi vers l’atmosphère par une surface. Les zones recouvertes de neige ou de glace possèdent généralement un albédo élevé dans la partie visible du spectre solaire (0,38-,78 µm), avec des valeurs de l’ordre de 0,4 pour la glace et 0,95 pour une neige pure et récente. Cela signifie que la glace renvoie 40% de l’énergie solaire incidente contre 95% pour de la neige pure et récente. Dans la partie infra-rouge du spectre solaire (0,78-2,5 µm), qui représente environ 40% de l’énergie solaire incidente, l’albédo de la neige est plus faible avec des valeurs oscillant entre 0,7 et 0,2 pour de la neige pure. Intégré sur tout le spectre solaire, l’albédo de la neige pure est compris entre 0,8 pour une neige récente et 0,7 pour une neige âgée. Par comparaison, les valeurs d’albédo typiquement observées sur les autres surfaces de la Terre sont bien inférieures, comprises entre 0,03 et 0,25 pour l’océan et entre 0,16 et 0,20 pour des surfaces végétales. De par son fort albédo et la quantité de surfaces recouvertes par la neige, de façon permanente ou saisonnière, la présence d’un couvert neigeux impacte considérablement le bilan énergétique de la planète et il est donc nécessaire de déterminer cet albédo et ses variations temporelles et spatiales.

La neige est un matériau très divisé, constitué d’air et de glace et (parfois) de quelques impuretés (carbone suie, poussières minérales…), c’est un milieu fragile et en perpétuelle évolution. L’ensemble des processus physiques modifiant la morphologie des grains de neige et l’évolution stratigraphique du manteau neigeux au cours du temps est dénommé métamorphisme [Colbeck, 1982; 1983; Sommerfeld, 1983]. Le métamorphisme a pour conséquence la modification des propriétés physiques de la neige telles que la taille des grains, la densité, la conductivité thermique, la perméabilité ainsi que l’albédo [Colbeck, 1982]. L’albédo de la neige, dans le visible, est dépendant de la taille de grains et de la quantité d’impuretés présentes dans la neige [Warren, 1982; Grenfell et al., 1994] mais dans l’infra rouge, l’albédo de la neige est uniquement dépendant de la taille de grains [Warren, 1982] ce qui signifie que cette variable permet à elle seule de déterminer l’albédo infra rouge de la neige [Domine et al., 2006]. En général la taille de grains augmente lors du métamorphisme [Flanner et Zender, 2006; Taillandier et al., 2007], de telle sorte que l’albédo diminue, dans le visible et l’infra rouge. Les valeurs d’albédo dans le visible peuvent décroître vers 0,8 dans le cas d’une neige pure et âgée composée de gros grains et il peut être inférieur à 0,2 dans l’infra rouge. La connaissance de la variable taille de grains apparaît donc cruciale pour l’étude des propriétés radiatives de la neige, c’est-à-dire la détermination de son albédo et donc l’étude du bilan énergétique de la planète.

la surface spécifique de la neige

La neige est un milieu poreux constitué d’air et de glace qui peut contenir quelques impuretés (poussières minérales, carbone suie, etc…). Un des moyens de caractériser un milieu poreux est d’en connaître sa surface spécifique (SS). La SS de la neige exprime la surface de l’interface entre les cristaux de neige et l’air interstitiel par unité de masse de neige, mais faute de méthodes fiables pour la mesurer, les paramètres taille de grains ou taille de cristaux ont longtemps été des substituts à la SS [Gow, 1969]. Cette section a pour objectif de clarifier l’utilisation souvent confuse de ces termes et de démontrer l’intérêt d’utiliser la variable SS pour décrire quantitativement les interactions neige-rayonnement et neige-chimie atmosphérique .

Le cristal et le grain de neige

Les particules de neige précipitantes sont souvent des monocristaux de glace. Dans l’atmosphère, la glace cristallise sous une forme hexagonale (voir [Legagneux, 2003] pour des détails sur la cristallographie de la glace) et les cristaux présentent en général une symétrie d’ordre 6. Il a été observé depuis longtemps une grande variété de formes de cristaux de neige. La forme de base d’un cristal de glace est un prisme hexagonal ayant deux faces basales à symétrie hexagonale et six faces prismatiques de forme rectangulaire. Selon la température, la croissance d’un de ces types de face va être favorisée, donnant soit une colonne soit une plaquette. Cette distinction colonne-plaquette est ce qu’on appelle la forme primaire d’un cristal de neige. La forme secondaire (développement de dendrites, de faces creuses, de formes en aiguilles, etc.) est déterminée par la vitesse de croissance, donc la sursaturation.

Après leur dépôt au sol, les cristaux de neige se transforment sous l’effet du métamorphisme [Colbeck, 1982; 1983]. La forme initiale des cristaux disparaît et en général plusieurs cristaux se retrouvent accolés en une même structure. On parle alors de grain de neige, défini comme la plus petite unité observable à l’œil nu. Un grain de neige peut être constitué d’un ou plusieurs cristaux de glace. C’est pourquoi la structure de la neige est souvent caractérisée à partir de la variable « taille de grains » dans la littérature. Mais la définition de la taille de grains est une notion complexe et floue [Aoki et al., 2000] et de nombreuses définitions ont été proposées parmi lesquelles :
➤ la moitié de la plus grande dimension de la particule de neige [Aoki et al., 1998]
➤ le rayon convexe moyen qui équivaut à la moyenne des rayons de courbure positifs de la périphérie des grains ou amas de grains [Lesaffre et al., 1998]
➤ le rayon du disque dont la surface est équivalente à celle de la section de la particule de neige non-sphérique [Aoki et al., 2000]
➤ la moitié de la plus grande dimension de la particule de neige non-sphérique [Grenfell et al., 1981; Aoki et al., 1998]. Celle-ci est généralement estimée par la moitié de la largeur d’une branche de dendrite ou par la plus petite section de la particule non-sphérique [Aoki et al., 2000]
➤ le rayon d’une sphère dont le rapport de la surface sur le volume (S/V) est équivalent à celui de la particule de neige non-sphérique [Wiscombe et Warren, 1980].

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela rapport-gratuit.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
Le manteau neigeux dans le système climatique
Surface spécifique de la neige et bilan énergétique de la Terre
Surface spécifique de la neige et composition chimique de l’atmosphère
Déroulement de la thèse et plan du manuscrit
Remarques
I. Etat de l’art sur la surface spécifique de la neige
I.A. Introduction à la surface spécifique de la neige
I.A.1) Taille de grains et surface spécifique
a) Le cristal et le grain de neige
b) La surface spécifique de la neige
I.A.2) Surface spécifique de la neige et bilan énergétique de la surface de la Terre
I.A.3) Surface spécifique de la neige et chimie atmosphérique
a) Adsorption d’espèces chimiques
b) Surface spécifique et photochimie
I.A.4) Méthodes de mesure de la surface spécifique de la neige
a) Mesure de surface spécifique par stéréologie
b) Mesure de surface spécifique par adsorption de méthane
c) Mesure de SS par tomographie de rayons X
d) Mesure de SS par méthodes optiques
I.B. Surface spécifique, propriétés optiques et modélisation de la réflectance de la neige
I.B.1) La réflectance
I.B.2) Physique et optique de la neige
I.B.3) Le modèle DISORT (DIScrete Ordinate method for Radiative Tranfer)
I.B.4) Relations entre surface spécifique et réflectance
a) Relations surface spécifique et réflectance dans le cas d’une neige pure
b) Relation entre surface spécifique et réflectance dans le cas d’une neige contaminée
I.B.5) Relations entre densité et réflectance de la neige
I.B.6) Impact du type de rayonnement incident et de l’angle solaire zénithal
II. Mesure de la surface spécifique de la neige par methode optique
II.A. Résumé étendu
II.A.1) Problématique
II.A.2) Choix de l’instrumentation et détermination de la réflectance de la neige
II.A.3) Calibration de DUFISSS
II.B. Résumé de l’article 1: « Measurement of the specific surface area of snow using
infrared reflectance in an integrating sphere at 1310 and 1550 nm »
II.C. Article 1: Texte intégral
II.D. Compléments et conclusions
II.D.1) Protocole expérimental et échantillonnage
II.D.2) Artefacts de mesures
II.D.3) Conclusions
III. Profils de la surface spécifique du manteau neigeux antarctique
III.A. Site d’étude et objectifs scientifiques
III.A.1) L’Antarctique
III.A.2) Objectifs scientifiques
III.B. Résumé de l’article 2 : “Vertical profiles of the specific surface area of the snow at Dome C, Antarctica.”
III.C. Article 2: Texte Intégral
III.D. Compléments et Conclusions
IV. Variations journalieres de la surface spécifique de la neige de surface a dome c, antarctique
IV.A. Echantillonnage et mesures
IV.B. Bilan d’énergie à Dôme Concordia
IV.B.1) Température de l’air à DC
IV.B.2) Variations de l’angle solaire zénithal
IV.B.3) Impact du couvert nuageux
IV.C. Bilan énergétique et cycles de condensation/sublimation
IV.C.1) Formation de givre de surface
IV.C.2) Formation de fleurs de givre
IV.D. Résumé de l’article 3: « Diurnal variation of the specific surface area of surface snow on the Antarctic plateau. Implications for the albedo and the chemistry of snow
IV.E. Article 3: Texte Intégral
IV.F. Compléments
IV.G. Conclusions
Conclusions et perspectives de la thèse

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *